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01/06/2010 | FRANCE | N°09VE01105

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 01 juin 2010, 09VE01105


Vu l'ordonnance du 12 mars 2009 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles, en application du 1er er alinéa de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, la requête présentée par M. A ;

Vu la requête, enregistrée le 2 mars 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris et le 2 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Antoine A, demeurant ..., par Me Gaspard ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 030

4021 en date du 18 novembre 2008 du Tribunal administratif de Cergy-Pont...

Vu l'ordonnance du 12 mars 2009 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles, en application du 1er er alinéa de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, la requête présentée par M. A ;

Vu la requête, enregistrée le 2 mars 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris et le 2 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Antoine A, demeurant ..., par Me Gaspard ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304021 en date du 18 novembre 2008 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1993 à 1995 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le redressement est insuffisamment motivé s'agissant des contributions sociales de l'année 1993, qui auraient dû faire l'objet d'une motivation distincte ; que la prolongation de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle d'une durée de 30 jours au titre de l'année 1994 était irrégulière, dans la mesure où M. A avait suffisamment répondu aux demandes de l'administration sur l'origine d'un crédit bancaire et l'existence d'un prêt ; que l'article L. 12 du livre des procédures fiscales a ainsi été méconnu ; que la notification de redressements et la réponse aux observations du contribuable étaient insuffisamment motivées s'agissant des revenus distribués correspondant à la remise en cause de la déductibilité de frais de réception du résultat de la société Energy Supply ; que le redressement n'était pas fondé, dans la mesure où l'administration ne pouvait reprocher au contribuable l'insuffisance des justifications apportée par la société Energy Supply, qui a, au demeurant, justifié que ces frais étaient exposés dans l'intérêt de l'entreprise ; que le redressement était insuffisamment motivé sur les frais de séjour d'agrément ; qu'il n'est pas démontré que M. A était le bénéficiaire des distributions ; que le redressement n'est pas justifié s'agissant des revenus distribués liés aux frais de téléphone, qui ont été exposés depuis un domicile privé mais à des fins professionnelles ; que le redressement concernant la pension alimentaire versée à la mère du contribuable n'est pas davantage fondé, dans la mesure où l'attestation produite est suffisamment probante pour démontrer l'absence de ressource de cet ascendant ;

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mai 2010 :

- le rapport de M. Morri, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision du 15 octobre 2009, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France Est a prononcé le dégrèvement de la somme de 463 euros au titre des contributions sociales de l'année 1993 ; que les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité des impositions contestées :

S'agissant de la prolongation de l'examen de situation fiscale personnelle :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la date des impositions en litige : L'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues au présent livre. (...) Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. Cette période est prorogée du délai accordé, le cas échéant, au contribuable et, à la demande de celui-ci, pour répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications pour la partie qui excède les deux mois prévus à l'article L. 16 A. Elle est également prorogée des trente jours prévus à l'article L. 16 A (...) et qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui a adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'examen de situation fiscale personnelle de M. A a débuté le 27 juin 1996, et que le délai d'un an prévu par les dispositions précitées expirait au plus tard le 27 juin 1997 ; que, toutefois, l'administration, qui avait sollicité le 7 mars 1997, en application de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, des éclaircissements sur l'origine de certains crédits bancaires, a adressé le 3 juin 2007 à M. A une mise en demeure de compléter, dans un délai de trente jours, la réponse apportée le 22 mai 1997 sur l'origine d'un crédit bancaire de 1 922 francs et sur un prêt qui aurait été consenti au contribuable pour un montant de 200 000 F ; qu'en estimant, qu'à défaut de date de certaine du contrat de prêt qui avait été produit par M. A au soutien de sa réponse, elle devait mettre en demeure le contribuable de justifier de l'enregistrement du prêt ou d'un commencement de remboursement, l'administration s'est bornée à faire application des garanties de l'article L. 16 A précité ; qu'elle n'a commis aucun détournement de procédure destiné à méconnaître la garantie de durée instituée par l'article L. 12 précité et que la durée de l'examen de situation fiscale personnelle a été régulièrement prorogée de trente jours, alors même que le contribuable n'avait par ailleurs apporté aucun début de réponse concernant le crédit de 1 922 francs ; qu'ainsi le délai ayant été régulièrement prorogé jusqu'au 27 juillet 1997, M. A n'est pas fondé à soutenir que la notification de redressements du 23 juillet 1997 a méconnu le délai de l'article L. 12 précité ;

