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29/03/2022 | FRANCE | N°20TL21302

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 29 mars 2022, 20TL21302


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à lui verser la somme totale de 227 334,39 euros, avec intérêts de droit à compter de la date de réception de sa demande indemnitaire préalable, en réparation des préjudices subis à la suite de sa prise en charge et des interventions chirurgicales des 18 novembre 2013 et 29 septembre 2014 et de mettre à sa charge les entiers dépens ainsi que la somme de 3 000 euros sur le fond

ement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à lui verser la somme totale de 227 334,39 euros, avec intérêts de droit à compter de la date de réception de sa demande indemnitaire préalable, en réparation des préjudices subis à la suite de sa prise en charge et des interventions chirurgicales des 18 novembre 2013 et 29 septembre 2014 et de mettre à sa charge les entiers dépens ainsi que la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1701630 du 20 février 2020, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à verser à M. B... une somme de 85 427,99 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2016, à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) Les Moulins une somme totale de 35 476,76 euros, à verser à M. B... et à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins une somme de 1 500 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 200 euros à la charge du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 avril 2020 sous le n° 20BX01302 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 16 janvier 2022 sous le n° 20TL21302 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et des mémoires complémentaire et en réplique enregistrés les 1er juillet 2020 et 11 mai 2021, le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, représenté par Me Le Prado, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1701630 du 20 février 2020 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) de rejeter les conclusions incidentes de M. B... et de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité en ce qu'il n'a pas répondu à son moyen tiré de l'insuffisance du rapport de l'expert judiciaire alors qu'il était soulevé dans son mémoire en défense et s'appuyait sur le rapport critique du docteur D..., spécialisé en chirurgie orthopédique ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu la responsabilité du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet ; pour retenir l'existence d'une négligence dans le suivi post-opératoire de M. B..., il s'est appuyé à tort sur le rapport d'expertise du docteur d'Arzac dont l'analyse a été contestée par le docteur D..., spécialisé en chirurgie orthopédique, qui a relevé que la prétendue complication tirée de la migration de la vis n'avait en réalité jamais existé mais qu'il a constaté à partir des radiographies une ostéolyse de la butée et une mobilisation de la rondelle ; il ne peut donc être retenu une faute tirée de la découverte tardive de la butée de la vis ;

- c'est également à tort que le tribunal a considéré que la pratique, lors de la seconde opération, d'une acromioplastie et une ténodèse, aurait été fautive car contre-indiquées au vu de l'état de santé du patient, à l'origine d'une perte de chance de 75% de se soustraire au risque d'algodystrophie qui s'est réalisé ; en effet, dans le cas de M. B..., la survenance et le rôle causal de l'algodystrophie dans la survenance du dommage demeurent imprécis ; il n'existe pas de lien direct entre la seconde intervention et la survenue de l'algodystrophie ;

- à titre subsidiaire, c'est à tort que le tribunal a retenu une perte de chance d'éviter le dommage évaluée à 75% ; compte tenu de l'ensemble des incertitudes, la perte de chance ne saurait excéder 20 % ;

- à titre très subsidiaire, l'évaluation des préjudices est excessive ;

- l'incidence professionnelle ne pouvait être fixée à 45 000 euros alors que l'intéressé était déjà en congé de longue maladie avant sa prise en charge et qu'il n'est pas établi qu'il aurait pu reprendre son travail d'auxiliaire de soins au sein de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins ; il n'a pas été indiqué s'il a été reclassé ou bénéficié de la qualité de travailleur handicapé ;

- compte tenu des incertitudes quant à sa reprise du travail en raison de sa pathologie chronique et ancienne, l'indemnisation de M. B... au titre de la perte de revenus professionnels et de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins n'était pas justifiée ;

- l'indemnisation au titre du déficit fonctionnel permanent doit être réduite à 1300 euros le point, soit 19 500 euros en tenant compte d'une perte de chance de 75% ;

- le chiffrage du déficit fonctionnel temporaire n'est pas justifié ;

- la réalité du préjudice d'agrément n'est pas établie ;

- contrairement à ce que demande M. B..., l'expert n'a pas qualifié l'indication de la première opération de fautive ;

- le défaut d'information n'est pas établi ;

- les demandes incidentes de majoration des préjudices de M. B... et de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins seront rejetées.

