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22/11/2022 | FRANCE | N°20TL03993

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 22 novembre 2022, 20TL03993


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée Pharmacie A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1801106 du 16 octobre 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires en réplique, e

nregistrés le 28 octobre 2020, le 11 mars 2021 et le 15 novembre 2021 sous le n° 20MA03993 au greffe de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée Pharmacie A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1801106 du 16 octobre 2020, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires en réplique, enregistrés le 28 octobre 2020, le 11 mars 2021 et le 15 novembre 2021 sous le n° 20MA03993 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 20TL03993 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la société Pharmacie A..., représentée par la société Alcade et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014, et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la constitution de provisions pour dépréciation de la valeur du fonds de l'officine de pharmacie est conforme aux dispositions du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts et de l'article 38 sexies de l'annexe III à ce code dès lors, notamment, que le chiffre d'affaires a baissé, de manière structurelle, par rapport à celui qui a déterminé la valeur d'inscription en comptabilité de ce fonds et que la valeur des fonds d'officine de pharmacie calculée en proportion du chiffre d'affaires a diminué en 2013 et 2014 par rapport à l'année 2010 ;

- le paragraphe 10 de la doctrine portant la référence BOI-BIC-PROV-40-10-10 du 25 février 2013 prévoit qu'un test de dépréciation doit être réalisé en se fondant sur des éléments externes et internes lorsqu'il existe des indices de dépréciation des immobilisations.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 mars et 28 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la société Pharmacie A....

Vu le jugement attaqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Serpentier pour la société Pharmacie A....

Considérant ce qui suit :

1. La société Pharmacie A..., qui exploite un fonds d'officine de pharmacie à Orange (Vaucluse), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2015 en matière d'impôt sur les sociétés. A l'issue de ce contrôle, l'administration a remis en cause la déduction de provisions de 100 000 euros, de 130 000 euros et de 100 000 euros, respectivement, au titre des exercices clos le 30 septembre 2013, le 30 septembre 2014 et le 30 septembre 2015, qui avaient été comptabilisées, la société ayant estimé que le fonds de commerce acheté en 2010 pour un montant de 2 044 400 euros s'était déprécié. Suivant l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, l'administration a ensuite seulement maintenu les rectifications au titre des exercices clos en 2013 et en 2014. La société Pharmacie A... fait appel du jugement du 16 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de ces exercices, et des pénalités correspondantes.

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : (...) 5° les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) ". Aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au même code : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment (...) les fonds de commerce, (...) donne lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts ". Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par l'entreprise, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent en outre comme probables eu égard aux circonstances de fait constatées à la date de clôture de l'exercice, et qu'enfin, elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise.

3. D'autre part, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité.

4. La valeur du fonds de la société requérante, mentionnée dans ses écritures comptables, s'élève à la somme de 2 044 400 euros, correspondant au prix indiqué dans l'acte de vente du 2 juin 2010. Il résulte de l'instruction, ainsi que le relève la société Pharmacie A..., que le chiffre d'affaires de l'exercice clos le 31 mars 2010 s'élevait à la somme de 1 956 475 euros et que ceux des exercices clos en 2013 et 2014 sont inférieurs, respectivement, de 10,22 % et de 7,21 % par rapport à celui constaté le 31 mars 2010. Toutefois, la valeur d'un fonds de commerce dépend aussi des profits. Or, la société requérante ne donne pas d'indication sur le montant des bénéfices au titre de l'exercice clos le 31 mars 2010 et elle ne soutient d'ailleurs pas que le résultat d'exploitation, sans provision pour dépréciation du fonds de commerce, au titre des deux années en litige, d'un montant respectivement de 81 569 euros en 2013 et de 80 841 euros en 2014, alors qu'il s'établissait à la somme de 25 498 euros pour l'exercice clos en 2011, aurait baissé par rapport à celui constaté au titre de l'exercice clos le 31 mars 2010. Ainsi, en l'absence d'une telle indication, nonobstant notamment la diminution constatée au niveau national de la valeur vénale des fonds de commerce d'officines de pharmacies par rapport au montant de leur chiffre d'affaires, la valeur retenue de la société lors d'une opération réalisée en 2016 s'élevant à seulement 80 % du chiffre d'affaires pour l'exercice clos en 2015 et la perte en juin 2011 d'un marché d'approvisionnement en médicaments avec un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes d'Orange, la société Pharmacie A... ne justifie pas que la diminution de valeur du fonds de commerce serait probable eu égard aux circonstances de fait constatées à la date de clôture des exercices en 2013 et 2014.

5. En second lieu, et en tout état de cause, la doctrine portant la référence BOI-BIC-PROV-40-10-10 du 25 février 2013 est relative à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. La société Pharmacie A..., assujettie à l'impôt sur les sociétés, ne peut donc s'en prévaloir. Au surplus, les énonciations du point 10 de cette doctrine, relatives aux éléments à prendre en compte lorsqu'on réalise un test de dépréciation quand il existe des indices de dépréciation d'une immobilisation, ne comportent aucune interprétation différente de la loi fiscale dont il a été fait application ci-dessus.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Pharmacie A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Pharmacie A... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Pharmacie A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Pharmacie A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- M. Lafon, président assesseur,

- Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 novembre 2022.

Le président-rapporteur,

A. B...L'assesseur le plus ancien,

N. Lafon

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°20TL03993 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20TL03993
Date de la décision : 22/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-04 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Détermination du bénéfice net. - Provisions.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: Mme CHERRIER
Avocat(s) : SCP ALCADE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-11-22;20tl03993 ?
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