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30/12/2008 | FRANCE | N°07VE02234

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 30 décembre 2008, 07VE02234


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 29 août 2007, présentée pour M. et Mme Y, demeurant ..., par Me Sicsic ; M. et Mme Y demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0306945-036946 en date du 31 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la réduction de leurs bases d'imposition à l'impôt sur le revenu pour un montant de 13 082 euros au titre de l'année 1999 et 41 707 euros au titre de l'année 2000 et à la décharge des impositions correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge des impositi

ons en litige ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme représentant ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 29 août 2007, présentée pour M. et Mme Y, demeurant ..., par Me Sicsic ; M. et Mme Y demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0306945-036946 en date du 31 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la réduction de leurs bases d'imposition à l'impôt sur le revenu pour un montant de 13 082 euros au titre de l'année 1999 et 41 707 euros au titre de l'année 2000 et à la décharge des impositions correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme représentant le montant des frais exposés et non compris dans les dépens ;

4°) de condamner l'Etat à leur verser des intérêts moratoires ;

Ils soutiennent que c'est à tort que l'administration a refusé d'admettre en déduction de leur revenu imposable les sommes versées en exécution d'un engagement de caution des dettes de la SARL Samaya dont M. Y était dirigeant ; qu'en effet, l'engagement de caution se rattachait directement à la qualité de dirigeant, qu'il avait été pris en vue de servir les intérêts de l'entreprise et qu'il n'était pas hors de proportion avec les rémunérations qui lui étaient allouées ou qu'il pouvait escompter au moment où il a contracté cet engagement ; que M. Y a produit l'ensemble des justificatifs de paiement des sommes en cause et de leur rattachement à l'engagement de caution ; que le fait que l'entreprise n'ait réalisé aucun bénéfice jusqu'à sa liquidation en 1995 ne faisait pas obstacle à ce que ces engagements aient été souscrits dans le cadre d'une gestion normale de l'entreprise, dans la mesure où ils visaient à permettre la poursuite de l'exploitation ; que pour apprécier la proportionnalité de l'engagement par rapport à la rémunération du dirigeant, il convient de prendre en compte le cumul des salaires perçus par M. Y de la part de différentes sociétés qui avaient des activités complémentaire à la SARL Samaya ; qu'il pouvait en outre raisonnablement espérer, à terme, une rémunération annuelle dont le triple aurait excéder les engagement souscrits ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2008 :

- le rapport de M. Morri, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par l'administration :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : « La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge » ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, la requête d'appel ne se borne pas à se référer à la demande de première instance ; que la fin de non-recevoir tirée de son insuffisance de motivation doit être écartée ;

Sur le bien-fondé des impositions contestées :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 du code général des impôts : « 1. Le bénéfice ou le revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en faveur de l'acquisition et de la conservation du revenu (...) » et qu'aux termes de l'article 83 du même code, relatif à l'imposition des traitements et salaires, le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés (...) : 3° les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales ;

Considérant qu'en vertu de ces dispositions, les sommes qu'un salarié qui, s'étant rendu caution d'une obligation souscrite par la SARL dont il est le dirigeant de droit ou de fait, a dû payer au créancier de cette dernière, sont déductibles de son revenu imposable de l'année au cours de laquelle le paiement a été effectué, à condition que son engagement comme caution se rattache directement à sa qualité de dirigeant, qu'il ait été pris en vue de servir les intérêts de l'entreprise et qu'il n'ait pas été hors de proportion avec les rémunérations allouées à l'intéressé ou qu'il pouvait escompter au moment où il l'a contracté ; que, dans le cas de versements effectués en exécution d'engagements multiples souscrits sur plusieurs années, le caractère déductible des sommes payées doit être apprécié par référence au montant total des engagements pris et est subordonné à la condition que l'engagement au titre duquel les paiements ont été effectués n'ait pas eu pour effet, à la date à laquelle il a été pris, de porter le montant cumulé des cautions données par le contribuable à des sommes hors de proportion avec la rémunération annuelle qu'il percevait ou pouvait escompter au titre de l'année en cause ; que, lorsque l'engagement souscrit ne respecte pas cette condition, les sommes versées à ce titre sont néanmoins déductibles dans la limite du plafond ainsi fixé, diminué de la différence entre le total des engagements souscrits antérieurement à l'année en cause et les remboursements effectués jusqu'au terme de cette même année ;

Considérant que M. Y, qui était dirigeant salarié de la SARL Samaya de 1989, année de création de la SARL, à 1994, année de sa liquidation judiciaire, s'est porté caution de cinq emprunts souscrits par ladite SARL ; qu'ont ainsi été cautionnés, de façon successive, un emprunt de 100 000 francs souscrit le 10 octobre 1988 auprès de la Banque Parisienne de Crédit, devenue Fortis Banque, pour l'installation de la SARL, un emprunt de 500 000 francs souscrit le 6 février 1989 auprès de l'Union Bancaire du Nord pour le financement du droit au bail et pour des travaux d'agencement d'un magasin, un emprunt de 500 000 francs souscrit le 11 avril 1989 auprès de la BNP pour l'installation d'un fonds de commerce, un emprunt de 860 000 francs souscrit le 27 avril 1992 auprès de la Banque Parisienne de Crédit pour assurer la poursuite de l'exploitation et enfin un prêt conclu à une date et pour un montant indéterminés souscrit auprès du Crédit Lyonnais ;

