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23/06/2022 | FRANCE | N°21TL00714

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 23 juin 2022, 21TL00714


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme J... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales, ainsi que les pénalités correspondantes, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 à 2015.

Par un jugement n° 1804616 du 28 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une

requête, enregistrée le 17 février 2021 sous le n° 21MA00714 au greffe de la cour administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme J... ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales, ainsi que les pénalités correspondantes, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 à 2015.

Par un jugement n° 1804616 du 28 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 février 2021 sous le n° 21MA00714 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 21TL00714 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, M. et Mme E..., représentés par Me Gasquet, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales, ainsi que les pénalités correspondantes, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 à 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la somme perçue en 2015 en contrepartie de la location d'un logement meublé n'est pas imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux dès lors que l'activité de location n'avait pas un caractère habituel ;

- la somme perçue en 2015 en exécution d'un contrat d'apporteur d'affaires n'est pas imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux dès lors que la condition d'habitude n'est pas remplie ;

- l'administration a méconnu les articles L. 16 et L. 16 A du livre des procédures fiscales en ne leur accordant pas un délai de deux mois pour répondre aux demandes d'informations qui leur ont été adressées dans le cadre de l'examen de leur situation fiscale personnelle ;

- l'administration ne leur a pas transmis certains documents obtenus dans l'exercice du droit de communication, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- la procédure de taxation d'office de la somme reçue en 2015 en contrepartie de la location d'un logement meublé est irrégulière dès lors que cette activité n'avait pas de caractère occulte, puisqu'ils se trouvaient dans l'impossibilité de la faire connaître au greffe du tribunal de commerce ;

- les rôles supplémentaires d'imposition ne comportent pas les mentions requises par l'article 24 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

- les sommes retenues en déduction des salaires imposables au titre des années 2013 et 2014 correspondent à des engagements de caution ;

- les sommes reçues de sociétés de capitaux ne sont pas imposables en tant que revenus distribués dès lors que l'administration n'a pas rehaussé les résultats imposables de ces sociétés à raison de ces prétendus revenus distribués ;

- la mise à disposition gratuite d'un véhicule Porsche modèle Cayenne par la société I... ne constitue pas une distribution occulte ;

- la somme reçue en 2015 en exécution d'un contrat d'apporteur d'affaires correspond à une avance sur frais ;

- l'application des pénalités prévues aux articles 1728 et 1729 du code général des impôts n'est pas justifiée.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 mai 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 1er mars 2022, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis à la cour administrative d'appel de Toulouse la requête de M. et Mme E....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Restino,

- et les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E... ont fait l'objet de deux examens de leur situation fiscale personnelle, le premier au titre des années 2013 et 2014, le second au titre de l'année 2015. A l'issue de ces contrôles, ils ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de ces trois années et à une cotisation supplémentaire de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre de l'année 2013. M. et Mme E... relèvent appel du jugement du 28 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le principe de l'assujettissement à l'impôt sur le revenu :

2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 34 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale ". Il résulte de ces dispositions que la location, à titre habituel, d'un logement meublé constitue une activité commerciale imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et non dans celle des revenus fonciers.

3. Pour considérer que les revenus tirés par les requérants de la location d'un logement meublé relevaient de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, l'administration s'est fondée sur le courrier électronique du 12 avril 2017 par lequel le conseil mandaté par les requérants pour les représenter dans le cadre de l'examen de leur situation fiscale personnelle a répondu à une question du service à propos de la nature de la somme de 2 499,60 à euros portée au crédit de l'un de leurs comptes bancaires le 25 mars 2015. Le conseil des requérants a ainsi indiqué que cette somme correspondait à des revenus de bénéfices industriels et commerciaux issus d'une activité de location meublée non professionnelle, en précisant : " Nous pensons que les charges correspondantes à cette activité s'élèvent à environ 20 % du montant total des recettes et viendraient en déduction ". Pour dénier toute portée à cette correspondance, les requérants se bornent à soutenir que cette somme rémunèrerait une unique prestation de location et pour un montant modique, de sorte que cette location ne constituerait pas une activité commerciale imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Toutefois, ces allégations, qui ne sont accompagnées d'aucune indication quant aux caractéristiques du bien loué ou de justification quant à la nature de la prestation facturée, ne sauraient prévaloir, dans les circonstances de l'affaire, sur les mentions de la correspondance mentionnée ci-dessus par lesquelles les requérants ont expressément reconnu l'exercice d'une activité de location en meublé relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Par suite, et alors même que le produit des locations n'aurait été que de 2 499,60 euros en 2015 et que l'activité aurait été exercée à titre non professionnel, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les revenus de cette activité devaient être imposés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.

