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28/03/2023 | FRANCE | N°21TL00624

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 28 mars 2023, 21TL00624


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté de la rectrice de l'académie de Montpellier daté du 4 novembre 2018 qui le place en disponibilité d'office du 4 novembre 2018 au 3 mai 2019, de condamner l'Etat à lui verser des dommages-intérêts pour préjudice moral et financier et atteinte à sa santé, d'enjoindre à la rectrice de lui communiquer la totalité de son dossier, de reconstituer sa carrière et de lui verser la totalité de son salaire, et de valider ses tri

mestres pour la retraite, d'annuler le refus de cette rectrice de reconnaître ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté de la rectrice de l'académie de Montpellier daté du 4 novembre 2018 qui le place en disponibilité d'office du 4 novembre 2018 au 3 mai 2019, de condamner l'Etat à lui verser des dommages-intérêts pour préjudice moral et financier et atteinte à sa santé, d'enjoindre à la rectrice de lui communiquer la totalité de son dossier, de reconstituer sa carrière et de lui verser la totalité de son salaire, et de valider ses trimestres pour la retraite, d'annuler le refus de cette rectrice de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie et d'ordonner une enquête sur cette question.

Par un jugement n°1901370 du 11 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 février 2021, sous le n°21MA00624 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL00624, et deux mémoires enregistrés les 10 octobre et 2 novembre 2022, M. B..., représenté par la SELARL Trilles-Font agissant par Me Font, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

A titre principal :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 11 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2018 de la rectrice de l'académie de Montpellier portant placement en disponibilité d'office du 4 novembre 2018 au 3 mai 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

A titre subsidiaire et avant dire-droit :

- d'ordonner une expertise médicale.

Il soutient que :

- la commission de réforme a émis, le 19 mars 2019, un avis d'ajournement, estimant une nouvelle expertise nécessaire, ce qui marque une volonté de s'émanciper des conclusions médicales du docteur C... ; ainsi, l'arrêté contesté, qui repose sur l'avis d'un comité médical insuffisamment éclairé, résulte d'une erreur manifeste d'appréciation en l'absence d'éléments suffisants pour statuer ; l'absence de médecin de prévention et d'éléments exploitables à son dossier ont conduit le médecin nouvellement désigné à entériner l'avis du docteur C... ; plusieurs médecins se contredisent sur son inaptitude absolue et définitive ainsi que le docteur C... lui-même ;

- sa mise en disponibilité n'a pas été décidée après avis du comité médical, en méconnaissance de l'article 48 du décret du 14 mars 1986 ;

- sa pathologie a un caractère professionnel ; l'arrêté du 4 novembre 2018 relève d'une erreur manifeste d'appréciation ; il n'était pas possible de statuer en l'état sur sa situation eu égard au caractère insuffisant du rapport du docteur C... dont l'attitude peu professionnelle a provoqué son départ en cours d'examen médical le 18 juillet 2017 et eu égard à l'ajournement de la procédure en cours par la commission de réforme en mars 2019 pour qu'une nouvelle expertise soit diligentée ; ses conditions de travail ont en partie contribué à la survenance de sa maladie ;

- une nouvelle expertise devra être ordonnée.

Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. B....

Par un mémoire en défense enregistré le 10 octobre 2022, la rectrice de la région académique Occitanie, rectrice de l'académie de Montpellier, conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les conclusions dirigées contre la décision de refus d'imputabilité au service de sa maladie sont tardives et qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Par une ordonnance du 3 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 7 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 ;

- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., professeur agrégé en génie mécanique, affecté en zone de remplacement de Béziers, avec un rattachement administratif depuis le 1er septembre 2007 au lycée ..., a été placé en congé de maladie du 4 septembre au 20 octobre 2013, puis en congé de longue maladie du 4 novembre 2013 au 3 novembre 2014, et en congé de longue durée du 4 novembre 2014 jusqu'au 3 novembre 2018. Par une décision du 23 avril 2018, la rectrice de l'académie de Montpellier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de M. B.... M. B... a formé un recours gracieux, le 30 avril 2018, qui a fait l'objet d'une décision de rejet en date du 26 juin 2018. Par un arrêté du 4 novembre 2018, la rectrice a placé l'intéressé en disponibilité d'office du 4 novembre 2018 au 3 mai 2019. M. B... a notamment demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler cet arrêté daté du 4 novembre 2018 ainsi que le refus de de la rectrice de l'académie de Montpellier de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie. Par un jugement du 11 décembre 2020, dont M. B... relève appel, le tribunal a rejeté ses demandes.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En vertu du dernier alinéa de l'article 51 de la loi susvisée du 11 janvier 1984, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 34.(...) ". Aux termes de l'article 43 du décret susvisé du 16 septembre 1985 : " La mise en disponibilité ne peut être prononcée d'office qu'à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 2°, au premier alinéa du 3° et au 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues à l'article 63 du la loi du 11 janvier 1984 susvisée. (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 27 du décret susvisé du 14 mars 1986, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 47 du même décret : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, en application du décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'Etat reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme. ". Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article 48 du même décret, dans sa version applicable au litige : " La mise en disponibilité prévue aux articles 27 et 47 du présent décret est prononcée après avis du comité médical ou de la commission de réforme sur l'inaptitude du fonctionnaire à reprendre ses fonctions. "

