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14/10/2010 | FRANCE | N°07VE01758

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 14 octobre 2010, 07VE01758


Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2007, présentée pour la société GROUPE VOISIN, venant aux droits de la société Lemaire parcs et jardins, dont le siège est au 5-7 Grande Rue à Limours (91470), par Me Bouillot ; la société GROUPE VOISIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304857 en date du 7 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire en date du 10 octobre 2002 d'un montant de 28 000 euros émis à son encontre par l'office public intercommunal d'habitations à loye

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Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2007, présentée pour la société GROUPE VOISIN, venant aux droits de la société Lemaire parcs et jardins, dont le siège est au 5-7 Grande Rue à Limours (91470), par Me Bouillot ; la société GROUPE VOISIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304857 en date du 7 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire en date du 10 octobre 2002 d'un montant de 28 000 euros émis à son encontre par l'office public intercommunal d'habitations à loyer modéré d'Argenteuil-Bezons pour avoir paiement de pénalités afférentes à cinq marchés d'entretien des espaces verts du parc immobilier de l'office ;

2°) d'annuler le titre exécutoire susvisé et de condamner l'office à lui verser la somme de 28 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 septembre 2003 et de la capitalisation des intérêts, ainsi qu'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

3°) de mettre à la charge de l'office une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la société Lemaire parcs et jardins s'est vu confier par l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons divers travaux d'entretien d'espaces verts et a, pendant plus de six mois, effectué les prestations convenues sans recevoir de commentaires de l'office, avant que celui-ci ne lui envoie, le 5 septembre 2002, une lettre recommandée lui notifiant, au titre de l'article 4-4-1 du cahier des clauses particulières des marchés, des pénalités d'un montant de 28 000 € pour prestations non exécutées, puis que l'office émette un titre exécutoire de ce même montant en octobre 2002 ; que, par un courrier du 12 décembre 2002, la société Lemaire parcs et jardins a mis en demeure l'office de lui régler la somme de 28 000 €, mais cette demande a été rejetée par courrier du 30 décembre 2002 ; qu'à défaut de mise en demeure préalable, les pénalités sont illégales dès lors que, d'une part, l'article 4-4-1 du cahier des clauses particulières, qui déroge dans son intégralité aux dispositions de l'article 11 du cahier des clauses administratives générales relatives aux pénalités pour retard, ne prévoit pas de dispense au principe général relatif à l'obligation de mise en demeure préalable et que, d'autre part, le courrier de l'OPHLM du 5 septembre 2002 ne saurait être qualifié de mise en demeure préalable ; que les pénalités sont illégales à défaut d'établissement d'un calendrier d'intervention préalable tel que prévu à l'article 4-4-2 du cahier des clauses particulières ; qu'elles sont également illégales faute de preuves, au sens de l'article 4-4-1 de ce cahier, de la prétendue inexécution, par la société, de ses obligations contractuelles ; qu'ainsi, alors que le courrier du 28 juin 2002 de la société Lemaire parcs et jardins fait état d'un simple retard dans les tontes et non d'inexécution des prestations, l'OPHLM ne produit ni les constats ni d'autres preuves visées à l'article 4-4-1 du cahier des clauses particulières et se borne à produire des documents dépourvus de valeur probante ; que la compensation opérée par la trésorerie d'Argenteuil HLM est nulle, car la dette invoquée par l'office n'est ni certaine, ni liquide, ni exigible ; qu'ainsi, la société est fondée à demander à la Cour de condamner l'office à lui verser la somme de 28 000 € au titre du règlement des mandats numéros 4721/2002, 4722/2002, 4865/2002, 4866/2002, 4867/2002, 4868/2002 et 4869/2002 impayés par l'office, augmentée des intérêts de droit capitalisés ; que, compte tenu du mauvais vouloir de l'OPHLM, la société est fondée à demander la somme de 5 000 €, à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 septembre 2010 :

- le rapport de Mme Vinot, président assesseur,

- et les conclusions de M. Davesne, rapporteur public ;