Par un mémoire enregistré le 27 avril 2020, la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn indique qu'elle n'a aucune créance à faire valoir.

Par un mémoire enregistré le 19 novembre 2020, l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins, représenté par Me Tanton, conclut à la condamnation du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à lui verser une somme globale de 39 160,43 euros au titre des salaires et charges patronales versés du 19 mars 2014 au 20 avril 2016 et à ce que soit mise à sa charge une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- le rapport critique du docteur D... en date du 10 mai 2016 invoqué par le centre hospitalier doit être écarté comme non contradictoire ;

- c'est à tort qu'il conteste l'existence d'une migration de la vis ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu les trois fautes relevées par l'expert ;

- le déficit fonctionnel de M. B... doit être imputé à ces fautes dès le 12 mars 2014 ;

- c'est à bon droit que le tribunal a retenu l'existence d'une négligence dans le suivi post-opératoire de M. B... à l'origine d'une perte de chance de 75% de se soustraire au risque d'algodystrophie qui s'est réalisé ;

- M. B... n'a pas reçu l'information qui lui aurait permis de donner un consentement éclairé ;

- en qualité d'employeur de M. B..., il doit obtenir le remboursement des salaires et charges patronales au titre de la période d'indisponibilité au travail directement imputable à ces fautes dès le 18 novembre 2013 ; en tout état de cause, la période d'indemnisation pour négligence dans le suivi post-opératoire aurait dû débuter dès le 12 mars 2014 jusqu'à la consolidation, le 8 juillet 2015 ; au titre de cette période, les salaires versés s'élèvent à 21 040,75 euros et les charges sociales à 8 189,45 euros ; durant la période du 9 juillet 2015 au 20 avril 2016, M. B... n'a pas pu reprendre son travail et a été maintenu en longue maladie alors qu'il fallait lui rechercher un poste adapté ; les rémunérations versées s'élèvent à 7 700,11 euros et les charges sociales à 2230,12 euros ; ces sommes seront éventuellement affectées du taux de 75 %.

Par un mémoire en défense et à fin d'appel incident enregistré le 17 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Bellen Rotger, conclut à la réformation du jugement n° 1701630 du 20 février 2020 du tribunal administratif de Toulouse, en tant qu'il n'a pas intégralement fait droit à sa demande d'indemnisation de l'intégralité des préjudices subis, à sa confirmation en tant qu'il a mis à la charge du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 200 euros, à la condamnation du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à lui verser la somme de 356 737,72 euros au titre des préjudices patrimoniaux et la somme de 60 732,25 euros au titre des préjudices extra-patrimoniaux, et à ce que soit mise à sa charge une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- en ne retenant pas la faute dans l'opération initiale du 18 novembre 2013 le tribunal a commis une erreur d'interprétation des conclusions de l'expert ;

- contrairement à ce que soutient le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, le rapport d'expertise est parfaitement motivé, impartial et contradictoire ; le rapport D... n'intervient qu'au cours de l'instance d'appel et n'est pas contradictoire alors que le centre hospitalier n'a pas sollicité de contre-expertise ;

- l'expert a estimé que l'intervention du 18 novembre 2013 n'était pas indiquée, en raison des faibles antécédents médicaux de M. B..., et d'une période clinique muette depuis plus de dix ans ; il y a donc une faute médicale dans le choix du traitement, directement en lien avec le dommage, à savoir les douleurs et la limitation du rotateur externe ; cette opération chirurgicale n'était pas médicalement justifiée car il n'y avait pas de luxation récidivante ;

- il n'a pas été suffisamment informé, par le document signé, des risques spécifiques liés à cette intervention ;

- c'est à bon droit que le tribunal a retenu l'existence de fautes dans le suivi post-opératoire de M. B... ; si l'appelant se fonde sur le rapport critique du docteur D... pour contester les conclusions de l'expert, il est le seul à contester l'existence d'une migration de la vis et n'explique pas le retard dans le traitement de ses pathologies ;

