La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/12/2009 | FRANCE | N°08VE03133

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 29 décembre 2009, 08VE03133


Vu la requête, enregistrée le 5 septembre 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, transmise le 24 septembre 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, et le mémoire complémentaire enregistré le 15 janvier 2009, par lesquels M. Dominique A, demeurant ..., représenté par Me Blanc, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0609339 en date du 4 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune d

e Milon-la-Chapelle a refusé d'abroger l'arrêté en date du 16 mars...

Vu la requête, enregistrée le 5 septembre 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, transmise le 24 septembre 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, et le mémoire complémentaire enregistré le 15 janvier 2009, par lesquels M. Dominique A, demeurant ..., représenté par Me Blanc, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0609339 en date du 4 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Milon-la-Chapelle a refusé d'abroger l'arrêté en date du 16 mars 1974 portant interdiction de la circulation automobile sur le chemin Jean Racine et a refusé de réaliser les travaux de mise en viabilité du chemin pour la circulation automobile, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la commune d'abroger cet arrêté et de réaliser les travaux de remise en état et, enfin, à ce que la commune soit condamnée à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice, majorée des intérêts légaux à compter du 13 juin 2006 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision précitée ainsi que l'arrêté du 16 mars 1974 ;

3°) d'enjoindre à la commune de procéder aux travaux de remise en état du chemin Jean Racine dans un délai de quatre mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de condamner la commune à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice, majorée des intérêts légaux à compter du 13 juin 2006 ;

5°) de mettre à la charge de la commune le versement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le jugement est irrégulier faute pour le tribunal administratif d'avoir convoqué les parties à l'audience ; que l'interdiction générale et absolue de circuler sur le chemin Jean Racine par l'arrêté du 16 mars 1974 ne répond à aucun motif de sécurité d'une gravité et d'une ampleur telles qu'aucune dérogation ne serait possible à l'égard des riverains ni aucun travail d'aménagement envisageable ; qu'elle n'était pas légalement justifiée par les caractéristiques du chemin et les espaces qu'il traverse alors d'ailleurs que la commune avait toujours admis qu'il avait le droit d'y circuler ; qu'elle porte une atteinte disproportionnée à son droit de propriété en violation de l'article 1er du premier protocole de la convention européenne des droits de l'homme ; que cette interdiction méconnaît le principe d'égalité de traitement avec les usagers de la portion de chemin où la circulation automobile est autorisée ; qu'en application des dispositions des articles L. 161-1 et L. 161-5 du code rural, la commune était tenue d'assurer la remise en état de l'assise du chemin pour permettre à l'ensemble des riverains d'y circuler en voiture ; que l'interdiction édictée par l'arrêté, en enclavant les fonds voisins qui doivent ainsi traverser sa propriété pour accéder chez eux, constitue une faute et génère un préjudice indemnisable ; que la liaison du contentieux n'était pas nécessaire en matière de travaux publics s'agissant de l'absence de réalisation de travaux nécessaires à l'utilisation normale d'un ouvrage public ; qu'en tout état de cause la demande indemnitaire a été formulée avant que le tribunal ne statue ;

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 décembre 2009 :

- le rapport de M. Le Gars, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Kermorgant, rapporteur public,

- les observations de M. A,

- et les observations de Me Le Port, pour la commune de Milon-la-Chapelle ;

Considérant que par arrêté du 16 mars 1974, pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 161-5 du code rural, le maire de la commune de Milon-la-Chapelle a interdit la circulation des véhicules automobiles de toutes catégories et des cyclomoteurs sur la majeure partie du chemin rural Jean Racine ; que, par lettre reçue en mairie le 13 juin 2006, M. A a demandé au maire d'abroger cet arrêté et de faire procéder aux travaux nécessaires pour rendre le chemin accessible à la circulation automobile ; que M. A interjette appel du jugement du Tribunal administratif de Versailles du 4 juillet 2008 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de cette demande d'abrogation de l'arrêté du 16 mars 1974 ainsi que ses conclusions indemnitaires et à fin d'injonction ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 711-2 du code de justice administrative : Toute partie est avertie, par une notification faite conformément aux articles R. 611-3 ou R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience ; qu'aux termes de l'article R. 431-1 du même code : Lorsqu'une partie est représentée devant le tribunal administratif par un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2, les actes de procédure, à l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R. 751-3 et suivants, ne sont accomplis qu'à l'égard de ce mandataire ; qu'il résulte de ces dispositions que l'avis d'audience est régulièrement notifié au seul avocat ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Me Blanc, avocat de M. A, et Me Le Port, avocat de la commune de Milon-la-Chapelle, ont accusé réception respectivement les 29 et 30 mai 2008 des avis les informant de l'audience du 27 juin 2008 du Tribunal administratif de Versailles ; que, par suite et en tout état de cause, le moyen tiré du défaut de convocation des parties à l'audience doit être écarté ;

Au fond :

Sur les conclusions à fin d'annulation et les conclusions à fin d'injonction présentées en première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale, de la police rurale et de l'exécution des actes de l'Etat qui y sont relatifs. ; que l'article L. 161- 1 du code rural dispose que : Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune. ; qu'aux termes de l'article L. 161-5 du même code : L'autorité municipale est chargée de la police et de la conservation des chemins ruraux. ; que l'article D. 161-10 du même code dispose que : Dans le cadre des pouvoirs de police prévus à l'article L. 161-5, le maire peut, d'une manière temporaire ou permanente, interdire l'usage de tout ou partie du réseau des chemins ruraux aux catégories de véhicules et de matériels dont les caractéristiques sont incompatibles avec la constitution de ces chemins, et notamment avec la résistance et la largeur de la chaussée ou des ouvrages d'art. ;