Considérant que l'office public intercommunal d'habitations à loyer modéré (OPHLM) d'Argenteuil-Bezons a conclu en 2002 avec l'entreprise Lemaire parcs et jardins, aux droits et obligations de laquelle vient la société GROUPE VOISIN, cinq marchés d'entretien des espaces verts du patrimoine immobilier dont l'office a la gestion ; que l'office a infligé à l'entreprise des pénalités pour inexécution partielle des prestations de tonte de gazon d'un montant de 28 000 euros ; que la société GROUPE VOISIN fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces pénalités ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation du titre exécutoire émis le 10 octobre 2002 par l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons :

Considérant, en premier lieu, que l'article 4 du cahier des clauses particulières de chacun des marchés en cause qui, en vertu de l'article 10.1 du même cahier déroge à l'article 10 et 11 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de fournitures courantes et de services en ce qui concerne les délais d'exécution et la prolongation des délais d'exécution et les pénalités , stipule en son alinéa 4.4.1, relatif aux Pénalités pour retard : (...) une pénalité sera appliquée à chaque fois qu'une prestation ne sera pas exécutée, selon le tableau ci-après : tonte : 800 € (...) Le constat en sera fait par le gardien de l'immeuble, qui précisera la nature de la prestation non réalisée ou non réceptionnable en l'état, sur la feuille d'attachement ou par tout moyen . ; qu'eu égard à ces stipulations, qui soumettent l'application de la pénalité de 800 euros à la seule circonstance qu'une tonte prévue par le marché n'a pas été exécutée, les parties doivent être regardées comme ayant entendu déroger au principe selon lequel des pénalités ne peuvent être infligées en l'absence de mise en demeure préalable ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de mise en demeure préalable doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 4.1 du cahier des clauses particulières de chacun des marchés en cause : Le titulaire établira le calendrier d'intervention avant le commencement d'exécution du marché. Il fera approuver ce calendrier par les services techniques de l'office. / En cas de non respect du calendrier, il encourt les pénalités prévues à l'article 4.4.1 ci-après ; que la société GROUPE VOISIN fait valoir l'absence de calendrier établi et approuvé conformément auxdites stipulations ; que, cependant, eu égard au calendrier suffisamment précis fixé à l'article 1-1-2 des cahiers des clauses particulières applicables, qui stipule que chacune des pelouses des cités concernées par les marchés en cause fera l'objet d'une tonte mensuelle en mars et avril, de deux tontes mensuelles en mai et juin puis à nouveau d'une tonte mensuelle de juillet à novembre inclus, et alors, au surplus, qu'il ne résulte pas de l'instruction et n'est d'ailleurs pas allégué que l'absence de calendrier établi et approuvé conformément aux stipulations précitées serait imputable à l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons, le moyen tiré de ce que le prestataire n'aurait pas été mis à même de connaître l'étendue des obligations issues de son contrat ne peut être accueilli ;

Considérant, en troisième lieu, que la société GROUPE VOISIN conteste le bien-fondé des pénalités que l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons a infligées à la société Lemaire parcs et jardins pour un montant de 28 000 €, et soutient que la totalité des tontes prévues par le marché ont été exécutées ; que, pour justifier du bien-fondé de ces pénalités, l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons soutient que l'entreprise Lemaire parcs et jardins a omis d'exécuter trente-cinq des tontes qui étaient prévues par les marchés, soit, à Argenteuil, cinq tontes dans la cité Bellevue, trois tontes dans la cité Roussillon et trois dans la cité Morinval, à Montigny-lès-Cormeilles, trois tontes dans la cité des Fossettes, trois tontes aux Grouettes-Maréeux et six dans la cité La Croix Blanche, à Bezons, quatre tontes dans la cité des Lilas, trois tontes dans la cité des Sycomores et cinq dans la cité Joliot-Curie ; que la société GROUPE VOISIN conteste la valeur probante des pièces produites par l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons à l'appui de cette allégation ;

