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27/11/2007 | FRANCE | N°06VE02201

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 27 novembre 2007, 06VE02201


Vu la requête, enregistrée le 27 septembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SARL KHAN AUTOMOBILES, dont le siège social est 117 avenue du général Leclerc à Pierrelaye (95480), représentée par son gérant, par Me d'Alboy, avocat ;X la SARL KHAN AUTOMOBILES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0103361 en date du 7 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution de 10 % sur

l'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités correspondantes auxquelle...

Vu la requête, enregistrée le 27 septembre 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SARL KHAN AUTOMOBILES, dont le siège social est 117 avenue du général Leclerc à Pierrelaye (95480), représentée par son gérant, par Me d'Alboy, avocat ;X la SARL KHAN AUTOMOBILES demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0103361 en date du 7 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995, 1996 et 1997 et mises en recouvrement le 29 novembre 2000, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés pour la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997, mis en recouvrement le 30 novembre 2000 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

La SARL KHAN AUTOMOBILES soutient que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité en ce que les dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales n'ont pas été respectées, l'administration n'ayant pas répondu à l'ensemble de ses observations ; qu'en ce qui concerne le bien-fondé des impositions litigieuses, la méthode de reconstitution adoptée par l'administration, fondée sur la comparaison du prix de vente déclaré des véhicules sur le livre de police et du prix de vente par référence à la cote « argus », était contestable ; que la valeur « argus » ne correspond pas systématiquement à un prix plancher pour les ventes entre professionnels et particuliers mais peut représenter une valeur moyenne ou une valeur donnée à titre d'information permettant de faciliter un accord amiable et, par suite, la transaction ; que seul l'accord des parties sur la chose et le prix a force probante ; qu'en l'espèce, la méthode commerciale adoptée consistait à acheter des véhicules éventuellement en mauvais état de présentation qui étaient revendus à bas prix pour réaliser un chiffre d'affaires important malgré une marge modeste, dans le but de créer la clientèle et d'assurer la trésorerie ; qu'il ne peut lui être fait grief d'avoir pratiqué des prix d'appel, pratique qui doit être regardée comme une décision de gestion non opposable ; que l'administration n'a pas tenu compte d'éléments propres à la société, tels sa structure de fonctionnement, une clientèle ayant peu de moyens ou une concurrence importante dans le secteur de la vente de véhicules d'occasion ; que le vérificateur aurait dû comparer les marges normalement pratiquées pour les années en litige ; que s'agissant des prix retenus par référence à la cote « argus », l'administration n'a pas tenu compte du kilométrage parcouru par les véhicules vendus, qui a pourtant une incidence importante sur les prix de vente, au-delà des valeurs « argus » annoncées ; qu'elle a systématiquement redressé les prix de vente inférieurs au cours de l'argus alors qu'elle a retenu les prix de vente lorsque ceux-ci étaient supérieurs à ce cours ; que la méthode de reconstitution n'étant pas fiable compte tenu des différences substantielles auxquelles elle aboutit, elle n'était pas pertinente ; qu'en outre, l'administration s'est bornée à appliquer approximativement une seule méthode de recoupement et n'a donc pas satisfait aux exigences de la doctrine administrative 4G-3343 n° 4 du 15 mai 1993 qui implique que les reconstitutions doivent demeurer dans des limites réalistes au regard des conditions effectives d'exploitation et être clairement et complètement exposées dans la notification de redressement ; que l'amende de l'article 1763 A du code général des impôts qui lui a été infligée n'est pas suffisamment motivée dès lors que n'est pas précisé son fondement juridique exact, l'administration ne faisant pas la distinction entre le 1° et le 2° de l'article 109-1 du code général des impôts ; qu'en outre, sa mauvaise foi n'est pas établie par l'administration, qui se borne à invoquer des considérations d'ordre général ;

……………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le livre des procédures fiscales et le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2007 :

- le rapport de Mme Riou, premier conseiller ;

