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25/04/2024 | FRANCE | N°22TL21427

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 25 avril 2024, 22TL21427


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Le Syndicat général des vignerons réunis des Côtes du Rhône, le Syndicat des vins de Laudun, l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) le domaine des Matassières et M. B... A... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 2 octobre 2020 par laquelle le conseil municipal de Tresques a approuvé la première modification du plan local d'urbanisme de la commune.



Par un jugement n° 2003697 du 26 avril 2022, l

e tribunal administratif de Nîmes a annulé cette délibération.



Procédure devant la cour :


...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Syndicat général des vignerons réunis des Côtes du Rhône, le Syndicat des vins de Laudun, l'exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) le domaine des Matassières et M. B... A... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la délibération du 2 octobre 2020 par laquelle le conseil municipal de Tresques a approuvé la première modification du plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 2003697 du 26 avril 2022, le tribunal administratif de Nîmes a annulé cette délibération.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 juin 2022 et un mémoire en réplique enregistré le 28 juillet 2023, la commune de Tresques, représentée par la SELARL d'avocats Blanc-Tardivel-Bocognano, demande à la cour :

1°) à titre principal d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande d'annulation présentée en première instance ;

3°) à titre subsidiaire d'annuler la délibération du 2 octobre 2020 en ce qui concerne le seul secteur D... ;

4°) de mettre à la charge solidaire des requérants de première instance la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en considérant que l'avis émis le 19 juin 2020 par le préfet du Gard, au titre des personnes publiques associées, annulait la dérogation accordée pour le secteur C..., par la décision du 10 février 2020, inexactement qualifiée d'avis alors qu'il s'agit d'un accord ;

- le tribunal a procédé à une mauvaise qualification des courriers et décisions du préfet alors que, sur la base des dispositions de l'article L. 142-5 du code de l'urbanisme, le préfet donne son accord à la dérogation tandis que, sur le fondement de l'article L. 153-43 du même code, il émet un avis sur le projet de modification ;

- il est faux d'indiquer que la décision favorable datée du 10 février 2020, sur l'ouverture à l'urbanisation du secteur C..., a été abrogée par l'avis émis le 19 juin 2020 ;

- le secteur D..., qui présente deux zones 2AU avec un rang de priorité ne relève pas de la procédure d'accord pour dérogation et ne relève pas des dispositions de l'article L. 142-4 du code de l'urbanisme ;

- au titre de l'effet dévolutif, les deux zones 1AU, couvrant les deux secteurs " Sauzet" et " Estang Sud" et concernées par la procédure de modification, sont relativement épargnées par l'aléa feux de forêts et le classement de ces deux secteurs est de nature à permettre à la commune d'atteindre ses objectifs en termes de création de logements ;

- à l'instar du contentieux relatif à l'approbation d'un plan local d'urbanisme, la cour a la possibilité de prononcer une annulation partielle tenant au seul secteur D... ;

- les dispositions de l'article L. 153-31 du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnues et aucune incompatibilité entre le projet et le projet d'aménagement et de développement durables n'est constituée ;

- le risque relatif aux feux de forêts n'est pas démontré ;

- aucune atteinte à la zone agricole au regard de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme n'est caractérisée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2022, le syndicat général des vignerons réunis des Côtes du Rhône, le syndicat des vins de Laudun, l'EARL le domaine des Matassières et M. B... A..., représentés par Me Poitout, concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Tresques la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les moyens d'appel relatifs au bien-fondé du jugement ne sont pas fondés ;

- au titre de l'effet dévolutif, la procédure de modification suivie par la commune de Tresques sur le fondement de l'article L. 153-38 du code de l'urbanisme méconnaît les dispositions de l'article L. 153-31 du même code puisque c'est une révision globale du plan local d'urbanisme qui s'imposait ;

- l'erreur du choix de la procédure de modification est établie en raison de l'absence de compatibilité du projet avec le projet d'aménagement et de développement durables, de l'atteinte à des zones agricoles et forestières et de l'atteinte à l'économie générale du plan local d'urbanisme ;

- la délibération est entachée d'erreur manifeste d'appréciation concernant un projet qui vise à ouvrir à l'urbanisation un secteur en zone rouge aléa feux de forêts pour le secteur D... et, concernant des projets d'urbanisation, qui visent à compromettre une zone agricole en méconnaissance de l'article L. 102-1 du code de l'urbanisme.

