La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2010 | FRANCE | N°08VE02426

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 06 mai 2010, 08VE02426


Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société 2 ACTES, dont le siège social est 16 Place Jacques Brel à Ris-Orangis (91130), par Me Nerrant ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0501983-05011984-0602620 en date du 20 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie

pour les exercices clos en 2000 2001 et 2002, du rappel de taxe sur la val...

Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société 2 ACTES, dont le siège social est 16 Place Jacques Brel à Ris-Orangis (91130), par Me Nerrant ; elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0501983-05011984-0602620 en date du 20 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie pour les exercices clos en 2000 2001 et 2002, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé au titre de la période du 1er septembre 1999 au 31 août 2002 et de l'amende régie par l'article 1763 A du code général des impôts qui lui a été appliquée ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Elle soutient que les redressements afférents aux amortissements non admis en déduction, aux recettes encaissées non déclarées sur les comptes bancaires, à la taxe sur la valeur ajoutée sur les recettes encaissées et non comptabilisées et aux crédits sur compte courant non justifiés sont imprécis ; que l'origine des montants n'est pas indiquée ; que les modalités de détermination des montants de taxe sur la valeur ajoutée ne sont pas précisées ce qui méconnaît les dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ; que les tableaux communiqués dans la notification de redressement par l'administration fiscale sont trop complexes ; qu'ainsi elle n'a pas été mise en mesure de présenter utilement ses observations ; que l'administration n'a pas respecté les dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ; qu'elle n'a pas saisi du litige la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que les droits de la défense ont été méconnus tant en application de la loi que de la constitution et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'avis de mise en recouvrement daté du 11 mars 2004 ne répond pas aux prescriptions de l'article R* 256-1 du livre des procédures fiscales ; que les redressements ne sont pas fondés en droit puisque les amortissements en litige ont été inscrits dans la comptabilité de l'entreprise dans les écritures d'inventaire avec les tableaux prévus ; que s'agissant des charges qui ont été rejetées pour défaut de justificatifs il s'agit pourtant de prestations de secrétariat facturées auxquelles sont joints les bulletins de salaires de la salariée ; que les sommes portées sur son compte bancaire au crédit du Nord n'étaient pas des recettes non déclarées mais résultaient de portage effectué pour le compte d'un client ; qu'en ce qui concerne le redressement sur le profit à la taxe sur la valeur ajoutée il sera abandonné si les redressements sont abandonnés ; que s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée non déclarée sur l'exercice clos en 2002 le chiffre d'affaires émis par la société est bien inférieur aux sommes encaissées ; que la décharge des impositions implique celle des pénalités ; que les intérêts de retard constituent une réelle sanction et que les taux pratiqués sur les marchés financiers sont inférieurs de moitié ; qu'ils doivent être motivés ; que selon les critères dégagés par la cour européenne de sauvegarde des droits de l'homme le taux d'intérêt fixé à l'article 1727 du code général des impôts se présente comme une sanction pénale ; que l'intérêt de retard de 9 % pratiqué par l'administration est manifestement excessif ; que l'article 19 de la loi de finances pour 2006 prévoit l'alignement du taux de l'intérêt de retard et des intérêts de retard au taux unique de 0,40 % par mois soit 4,80 % par an ; que, dès lors, le contribuable, en application de la loi récente plus douce, est fondé à demander à ce que les intérêts qui lui sont appliqués soient diminués d'autant ;

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Constitution ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 :

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2010 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Dhers, rapporteur public ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision du 12 janvier 2009, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Paris-Centre a prononcé le dégrèvement de l'amende fiscale prévue à l'article 1763 A du code général des impôts à concurrence d'une somme de 163 756 euros ; qu'ainsi, les conclusions de la requête de la SARL 2 ACTES sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination. ;

Considérant que la SARL 2 ACTES, qui n'a pas déposé dans le délai légal sa déclaration de résultats au titre des années 2000, 2001 et 2002, ni régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure, s'est placée en situation de taxation d'office, en application de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, la régularité de la motivation de la notification de redressement, qui lui a été adressée le 15 décembre 2003 au titre de ces années, doit être appréciée au regard des seules dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ; qu'il ressort de ses énonciations que ladite notification mentionne les bases d'imposition et les modalités de leur détermination, et répond ainsi aux prescriptions de cet article ; que, par suite, le moyen de la SARL 2 ACTES tiré de l'irrégularité de la notification de redressement doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que dès lors que les redressements en litige lui ont été notifiés le 15 décembre 2003, soit antérieurement à l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 114 de la loi de finances pour 2004 du 30 décembre 2003, qui a étendu l'application de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales aux cas dans lesquels l'administration utilise la procédure d'imposition d'office, la société ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions ; que la requérante ne peut, non plus, utilement soutenir que les droits de la défense, notamment la possibilité de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, qui sont attachés à la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, auraient été méconnus, dès lors qu'en vertu de l'article L. 56 du même livre, cette procédure n'est pas applicable en cas de taxation ou évaluation d'office des bases d'imposition ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article R* 256 -1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige : L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 du même livre indique pour chaque taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui fait l'objet de cet avis ;

