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22/12/2005 | FRANCE | N°03VE03030

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 22 décembre 2005, 03VE03030


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SOCIETE EMULITHE venant aux droits de la Société Gercif-Emulithe, dont le siège s

ocial est Voie de Seine à Villeneuve le Roi (94290), par Me Z...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la SOCIETE EMULITHE venant aux droits de la Société Gercif-Emulithe, dont le siège social est Voie de Seine à Villeneuve le Roi (94290), par Me Z... ;

Vu la requête, enregistrée le 29 juillet 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle SOCIETE EMULITHE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9806649 en date du 26 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) à lui verser une somme de 126 620,35 F (19 303,15 €) au titre des travaux publics exécutés en qualité de sous-traitant de l'entreprise Magnard ;

2°) de condamner le CEA à lui verser la somme de 19 303,15 € ;

3°) de condamner le CEA à lui verser une somme de 3 000 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'en jugeant que le CEA n'avait pas été informé de son intervention sur le chantier en qualité de sous-traitant de l'entreprise Magnard, les premiers juges se sont fondés sur une interprétation erronée des faits de l'espèce ; qu'en retenant à son encontre qu'elle n'avait pas demandé son agrément le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; qu'en s'abstenant de demander sa régularisation, le CEA a commis une faute de nature à engager sa responsabilité envers elle ; qu'en versant la somme qui lui était due au passif de la liquidation de l'entreprise Magnard, le CEA a également commis une faute ; que le préjudice résultant de l'impossibilité où elle se trouvera de récupérer la somme qui lui est due au titre des travaux qu'elle a effectués est en relation directe avec les fautes commises par le CEA ;

………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 modifiée relative à la sous-traitance ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2005 :

- le rapport de M. Dacre-Wright, président ;

- les observations de Me X..., substituant Me Z..., pour la SOCIETE EMULITHE et de Me A... pour le Commissariat à l'énergie atomique ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Société Gercif-Emulithe, désormais dénommée SOCIETE EMULITHE, a effectué les 3 et 4 janvier 1996, en qualité de sous-traitant de l'entreprise Magnard, titulaire d'un marché passé le 21 août 1995 avec le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), des travaux publics sur une voie interne du centre d'études nucléaires de Saclay relèvant de cet établissement public ; que l'entreprise Magnard, en cessation de paiement à compter du 16 février 1996, a été placée en redressement judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Versailles en date du 22 février 1996, puis en liquidation judiciaire par un jugement du même tribunal en date du 15 avril 1996, Me Y... étant nommé liquidateur judiciaire de la société ; que, par une lettre du 19 avril 1996, le CEA a retourné à la SOCIETE EMULITHE la facture de 126 620,35 F (19 303,15 €) relative aux travaux qu'elle avait effectués et qu'elle lui avait adressée en sollicitant son paiement direct ; que le 4 juillet 1996, le CEA a versé entre les mains de Me Y..., au titre du passif de la liquidation de l'entreprise Magnard, une somme de 211 152,51 F (32 189,99 €) représentative du montant du marché passé avec cette entreprise et incluant le coût des travaux réalisés par la SOCIETE EMULITHE ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de la SOCIETE EMULITHE tendant à la condamnation du CEA à lui verser une indemnité de 19 303,15 € en réparation du préjudice qu'elle avait subi en ne percevant pas, par la faute de l'établissement public, la somme qui lui était due à raison des travaux qu'elle avait effectués ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que la SOCIETE EMULITHE produit le procès-verbal de l'assemblée générale du 23 novembre 1998 au cours de laquelle la Société Gercif-Emulithe a décidé de modifier sa dénomination sociale pour adopter celle d'EMULITHE ; que, par suite, le moyen tiré par le CEA de ce que la requête est irrecevable, faute pour la SOCIETE EMULITHE de démontrer qu'elle vient aux droits de la Société Gercif-Emulithe, doit être écarté ;

Sur la responsabilité du Commissariat à l'énergie atomique :

