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12/05/2022 | FRANCE | N°19TL22286

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 12 mai 2022, 19TL22286


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société A... et M. B... C... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner Toulouse Métropole à leur verser la somme de 64 710 euros en réparation des préjudices qu'ils ont subis du fait de travaux de voirie à compter de septembre 2015, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts.

Par un jugement n° 1704292 du 4 avril 2019, le tribunal administratif de Toulouse rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête e

t un mémoire complémentaire, enregistrés le 4 juin 2019 et le 30 septembre 2019, sous le n° 19BX0...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société A... et M. B... C... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner Toulouse Métropole à leur verser la somme de 64 710 euros en réparation des préjudices qu'ils ont subis du fait de travaux de voirie à compter de septembre 2015, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts.

Par un jugement n° 1704292 du 4 avril 2019, le tribunal administratif de Toulouse rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 4 juin 2019 et le 30 septembre 2019, sous le n° 19BX02286 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux puis sous le n° 19TL22286 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la société A... et M. C..., représentés par Me Maylie, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner Toulouse Métropole à leur verser respectivement la somme de 38 210 euros et la somme de 26 500 euros assorties des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts en réparation des préjudices qu'ils ont subis du fait de travaux de voirie à compter de septembre 2015 ou, à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise avant dire droit ;

3°) de mettre à la charge de Toulouse Métropole la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable dès lors qu'elle est bien dirigée contre Toulouse Métropole, et ce alors même que la requête introductive d'instance devant le tribunal administratif de Toulouse indique qu'elle est dirigée contre la communauté urbaine de Toulouse ;

- le gérant de la société A..., M. C..., a qualité pour agir au nom de cette dernière ;

- la requête ne constitue pas une requête collective irrégulière ni une action de groupe irrecevable ;

- le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer sur les moyens tirés de ce que, pour évaluer la baisse d'activité d'un fonds de commerce riverain de travaux publics de voirie, l'on doit comparer le chiffre d'affaires de ce fonds au cours de la période des travaux à ceux réalisés par lui aux cours des années précédentes et de ce qu'un bénéfice manqué consiste dans un gain qui peut être raisonnablement attendu d'une activité économique et qui n'a pas été obtenu et qu'un tel préjudice peut donc exister indépendamment du constat d'une éventuelle augmentation du bénéfice annuel d'une entreprise ;

- les travaux de voirie ont généré à compter du mois de septembre 2015 et le temps des travaux qui ont duré dix semaines une baisse significative de l'activité de la société et, par suite, une diminution notable de son chiffre d'affaires qui a entraîné une perte de marge bénéficiaire de 38 210 euros et non de 4 000 euros comme l'a estimé le tribunal administratif ;

- les travaux de voirie ont rendu particulièrement difficile voire impossible l'accès au restaurant de la requérante ;

- ils ont subi un préjudice anormal et spécial du fait de leur emplacement sur un îlot entouré de voies prévues exclusivement pour la circulation automobile ;

- la baisse significative des revenus de M. C... en 2015 est la conséquence de la diminution notable de l'activité de la société A... au cours de l'exécution des travaux de voirie en litige ;

- M. C... démontre avoir subi un préjudice moral en lien avec les travaux de voirie ;

- la société et son associé unique constituant des personnes juridiques différentes, le préjudice de la première ne peut être pris en compte pour apprécier le préjudice propre de son associé.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 août 2019 et le 11 janvier 2021, Toulouse Métropole, représentée par Me Rosier, conclut au rejet la requête et à ce qu'il soit mise à la charge solidaire de la société A... et M. C... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est mal dirigée dès lors qu'elle est dirigée contre la communauté urbaine de Toulouse Métropole qui n'existe plus depuis le 1er janvier 2015 ;

- la société A... agit sans que son représentant n'ait manifestement été habilité pour engager la présente instance ;

- la requête est irrecevable car elle est collective et constitue une action de groupe ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 18 décembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 18 janvier 2021.

Par ordonnance du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la société A... et M. C....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Maylie, représentant la société A... et M. C..., et de Me Becquevort, représentant Toulouse Métropole.

