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13/04/2006 | FRANCE | N°03VE00755

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 13 avril 2006, 03VE00755


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n° 2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une Cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M.et Mme X, demeurant ..., par Me Chastel ;

Vu la requête, enregistrée le

14 février 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Pa...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n° 2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une Cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M.et Mme X, demeurant ..., par Me Chastel ;

Vu la requête, enregistrée le 14 février 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle M.et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 991610 en date du 17 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1994 et 1995 et à la condamnation de l'Etat à leur payer la somme de 20 000 F ;

2°) d'accorder la réduction sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat à leur payer la somme de 10 000 F au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il ne précise pas le montant des 4 chèques émanant de la société Bat'Yvelines qu'ils avaient produits à l'appui de leurs justifications des salaires perçus ; que c'est sur l'intégralité des impositions supplémentaires que portait leur contestation d'origine ; que c'est à tort que l'administration a considéré comme tacitement acceptés les redressements au titre de l'année 1994 dès lors que des observations ont été produites par leur conseil, même si celui-ci ne produisait pas de mandat ; que la notification de redressements est muette sur les éléments réunis par le vérificateur permettant d'établir qu'ils avaient disposé de revenus plus importants que ceux qu'ils avaient déclarés ; que la charge de la preuve reposait donc toujours sur l'administration dès lors qu'une réponse à la notification de redressement a été produite dans les délais ; qu'ils ont été privés du droit de demander l'intervention de la commission départementale des impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires du fait de l'absence de réponse aux observations du contribuable ; que, s'agissant de l'année 1995, ils avaient répondu à la notification de redressement par l'intermédiaire d'un avocat ; que l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est méconnu dès lors qu'ils n'ont pas été interrogés dans leur langue ; que les procédures de taxation d'office initiées à leur encontre méconnaissent la convention franco-portugaise du 14 janvier 1971 ; que l'inspecteur n'a produit aucune balance de trésorerie permettant d'établir une discordance entre leurs revenus et leur patrimoine ;

………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention fiscale conclue entre la France et le Portugal le 14 janvier 1971 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mars 2006 :

- le rapport de M. Martin, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, d'une part, par décision en date du 24 mai 2004 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux des Yvelines a prononcé le dégrèvement, en droits, à concurrence d'une somme de 11 938,28 euros du complément d'impôt sur le revenu auquel M. et Mme X ont été assujettis au titre de l'année 1995 ; que les conclusions de la requête de M. et Mme X sont, dès lors, devenues sans objet au titre de l'année 1995 ; que, d'autre part, par décisions en date du 28 avril 2005 et du 30 septembre 2005 postérieures à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux des Yvelines a prononcé respectivement le dégrèvement à concurrence d'une somme de 3 654,81 euros et d'une somme de 1906,53 euros du complément d'impôt sur le revenu au titre de l'année 1994 ; que les conclusions de la requête de M. et Mme X sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la recevabilité de la requête en tant qu'elle concerne les cotisations afférentes aux revenus salariaux au titre des années 1994 et 1995 :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales : « (…) Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation à l'administration. (…) » ;

Considérant que, par réclamation au directeur des services fiscaux présentée le 7 septembre 1998, M. et Mme X ont expressément limité leur contestation au titre des années 1994 et 1995 à la taxation des crédits bancaires non justifiés en précisant ne pas contester les redressements en matière de salaires ; que, cependant, dans leur requête enregistrée au greffe de la Cour le 14 février 2003, les requérants ont présenté des conclusions en décharge qui excèdent le quantum qui figurait dans leur réclamation préalable, en étendant leur contestation aux droits rappelés afférents aux salaires ; que, par suite, les conclusions de la requête tendant à la décharge des impositions supplémentaires afférentes aux salaires sont irrecevables ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Versailles a analysé et confirmé chacun des chefs de redressement retenus par l'administration et le montant de chaque redressement qui en résultait ; qu'ainsi ce jugement doit être regardé comme suffisamment motivé, même si pour le chef de redressement relatif aux crédits bancaires qui correspondraient à des salaires, la somme correspondante n'est pas expressément mentionnée ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : « Sont taxés d'office : 1° à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus (...), sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 67 (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 67 du même livre : « La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4) de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure (...) » ; et qu'aux termes de l'article L. 76 du même livre : « Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination (...) » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme X ont été taxés d'office pour défaut de déclaration de leurs revenus de l'année 1994 malgré la mise en demeure qui leur a été adressée le 30 août 1995 et dont ils ont accusé réception le 4 septembre 1995 ; qu'en vertu de l'article L. 76 susrappelé du livre des procédures fiscales, l'administration n'est pas tenue, en cas de taxation d'office du revenu global pour défaut de déclaration, d'inviter le contribuable à faire connaître son acceptation ou ses observations dans les trente jours de l'envoi de la notification des bases ou des éléments ayant servi au calcul des impositions établies d'office, une discussion par le contribuable de ces impositions ne pouvant être engagée qu'après mise en recouvrement de l'impôt, dans le cours de la procédure contentieuse ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la notification de redressements du 9 décembre 1997 n'invitait pas M. et Mme X à présenter leur acceptation ou leurs observations et de ce qu'ils auraient été privés de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est inopérant ;