Considérant qu'il ressort de ses énonciations que l'avis de mise en recouvrement du 11 mars 2004 en litige mentionne la nature de la taxe et des pénalités recouvrées, la période au titre de laquelle porte le redressement et le montant total des droits et pénalités ; que s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration fiscale n'était pas tenue de préciser la base légale des redressements de manière plus précise que par un renvoi aux articles 256 et suivants du code général des impôts, dès lors que la notification de redressement permettait au contribuable d'identifier précisément l'activité faisant l'objet de la taxation ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que les impositions ayant été établies d'office la charge de la preuve incombe à la contribuable qui en demande la décharge, en application de l'article L.193 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant notamment : (...) 2° les amortissements réellement effectués par l'entreprise (...). ;

Considérant que, s'agissant des amortissements non admis en déduction, si la requérante fait valoir que son livre d'inventaire portait mention des amortissements en litige il résulte de l'instruction et notamment du procès verbal établi par la vérificatrice le 4 décembre 2003 pour défaut de présentation de la comptabilité que le livre d'inventaire, qui ne comportait aucune mention n'était pas tenu par la gérante, aucune écriture n'y étant recueillie ; que la société a déposé ses déclarations de résultats hors délai pour les trois années vérifiées et n'a donc pu inscrire ces écritures d'amortissements à son inventaire avant l'expiration du délai de dépôt de ses déclarations ; que, dès lors, les amortissements en litige doivent être regardés comme n'ayant pas été réellement effectués au sens des dispositions précitées de l'article 39 du code ; que c'est donc à bon droit que l'administration les a réintégrés dans les bénéfices imposables de la société 2 ACTES ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en l'absence de justifications suffisamment probantes, tels que bulletins de paie, de la réalité et du montant des charges correspondant à la mise à disposition d'un personnel de secrétariat, celles-ci ne peuvent être admises en déduction des résultats imposables de la société ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il y lieu d'adopter la motivation circonstanciée par laquelle le Tribunal administratif a écarté le moyen de la société 2 ACTES dirigé contre la réintégration dans ses recettes imposables d'encaissements apparaissant sur ses comptes bancaires ainsi que ceux relatifs à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur les intérêts de retard :

Considérant que, dans sa rédaction issue de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987, l'article 1727 du code général des impôts dispose que : Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions. Cet intérêt n'est pas dû lorsque sont applicables les dispositions de l'article 1732 ou les sanctions prévues aux articles 1791 à 1825 F. / Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 p. 100 par mois. Il s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé. ;

Considérant, en premier lieu, que l'intérêt de retard institué par ces dispositions vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; qu'en outre il est dû de plein droit et n'implique aucune appréciation par l'administration fiscale du comportement du contribuable ; que dès lors que l'intérêt de retard n'a pas le caractère d'une sanction il n'est pas soumis à l'obligation de motivation ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 207 du livre des procédures fiscales : Lorsqu'une réclamation contentieuse est admise en totalité ou en partie, le contribuable ne peut prétendre à des dommages-intérêts ou à des indemnités quelconques, à l'exception des intérêts moratoires prévus par l'article L. 208. ; qu'aux termes de l'article L. 208 du même code : Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. (...) ; et qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lequel doit, en vertu de l'article 5 du même protocole, être regardé comme un article additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. ; qu'aux termes de l'article 14 de la même convention : La jouissance des droits et libertés reconnus par la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. ;

Considérant que si les stipulations combinées des articles précités de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de son premier protocole additionnel peuvent être utilement invoquées pour soutenir que la loi fiscale serait à l'origine de discriminations injustifiées entre contribuables, elles sont en revanche sans portée dans les rapports institués entre la puissance publique et un contribuable à l'occasion de l'établissement et du recouvrement de l'impôt ; que dès lors, le moyen tiré de l'existence d'une différence de taux entre, d'une part, l'intérêt de retard institué par l'article 1727 du code général des impôts et, d'autre part, les intérêts moratoires mentionnés aux articles L. 207 et L. 208 du livre des procédures fiscales n'est pas susceptible d'être accueilli ;

Considérant, enfin, que la SARL 2 ACTES ne peut utilement invoquer le bénéfice de la loi pénale plus douce au motif que l'article 1727 du code général des impôts a été modifié à compter du 1er janvier 2006 pour ramener le taux de l'intérêt de retard de 9 % à 4,80 %, dès lors que l'intérêt de retard n'a pas le caractère d'une sanction ou d'une accusation en matière pénale ; que, par suite, la demande de la SARL 2 ACTES tendant à l'application rétroactive de l'article 29 de la loi de finances pour 2006 ne peut qu'être rejetée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL 2 ACTES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que l'Etat n'étant pas, en l'espèce, la partie perdante il ne peut être fait droit aux conclusions de la requête tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 163 756 euros en ce qui concerne l'amende fiscale réclamée à la société 2 ACTES, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société 2 ACTES est rejeté.

''

''

''

''

N° 08VE02426 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 08VE02426
Date de la décision : 06/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GAILLETON
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: M. DHERS
Avocat(s) : SELARL DUBAULT-BIRI et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-05-06;08ve02426 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award