Considérant, d'une part, qu'il est constant que le chemin Jean Racine a le caractère de chemin rural au sens de l'article L. 161-1 précité du code rural ; que l'arrêté du 16 mars 1974, pris sur le fondement de l'article 64 du code rural alors en vigueur, devenu l'article L. 161-5 du code rural, constate que le chemin dont s'agit est aménagé en voie piéton et que la circulation des véhicules automobiles et des cyclomoteurs nuit à sa bonne conservation ; qu'il ressort des pièces du dossier que la portion de chemin litigieuse était, à la date de la demande d'abrogation de l'arrêté, impropre à la circulation automobile tant au regard des impératifs de sécurité des automobilistes que de la conservation du chemin lui-même ; que sa destination à l'usage des piétons depuis au moins 1974, qui exclut toute obligation d'entretien à la charge de la commune en vue d'une transformation en voie de circulation, a été renforcée par son inscription au schéma départemental de la randonnée pédestre ; que ce chemin traverse la vallée du Rhodon, site classé, dans un secteur répertorié comme espace naturel de grande sensibilité par le schéma directeur de la haute vallée de Chevreuse et classé en tant qu'espace naturel protégé par le plan d'occupation des sols ; que l'arrêté litigieux édicte une mesure d'interdiction de circulation limitée dans l'espace, pour les véhicules à moteur, et à laquelle il ne saurait être fait grief, du fait de sa nature, de ne pas être également limitée dans le temps ; qu'ainsi, le maire de Milon-la-Chapelle a pu, sans commettre d'erreur de droit au regard des articles L. 161-1 et L. 161-5 du code rural, ni d'erreur de fait, ni d'erreur manifeste d'appréciation, se fonder sur les motifs liés à la nécessité de conservation du caractère particulier du chemin, à la sécurité des usagers et à la sensibilité écologique du site pour refuser l'abrogation sollicitée de l'arrêté du 16 mars 1974 ; que, pour les mêmes motifs, le maire était fondé à ne pas prévoir une dérogation en faveur des propriétaires desservis par ledit chemin qui bénéficient, par ailleurs, d'une servitude légale de passage sur le fonds de M. A ;

Considérant, d'autre part, que la circonstance que l'interdiction de circuler sur la portion litigieuse du chemin rural a pour effet d'enclaver les propriétés des consorts Petit et de Mme B, qui ne formaient qu'un seul tenant avec celle, indivise, de M. A, sur le fonds de laquelle ils détiennent une servitude légale de passage ayant donné lieu à indemnisation judiciaire, est sans influence sur la légalité de la décision du maire de refus d'abroger cet arrêté ; qu'au surplus, il ressort des pièces du dossier que les consorts Petit utilisent le chemin privé de M. A depuis l'acquisition de leur propriété auprès de M. Georges Rouge en 1955, soit antérieurement à l'arrêté en cause, et qu'il en est de même, depuis 1988, de Mme B ;

Considérant, enfin, que si M. A fait valoir que la décision attaquée violerait le principe d'égalité dès lors que l'interdiction de circuler ne concerne qu'une portion du chemin Jean Racine, il ressort des pièces du dossier que si l'autre portion est goudronnée ou empierrée et est ouverte à la circulation automobile, cette dernière portion se situe dans un secteur plus densément urbanisé de la commune et dessert un nombre important d'habitations ; que, par ailleurs, le secteur ainsi desservi ne présente aucun caractère naturel ou écologique spécifique ; que, compte tenu de cette différence de situation, la commune de Milon-la-Chapelle n'a pas méconnu le principe d'égalité en laissant cette dernière portion du chemin ouverte à la circulation et en lui conservant un caractère carrossable ;

Considérant, enfin, que le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnaîtrait les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision implicite du maire de Milon-la-Chapelle refusant l'abrogation de l'arrêté en date du 16 mars 1974 portant interdiction de la circulation automobile sur le chemin Jean Racine ainsi que ses conclusions à fin d'injonction ;

Sur les conclusions à fin d'indemnité :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune n'a pas commis de faute en refusant de lever l'interdiction de la circulation automobile sur le chemin Jean Racine et de réaliser les travaux de mise en viabilité du chemin à cette fin ni, par suite, en refusant de demander une participation aux frais à la commune de Saint-Lambert-des-Bois pour la portion du chemin située sur son territoire ; que, dès lors, M. A n'est en tout état de cause pas fondé à se plaindre de ce que le Tribunal administratif de Versailles a, par le jugement attaqué, rejeté ses conclusions à fin d'indemnité ;

Sur les conclusions à fin d'injonction présentées devant la Cour :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; qu'il suit de là que les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intéressé devant la Cour ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Milon-la-Chapelle, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Milon-la-Chapelle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Il est mis à la charge de M. A le versement à la commune de Milon-la-Chapelle de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

''

''

''

''

N° 08VE03133 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 08VE03133
Date de la décision : 29/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Julien LE GARS
Rapporteur public ?: Mme KERMORGANT
Avocat(s) : LE PORT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2009-12-29;08ve03133 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award