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25/04/2024 | FRANCE | N°22TL21479

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 25 avril 2024, 22TL21479


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 7 février 2020 par lequel le maire de Larra a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison individuelle avec un garage et la décision du 17 avril 2020 rejetant son recours gracieux.



Par un jugement n° 2004215 du 29 avril 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par u

ne requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juin 2022 et le 8 juin 2023, M. A..., représenté par Me Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 7 février 2020 par lequel le maire de Larra a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison individuelle avec un garage et la décision du 17 avril 2020 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2004215 du 29 avril 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juin 2022 et le 8 juin 2023, M. A..., représenté par Me Courrech, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Larra une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que sa parcelle n'était pas située en zone agricole ;

- s'agissant de la demande de substitution de motif tenant à la méconnaissance de l'article U 13.2.1 du règlement du plan local d'urbanisme, la commune ne pouvait pas utilement soutenir devant le tribunal administratif que le dossier de demande de permis de construire était incomplet ; le fait que la parcelle soit classée en espace boisé classé par le nouveau plan local d'urbanisme est sans incidence sur la légalité de la décision qui a été édictée avant l'entrée en vigueur de ce classement ; ce motif ne pouvait pas fonder un refus de permis de construire mais seulement une prescription complémentaire dès lors que seulement sept arbres doivent être abattus ;

- en outre, s'agissant de la demande de substitution de motif tenant à la fraude, il n'a jamais cherché à induire en erreur l'administration sur l'état de boisement de sa parcelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 avril 2023, la commune de Larra, représentée par la SCP Bouyssou et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- dès lors qu'elle n'a pas demandé de substitution de motif fondée sur l'incomplétude du dossier, le moyen de l'appelant est inopérant ;

- un autre motif est de nature à fonder légalement la décision dans la mesure où le projet méconnaît l'article U 13.2.1 du règlement du plan local d'urbanisme, une dizaine d'arbres devant être abattus sans que leur remplacement ne soit prévu ; le tribunal administratif ne s'est pas fondé sur le fait que la parcelle soit classée en espace boisé classé par le nouveau plan local d'urbanisme pour opérer la substitution de motif ; au vu de l'important boisement, une prescription complémentaire ne pouvait pas être édictée pour permettre la délivrance du permis de construire ;

- un autre motif est de nature à fonder légalement la décision dans la mesure où le projet est entaché de fraude dès lors que M. A... a délibérément cherché à induire en erreur la commune quant à l'état densément boisé de la parcelle.

Par ordonnance du 8 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 6 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lasserre, première conseillère,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- et les observations de Me Köth, représentant M. A..., et de Me Malbert, représentant la commune de Larra.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a déposé le 2 août 2019 une demande tendant à la délivrance d'un permis de construire pour la construction d'une maison individuelle avec garage située route de Bretx sur le territoire de la commune de Larra (Haute-Garonne). Par arrêté du 7 février 2020, le maire de Larra a refusé de délivrer le permis sollicité. M. A... a formé le 1er avril 2020 un recours gracieux contre cette décision qui a été rejeté le 17 avril suivant. Par la présente requête, il relève appel du jugement du 29 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne le motif initialement opposé par le maire :

2. Pour refuser le permis de construire sollicité, le maire de Larra a considéré que le projet comporte une partie de sa voie d'accès en zone agricole, sur la parcelle cadastrée section ZR n° 10, et que le projet n'entre pas dans le champ des occupations et utilisations du sol autorisées dans cette zone. Il ressort des pièces du dossier que le plan de zonage du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Larra en vigueur à la date de la décision attaquée suit entièrement, dans cette zone, alors même qu'il n'y était pas tenu, d'anciens découpages parcellaires. Il ressort également des pièces du dossier et il n'est pas contesté en cause d'appel que les parcelles d'implantation du projet en litige, cadastrées section ZR n° 10 et n° 23, correspondent à l'ancienne ... que le plan local d'urbanisme a classée en totalité en zone Uc ainsi que cela ressort du document graphique. Par suite, le projet étant en totalité en zone Uc et non pour partie en zone agricole, le requérant est fondé à soutenir que le motif du refus de permis de construire en litige repose sur une erreur de fait. Par conséquent et ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, le motif de refus initialement opposé par le maire est entaché d'illégalité.