Considérant qu'en application des dispositions combinées des articles 3 et 6 de la loi du 31 décembre 1975 susvisée relative à la sous-traitance, le paiement direct du sous-traitant par le maître d'ouvrage pour la part du marché dont il assure l'exécution est subordonné à la double condition que, sur la demande de l'entrepreneur principal, le sous-traitant ait été accepté et que les conditions de paiement prévues à son contrat aient été agréées par le maître d'ouvrage ; que lorsqu'il tolère l'intervention d'un sous-traitant que le titulaire du marché n'a pas soumis à son acceptation, le maître d'ouvrage méconnaît les dispositions précitées et commet une faute de nature à engager sa responsabilité envers le sous-traitant ;

Considérant qu'il est constant que la Société Gercif-Emulithe n'a pas été présentée à l'agrément du CEA en qualité de sous-traitant par l'entreprise Magnard, qui était titulaire du marché passé avec cet établissement public pour la réalisation des travaux décrits précédemment ; que si la Société Gercif-Emulithe ne s'est fait explicitement connaître du CEA que le 27 février 1996, date de réception par l'établissement public de sa lettre du 23 février 1996 par laquelle elle sollicitait le paiement direct par le maître d'ouvrage du montant des travaux qu'elle avait effectués, alors qu'à cette date les travaux étaient entièrement exécutés et que l'entreprise Magnard venait d'être mise en règlement judiciaire, le CEA ne pouvait ignorer l'intervention de la Société Gercif-Emulithe dès lors que, dans une lettre en date du 8 janvier 1996 adressée à l'entreprise Magnard par l'ingénieur de sécurité du centre d'études nucléaires de Saclay en raison de l'insuffisante signalisation des travaux effectués les 3 et 4 janvier 1996, la Société Gercif-Emulithe, auteur de ces travaux, était clairement désignée comme étant son sous-traitant ; qu'en s'abstenant de procéder à l'acceptation de celle-ci en qualité de sous-traitant et à l'agrément des conditions de paiement, alors que la mise en redressement judiciaire de l'entreprise Magnard n'est intervenue que le 22 février 1996, le CEA a méconnu les dispositions des articles 3 et 6 de la loi du 31 décembre 1975 susvisée et a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que cette faute est à l'origine du dommage subi par la SOCIETE EMULITHE du fait du versement par le CEA de la totalité des sommes correspondant aux travaux exécutés par la Société Gercif-Emulithe au passif de la liquidation de l'entreprise Magnard ; que la responsabilité du CEA est toutefois atténuée par les fautes commises tant par l'entreprise Magnard en ne soumettant pas à l'acceptation du CEA l'intervention de la Société Gercif-Emulithe, que de cette société elle-même en négligeant de s'assurer qu'elle avait été acceptée ; qu'il sera par suite fait une juste appréciation des circonstances de l'affaire en mettant à le charge du CEA le tiers du préjudice subi par la SOCIETE EMULITHE ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les sommes perdues par la SOCIETE EMULITHE se sont élevées à 19 303,15 € (126 620,35 F) ; que cette société est, par voie de conséquence de ce qui précède, fondée à demander que le CEA soit condamné à lui verser une indemnité de 6 434,38 € ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE EMULITHE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions du CEA tendant au bénéfice des dispositions de l'article L761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge du CEA le paiement à la SOCIETE EMULITHE d'une somme de 1 500 € au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 9806649 du 26 mai 2003 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : Le Commissariat à l'énergie atomique est condamné à verser à la SOCIETE EMULITHE une indemnité de 6 434,38 €.

Article 3 : Le Commissariat à l'énergie atomique versera à la SOCIETE EMULITHE une somme de 1 500 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la SOCIETE EMULITHE et les conclusions du Commissariat à l'énergie atomique tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 03VE03030
Date de la décision : 22/12/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: M. Gildas DACRE-WRIGHT
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : FRECHE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-12-22;03ve03030 ?
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