S'agissant de la motivation de la notification de redressements et de la réponse aux observations du contribuable :

Considérant que dans le cadre de la procédure contradictoire de redressement de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, une notification de redressements est suffisamment motivée dès lors qu'elle indique clairement la nature des redressements envisagés, le montant de ces redressements par catégorie de revenus et par chef de redressement, l'impôt et l'année d'imposition, pour permettre au contribuable d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations ;

Considérant, d'une part, que contrairement à ce que soutient M. A, la seule circonstance que l'administration ait retenu, s'agissant des revenus distribués issus de la réintégration de frais de réception dans le résultat imposable de la société Energy Supply, une quote-part forfaitaire de 50 % des frais en cause, sans indiquer les raisons qui avaient permis de déterminer ce taux ou n'ait pas indiqué, dépense par dépense, celles qui pouvaient être admises en déduction à raison de leur caractère professionnel, ne privait pas le contribuable de la possibilité de présenter utilement ses observations ; que, pour le reste, il résulte de l'instruction que la notification de redressements qui indique de façon précise et détaillée la raison pour laquelle le caractère professionnel d'une partie des frais de réception n'a pas été justifié par la société, était suffisamment motivée ; qu'il en allait de même de la réponse aux observations du contribuable, qui répondait de façon circonstanciée aux arguments du contribuable sur ce chef de redressement et en particulier sur l'argument selon lequel les conditions de son activité l'auraient conduit à recevoir des clients en fin de semaine ;

Considérant, d'autre part, qu'en indiquant que la société Energy Supply avait pris en charge des séjours d'agrément de M. A, par définition dépourvus de caractère professionnel, et en détaillant précisément le lieu et la date des séjours dont elle a remis en cause la prise en charge par la société, l'administration a suffisamment motivé sa notification de redressements sur ce point ; que M. A n'est, par suite, pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 57 précité du livre des procédures fiscales ont été méconnues ;

S'agissant de la détermination du bénéficiaire des distributions :

Considérant que contrairement à ce que soutient M. A, il résulte des dispositions de l'article 117 du code général des impôts que si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard de la personne physique qui a bénéficié de la distribution et que l'administration, compte tenu des renseignements dont elle dispose, est en mesure d'identifier ;

Sur le bien-fondé des impositions contestées :

S'agissant des bénéfices réputés distribués :

Considérant qu'aux termes du 1. de l'article 109 du code général des impôts : Sont considérés comme des revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; qu'il appartient à l'administration, qui supporte la charge de la preuve dans le cadre de la procédure contradictoire, de démontrer l'existence, le montant et l'appréhension des revenus distribués taxés entre les mains du contribuable ;