Considérant qu'il résulte des éléments fournis qu'à l'exception du dernier engagement de caution relatif au prêt accordé par le Crédit Lyonnais et pour lequel aucune justification n'a été produite, ces engagements de caution se rattachaient directement à la qualité de dirigeant de M. Y ; que, par ailleurs, la seule circonstance que la SARL Samaya ait rencontré, dès 1989, des difficultés financières et qu'elle ait connu un endettement important ne suffit pas à établir que ces engagements de caution, qui étaient destinés à permettre la création de l'entreprise puis le maintien de son activité, aient été étrangers à l'intérêt de cette dernière ;

Considérant, en revanche, que l'administration soutient, sans être contredite, que les seules rémunérations perçues par M. Y de la SARL Samaya pendant l'ensemble de la période ont été de 25 000 francs au titre de l'année 1989 et de 60 000 francs au titre de l'année 1991 ; que si M. et Mme Y font valoir qu'il convient également de prendre en compte les rémunérations d'autres sociétés appartenant au même groupe, ils n'apportent, en tout état de cause, aucune justification sur ces rémunérations ; que l'allégation selon laquelle M. Y pouvait raisonnablement escompter une rémunération supérieure au moment où il a souscrit ces engagement de caution n'est pas davantage justifiée, sauf en ce qui concerne le prêt du 10 octobre 1988 contracté alors que la SARL Samaya n'avait pas commencé à fonctionner ; qu'à cette date, et dans les circonstances de l'espèce, M. Y pouvait raisonnablement escompter une rémunération équivalente à celle qu'il a perçu l'année suivante, soit 25 000 francs annuels ;

Considérant, dès lors, que compte tenu des rémunérations perçues par M. Y, le montant de ses engagements de caution était, dès le premier acte de cautionnement portant sur l'emprunt de 100 000 francs souscrit en 1988, hors de proportion avec la rémunération annuelle de 25 000 F que M. Y pouvait escompter pour l'année 1989 ; que tel était à plus forte raison le cas pour le montant cumulé des deux engagements souscrits en 1989 pour un montant de 1 million de francs et de l'engagement de 860 000 francs consenti en 1992, dans la mesure où M. Y n'a perçu aucune rémunération en 1990 et 1992 et que son salaire de dirigeant s'est limité à 60 000 francs en 1991 ;

Considérant, en revanche, que les sommes versées en exécution de l'engagement de caution du prêt du 10 octobre 1988 étaient déductibles dans la limite du triple de la rémunération annuelle de 25 000 francs que M. Y pouvait estimer raisonnablement percevoir en 1989, soit 75 000 francs (11433 euros) ;

Considérant que l'administration soutient que les documents produits pour justifier de versements effectués au cours des années 1999 et 2000 à Fortis banque, venue aux droits de la Banque Parisienne de Crédit, ne mentionnent pas si les paiements se rattachaient à l'engagement de caution du 10 octobre 1988 ou à celui du 27 avril 1992 souscrit à l'égard de la même banque ; que, toutefois, en l'absence d'indication contraire du débiteur, ces paiements devaient être réputés, en application de l'article 1256 du code civil, et en présence de deux dettes échues que le débiteur avait un égal intérêt à acquitter, s'imputer sur la plus ancienne de ces deux dettes ; que la circonstance que les contribuables aient conclu avec leur créancière un accord global portant réaménagement du paiement de ces dettes ne faisait pas obstacle à l'application de ce principe ;

Considérant ainsi que les contribuables étaient fondés à déduire au titre des frais réels la somme de 7685 euros versée à la banque Fortis en 1999 en exécution de l'engagement de caution du 10 octobre 1998 ; qu'ils étaient également fondés à déduire, dans la limite du montant cumulé de 11 433 euros, les paiements effectués au cours de l'année 2000 au titre de ce même engagement, soit 3748 euros ;

Considérant, par suite, que M. et Mme Y, qui doivent être réputés avoir renoncé à la déduction forfaitaire de 10 % pour 1999 et 2000 comme le soutient l'administration fiscale, sont fondés à demander la réduction de leur base imposable pour un montant égal à la différence entre la déduction forfaitaire de 3 018 euros et 1 524 euros déjà pratiquée au titre des années 1999 et 2000, telle qu'elle résulte des avis d'imposition du 30 septembre 2003, et les sommes de 7 685 euros et 3 748 euros qu'ils étaient susceptibles de déduire au titre des frais réels ; que cette différence s'élève à 4 667 euros pour l'année 1999 et à 2 224 euros pour l'année 2000 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme Y sont fondés à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à la réduction de leur base imposable à l'impôt sur le revenu pour un montant de 4 667 euros au titre de l'année 1999 et 2 224 euros au titre de l'année 2000 ; que le surplus de leurs conclusions doit, en revanche, être rejeté ;

Sur les intérêts moratoires :

Considérant qu'en l'absence de litige né et actuel relatif à un refus de paiement des intérêts moratoires, les conclusions de M. et Mme Y tendant au paiement de tels intérêts ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie principalement perdante, les sommes au demeurant non chiffrées sollicitées par M. et Mme Y au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les revenus imposables de M. et Mme Y dans la catégorie des traitements et salaires sont diminués de la somme de 4667 euros au titre de l'année 1999 et de 2224 euros au titre de l'année 2000.

Article 2 : M. et Mme Y sont déchargés, en droits et pénalités, de la différence entre l'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 1999 et 2000 et celui résultant de l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le jugement n° 0306945-036946 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 31 mai 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme Y est rejeté.

N° 07VE02234 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE02234
Date de la décision : 30/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Johan MORRI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : SICSIC

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-12-30;07ve02234 ?
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