- c'est à bon droit que le tribunal a retenu la faute lors de la seconde intervention par la réalisation d'une acromioplastie et une ténodèse contre-indiquées au vu de l'état de santé du patient ; l'existence d'une migration de la vis a conduit à réaliser cette intervention ; en toute hypothèse, celle-ci est à l'origine directe et certaine de la limitation fonctionnelle importante de l'épaule droite dont il souffre ; l'arthroscopie n'était pas médicalement justifiée ; cette sur- indication opératoire a prolongé l'incapacité temporaire au-delà du 1er janvier 2015 et jusqu'à la date de consolidation ;

- le lien de causalité entre les fautes relevées et ses préjudices justifie une indemnisation intégrale ; c'est à tort que le tribunal a limité son indemnisation à la perte de chance de 75% de se soustraire au risque d'algodystrophie qui s'est réalisé en suivant les conclusions de l'expert ;

- les préjudices ont été mal évalués ;

- il a droit à une indemnisation forfaitaire de 1 000 euros pour ses déplacements dont la réalité n'est pas contestée ;

- si le tribunal a admis le principe de la perte de salaire, c'est à tort qu'il n'a retenu que la période du 1er mai 2014 au 8 juillet 2015 ; il devait être indemnisé dès le 27 mars 2014, date de son premier arrêt de travail ; sa perte de salaire s'élève à 6 094,96 euros bruts ; il ne souffrait pas d'une pathologie chronique et ancienne ;

- il a droit à l'indemnisation des pertes de gains futurs ; en raison de la limitation fonctionnelle importante de l'épaule droite dont il souffre, il ne pourra plus exercer son activité d'aide-soignant en établissement pour personnes âgées dépendantes pour laquelle il a été reconnu comme définitivement inapte ; son poste de travail n'a pas pu être aménagé ; il est en attente reclassement ; il est âgé de 42 ans et a un fils de 19 ans à charge ; il est reconnu travailleur handicapé ; il n'a aucune certitude de retrouver un emploi ; il élabore toujours un projet de reconversion professionnelle compatible avec son état et ses acquis ; il perçoit actuellement 600 euros nets en congé de longue durée, soit une perte de 900 euros par mois à capitaliser pour l'avenir ; il sollicite une somme de 247 600,80 euros au titre du préjudice professionnel ; il sollicite aussi la somme de 60 000 euros au titre de l'incidence professionnelle ; il ne perçoit aucune indemnité pouvant venir en déduction ;

-le jugement est entaché d'erreur de droit en tant qu'il refuse de l'indemniser du surcoût d'équipement d'un véhicule par une boite automatique dont il a reconnu la nécessité au motif qu'il n'a produit qu'un devis de 6 834,80 euros ; sa situation financière ne lui permet pas d'avancer ces frais ; en outre, sur la base d'un renouvellement tous les cinq ans, il est fondé à solliciter une somme de 20 264 euros ;

- de même, il a produit un devis sur le coût des travaux à réaliser dans sa maison évalués à 42 041,96 euros, qu'il ne pourra plus réaliser lui-même ;

- son déficit fonctionnel temporaire partiel de 25 % doit être indemnisé à compter du 27 mars au 27 juillet 2014 puis du 1er janvier au 8 juillet 2015 à hauteur de 9 232,25 euros ;

- c'est à tort que le tribunal a confondu deux postes de préjudice distincts, souffrances endurées et préjudice esthétique ;

- il est fondé à solliciter 7 000 euros au titre des souffrances endurées évaluées à 2,5/7 ;

- c'est à tort que le tribunal a confondu deux postes de préjudice distincts, déficit fonctionnel permanent et préjudice d'agrément ;

- il est fondé à solliciter une somme de 33 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ;

- il a droit au versement d'une somme de 1 500 euros au titre du préjudice esthétique évalué à 1/7 ;

- il est fondé à solliciter une somme de 10 000 euros au titre du préjudice d'agrément du fait qu'il ne peut plus pratiquer la musculation.

Par une ordonnance en date du 23 septembre 2021, la date de clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 27 octobre 2021.