La clôture d'instruction a été fixée au 10 août 2023 par une ordonnance en date du 27 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- les observations de Me Rouault, représentant la commune appelante ;

- et les observations de Me Poitout, représentant les parties intimées.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 2 octobre 2020, le conseil municipal de Tresques (Gard) a approuvé, suivant la procédure prévue à l'article L. 153-38 du code de l'urbanisme, la première modification du plan local d'urbanisme de la commune ayant pour objet le changement de zonage de deux zones, anciennement classées en zone à urbaniser 1AU " fermée ", le secteur dit C... et le secteur dit D..., respectivement en zone UB et en deux zones à urbaniser 2AU1 et 2AU2 " ouvertes ". Le syndicat général des vignerons réunis des Côtes du Rhône, le syndicat des vins de Laudun, l'EARL le domaine des Matassières et M. B... A... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de cette délibération. Par le jugement susvisé du 26 avril 2022, dont la commune de Tresques relève appel, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la délibération du conseil municipal du 2 octobre 2020.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme, de se prononcer sur le bien-fondé des différents motifs d'annulation retenus par les premiers juges, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui, et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation. En outre, dans le cas où il estime qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, les examine. Il lui appartient de les écarter si aucun d'eux n'est fondé et, à l'inverse, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, de se prononcer, si un ou plusieurs de ces moyens lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges.

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

3. Le tribunal administratif de Nîmes a annulé la délibération du 2 octobre 2020 par laquelle le conseil municipal de Tresques a approuvé la première modification de son plan local d'urbanisme au motif tiré de ce que le préfet a expressément refusé d'accorder la dérogation prévue à l'article L. 142-5 du code de l'urbanisme, antérieurement à la délibération en litige, pour permettre l'ouverture à l'urbanisation du secteur D... et du secteur C....

4. D'une part, aux termes de l'article L. 142-4 du code de l'urbanisme : " Dans les communes où un schéma de cohérence territoriale n'est pas applicable : / 1° Les zones à urbaniser délimitées après le 1er juillet 2002 ainsi que les zones naturelles, agricoles ou forestières d'un plan local d'urbanisme ou d'un document en tenant lieu ne peuvent être ouvertes à l'urbanisation à l'occasion de l'élaboration ou d'une procédure d'évolution d'un document d'urbanisme ; (...) ". Aux termes de l'article L. 142-5 du même code : " Il peut être dérogé à l'article L. 142-4 avec l'accord de l'autorité administrative compétente de l'Etat après avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime et, le cas échéant, de l'établissement public prévu à l'article L. 143-16. La dérogation ne peut être accordée que si l'urbanisation envisagée ne nuit pas à la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers ou à la préservation et à la remise en bon état des continuités écologiques, ne conduit pas à une consommation excessive de l'espace, ne génère pas d'impact excessif sur les flux de déplacements et ne nuit pas à une répartition équilibrée entre emploi, habitat, commerces et services ".

5. Le territoire de la commune de Tresques n'était pas couvert par un schéma de cohérence territoriale à la date de la délibération attaquée et était donc soumise au principe d'urbanisation limitée énoncé par l'article L. 142-4 du code de l'urbanisme.