4. En second lieu, aux termes du 1 de l'article 92 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ".

5. Il résulte de l'instruction qu'en réponse à la demande de l'administration quant à la nature des crédits bancaires d'un montant total de 242 500 euros encaissés en 2015, le conseil mandaté par les requérants pour les représenter dans le cadre de l'examen de leur situation fiscale personnelle a produit un contrat d'intermédiation commerciale conclu le 3 novembre 2014 entre M. E... et la société I..., dont l'objet était la mise en relation, par lui, de cette société avec des " sociétés porteuses d'affaires à fort potentiel pour la production de produits cosmétiques en Suisse ". Ce contrat, conclu pour une durée indéterminée prévoyait le versement d'une somme de 250 000 euros à M. E... aux fins de prospection et pour permettre d'établir une avance dans la phase des pourparlers. En cas de rupture du contrat, M. E... devait rembourser à la société I... les sommes non investies pour son compte.

6. La circonstance que l'activité d'entremise à raison de laquelle M. E... a été rémunéré par la société I... n'ait pas revêtu un caractère habituel ne fait pas obstacle à ce que le profit en résultant soit assimilable à un bénéfice non commercial au sens des dispositions précitées du 1 de l'article 92 du code général des impôts. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les revenus de cette activité devaient être imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

7. En premier lieu, aux termes du troisième alinéa de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige, l'administration peut, en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, demander au contribuable " (...) des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, notamment lorsque le total des montants crédités sur ses relevés de compte représente au moins le double de ses revenus déclarés ou excède ces derniers d'au moins 150 000 euros (...) " et aux termes de l'article L. 16 A du même livre : " Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. / Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite ".

8. Il résulte de l'instruction que l'administration a adressé aux requérants, par deux courriers du 15 septembre 2016, des demandes de renseignements à propos de sommes encaissées en 2013 et 2014, en leur accordant un délai de réponse de trente jours. Ces demandes, adressées dans le cadre de l'examen de leur situation fiscale personnelle et rédigées sur papier libre, ne présentaient aucun caractère contraignant et n'avaient pas le caractère de demandes d'éclaircissements et de justifications au sens du troisième alinéa de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales. Par conséquent, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'administration aurait méconnu ces dispositions ainsi que celles de l'article L. 16 A du même livre en leur accordant un délai de réponse inférieur à deux mois.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