Par une ordonnance en date du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Armelle Geslan-Demaret, présidente rapporteure,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Yassfy, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né le 15 mai 1978, a consulté le docteur C..., chirurgien orthopédiste exerçant au sein du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, le 11 octobre 2013, en raison de douleurs ressenties au niveau de son épaule droite. Le 18 novembre suivant, il y a subi une opération consistant en la réalisation d'une butée coracoïdienne vissée, une capsulorraphie et une réinsertion du muscle sous scapulaire. Au vu des douleurs persistantes de M. B... et des éléments recueillis lors des consultations post-opératoires ayant mis en évidence un recul de la vis de synthèse, une nouvelle intervention chirurgicale consistant en une ablation de la vis, une acromioplastie et une ténodèse de la longue portion du biceps, a été réalisée par le même praticien, le 29 septembre 2014, au centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet. En raison des troubles dont il restait atteint, M. B... a saisi le tribunal administratif de Toulouse qui a désigné un expert, le docteur d'Arzac, qui a déposé son rapport le 21 décembre 2015. Par jugement n° 1701630 du 20 février 2020, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le centre hospitalier intercommunal de Castres Mazamet à verser à M. B... une somme de 85 427,99 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2016, à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins, son employeur, une somme totale de 35 476,76 euros, à verser à M. B... et à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins une somme de 1 500 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 200 euros à la charge du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet et a rejeté le surplus des conclusions des parties. Par sa requête susvisée, le centre hospitalier intercommunal de Castre- Mazamet relève appel de ce jugement dont il sollicite l'annulation et par voie de l'appel incident, M. B... et l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins demandent sa réformation, en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de leurs conclusions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet fait grief au jugement attaqué de n'avoir pas répondu à sa critique du rapport d'expertise, il ressort du dossier de première instance que s'il avait évoqué, dans ses écritures, " le rapport critique du docteur D... ", il ne l'avait pas joint avant sa production à l'appui de sa note en délibéré. Ce rapport, produit en appel, n'est pas revêtu du caractère contradictoire, à la différence du rapport d'expertise du docteur d'Arzac. Par suite, en s'abstenant d'y faire expressément référence, les premiers juges, qui ont implicitement retenu le caractère probant du rapport d'expertise, n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité et suffisamment répondu au moyen de défense du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet qui contestait la preuve de l'existence de fautes de nature à engager sa responsabilité.

Sur la responsabilité du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet :

3. Aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé (...), ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".

4. Dans l'hypothèse où un accident médical est à l'origine de conséquences dommageables et où la faute commise par une personne mentionnée au I de l'article L. 1142-1 a fait perdre à la victime une chance d'échapper à l'accident ou de se soustraire à ses conséquences, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe alors à l'hôpital doit être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.

5. Après avoir subi une luxation antéro-interne de l'épaule droite en 2000, traitée par réduction orthopédique et immobilisation au centre hospitalier de Castres, M. B... avait repris une vie personnelle et sportive normale et exerçait une activité professionnelle d'aide-soignant au sein de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins depuis 2007. En 2012, après avoir effectué un mouvement circulaire en procédant au nettoyage d'une table, il a ressenti une douleur à l'épaule droite, mais n'a pas consulté avant que ces douleurs persistantes ne s'aggravent et l'obligent à être placé en arrêt maladie en septembre 2013. Au vu des résultats d'une échographie, d'un examen radiologique et d'une imagerie par résonance magnétique, le chirurgien orthopédique du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, consulté le 11 octobre 2013, a décidé de procéder à une intervention chirurgicale, le 18 novembre 2013, consistant en la réalisation d'une butée coracoïdienne vissée, d'une capsulorraphie et d'une réinsertion du muscle sous scapulaire. M. B... a souffert par la suite de douleurs persistantes à l'épaule droite et après plusieurs examens, le chirurgien a diagnostiqué un déplacement de la vis du matériel d'ostéosynthèse et a procédé, dans cet établissement, à une nouvelle intervention, le 29 septembre 2014, consistant en une ablation de vis, une acromioplastie et une ténodèse de la longue portion du biceps. A la suite de cette intervention, M. B... a souffert d'une impotence de l'épaule limitant la mobilisation de son membre ainsi que d'une algodystrophie entraînant des douleurs persistantes. Il ressort de l'expertise diligentée en référé que la date de consolidation a été fixée au 8 juillet 2015 et que l'intéressé présente " une raideur de l'épaule droite chez un droitier avec une limitation de l'élévation, de l'abduction et de l'antépulsion à 85 degrés ".

