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30/04/2024 | FRANCE | N°22TL21997

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 30 avril 2024, 22TL21997


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



MM. C... D... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté de la maire de Seix (Ariège) du 19 décembre 2018 autorisant pour certaines périodes de l'année 2019, par dérogation à l'arrêté municipal n° 2016-0019 du 16 février 2016 d'interdiction de circulation des véhicules de plus de 19 tonnes sur la voie communale n° 2, dite route d'Estours, la circulation des véhicules de plus de 19 tonnes de la société à responsabilité limi

tée Marble Stone Pyrénées.

Par un jugement n° 1902539 du 13 juillet 2022, le tribunal a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

MM. C... D... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté de la maire de Seix (Ariège) du 19 décembre 2018 autorisant pour certaines périodes de l'année 2019, par dérogation à l'arrêté municipal n° 2016-0019 du 16 février 2016 d'interdiction de circulation des véhicules de plus de 19 tonnes sur la voie communale n° 2, dite route d'Estours, la circulation des véhicules de plus de 19 tonnes de la société à responsabilité limitée Marble Stone Pyrénées.

Par un jugement n° 1902539 du 13 juillet 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 septembre 2022 et le 6 mars 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, MM. D... et A..., représentés par Me Terrasse, demandent à la cour :

1°) à titre principal d'annuler ce jugement du 13 juillet 2022 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler l'arrêté de la maire de Seix du 19 décembre 2018 autorisant pour certaines périodes de l'année 2019, par dérogation à l'arrêté municipal n° 2016-0019 du 16 février 2016 d'interdiction de circulation des véhicules de plus de 19 tonnes sur la voie communale n° 2, dite route d'Estours, la circulation des véhicules de plus de 19 tonnes de la société Marble Stone Pyrénées ;

3°) à titre subsidiaire, de réformer ce jugement en tant qu'il a mis à leur charge la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Seix la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'arrêté en litige est insuffisamment motivé, au regard des exigences de l'article L. 211-3 du code des relations entre le public et l'administration et de celles de l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales dès lors que les circonstances de fait justifiant l'octroi d'une dérogation d'interdiction de circulation des véhicules de plus de 19 tonnes sur la voie communale n° 2 ne sont pas mentionnées ;

- l'arrêté litigieux porte atteinte à la sécurité des usagers, en méconnaissance de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales et de l'article R. 141-3 du code de la voirie routière ;

- en effet l'état de dangerosité de la voie communale n° 2 est incontestable et a entraîné l'intervention de l'arrêté d'interdiction du 16 février 2016 ; cette dangerosité est établie par l'état dans lequel sont les trois ponts qui se trouvent sur cette route et dont le franchissement est indispensable pour les camions devant se rendre ou partir de la marbrerie de la société Marble Stone Pyrénées ; par ailleurs, la voie présente un caractère dangereux en raison de la fragilité de ses soutènements ; la chaussée, qui surplombe un ravin, est par ailleurs en mauvais état et présente un caractère étroit et sinueux ;

- les prescriptions contenues dans l'arrêté sont insuffisantes pour garantir la sécurité publique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2023 et un mémoire en production de pièces du 29 mars 2024 non communiqué, la commune de Seix, représentée par Me Montazeau, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge des appelants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable faute de comporter une critique du jugement de première instance ;

- subsidiairement, sur le fond, aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 13 février 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 6 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

-le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la voirie routière ;

- le code de justice administrative

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bentolila, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Rover substituant Me Terrasse, représentant MM. D... et A..., et de Me Montazeau, représentant la commune de Seix.

Une note en délibéré a été présentée le 5 avril 2024 pour la commune de Seix.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 16 février 2016, la maire de Seix (Ariège) a interdit la circulation sur la voie communale n° 2, dite route d'Estours, des véhicules d'un poids total roulant supérieur à 19 tonnes. À la demande de la société Marble Stone Pyrénées, exploitant une carrière de marbre vert au lieu-dit Estours, la maire de Seix a, par un arrêté du 19 décembre 2018, autorisé, à titre ponctuel et dérogatoire, la circulation des véhicules de plus de 19 tonnes affectés au transport de marbre appartenant à la société Marble Stone Pyrénées sur la route communale n° 2 pendant la période du 7 janvier au 31 mars 2019, hors périodes de vacances scolaires, du 1er avril au 31 octobre 2019, hors périodes de vacances scolaires, et du 1er au 30 novembre 2019.