10. D'une part, il ressort de la proposition de rectification du 12 décembre 2016 que, pour rehausser les revenus imposables des requérants au titre de l'année 2013 à raison des revenus distribués correspondant à la mise à disposition gratuite par la société C... d'une villa à titre de résidence principale, le vérificateur s'est fondé sur les quittances de loyer de cette villa, obtenues dans l'exercice du droit de communication auprès de la société C..., qui la louait auprès de la société F.... La proposition de rectification indique, par ailleurs, qu'une vérification de comptabilité a été engagée à l'égard de la société C..., laquelle a comptabilisé en charges les loyers facturés par la société F... au titre de l'exercice clos en 2013. Dès lors que les rehaussements en cause sont fondés sur les quittances de loyer adressées par la société F... à la société C..., qui ont été remises aux requérants à leur demande, et non pas sur les éléments comptables de la société C..., lesquels n'ont, au demeurant, pas été obtenus par l'administration dans l'exercice du droit de communication, les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que ces éléments comptables ne leur ont pas été adressés en réponse à leur demande qui visait les documents obtenus dans l'exercice du droit de communication. D'autre part, s'il ressort de la page 16 de la proposition de rectification du 15 mai 2017, portant sur l'année 2015, que pour rehausser les revenus imposables des requérants à raison des revenus distribués correspondant à la mise à disposition gratuite d'un véhicule Porsche modèle Cayenne, le vérificateur s'est fondé sur des " renseignements obtenus dans le cadre du droit de communication auprès de la société I... conformément aux dispositions des articles L. 81 et suivants du LPF, dont une copie vous a été remise, à votre demande, le 23 février 2017 (cf supra) ", il résulte de l'instruction que la mention de la société I... résulte d'une erreur de plume, l'administration n'ayant pas exercé son droit de communication auprès de cette société mais auprès de la société K..., bailleresse du véhicule, ainsi qu'il ressort de la page 4 de cette même proposition de rectification : " Lors de cette entrevue [du 23 février 2017] qui s'est déroulée en la seule présence de Maître D..., j'ai remis à cette dernière la copie recto-verso de la demande de renseignements effectuée auprès de la société CGL, bailleresse du véhicule Porsche Cayenne immatriculé (...) et de la réponse reçue (5 feuilles). Accusés réception manuscrits du 23/02/2017 ". Les requérants ayant effectivement obtenu communication des éléments recueillis dans l'exercice du droit de communication ayant servi à asseoir les rectifications correspondant à la mise à disposition gratuite du véhicule susmentionné, cette erreur de plume, pour regrettable qu'elle soit, est sans influence sur la régularité de la procédure. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit être écarté.

11. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. / Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure : / (...) 3° Si le contribuable s'est livré à une activité occulte, au sens du deuxième alinéa de l'article L. 169 " et aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 169 du même livre dans sa rédaction applicable au litige : " (...) L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite ".

12. Il est constant que l'activité commerciale de location meublée des requérants n'a fait l'objet d'aucune déclaration de résultat au titre de l'année 2015. Par ailleurs, à supposer même que les requérants se soient trouvés dans l'impossibilité de faire connaître l'existence de cette activité au greffe du tribunal de commerce, ce qu'ils ne démontrent pas, ils n'établissent ni même n'allèguent qu'ils en auraient fait connaître l'existence à un centre de formalités des entreprises. Par conséquent, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère occulte de l'activité de location meublée exercée par les requérants. Dans ces conditions, ils ne sont pas fondés à soutenir que la procédure de taxation d'office des revenus de cette activité, sans mise en demeure préalable, serait irrégulière.

13. En quatrième lieu, aux termes de l'article 1658 du code général des impôts : " Les impôts directs et les taxes assimilées sont recouvrés en vertu soit de rôles rendus exécutoires par arrêté du directeur général des finances publiques ou du préfet, soit d'avis de mise en recouvrement (...) ". Le rôle doit comporter l'identification du contribuable, ainsi que le total par nature d'impôt et par année des sommes à acquitter.

14. Il résulte de l'instruction que les extraits de rôle, produits par l'administration, relatifs aux impositions supplémentaires établies au titre des années 2013, 2014 et 2015, au nom des requérants, mentionnent l'identité de ces contribuables, le total dû, impôt par impôt, et les années concernées. En outre, les requérants ne peuvent utilement soutenir que ces rôles méconnaîtraient les dispositions de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, qui ne sont pas applicables aux créances fiscales.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant des rectifications opérées suivant la procédure contradictoire :

Quant à la charge de la preuve :

15. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) ".

16. Aux termes de l'article L. 57 du même livre : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 11, ce délai est prorogé de trente jours. (...) " et aux termes de l'article L. 11 de ce livre, dans sa rédaction applicable au litige : " A moins qu'un délai plus long ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d'éclaircissements et, d'une manière générale, à toute notification émanant d'un agent de l'administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification ".