- les observations de Me D'Alboy, pour la société requérante ;

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SARL KHAN AUTOMOBILES, qui a une activité de ventes d'automobiles d'occasion, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997, à l'issue de laquelle des redressements lui ont été notifiés au titre des exercices 1995, 1996 et 1997, en droits et pénalités, en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. ... Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit également être motivée ;

Considérant que si la SARL KHAN AUTOMOBILES soutient que la réponse faite le 10 mars 1999 à ses observations était insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 57 précité du livre des procédures fiscales, il résulte cependant de l'instruction que, tant en appel que devant les premiers juges, l'intéressée n'a pas produit la copie des observations qu'elle avait adressées à l'administration et n'a assorti son allégation d'aucune précision utile permettant d'en apprécier la pertinence ; que, par suite, le moyen invoqué ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que la SARL KHAN AUTOMOBILES ne conteste pas que sa comptabilité des années litigieuses était irrégulière et non probante ; que les impositions dont s'agit, qui procèdent de la vérification de sa comptabilité, ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il appartient, par suite et en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, à la société requérante d'apporter la preuve de l'exagération desdites impositions ;

Considérant que le contribuable, à qui incombe, comme en l'espèce, la charge de prouver l'exagération des bases d'imposition retenues par le service, peut, s'il n'est pas en mesure d'établir le montant exact de ses résultats en s'appuyant sur une comptabilité régulière et probante, soit critiquer la méthode d'évaluation que l'administration a suivie et qu'elle doit faire connaître au contribuable et démontrer que cette méthode aboutit, au moins sur certains points et pour certains montants, à une exagération des bases d'imposition, soit, soumettre à l'appréciation du juge de l'impôt une nouvelle méthode d'évaluation permettant de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que celle qui pouvait être atteinte par la méthode utilisée par l'administration ;

Considérant que, pour reconstituer le chiffre d'affaires de la SARL KHAN AUTOMOBILES, compte tenu des minorations de recettes évaluées à 23 % pour les exercices 1995 et 1996 et à 7 % pour l'exercice 1997, le vérificateur a pris pour échantillon, au titre de chacun de ces exercices, un quart des ventes de véhicules d'occasion réalisées par la société, et procédé à la comparaison entre le prix de vente de ces véhicules figurant sur le livre de police et les valeurs de la cote « argus » ; qu'il a ainsi constaté que les prix de vente étaient parfois très inférieurs aux valeurs « argus », alors que le livre de police ne précisait, dans la majorité des cas, ni le type de modèle vendu, ni le millésime, ni la motorisation essence ou diesel et le kilométrage ; que certains prix de vente de véhicules correspondaient aux prix d'achat de ceux-ci ou leur étaient inférieurs sans qu'aucune justification soit apportée ; qu'enfin, les opérations de remise en état ou de réparation des véhicules destinés à la vente et les présentations au contrôle technique préalable à celle-ci n'étaient pas non plus portées sur ledit livre de police ;

Considérant que si la société requérante soutient que la méthode retenue par l'administration, fondée sur la comparaison du prix de vente déclaré des véhicules sur le livre de police et du prix de vente par référence à la cote « argus », serait excessivement sommaire ou manifestement erronée et que les impositions seraient exagérées, elle ne l'établit ni en se bornant à soutenir que la valeur « argus » ne correspondrait pas systématiquement à un prix plancher, mais pourrait représenter une valeur moyenne de transaction et que seul l'accord des parties sur la chose et le prix aurait force probante, ni en alléguant, sans précision ni justificatifs probants, que la vente de ses véhicules à un prix supérieur au cours moyen « argus » serait justifiée en cas de remplacements de pièces ou de réparations importantes effectuées sur ces véhicules ; qu'elle n'établit pas, compte tenu de la méthode susrappelée, que l'administration n'aurait pas pris en considération sa structure de fonctionnement, sa clientèle ou le kilométrage des véhicules vendus ; qu'enfin, elle se borne à se prévaloir d'une politique d'achat de véhicules en mauvais état de présentation, revendus à bas prix afin de constituer une clientèle tout en assurant sa propre trésorerie, sans apporter aucun justificatif probant au soutien de cette allégation ; que, dans ces conditions, la méthode retenue par l'administration ne saurait être regardée comme excessivement sommaire ou radicalement viciée dans son principe ; qu'au surplus, aucune méthode alternative reposant sur des données justifiées n'est proposée par la requérante, qui permettrait de déterminer le chiffre d'affaires de la période en litige avec une meilleure approximation que celle de l'administration ; que, dès lors, la SARL KHAN AUTOMOBILES n'apporte pas la preuve de ce que les bases d'imposition retenues pour l'établissement des impositions litigieuses seraient excessives ;