2. MM. D... et A... demandent, à titre principal, l'annulation du jugement du 13 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité du 19 décembre 2018, et, à titre subsidiaire, de réformer ce jugement en tant qu'il met à leur charge la somme de 1 000 euros à verser tant à la commune de Seix qu'à la société Marble Stone Pyrénées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :

3. Les appelants, s'ils reprennent en appel plusieurs moyens invoqués devant le tribunal administratif, critiquent par ailleurs, en tout état de cause, à plusieurs reprises, le jugement de première instance. En conséquence, la fin de non-recevoir opposée à cet égard en défense, doit être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'État dans le département, de la police municipale (...) ". Aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...) ". Et aux termes de l'article R. 141-3 du code de la voirie routière : " Le maire peut interdire d'une manière temporaire ou permanente l'usage de tout ou partie du réseau des voies communales aux catégories de véhicules dont les caractéristiques sont incompatibles avec la constitution de ces voies, et notamment avec la résistance et la largeur de la chaussée ou des ouvrages d'art ".

5. Il est constant que l'accès à la marbrerie exploitée par la société Marble Stone Pyrénées n'est possible qu'en empruntant la voie communale n° 2, dite route d'Estours, dont la longueur est de l'ordre de trois kilomètres, et que les camions qui doivent emprunter cette route doivent nécessairement franchir trois ponts. Il ressort en outre des pièces du dossier, et notamment du rapport établi par le cabinet Arcadis, le 13 mai 2011, que deux de ces trois ponts nécessitent des travaux, sans pour autant qu'il en résulte qu'il serait impossible pour les camions précités de les utiliser, et que, s'agissant du troisième pont, " l'affouillement sous la fondation de la culée de la rive droite peut remettre en cause sa stabilité, et par conséquent la stabilité globale de l'ouvrage " et que l'état de ce pont justifiait son classement dans la catégorie " 3 U ", soit celle correspondant à des " ouvrages dont la structure est gravement altérée et nécessite des travaux de réparation urgents liés à l'insuffisance de capacité portante de l'ouvrage ou à la rapidité des désordres ". Le cabinet Arcadis précisait, de plus, en conclusion, s'agissant de cet ouvrage, qu'il présentait un " désordre vital à traiter en urgence ".

6. Il suit de ce qui vient d'être exposé que la dangerosité du pont n° 3 précité, dont l'arrêté querellé autorise par dérogation l'usage aux camions de plus de 19 tonnes de la société Marble Stone Pyrénées, est établie. En conséquence, MM. D... et A... sont fondés à soutenir que l'arrêté de la maire de Seix du 19 décembre 2018 litigieux est entaché d'une erreur d'appréciation.

7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, MM. D... et A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la maire de Seix du 19 décembre 2018 autorisant pour certaines périodes de l'année 2019 sur la voie communale n° 2, dite route d'Estours la circulation des véhicules de plus de 19 tonnes de la société Marble Stone Pyrénées. C'est également à tort qu'il a mis à leur charge des sommes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MM. D... et A..., qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, la somme que la commune de Seix demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Seix le versement de la somme de 750 euros à M. D... et de la même somme de 750 euros à M. A..., sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 13 juillet 2022 du tribunal administratif de Toulouse et l'arrêté de la maire de Seix du 19 décembre 2018 autorisant pour certaines périodes de l'année sur la voie communale n° 2, dite route d'Estours, la circulation des véhicules de plus de 19 tonnes de la société Marble Stone Pyrénées sont annulés.

Article 2 : La commune de Seix versera la somme de 750 euros à M. D... et la même somme de 750 euros à M. A..., sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Seix sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à M. B... A..., à la commune de Seix et à la société anonyme à responsabilité limitée Marble Stone Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2024 à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder , président,

M.Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2024.

Le rapporteur

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet de l'Ariège en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21997
Date de la décision : 30/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Commune - Attributions - Police - Police de la circulation et du stationnement.

Police - Police générale - Circulation et stationnement - Réglementation de la circulation.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: M. Pierre Bentolila
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : TERRASSE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-04-30;22tl21997 ?
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