17. Il résulte de l'instruction d'une part, qu'en réponse à la proposition de rectification du 12 décembre 2016 portant sur les revenus de l'année 2013 qui leur a été notifiée le 13 décembre 2016, ainsi qu'il résulte de la réponse aux observations du contribuable du 15 mai 2017, les requérants ont présenté des observations les 13 février, 7 et 12 avril 2017, postérieurement à l'expiration du délai de trente jours prévu à l'article L. 11 du livre des procédures fiscales, sans qu'ils aient obtenu une prorogation de ce délai. D'autre part, les requérants n'ont pas présenté d'observations en réponse aux propositions de rectification des 2 et 15 mai 2017 portant respectivement sur les revenus des années 2014 et 2015. Par conséquent, il leur appartient d'établir le caractère exagéré des impositions établies au titre des années 2013, 2014 et 2015.

Quant aux rehaussements dans la catégorie des traitements et salaires :

18. Aux termes de l'article 83 du code général des impôts : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales ". Il résulte de ces dispositions que les sommes qu'un salarié qui, s'étant rendu caution d'une obligation souscrite par la société dont il est le dirigeant de droit ou de fait, a dû payer au créancier de cette dernière sont déductibles de son revenu imposable de l'année au cours de laquelle le paiement a été effectué, à condition que son engagement comme caution se rattache directement à sa qualité de dirigeant, qu'il ait été pris en vue de servir les intérêts de l'entreprise et qu'il n'ait pas été hors de proportion avec les rémunérations allouées à l'intéressé ou qu'il pouvait escompter au moment où il l'a contracté.

19. D'une part, pour la détermination du montant des salaires imposables de M. E... au titre de l'année 2013, les requérants ont déduit une somme de 100 000 euros à raison de l'exécution d'un engagement de caution que M. E... aurait souscrit au profit de la société G.... L'administration a remis en cause cette déduction aux motifs que la somme a été versée en 2012 et que M. E... n'était pas salarié de cette société en 2013. D'autre part, pour la détermination du montant des salaires imposables de M. E... au titre des années 2013 et 2014, les requérants ont déduit des sommes de 59 308 euros et 28 500 euros à raison de l'exécution d'engagements de caution par lui au profit de la société (/PSEUDO)Chrono-Forme(PSEUDO). L'administration a remis en cause cette déduction aux motifs que M. E... n'était pas salarié de la société Chrono-Forme et que ces sommes ont été versées, non pas en exécution d'un engagement de caution, mais en exécution de sa condamnation solidaire en tant que dirigeant de cette société par le tribunal de commerce de Nîmes pour faute lourde de gestion. Les requérants, qui ne contestent pas les éléments ainsi retenus par l'administration, ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, du caractère exagéré de l'imposition en se bornant à soutenir que la perception du salaire doit s'apprécier non pas au niveau d'une société mais au niveau du groupe de sociétés, fut-il informel. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déduction de ces sommes des revenus imposables des requérants, dans la catégorie des traitements et salaires.

Quant aux rehaussements dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers :

20. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

21. En premier lieu, l'administration a réintégré dans les revenus imposables des requérants, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts, des sommes portées au crédit de leurs comptes bancaires, par chèques ou virements bancaires, pour des montants de 618 748 euros, 90 909 euros et 122 626 euros, respectivement au titre des années 2013, 2014 et 2015, provenant de sociétés contrôlées par M. E.... D'une part, les requérants ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, de l'exagération des bases ainsi retenues en se bornant à soutenir, pour l'ensemble de ces sommes, qu'elles n'ont pas été réintégrées dans les résultats des sociétés distributrices, alors même que les avantages occultes peuvent être imposés entre les mains de leurs bénéficiaires même s'ils n'apparaissent pas dans la comptabilité de la société distributrice. D'autre part, s'ils soutiennent que des crédits bancaires réintégrés dans leurs revenus imposables de l'année 2013 correspondraient à des remboursements de charges exposées par M. E... pour le compte des sociétés H... et G..., ils n'en justifient pas.