3. D'une part, M. B... expose que l'administration a méconnu les dispositions précitées de l'article 48 du décret du 14 mars 1986, en prononçant sa mise en disponibilité sans attendre l'avis du comité médical. Toutefois, la rectrice fait valoir en défense sans être contredite que son arrêté n'a été pris qu'après la réception de l'avis du comité médical du 5 décembre 2018 et qu'il est ainsi seulement entaché d'une erreur matérielle quant à sa date, sans incidence sur sa légalité, ce qui explique également qu'il ait été joint à sa lettre du 20 décembre 2018 adressée à M. B.... La circonstance que cet arrêté prenne effet dès le 4 novembre 2018 a pour seul objet de régulariser la situation de l'intéressé en lui donnant une position régulière, dès lors que son congé longue durée expirait le 3 novembre 2018. Par suite, le vice de procédure allégué n'est pas établi.

4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté prononçant la mise en disponibilité d'office de M. B... a été pris en considération de l'avis du comité médical de l'Hérault qui a, dans sa séance du 5 décembre 2018, estimé l'intéressé " inapte à ses fonctions et à toute fonction de façon absolue et définitive ". Si M. B... soutient que le comité médical était insuffisamment éclairé, il ressort des pièces du dossier que l'organisme collégial s'est appuyé sur le rapport établi le 19 novembre 2018 par le docteur C..., médecin psychiatre agréé, faisant suite à un examen du 7 novembre 2018. L'expert a conclu que l'état psychique de M. B... entraînait une inaptitude absolue et définitive à l'exercice de toute fonction. La circonstance que l'intéressé ait interrompu et quitté un précédent examen médical en date du 18 juillet 2017 conduit par le même médecin expert, alors appelé à donner un avis sur l'imputabilité au service de la maladie de l'agent est sans incidence sur l'expertise effectuée en novembre 2018. De même, la circonstance que le rapport d'expertise du 19 novembre 2018 reprenne, dans ses commémoratifs, les conclusions de la précédente expertise indiquant notamment que l'inaptitude de l'agent était à évaluer, n'est pas de nature à démontrer une contradiction de l'expert sur cette question. Les certificats médicaux en date des 16 et 19 avril 2019 versés au dossier par M. B..., l'un établi par sa psychiatre qui le regarde comme apte à une activité à temps partiel et l'autre par son médecin généraliste qui se borne à indiquer qu'il ne présente pas de contre-indication à l'emploi en général, au demeurant postérieurs à la décision attaquée, sont peu circonstanciés et ne permettent ainsi pas d'infirmer les conclusions du médecin agréé. Si M. B... soutient également que la commission de réforme a demandé, le 19 mars 2019, soit postérieurement à l'arrêté contesté, une nouvelle expertise, il ressort des pièces du dossier que cette expertise était destinée à vérifier l'imputabilité au service de la pathologie de l'agent et non son aptitude à l'exercice de toute fonction. Dès lors, cette circonstance n'est pas de nature à faire regarder comme insuffisantes les conclusions du rapport d'expertise du docteur C... sur l'inaptitude de l'agent. Il en est de même de la lettre du 1er avril 2019 du médecin conseiller technique informant la rectrice qu'elle ne pouvait rédiger de rapport circonstancié relatif à la demande de M. B... tendant à la reconnaissance d'une maladie professionnelle et qui s'est, au demeurant, rallié aux conclusions de l'expertise antérieure.

5. Enfin, la décision attaquée datée du 4 novembre 2018, qui est fondée sur l'inaptitude définitive de l'agent à toute fonction et, par suite, sur l'impossibilité d'un reclassement, n'a ni pour objet ni pour effet de refuser de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie. Par suite, M. B... ne peut utilement se prévaloir du caractère professionnel de sa pathologie ou soutenir que ses conditions de travail ont pour partie contribué à sa survenance pour en contester la légalité. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier de première instance que, par une décision du 23 avril 2018 notifiée le 28 avril suivant et comportant l'indication des voies et délais de recours, la rectrice de l'académie de Montpellier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de M. B.... M. B... a alors formé, à l'encontre de cette décision, un recours gracieux le 30 avril 2018, qui a lui-même fait l'objet d'une décision de rejet en date du 26 juin 2018 notifiée le 29 juin suivant et comportant également l'indication des voies et délais de recours. Dès lors et ainsi que le fait valoir la rectrice en défense, la décision de refus de reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie du requérant en date du 23 avril 2018, a été tardivement contestée par le dépôt d'un recours devant le tribunal administratif le 19 mars 2019, et revêt, par suite, un caractère définitif.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il n'était pas possible de statuer, en l'état, sur sa mise en disponibilité d'office et que le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont serait entaché l'arrêté du 4 novembre 2018 ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise médicale sollicitée à titre subsidiaire, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée à la rectrice de la région académique Occitanie, rectrice de l'académie de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 14 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

M. Teulière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2023.

Le rapporteur,

T. Teulière

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21TL00624


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL00624
Date de la décision : 28/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05 Fonctionnaires et agents publics. - Positions.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: M. Thierry TEULIÈRE
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SELARL TRILLES-FONT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-03-28;21tl00624 ?
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