6. Il ressort des pièces du dossier que le maire de Tresques, par courrier du 14 octobre 2019, a saisi le préfet du Gard d'une demande de dérogation pour l'ouverture à l'urbanisation des deux zones à urbaniser " fermées " 1AU des secteurs C... et D..., dans le cadre du projet de modification n° 1 du plan local d'urbanisme. Par une décision du 10 février 2020 prise sur le fondement de l'article L. 142-5 du code de l'urbanisme, le représentant de l'Etat a accordé une dérogation pour ouvrir à l'urbanisation uniquement la zone à urbaniser 1AU du secteur C... et a refusé d'accorder la dérogation sollicitée pour le secteur D.... Il ressort également des pièces du dossier que, saisi par la commune de Tresques pour consultation, en tant que personne publique associée, sur la version du 2 mars 2020 du projet de modification n° 1 du plan local d'urbanisme, préalablement à sa soumission à enquête publique du 22 juin au 31 juillet 2020, le préfet du Gard par un courrier du 19 juin 2020 a rendu un avis défavorable sur cette seconde version au motif qu'elle maintient une volonté de la part de la commune d'ouvrir à l'urbanisation la zone D.... Si, dans ce même avis, le préfet relève, concernant le classement en zone UB du secteur C..., que " la densité de logements résultant de ce choix risque d'être en deçà de celle fixée par le Scot arrêté ", cet avis émis sur le projet de plan local d'urbanisme en application de l'article R. 123-8 du code de l'environnement ne constitue cependant pas une réponse à une demande de dérogation. Par suite, contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, l'avis du 19 juin 2020 du préfet du Gard ne peut être regardé comme ayant retiré ou abrogé sa décision d'octroi de la dérogation du 10 février 2020 concernant l'ouverture à l'urbanisation de la zone 1AU du secteur C.... Par conséquent, c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 142-4 et L. 142-5 du code de l'urbanisme s'agissant du secteur du Sauzet.

7. En revanche, s'agissant du secteur D..., anciennement classé en zone à urbaniser 1AU " fermée " par le plan local d'urbanisme approuvé le 10 avril 2012, transformé en zones à urbaniser 2AU1 et 2AU2 " ouvertes " par la délibération en litige, il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus que le préfet du Gard, sur demande de la commune, a refusé d'accorder la dérogation prévue à l'article L. 142-4 du code de l'urbanisme pour l'ouverture à l'urbanisation de ce secteur. Si la commune de Tresques soutient pour la première fois en appel que l'ouverture à l'urbanisation de ce secteur ne relevait pas de la procédure d'octroi d'une dérogation par le représentant de l'Etat, il ressort des pièces du dossier que le classement du secteur D... en zone à urbaniser 1AU " fermée " ne permettait pas son ouverture immédiate à l'urbanisation. Par suite, une telle ouverture immédiate supposait une évolution du plan local d'urbanisme sous réserve de l'octroi d'une dérogation du préfet en l'absence de schéma de cohérence territoriale couvrant le territoire communal. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont accueilli ce même moyen pour prononcer l'annulation de la délibération en litige s'agissant du secteur D....

8. Il résulte de ce qui précède que la commune appelante est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur ce motif pour prononcer l'annulation de la totalité de la délibération du 2 octobre 2020.

9. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les demandeurs tant en première instance qu'en défense en appel.

En ce qui concerne les autres moyens invoqués par les intimés s'agissant de l'ouverture à l'urbanisation du secteur C... :

10. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 153-31 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " Le plan local d'urbanisme est révisé lorsque l'établissement public de coopération intercommunale ou la commune décide : / 1° Soit de changer les orientations définies par le projet d'aménagement et de développement durables ; / 2° Soit de réduire un espace boisé classé, une zone agricole ou une zone naturelle et forestière ; / 3° Soit de réduire une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels, ou d'une évolution de nature à induire de graves risques de nuisance ".

11. D'une part, dès lors que les zones en litige étaient classées en zone à urbaniser et non en zone agricole au sens de l'article L. 153-31 du code de l'urbanisme, le moyen tiré de ce que la modification approuvée du plan local d'urbanisme consiste en la réduction d'une zone agricole du fait de l'appartenance des parcelles en cause à l'AOC Côte du Rhône et de leur exploitation agricole ne peut qu'être écarté.

12. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme de la commune avant modification comportait cinq zones à urbaniser AU " ouvertes " en plus des deux zones à urbaniser AU " fermées " que la délibération en litige ouvre à l'urbanisation pour 9 000 m², s'agissant du secteur C... classé en zone UB, et pour 2,8 hectares s'agissant du secteur D... classé en zones 2AU1 et 2AU2 afin de permettre un aménagement différencié dans le temps. Il ressort de ces mêmes pièces que les secteurs en cause s'inscrivent dans une double volonté de circonscrire l'étalement urbain et de coordonner l'urbanisation avec le développement des infrastructures. Toutefois, dans le cadre des orientations du projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme énonçant "1- une préservation du cadre de vie et des paysages qui font la qualité du territoire de Tresques 2- Un développement urbain maîtrisé renforçant la centralité du village 3- Un confortement de la dynamique économique communale ", les auteurs du plan local d'urbanisme ont prévu que les zones 1AU C... et D... sont privilégiées afin d'accueillir à l'horizon 2024 les demandes nouvelles de logements. Ainsi, la modification opérée par la délibération, qui porte sur des zones à urbaniser et répond à l'objectif 2, ne change pas les orientations générales d'urbanisme définies par le projet d'aménagement et de développement durables pour l'ensemble de la commune et ne porte pas davantage atteinte, par ces modifications limitées, à l'économie générale du plan. Par suite, en recourant à la procédure de modification, les auteurs de la délibération contestée n'ont pas commis d'erreur de droit.

13. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 153-31 du code de l'urbanisme doit être écarté.

14. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 153-8 du code de l'urbanisme : " Le dossier soumis à l'enquête publique est composé des pièces mentionnées à l'article R. 123-8 du code de l'environnement et comprend, en annexe, les différents avis recueillis dans le cadre de la procédure. / Il peut, en outre, comprendre tout ou partie des pièces portées à la connaissance de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ou de la commune par le préfet. ". Aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'environnement : " Le dossier soumis à l'enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. / Le dossier comprend au moins : / 1° Lorsqu'ils sont requis, l'étude d'impact et son résumé non technique, le rapport sur les incidences environnementales et son résumé non technique, et, le cas échéant, la décision prise après un examen au cas par cas par l'autorité mentionnée au IV de l'article L. 122-1 ou à l'article L. 122-4, l'avis de l'autorité environnementale mentionné au III de l'article L. 122-1 et à l'article L. 122-7 du présent code ou à l'article L. 104-6 du code de l'urbanisme, ainsi que la réponse écrite du maître d'ouvrage à l'avis de l'autorité environnementale ; / 2° En l'absence d'évaluation environnementale le cas échéant, la décision prise après un examen au cas par cas ne soumettant pas le projet, plan ou programme à évaluation environnementale et, lorsqu'elle est requise, l'étude d'incidence environnementale mentionnée à l'article L. 181-8 et son résumé non technique, une note de présentation précisant les coordonnées du maître d'ouvrage ou de la personne publique responsable du projet, plan ou programme, l'objet de l'enquête, les caractéristiques les plus importantes du projet, plan ou programme et présentant un résumé des principales raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l'environnement, le projet, plan ou programme soumis à enquête a été retenu ;/ 3° La mention des textes qui régissent l'enquête publique en cause et l'indication de la façon dont cette enquête s'insère dans la procédure administrative relative au projet, plan ou programme considéré, ainsi que la ou les décisions pouvant être adoptées au terme de l'enquête et les autorités compétentes pour prendre la décision d'autorisation ou d'approbation ; / 4° Lorsqu'ils sont rendus obligatoires par un texte législatif ou réglementaire préalablement à l'ouverture de l'enquête, les avis émis sur le projet plan, ou programme ; / 5° Le bilan de la procédure de débat public organisée dans les conditions définies aux articles L. 121-8 à L. 121-15, de la concertation préalable définie à l'article L. 121-16 ou de toute autre procédure prévue par les textes en vigueur permettant au public de participer effectivement au processus de décision. Il comprend également l'acte prévu à l'article L. 121-13. Lorsque aucun débat public ou lorsque aucune concertation préalable n'a eu lieu, le dossier le mentionne ;(...) ". D'autre part, aux termes de l'article L. 112-3 du code rural et de la pêche maritime : " (...), les plans d'occupation des sols ou les documents d'urbanisme en tenant lieu (...) prévoyant une réduction des espaces agricoles ou forestiers ne peuvent être rendus publics ou approuvés qu'après avis de la chambre d'agriculture, de l'Institut national de l'origine et de la qualité dans les zones d'appellation d'origine contrôlée et, le cas échéant, du Centre national de la propriété forestière. Il en va de même en cas de révision ou de modification de ces documents. (...). ". Aux termes de l'article R. 153-6 du code de l'urbanisme : " Conformément à l'article L. 112-3 du code rural et de la pêche maritime, le plan local d'urbanisme ne peut être approuvé qu'après avis de la chambre d'agriculture, de l'Institut national de l'origine et de la qualité dans les zones d'appellation d'origine contrôlée et, le cas échéant, du Centre national de la propriété forestière lorsqu'il prévoit une réduction des espaces agricoles ou forestiers. / Ces avis sont rendus dans un délai de trois mois à compter de la saisine. En l'absence de réponse à l'issue de ce délai, l'avis est réputé favorable ". Enfin, aux termes de l'article L. 153-41 du même code : " Le projet de modification est soumis à enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou le maire lorsqu'il a pour effet : / 1° Soit de majorer de plus de 20 % les possibilités de construction résultant, dans une zone, de l'application de l'ensemble des règles du plan ; / 2° Soit de diminuer ces possibilités de construire ; / 3° Soit de réduire la surface d'une zone urbaine ou à urbaniser ; 4° Soit d'appliquer l'article L. 131-9 du présent code. "