22. En second lieu, l'administration a réintégré dans les revenus imposables des requérants au titre des années 2013 à 2015, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts, les loyers versés en exécution du contrat de location avec option d'achat d'un véhicule de marque Porsche modèle Cayenne souscrit par la société Aytech resaerch consulting, au motif que ce véhicule était mis à la disposition de M. E... par cette société, dont il était l'unique associé. D'une part, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le montant de l'avantage correspondant à la mise à disposition de ce véhicule peut être imposé sur le fondement des dispositions précitées. D'autre part, les requérants ne rapportent pas la preuve qui leur incombe, du caractère exagéré de l'imposition en se bornant à soutenir que l'administration ne démontre pas que M. E... aurait utilisé ce véhicule, alors même que, dans un courrier électronique du 12 avril 2017, le conseil mandaté par les requérants pour les représenter dans le cadre de l'examen de leur situation fiscale personnelle a expressément admis l'utilisation de ce véhicule à des fins personnelles par M. E....

S'agissant des rectifications opérées suivant la procédure d'évaluation d'office :

23. Il résulte de l'instruction que l'administration a imposé entre les mains des requérants, au titre de l'année 2015, les revenus reçus par M. E... de la société I... à raison de son activité d'apporteur d'affaires, après avoir retranché un forfait de charges de 30 %. Les requérants, qui ne contestent ni l'encaissement de de la somme de 242 500 euros en 2015 ni son rattachement à l'activité d'apporteur d'affaires de M. E..., ne rapportent pas la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues en soutenant que ces sommes étaient des avances sur frais alors qu'en matière de bénéfices non commerciaux, les recettes sont, sauf option en faveur d'une comptabilité d'engagement, déterminées à partir des sommes encaissées.

En ce qui concerne les pénalités :

S'agissant de la majoration de 40 % pour manquement délibéré :

24. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'administration d'apporter la preuve de l'intention délibérée du contribuable d'éluder l'impôt.

25. Il résulte de l'instruction que la majoration pour manquement délibéré a été appliquée au titre des années 2013 à 2015 aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge des requérants en conséquence, d'une part, des rehaussements de leurs revenus dans la catégorie des traitements et salaires à raison des sommes présentées comme des engagements de caution et, d'autre part, des rehaussements de leurs revenus dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à raison de sommes reçues de sociétés contrôlées par M. E.... En se fondant sur l'importance des sommes déduites au titre d'engagements de caution, le fait qu'elles représentaient la quasi-totalité des salaires déclarés, soit 88 % en 2013 et 82 % en 2014, et le caractère répétitif de ces déductions, l'administration apporte la preuve de l'intention des requérants d'éluder l'impôt. En se fondant sur l'importance des sommes reçues de la part de sociétés contrôlées par M. E..., l'absence de justification de la nature et de l'origine de ces sommes et le caractère répétitif de l'omission déclarative, l'administration apporte la preuve de l'intention des requérants d'éluder l'impôt. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a appliqué la majoration pour manquement délibéré aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles les requérants ont été assujettis au titre des années 2013 à 2015.

S'agissant de la majoration prévue en cas d'exercice d'une activité occulte :

26. Aux termes du 1 de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte ".

27. En premier lieu, d'une part, l'administration justifie, pour les motifs déjà exposés au point 12, de ce que les requérants ont, au cours de l'année 2015, exercé de manière occulte une activité commerciale de location meublée. D'autre part, il est constant que M. E... n'a souscrit aucune déclaration de bénéfices afférente à son activité non commerciale d'apporteur d'affaires et n'a fait connaître celle-ci ni à un centre de formalités des entreprises ni au greffe du tribunal de commerce. Par conséquent, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère occulte de cette activité. En second lieu, les requérants n'établissent pas avoir commis des erreurs justifiant qu'ils ne se soient pas acquittés de leurs obligations déclaratives. Dès lors, ils ne sont pas fondés à demander la décharge de ces majorations de 80 % appliquées en l'espèce.

28. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à se soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

29. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser aux requérants, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et A... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- Mme Restino, première conseillère,

- Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2022.

La rapporteure,

V. RestinoLe président,

A. Barthez

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°21TL00714 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21TL00714
Date de la décision : 23/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Pouvoirs du juge fiscal.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: Mme Virginie RESTINO
Rapporteur public ?: Mme CHERRIER
Avocat(s) : SCP CAMILLE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-06-23;21tl00714 ?
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