En ce qui concerne les nouveaux motifs invoqués par la commune :

3. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif de droit ou de fait autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

4. D'une part, le permis de construire n'ayant d'autre objet que d'autoriser la construction conforme aux plans et indications fournis par le pétitionnaire, l'administration n'a à vérifier ni l'exactitude des déclarations du demandeur relatives à la consistance du projet à moins qu'elles ne soient contredites par les autres éléments du dossier joints à la demande tels que limitativement définis par les dispositions des articles R. 431-4 et suivants du code de l'urbanisme, ni l'intention du demandeur de les respecter, sauf en présence d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date à laquelle l'administration se prononce sur la demande d'autorisation. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s'étant livré à l'occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l'administration.

5. D'autre part, aux termes de l'article U 13 du règlement du plan local d'urbanisme applicable à la zone U dans laquelle se situe le projet en litige : " (...) 2 - Espaces libres et plantations / 2-1 - Plantations et boisements existants / / Les espaces boisés, arbres isolés ou alignement d'arbres existants sont à conserver et à protéger. / Tout arbre abattu et détérioré doit être remplacé. (...) ".

6. La commune de Larra soutient pour la première fois en appel que la demande de permis de construire en cause a été obtenue à la suite de manœuvres frauduleuses. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des photographies aériennes produites en défense, que la parcelle d'implantation principale du projet, à savoir la parcelle ..., est une parcelle entièrement boisée et que, en particulier, des arbres sont présents tant au niveau du chemin d'accès qu'au niveau de la maison d'habitation prévus par le projet. Or, à l'appui de sa demande de permis de construire, M. A... a indiqué que la parcelle ne comporte pas d'arbre puis a précisé, sur demande de la commune du 4 décembre 2019, que le projet ne prévoit que l'abattage d'un chêne devant être remplacé par trois arbres identifiés comme étant des cerisiers ou des tilleuls. Toutefois, les deux documents photographiques produits pour étayer cette allégation, quasiment similaires, ne permettent pas de situer l'endroit où ces photographies ont été prises et ne présentent ainsi pas un caractère probant. De même, s'il soutient pour la première fois en appel que, selon son architecte, la réalisation de son projet n'emportera l'arrachage que de sept arbres, il n'apporte à l'appui de cette allégation aucun élément de nature à en établir le bien-fondé. Dans ces conditions, le projet doit être regardé comme nécessitant l'abattage d'un nombre important d'arbres et non du seul chêne indiqué comme à abattre dans la demande de permis de construire. En outre, au regard des caractéristiques de la parcelle et de son important boisement ainsi que des caractéristiques du projet en lui-même qui prévoit la mise en place d'une installation d'assainissement non collectif constituée d'une fosse toutes eaux et d'un lit filtrant à flux vertical et la création d'un chemin d'accès à la maison d'habitation, le dossier de demande de permis de construire n'établit pas qu'il soit possible de replanter autant d'arbres que ceux dont l'abattage est nécessaire dans le cadre du projet en litige. Par suite, en minimisant le boisement de sa parcelle dans sa demande de permis de construire, M. A... a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper la commune sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application de l'article U 13 du règlement du plan local d'urbanisme tant en ce qui concerne les arbres à abattre que ceux à replanter. Par conséquent, le motif invoqué tiré de la fraude est de nature à fonder légalement la décision de refus de permis de construire.

7. Il résulte de l'instruction que le maire de Larra aurait pris la même décision s'il s'était fondé initialement sur ce motif. Dès lors, il y a lieu de procéder à la substitution de motifs demandée en appel qui ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Larra, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Larra sur le fondement de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la commune de Larra une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Larra.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

D. ChabertLa greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 22TL21479


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21479
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: Mme Nathalie Lasserre
Rapporteur public ?: Mme Meunier-Garner
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-04-25;22tl21479 ?
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