6. En premier lieu, c'est à bon droit que les premiers juges, qui ne se sont pas mépris sur les conclusions de l'expert, n'ont pas retenu l'existence d'une faute dans l'indication de la première intervention du 18 novembre 2013 dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'intervention, qui faisait suite aux douleurs récidivantes, aurait été contre-indiquée, en dépit de l'absence de luxation récidivante, des faibles antécédents médicaux de M. B... et d'une période clinique muette depuis plus de dix ans. Dans ces conditions, les éléments du dossier ne permettent pas de caractériser l'existence d'une faute médicale dans le choix du traitement, contrairement aux prétentions de M. B....

7. En deuxième lieu, aucun élément ne permet d'établir que le consentement donné par M. B... à l'opération du 18 novembre 2013 par sa signature sur le document qui lui a été remis par le chirurgien n'aurait pas été suffisamment éclairé alors qu'il ne fait état d'aucun risque spécifique à cette intervention sur l'épaule droite dont il aurait dû être informé.

8. En troisième lieu, les premiers juges ont relevé qu'il résultait des conclusions de l'expert que le suivi post opératoire de M. B... avait été effectué de manière négligente au regard de la découverte tardive de la butée de la vis. Si le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet se prévaut du contre-rapport qu'il a fait réaliser par le docteur D..., spécialisé en chirurgie orthopédique, qui conteste l'existence de " la prétendue complication tirée de la migration de la vis ", il ressort néanmoins des pièces médicales analysées par l'expert qu'un problème concernant la vis et /ou la rondelle a été détecté dès la radiographie du 27 mars 2014, puis lors de celle du 25 avril 2014, confirmé par l'examen du 25 juillet 2014, puis par l'arthroscanner du 6 août 2014 analysé le 22 août suivant qui a conduit le chirurgien à envisager la seconde opération. Il s'ensuit qu'il peut, en tout état de cause, être retenu un retard dans le diagnostic post-opératoire et l'origine des douleurs persistantes de M. B....

9. En quatrième lieu, c'est à bon droit que les premiers juges, s'appuyant sur le rapport d'expertise, ont estimé que si l'ablation de la vis réalisée le 29 septembre 2014, responsable du syndrome douloureux post opératoire, était nécessaire, l'indication de la réalisation d'une arthroscopie pour acromioplastie et ténodèse, également effectuée lors de cette intervention, paraissait contre-indiquée au vu de l'état de santé global de M. B..., comme l'avait indiqué son rhumatologue dont l'avis n'a pas été suivi. En en déduisant que cette faute n'était à l'origine que d'une perte de chance de 75% de se soustraire au risque d'algodystrophie qui s'est effectivement réalisé, ils n'ont pas commis d'erreur d'appréciation.

Sur l'évaluation des préjudices de M. B... :

En ce qui concerne les préjudices résultant du retard fautif de diagnostic :

S'agissant des pertes de gains professionnels :

10. M. B... a été placé en congé de longue maladie dès le 4 octobre 2013 avant sa prise en charge par le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet du fait des douleurs qui l'avaient amené à consulter. Contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges et ainsi qu'il ressort du rapport d'expertise, c'est seulement à compter de la radiographie réalisée le 27 mars 2014, et non dès la visite post-opératoire du 12 décembre 2013, qu'un arthroscanner aurait dû être prescrit par le chirurgien du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, au vu des douleurs présentées par M. B..., qui aurait montré le recul de la vis et induit en conséquence une ablation immédiate de la vis ce qui n'aurait engendré qu'un déficit fonctionnel de trois mois. C'est seulement le 27 juillet 2014 qu'a été prescrit ce scanner, qui n'a été réalisé que le 6 août 2014, analysé le 22 août suivant et a conduit à l'opération du 29 septembre 2014. Le retard de diagnostic peut donc être estimé à quatre mois. Il en résulte que si M. B... aurait pu être opéré dès le début du mois d'avril 2014 pour une ablation immédiate de la vis, il aurait pu être rétabli au mieux à compter du début du mois d'août 2014. Il résulte de l'instruction que M. B... ayant bénéficié d'un plein traitement jusqu'au 4 octobre 2014, le retard de diagnostic fautif n'a pas entraîné de perte de salaire sur cette période et il n'est pas établi qu'il aurait pu reprendre son travail à l'issue de cette période. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont accueilli sa demande d'indemnisation à ce titre.