Considérant ce qui suit :

1. La société A..., dont M. C... est l'unique actionnaire et le gérant, exploite un

restaurant à Fenouillet. Estimant avoir subi des préjudices du fait des travaux de voirie réalisés dans le cadre de l'aménagement d'un centre commercial de la commune, ils ont formé, par courrier en date du 28 juin 2017, une demande indemnitaire préalable auprès de Toulouse Métropole qui a été rejetée. Par jugement en date du 4 avril 2019, le tribunal administratif a rejeté leur requête tendant à la condamnation de Toulouse Métropole à leur verser la somme totale de 64 710 euros. La société A... et M. C... relèvent appel de ce jugement et demandent à la cour de condamner Toulouse Métropole à leur verser respectivement la somme de 38 210 euros et la somme de 26 500 euros assortis des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Toulouse a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par les requérants. En particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre au moyen tiré de l'anormalité du dommage. Par suite, la société A... et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Il appartient au riverain d'une voie publique qui entend obtenir réparation des dommages qu'il estime avoir subis à l'occasion d'une opération de travaux publics à l'égard de laquelle il a la qualité de tiers d'établir le lien de causalité entre cette opération et les dommages invoqués et le caractère anormal et spécial de son préjudice, les riverains des voies publiques étant tenus de supporter sans contrepartie les sujétions normales qui leur sont imposées dans un but d'intérêt général.

4. Il résulte de l'instruction que les travaux de voirie réalisés dans le cadre de l'aménagement du centre commercial l'ont été sous la maîtrise d'ouvrage de l'établissement public de coopération intercommunale " Toulouse Métropole " qui a remplacé à compter du 1er janvier 2015 la communauté urbaine " Toulouse métropole ". La demande indemnitaire préalable de la société A... et de M. C... en date du 28 juin 2017 a été formée auprès de Toulouse Métropole et a été adressée à l'adresse postale de l'établissement public de coopération intercommunale " Toulouse Métropole ". Ainsi, et alors même que la société A... et M. C... ont visé dans leur requête introductive d'instance devant le tribunal administratif de Toulouse la communauté urbaine " Toulouse métropole ", ils doivent être regardés comme ayant sollicité l'indemnisation de leur préjudice à l'établissement public de coopération intercommunale " Toulouse Métropole ", de sorte que les conclusions indemnitaires ne sont pas mal dirigées.

En ce qui concerne les préjudices subis par la société A... :

5. Il résulte de l'instruction que les travaux de voirie en litige ont duré dix semaines de septembre à décembre 2015, dont quatre semaines du 16 novembre 2015 au 11 décembre 2015 devant le restaurant exploité par la société. Pour la réalisation de cette partie des travaux, un balisage de type K16 blanc et rouge et une clôture métallique ont été installés réduisant de moitié la voie d'accès au restaurant. Ainsi, si l'accès à l'établissement a été rendu plus difficile, il est resté accessible à la clientèle. En outre, si la société A... soutient qu'elle a subi une perte de marge nette d'un montant de 38 210 euros en lien avec les travaux, il résulte de l'instruction, et notamment des bilans produits, que son chiffre d'affaires a diminué entre 2014 et 2015 sans qu'un lien puisse être établi avec les travaux qui ne sont intervenus que postérieurement et que son résultat net d'exploitation a, quant à lui, augmenté sur la même période. Si elle soutient que la progression du résultat d'exploitation sur cette période s'explique par la baisse de rémunération de son gérant de 20 000 euros, elle ne démontre pas que cette baisse serait en lien avec les travaux de voirie, lesquels n'ont au demeurant duré que quatre semaines au droit du restaurant qu'elle exploite. Dans ces conditions, elle ne démontre pas avoir subi, du fait des travaux en litige, un préjudice d'exploitation excédant les sujétions normales imposées aux riverains de la voie publique et, partant, de nature à lui ouvrir droit à réparation sur le fondement de sa responsabilité sans faute de l'administration.

En ce qui concerne les préjudices subis par M. C... :

6. Il résulte de l'instruction, et notamment des comptes et bilans de la société A..., que la rémunération de son dirigeant, M. C..., a subi une diminution constante à partir d'octobre 2013. M. C... n'apporte donc pas la preuve, par la seule production de l'expertise d'un cabinet d'expertise comptable non étayée sur ce point, qu'il aurait subi un préjudice financier de 19 500 euros en raison des seuls travaux de voirie en litige. En outre, il n'apporte aucun commencement de preuve d'un préjudice moral.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par Toulouse Métropole ni d'ordonner une expertise, que la société A... et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Toulouse Métropole, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à la société A... et à M. C... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société A... et à M. C... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Toulouse Métropole et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société A... et de M. C... est rejetée.

Article 2 : La société A... et M. C... verseront à Toulouse Métropole une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société A..., à M. B... C... et à Toulouse Métropole.

Délibéré après l'audience du 14 avril 2022, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- Mme Restino, première conseillère,

- Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mai 2022.

La rapporteure,

N. LasserreLe président,

A. Barthez

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°19TL22286


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19TL22286
Date de la décision : 12/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02 Travaux publics. - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: Mme Nathalie LASSERRE
Rapporteur public ?: Mme CHERRIER
Avocat(s) : SCP CGCB et ASSOCIES MONTPELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-05-12;19tl22286 ?
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