Considérant que la SARL KHAN AUTOMOBILES invoque également la doctrine administrative référencée 4G-3343, en date du 15 mai 1993, préconisant le recours à plusieurs méthodes de reconstitution de recettes ; que cependant cette doctrine ne peut, en tout état de cause, être opposée à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale ;

Sur l'application des pénalités de mauvaise foi :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts alors applicable : « 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) » ;

Considérant, d'une part, que le vérificateur a motivé l'application des majorations pour mauvaise foi par l'importance des dissimulations de recettes, tant en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés que la taxe sur la valeur ajoutée, par l'absence d'explications et de pièces justificatives ainsi que par la constatation d'incohérences relatives aux apports en compte courant ou en espèces, pour la période en litige ; qu'il a rappelé le texte fondant l'application des pénalités litigieuses, l'article 1729 du code général des impôts, ainsi que les redressements sur lesquels elles portaient ; que, par suite, une telle motivation doit être regardée comme suffisante ;

Considérant, d'autre part, qu'en relevant les graves irrégularités affectant sa comptabilité et l'importance des dissimulations de recettes susmentionnées qui ressortissent de la reconstitution de recettes précise et complète effectuée par le vérificateur en tenant compte des données propres à l'entreprise sur trois exercices, l'administration doit être regardée comme ayant apporté la preuve de la mauvaise foi de la société et l'intention de celle-ci d'éluder l'impôt ; que, par suite, l'application des majorations prévues par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts était justifiée ;

Sur l'amende de 100 % :

Considérant que les dispositions du premier alinéa de l'article 1763 A du code général des impôts relatives à la pénalité qui peut être infligée aux sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont elles ne révèlent pas l'identité, applicables avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2006, de l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005, ont été reprises, après cette entrée en vigueur, par les dispositions de l'article 1759 nouveau du code général des impôts, applicables au présent litige ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent et qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : 1° Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 ... quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait a porté la motivation à la connaissance du contribuable… ; que l'amende fiscale prévue à l'article 1759 du code général des impôts est au nombre des sanctions auxquelles s'appliquent ces dispositions ; qu'il résulte de l'instruction qu'après avoir invité la SARL KHAN AUTOMOBILES, par la notification de redressements du 16 décembre 1998 qui se référait à l'article 117 du code général des impôts, à désigner, dans un délai de trente jours, le ou les bénéficiaires de l'excédent des distributions résultant du rehaussement de ses bénéfices imposables au titre des années 1995, 1996 et 1997, l'administration lui a fait connaître, dans la réponse aux observations du contribuable du 10 mars 1999, que faute d'avoir déféré à cette invitation, la société se verrait appliquer l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts et lui en a précisé la base ; que, par suite, la société, qui ne peut en tout état de cause invoquer la circonstance que le service n'aurait pas distingué les dispositions du 1° et du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts, n'est pas fondée à soutenir que cette amende n'aurait pas fait l'objet d'une motivation suffisante au regard de la loi du 11 juillet 1979 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL KHAN AUTOMOBILES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL KHAN AUTOMOBILES est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06VE02201
Date de la décision : 27/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: Mme Catherine RIOU
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : D'ALBOY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-11-27;06ve02201 ?
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