Considérant, en deuxième lieu, que si les requérants contestent la mise en oeuvre de la procédure prévue par l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, cette procédure n'a été mise en oeuvre qu'en ce qui concerne l'année 1995 ;

Considérant, en troisième lieu, que si les requérants soutiennent que la notification de redressements du 9 décembre 1997 était insuffisamment motivée, il résulte de l'instruction que cette notification mentionnait le montant total des salaires retenus pour le calcul de leur base d'imposition et précisait pour Mme X, que la somme correspondait au montant des salaires imposables reçus et pour M. X que la somme correspondait au cumul des salaires imposables mentionné sur le bulletin de salaires du mois de décembre ; que la circonstance que la notification de redressements se référait au montant des salaires figurant sur les bulletins de salaires et non au montant effectivement perçu n'a pas d'incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ; que la notification de redressements satisfaisait aux prescriptions de l'article L. 76 précité du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré par les requérants d'une violation des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant, dès lors que cette stipulation n'est, en tout état de cause, applicable qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions et n'est pas applicable à la procédure d'imposition ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la convention conclue entre la France et le Portugal le 14 janvier 1971 : « la présente convention s'applique aux personnes qui sont des résidents d'un Etat contractant ou de chacun des deux Etats » et qu'aux termes de l'article 25 de la même convention : « 1. Les nationaux d'un Etat contractant ne sont soumis dans l'autre Etat contractant à aucune imposition ou obligation y relative, qui soit autre ou plus lourde que celle à laquelle sont ou pourront être assujettis les nationaux de cet autre Etat se trouvant dans la même situation » ; que cette clause de non discrimination contenue à l'article 25 de la convention précitée conclue entre la France et le Portugal n'a pas été méconnue dès lors que la procédure de taxation d'office suivie à l'encontre de M. et Mme X est applicable à toutes les personnes domiciliées en France, quelle que soit leur nationalité et qui n'ont pas déposé, comme les requérants, dans les délais légaux la déclaration de revenus et qui n'ont pas régularisé leur situation après l'envoi d'une mise en demeure ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que le ministre demande, par substitution de base légale, que la somme de 16 475 F dont les requérants soutiennent qu'elle correspondrait à un salaire versé à M. X par la Sarl Bat'Yvelines au titre du mois de février 1994, demeure taxée au nom de M. X dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en tant qu'avantage occulte sur le fondement des dispositions de l'article 111 du code général des impôts aux termes desquelles : « Sont notamment considérés comme revenus distribués : ( . . . ) c) les rémunérations et avantages occultes . ( . . . ) » ;

Considérant qu'en regardant la somme de 16 475 F comme constitutive d'une rémunération occulte imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement de l'article 111 c) du code général des impôts, l'administration s'est bornée, devant le juge, à opérer par substitution de base légale la qualification de ce revenu au regard de la loi fiscale ; que, les requérants ne sont privés d'aucune garantie du fait de cette substitution dès lors qu'au titre de l'année 1994, comme il a été dit ci-dessus, les contribuables étaient en situation de taxation d'office pour n'avoir pas déposé de déclaration de revenus au titre de ladite année ;

Considérant que si les requérants soutiennent que le crédit d'un montant de 16 475 F correspondrait à des salaires versés par la Sarl Bat'Yvelines, la production d'un bulletin de salaires du mois de février 1994 mentionnant un montant net à payer de 15 952,77 F ne permet pas d'établir la concordance entre la paye en cause et le crédit porté au compte bancaire de M. X ; qu'ainsi la somme qui lui a été versée par la Sarl Bat'Yvelines constitue, en vertu des dispositions de l'article 111 c) susvisé du code général des impôts, un avantage occulte imposable comme tel dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et non dans celle des traitements et salaires ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : « Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition » ;

Considérant que s'agissant des autres crédits bancaires, les requérants ne produisent aucun justificatif ; que, dès lors, ils n'apportent pas la preuve qui leur incombe du caractère exagéré des impositions litigieuses auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1994 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 11 938,28 euros en ce qui concerne le complément d'impôt sur le revenu auquel M. et Mme X ont été assujettis au titre de l'année 1995 et à concurrence de la somme de 3 654,81 euros et de la somme de 1 906,53 euros en ce qui concerne le complément d'impôt sur le revenu auquel M. et Mme X ont été assujettis au titre de l'année 1994, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme X.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X est rejeté.

03VE00755 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 03VE00755
Date de la décision : 13/04/2006
Sens de l'arrêt : Non-lieu partiel
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : CHASTEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-04-13;03ve00755 ?
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