Considérant, en premier lieu, qu'en relevant qu'une grande partie des frais de réception de M. A pris en charge par la société Energy Supply, correspondant à des repas pris seul ou lors de dimanches ou de jours fériés, dans des établissement situés dans lieux ou destinations touristiques, et sans justification du caractère professionnel et en estimant qu'une quote-part de 50 % de ces frais, remboursés à M. A, devait être regardée comme non engagée dans l'intérêt de l'entreprise, l'administration a démontré l'existence, le montant et l'appréhension par M. A des sommes en cause ; que si le contribuable fait valoir qu'il est exclusivement en relations d'affaires avec des clients originaires du Liban ou d'Arabie Saoudite, pour lesquels le samedi et le dimanche sont des jours travaillés, cette circonstance ne dispensait pas la société de démontrer, par la production de justificatifs, le caractère professionnel des repas et réceptions en cause ; que le fait que l'administration, ait admis de façon forfaitaire et par souci de réalisme économique, la déductibilité d'une partie de ces frais, ne remet pas davantage en cause le bien-fondé de la taxation des revenus non compris dans cette quote-part ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'administration a relevé que la société Energy Supply avait pris en charge des séjours dans différentes destinations touristiques, au nombre desquels figuraient notamment un séjour de thalassothérapie et des séjours à Deauville et à Venise, sans que le caractère professionnel de ces déplacement ne soit assorti de justificatifs ; qu'elle a ainsi démontré l'existence et le montant de distributions ; que, par ailleurs, la mention dans la comptabilité des initiales AS pour désigner le bénéficiaire des voyages en cause, dont il n'est pas allégué qu'elle pouvait correspondre à un autre dirigeant, associé ou salarié de l'entreprise, suffisait à démontrer que M. A avait, à ce titre, appréhendé les distributions litigieuses ;

Considérant, en troisième lieu, que l'administration a relevé que la prise en charge des frais téléphoniques de M. A par la société Energy Supply n'était pas assortie de justifications démontrant que ces dépenses avaient été exposées dans l'intérêt de la société ; que si M. A soutient qu'une partie au moins des communications téléphoniques effectuées depuis son domicile avaient un caractère professionnel à raison de la nécessité d'entrer en communication avec des clients résidant au Liban et en Arabie Saoudite les samedis et dimanche, il ne l'établit pas ; qu'ainsi, l'administration doit là encore être regardée comme ayant apporté la preuve de l'existence, du montant et de l'appréhension des distributions en cause ;

S'agissant de la pension alimentaire :

Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en litige : L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : II. Des charges ci-après lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories : (...) 2° (...) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 et 367 du code civil ; que l'article 205 du code civil dispose que : Les enfants doivent des aliments à leur père et mère et autres ascendants qui sont dans le besoin et qu'aux termes de l'article 208 du même code : Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame ;

Considérant que M. A a versé à sa mère, Mme Renée Saade demeurant au Liban une somme annuelle de 78 000 francs en 1993, 1994 et 1995 ; que, contrairement à ce que soutient l'administration, le lien de filiation entre le contribuable et Mme Saade est établi par les documents produits et en particulier le certificat de naissance du requérant ; qu'il résulte des termes de l'attestation établie par le maire de la commune de résidence de cette dernière le 5 février 1995 et d'une attestation établie par le consulat du Liban en France le 10 mars 2010, et confirmant l'authenticité et l'exactitude du premier document, que les parents de M. A sont sans ressources et à la charge exclusive de leurs fils ; que, contrairement à ce que soutient l'administration, la seule circonstance que cette attestation serait postérieure aux faits en litige, ne suffit pas à en écarter la valeur probante, dès lors qu'elle a été confirmée par les services consulaires du Liban en France, lesquels ont également indiqué que l'établissement de ce type d'attestations relevait des attributions du maire ; qu'ainsi, M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que la déduction des sommes correspondantes a été refusée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions résultant du refus de déduction de son revenu imposable de la pension alimentaire versée à sa mère en 1993, 1994 et 1995 pour un montant de 78 000 F (11 891 euros) par an ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'eu égard aux montants respectifs des dégrèvements prononcés et des sommes en litige, l'Etat ne peut être regardé, en appel, comme la partie principalement perdante ; qu'ainsi, les conclusions de M. A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y pas lieu de statuer sur la requête de M. A s'agissant des contributions sociales de l'année 1993.

Article 2 : M. A est déchargé des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1993, 1994 et 1995 à raison de la réintégration dans ses bases d'imposition de la pension alimentaire versée à ses parents.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 18 novembre 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 09VE01105 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 09VE01105
Date de la décision : 01/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Johan MORRI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : CABINET 2CFR-CABINET CONSEILS FISCAUX REUNIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-06-01;09ve01105 ?
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