S'agissant du déficit fonctionnel temporaire :

11. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que M. B... a subi un déficit fonctionnel temporaire évalué à 25 %, en lien avec le retard fautif de diagnostic. C'est à bon droit que les premiers juges lui ont alloué à ce titre la somme de 1 600 euros.

En ce qui concerne les préjudices résultant de la faute commise lors de la seconde intervention :

S'agissant des pertes de gains professionnels :

12. La seconde intervention qui n'a eu lieu que le 29 septembre 2014, a généré une perte de salaire à compter du 4 octobre 2014 et jusqu'à sa consolidation, le 8 juillet 2015, pour laquelle M. B... sollicite le versement d'une somme de 6 094,96 euros non contestée. Toutefois, après l'application du taux de perte de chance de 75 %, le montant indemnisable doit être limité à 4 571,22 euros.

S'agissant de l'incidence professionnelle :

13. Il résulte de l'instruction que, par courrier du 19 octobre 2015, l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins a indiqué à M. B... qu'aucun aménagement de poste n'était disponible. L'intéressé n'a jamais pu reprendre son travail et précise dans son mémoire en défense être placé en congé de longue durée et percevoir un demi-traitement. S'il indique être reconnu travailleur handicapé, il ne produit aucune pièce de nature à établir son taux d'invalidité ni ne justifie percevoir une allocation à ce titre. Il déclare toutefois poursuivre un projet de reconversion professionnelle compatible avec son état et ses acquis sans autre précision. En évaluant le préjudice afférent à l'incidence professionnelle à 60 000 euros correspondant à sa perte de revenus de 900 euros mensuels par rapport à un plein traitement non contestée sur une durée de 66 mois, et en lui allouant une indemnité de 45 000 euros après l'application du taux de perte de chance de 75 %, les premiers juges n'ont pas commis d'erreur d'appréciation. Il n'y a pas lieu, en l'absence de tout élément sur les perspectives professionnelles futures de M. B..., de faire droit à sa demande dans son appel incident tendant à indemniser sa perte de gains futurs.

S'agissant du déficit fonctionnel permanent et du préjudice d'agrément :

14. Il résulte également de l'instruction, notamment du rapport de l'expert, que M. B... reste atteint d'un déficit fonctionnel permanent de 20 % et a subi un préjudice d'agrément du fait de l'impossibilité pour lui de continuer sa pratique de la musculation et d'une gêne pour toute activité physique mobilisant le bras droit qui peut être évalué à 5% du déficit fonctionnel permanent. C'est à juste titre que les premiers juges lui ont alloué au titre de ces deux préjudices une indemnité globale de 30 000 euros, après application du taux de perte de chance de 75 %.

S'agissant des souffrances endurées et du préjudice esthétique :

15. Il résulte de l'instruction que M. B... a enduré les souffrances évaluées par l'expert à 2,5 sur une échelle allant de 1 à 7. Par ailleurs l'expert estime le préjudice esthétique, résultant de l'arthroscopie pour acromioplastie, à 1 sur une échelle allant de 1 à 7. En lui accordant une indemnité globale de 2 900 euros en réparation de ces préjudices après application du taux de perte de chance de 75 %, les premiers juges n'ont pas commis d'erreur d'appréciation.

S'agissant des frais divers :

16. En premier lieu, M. B... se borne toujours en appel à solliciter une indemnisation forfaitaire de 1 000 euros pour ses déplacements pour se rendre au centre hospitalier intercommunal de Castres Mazamet sans assortir ses prétentions d'aucune pièce justificative. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges lui ont refusé toute indemnisation à ce titre.

17. Si M. B... produit à nouveau en appel un devis établi le 19 février 2016 d'un montant de 6 834,80 euros pour l'adaptation d'une boîte à vitesses automatique sur un véhicule Citroën C3 de 2010, il n'établit ni être propriétaire d'un tel véhicule ni être titulaire du permis de conduire. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté sa demande d'indemnisation à ce titre majorée en appel à la somme de 20 264 euros tenant compte d'un renouvellement tous les cinq ans du véhicule.