15. S'il appartient à l'autorité administrative de mettre à la disposition du public, pendant toute la durée de l'enquête, un dossier d'enquête publique comportant l'ensemble des documents mentionnés par les dispositions de l'article R. 123-8 du code de l'environnement précitées, la méconnaissance de ces dispositions n'est toutefois de nature à vicier la procédure, et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique, que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.

16. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du rapport d'enquête publique, et n'est pas sérieusement contesté que le dossier soumis à l'enquête publique, au sujet duquel le commissaire-enquêteur n'a relevé aucune omission de pièces en listant les pièces du dossier, comprenait notamment les avis des organes délibérants des personnes publiques associées et des réponses qui ont été apportées, le courrier du préfet du Gard du 10 février 2020, l'avis rendu le 12 décembre 2019 par la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers et l'avis de la chambre d'agriculture du Gard en date du 17 juin 2020. Les intimés ne démontrent pas que la modification du plan en litige aurait pour conséquence une réduction d'un espace agricole au sens des dispositions de l'article L. 112-3 du code rural et de la pêche maritime. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que les parcelles concernées par la procédure de modification sont classées depuis l'approbation du plan local d'urbanisme, le 10 avril 2012, en zone à urbaniser 1AU et que l'Institut national de l'origine et de la qualité avait rendu un avis favorable le 5 septembre 2011 sur le projet de règlement. Par ailleurs, en se bornant à soutenir que les " éléments visés aux alinéa 1°, 2°, et 5° font défaut ", les intimés n'assortissent pas leur moyen de précision suffisante. Par suite, les moyens tirés de la " carence des pièces visées à l'article R. 123-8 du code de l'environnement " et de l'absence d'avis des personnes publiques associées, ainsi que de l'Institut national de l'origine et de la qualité doivent être écartés.

17. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 153-38 du même code : " Lorsque le projet de modification porte sur l'ouverture à l'urbanisation d'une zone, une délibération motivée de l'organe délibérant de l'établissement public compétent ou du conseil municipal justifie l'utilité de cette ouverture au regard des capacités d'urbanisation encore inexploitées dans les zones déjà urbanisées et la faisabilité opérationnelle d'un projet dans ces zones ".

18. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que, par la délibération en date du 8 octobre 2019, prise sur le fondement des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 153-38 du code l'urbanisme et prescrivant la 1ère modification du plan local d'urbanisme de la commune, le conseil municipal de Tresques a justifié de l'utilité de l'ouverture à l'urbanisation des zones 1AU, en précisant que les zones 2AU actuelles sont en cours d'urbanisation ou soumises à des contraintes obérant leur potentiel opérationnel et que les deux zones visées sont situées hors zone inondable et présentent des caractéristiques favorables, eu égard aux capacités résiduelles dans les zones urbaines bien inférieures à la demande de production de logements issue du plan local d'habitat. Ainsi, les membres du conseil municipal ont régulièrement délibéré sur l'ouverture à l'urbanisation de ces zones au regard des dispositions de l'article R. 153-38 du code de l'urbanisme. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de ce moyen, formulé dans la requête enregistrée le 2 décembre 2020, au regard des dispositions de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, ledit moyen tiré de l'absence de motivation de la délibération du 8 octobre 2019 conformément aux exigences de l'article L. 153-38 du code de l'urbanisme doit être écarté.

19. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 151-1 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable au litige : " Pour l'application de l'article L. 151-4, le rapport de présentation : / 1° Expose les principales conclusions du diagnostic sur lequel il s'appuie ainsi que, le cas échéant, les analyses des résultats de l'application du plan prévues par les articles L. 153-27 à L. 153-30 et comporte, en annexe, les études et les évaluations dont elles sont issues ; / 2° Analyse les capacités de densification et de mutation des espaces bâtis identifiés par le schéma de cohérence territoriale en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 141-3 ainsi que des autres espaces bâtis identifiés par le rapport lui-même en vertu du troisième alinéa de l'article L. 151-4 ; / 3° Analyse l'état initial de l'environnement, expose la manière dont le plan prend en compte le souci de la préservation et de la mise en valeur de l'environnement ainsi que les effets et incidences attendus de sa mise en œuvre sur celui-ci ". Aux termes de l'article R. 151-2 du même code " Le rapport de présentation comporte les justifications de : / 1° La cohérence des orientations d'aménagement et de programmation avec les orientations et objectifs du projet d'aménagement et de développement durables ; / 2° La nécessité des dispositions édictées par le règlement pour la mise en œuvre du projet d'aménagement et de développement durables et des différences qu'elles comportent, notamment selon qu'elles s'appliquent à des constructions existantes ou nouvelles ou selon la dimension des constructions ou selon les destinations et les sous-destinations de constructions dans une même zone ; / 3° La complémentarité de ces dispositions avec les orientations d'aménagement et de programmation mentionnées à l'article L. 151-6 ; / 4° La délimitation des zones prévues par l'article L. 151-9 ; / 5° L'institution des zones urbaines prévues par l'article R. 151-19, des zones urbaines ou zones à urbaniser prévues par le deuxième alinéa de l'article R. 151-20 lorsque leurs conditions d'aménagement ne font pas l'objet de dispositions réglementaires ainsi que celle des servitudes prévues par le 5° de l'article L. 151-41 ; / 6° Toute autre disposition du plan local d'urbanisme pour laquelle une obligation de justification particulière est prévue par le présent titre. Ces justifications sont regroupées dans le rapport. ".

20. Il ressort des pièces du dossier que le rapport de présentation expose le contexte de la modification ainsi que les objectifs quantitatifs que se sont fixé les auteurs de cette modification. Ce rapport comporte une analyse des opportunités offertes par le plan local d'urbanisme en présentant les zones à urbaniser 2AU du plan ainsi que les deux zones retenues pour être ouvertes à l'urbanisation. Ainsi, ce rapport qui est proportionné aux modifications apportées par la délibération satisfait aux exigences des dispositions précitées.

21. En cinquième lieu, contrairement à ce que soutiennent les intimés, le préfet du Gard a accordé la dérogation prévue à l'article L. 142-5 du code de l'urbanisme en ce qui concerne le secteur C.... A cet égard, comme il a été dit plus haut, il ressort des pièces du dossier que ce secteur a été classé en zone à urbaniser 1AU " fermée " par le plan local d'urbanisme adopté le 10 avril 2012 et que l'Institut national de l'origine et de la qualité a rendu un avis favorable sur le projet d'ouverture immédiate à l'urbanisation de ce secteur le 5 septembre 2021. En outre, il ressort des pièces du dossier que ledit secteur se trouve en dehors des espaces naturels et agricoles et qu'il est intégré au quartier C... composé d'un habitat pavillonnaire et inclus en zone urbaine mixte UC. En outre, ainsi que l'a relevé le préfet du Gard, ce secteur a été identifié par le projet de schéma de cohérence territoriale Gard Rhodanien arrêté le 27 juin 2019 comme un secteur de densification urbaine. Par ailleurs, les intimés ne peuvent utilement invoquer l'incompatibilité de la modification du plan local d'urbanisme avec le schéma de cohérence territoriale Rhodanien qui n'a été approuvé que le 14 décembre 2020, soit postérieurement à la délibération en litige. Enfin, les critiques formulées par les intimés concernant le secteur D... sont inopérantes à l'effet de contester l'ouverture à l'urbanisation du secteur C.... Par suite et dans ces conditions, le classement de ce secteur en zone ouverte à l'urbanisation après octroi d'une dérogation en ce sens par le préfet du Gard n'est pas entaché d'illégalité au regard des dispositions de l'article L. 142-5 du code de l'urbanisme.

22. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : / 1° L'équilibre entre : / a) Les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ; / b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux ; / c) Une utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des sites, des milieux et paysages naturels ; (...) ". Ces dispositions imposent seulement aux auteurs des documents d'urbanisme d'y faire figurer des mesures tendant à la réalisation des objectifs qu'elles énoncent. Il en résulte que le juge de l'excès de pouvoir exerce un simple contrôle de compatibilité entre ces documents et les dispositions de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme en se plaçant au niveau de l'ensemble du territoire de la commune et non à l'échelle d'un seul secteur.

23. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation, que la zone à urbaniser 1AU " fermée " du secteur C..., qui répondait à une logique de densification et de recentrage de l'urbanisation tout en préservant les entités agricoles d'intérêt paysager, et que la délibération en litige ouvre à l'urbanisation pour 9 000 m², transformé en zone UB, est totalement intégrée au quartier C... composé d'un habitat pavillonnaire et inclus en zone urbaine mixte UC. Ainsi, les incidences de la modification du plan local d'urbanisme en litige sur le potentiel agricole de la commune sont faibles. Il ressort également des pièces du dossier que cette évolution correspond à une modération de la consommation des espaces, compatible avec le respect du principe d'équilibre entre le développement urbain et l'utilisation économe des espaces naturels et agricoles. Par suite, les intimés n'établissent pas que la modification du plan local d'urbanisme en litige serait incompatible avec les objectifs énoncés par les dispositions précitées.

24. Pour les mêmes motifs, la contestation de l'ouverture à l'urbanisation du secteur D... au regard notamment des caractéristiques des parcelles de ce secteur classées en appellation d'origine contrôlée Côtes du Rhône ne peut être utilement invoquée par les intimés au soutien de leur moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement du secteur C... en zone UB.

25. En sixième et dernier lieu, compte tenu du motif d'annulation de la délibération en litige retenu par les premiers juges et de ce qui a été jugé aux points 7 et 8 du présent arrêt, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de l'ouverture à l'urbanisation du secteur D... au regard de l'aléa de feux de forêt est inopérant.

26. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Tresques est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la délibération portant approbation de la première modification du plan local d'urbanisme en tant qu'elle ouvre à l'urbanisation et classe en zone UB le secteur C.... Il y a donc lieu d'annuler dans cette mesure le jugement en litige du tribunal administratif de Nîmes. Par suite, il y a lieu de rejeter, dans cette seule mesure, la demande présentée en première instance par le syndicat des vignerons réunis des Côtes du Rhône et autres aux fins d'annulation totale de la délibération du 2 octobre 2020 du conseil municipal de Tresques.

Sur les frais liés au litige :

27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur leur fondement par les intimés, qui sont partie perdante en appel. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Tresques au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés sur le même fondement.

D E C I D E:

Article 1er : Le jugement du 26 avril 2022 du tribunal administratif de Nîmes est annulé en tant qu'il prononce l'annulation de la délibération en date du 2 octobre 2020 en ce qu'elle ouvre à l'urbanisation et classe en zone urbaine UB le secteur C....

Article 2 : La demande présentée par le syndicat des vignerons réunis des Côtes du Rhône et autres en tant qu'elle est dirigée contre la délibération du 2 octobre 2020 du conseil municipal de Tresques approuvant la première modification de son plan local d'urbanisme en ce qu'elle ouvre à l'urbanisation et classe en zone urbaine UB le secteur C... est rejetée.

Article 3 : le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Tresques et au syndicat général des vignerons réunis des Côtes du Rhône, premier requérant dénommé dans le mémoire en défense.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

Le rapporteur,

X. Haïli

Le président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet du Gard en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 22TL21427

2


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21427
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Xavier Haïli
Rapporteur public ?: Mme Meunier-Garner
Avocat(s) : POITOUT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-04-25;22tl21427 ?
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