18. Enfin, s'il persiste à solliciter l'indemnisation sur devis des travaux restant à réaliser dans sa maison évalués à 42 041,96 euros, au motif qu'il ne pourrait plus, du fait du dommage subi, rénover lui-même, il n'est nullement établi que ce montant correspondrait à un surcoût nécessité par le réaménagement de son habitation lié à la détérioration de son état de santé résultant de la faute du centre hospitalier pouvant seul constituer un préjudice indemnisable. Par suite, il n'y a pas lieu de remettre en cause le rejet qui lui a été opposé par les premiers juges sur ce point.

19. Il résulte de ce qui précède que l'indemnité que le centre hospitalier intercommunal de Castres Mazamet a été condamné à verser à M. B... doit être ramenée de 85 427, 99 euros à 84 071,22 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2016, date de réception de sa demande indemnitaire préalable.

Sur les droits de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes " Les Moulins " :

20. Aux termes de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959, l'Etat dispose de plein droit à l'encontre du tiers responsable du décès, de l'infirmité ou de la maladie de l'un de ses agents, d'une action subrogatoire en remboursement " de toutes les prestations versées ou maintenues à la victime ou à ses ayants droit à la suite du décès, de l'infirmité ou de la maladie ". L'article 2 de cette ordonnance ajoute que cette action subrogatoire est en principe exclusive de toute autre action de l'Etat contre le tiers responsable. Toutefois, par dérogation à ces dernières dispositions, l'article 32 de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation ouvre à l'Etat, en sa qualité d'employeur, une action directe contre le responsable des dommages ou son assureur afin de poursuivre le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées à l'agent pendant la période d'indisponibilité de celui-ci. Enfin, selon les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance n°59-76 : " Les dispositions de la présente ordonnance sont applicables aux recours exercés par : / (...) / 2° Les établissements publics à caractère administratif ".

21. Le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet a été condamné à rembourser à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins la somme totale de 35 476,76 euros au titre des périodes du mois de mai 2014 jusqu'au 8 juillet 2015, puis du 9 juillet 2015 et jusqu'au 20 avril 2016. L'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins doit être regardé comme sollicitant, par la voie de l'appel incident, que cette somme soit portée à 39 160,43 euros au titre des salaires et charges patronales versés du 19 mars 2014 au 20 avril 2016. Cependant, compte tenu de l'incidence du retard de diagnostic exposé au point 10, il y a lieu de limiter les droits à remboursement de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins à la période du mois d'août 2014 au 20 avril 2016, des salaires et charges sociales versés à M. B..., sous réserve de l'application du taux de 75%. En conséquence, la somme à allouer à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins doit être ramenée à 18 432,11 euros.

Sur les frais d'expertise :

22. Les frais de l'expertise liquidés et taxés à la somme de 1 200 euros, doivent être maintenus à la charge du centre hospitalier intercommunal de Castres Mazamet.

23. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier intercommunal de Castres Mazamet est seulement fondé à obtenir la limitation, d'une part, à la somme de 84 071,22 euros sa condamnation à indemniser M. B..., assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2016, date de réception de sa demande indemnitaire préalable, d'autre part, à la somme de 18 432,11 euros sa condamnation à indemniser l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins. Il en résulte également que les appels incidents doivent être rejetés.

Sur les frais liés au litige :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins et de M. B... tendant à leur application.

D É C I D E :

Article 1er : L'indemnité que le centre hospitalier intercommunal de Castres Mazamet a été condamné à verser à M. B... est ramenée à 84 071,22 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 décembre 2016, date de réception de sa demande indemnitaire préalable.

Article 2 : L'indemnité que le centre hospitalier intercommunal de Castres Mazamet a été condamné à verser à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins est ramenée à 18 432,11 euros.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 20 février 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, les appels incidents et les conclusions de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins et de M. B... tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, à M. A... B..., à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Les Moulins et à la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn.

Délibéré après l'audience du 15 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

- Mme Blin, présidente assesseure,

- Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.

La présidente rapporteure,

A. Geslan-DemaretLa présidente assesseure,

A. Blin

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°20TL21302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL21302
Date de la décision : 29/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01 Responsabilité de la puissance publique. - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. - Service public de santé.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Armelle GESLAN-DEMARET
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SCP PAMPONNEAU TERRIE PERROUIN BELLEN-ROTGER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-03-29;20tl21302 ?
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