Considérant qu'eu égard aux termes du courrier du 28 juin 2002 par lequel l'entreprise Lemaire parcs et jardins a présenté ses excuses à l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons pour le retard pris dans l'exécution de certaines prestations, concernant plus particulièrement les tontes, et de celui du 9 décembre 2002 par lequel le responsable des charges locatives au sein de l'amicale des locataires des HLM s'est plaint de problèmes dans l'entretien des espaces verts de la cité des Sycomores, dont les allégations qu'il comporte ne sont pas sérieusement contestées par la société GROUPE VOISIN, l'office établit suffisamment l'inexécution des trois tontes dans la résidence des Sycomores à raison desquelles il a appliqué des pénalités pour un montant de 2 400 (3 x 800) euros ; que, par ailleurs, compte tenu de la concordance suffisante entre les notes internes à l'OPHLM faisant état de difficultés dans l'exécution des prestations dans les cités des Lilas et de Joliot-Curie, outre celle des Sycomores, et le courrier du 28 juin 2002 précité de l'entreprise Lemaire parcs et jardins mais, toutefois, de ce que l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons n'apporte aucun commencement de preuve de ce que les problèmes rencontrés à Bezons auraient été plus aigus dans les cités Lilas et Joliot-Curie qu'aux Sycomores, l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons doit être regardé comme établissant l'inexécution de trois tontes dans les cités des Lilas et de Joliot-Curie et, par suite, le bien-fondé des pénalités appliquées au titre de ces cités à concurrence de 4 800 euros (2 x 3 x 800) ; qu'enfin, eu égard aux termes du courrier du 21 janvier 2003 émanant de deux des trois administrateurs représentant des locataires au conseil d'administration de l'office demeurant dans les cités Roussillon et Bordelais à Argenteuil, dont les allégations qu'il comporte ne sont pas sérieusement contestées par la société requérante, l'OPHLM établit suffisamment l'inexécution des trois tontes dans la cité Roussillon et, par suite, le bien-fondé des pénalités appliquées au titre de cette cité, pour un montant de 2 400 (3 x 800) euros ;

Considérant que, s'agissant des vingt-six autres pénalités de 800 euros en litige, l'OPHLM n'apporte pas d'éléments suffisants qui permettraient de tenir pour établie l'allégation selon laquelle chacune des tontes litigieuses n'aurait pas été exécutée selon les règles fixées par le marché ; qu'eu égard aux stipulations précitées de l'article 4.4.1 du cahier des clauses particulières de chacun des marchés en cause, en vertu desquelles il appartient au gardien des immeubles de faire le constat de l'inexécution des prestations prévues par le marché sur la feuille d'attachement ou par tout moyen , l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons ne peut utilement se prévaloir de ce que la société GROUPE VOISIN ne produit pas les attachements relatifs aux tontes litigieuses ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société GROUPE VOISIN est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a refusé de faire droit à sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire en date du 10 octobre 2002 émis à son encontre par l'office, en tant qu'il excède la somme de 9 600 euros, au titre des pénalités afférentes à cinq marchés d'entretien des espaces verts du parc immobilier de l'office et à la condamnation de l'office à lui verser le solde de ces marchés pour un montant de 18 400 euros ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Considérant, d'une part, que la somme susvisée portera intérêts au taux légal à compter du 11 septembre 2003, date de saisine du tribunal administratif ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière ; que la société GROUPE VOISIN a demandé la capitalisation des intérêts le 11 septembre 2003 ; que cette demande prend effet à compter du 12 septembre 2004, date à laquelle, pour la première fois, les intérêts étaient dus pour une année entière, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les intérêts compensatoires pour mauvais vouloir manifeste du débiteur :

Considérant que la société GROUPE VOISIN n'établit pas l'existence d'un mauvais vouloir manifeste du débiteur dans le paiement des sommes dues ; que les conclusions de la société GROUPE VOISIN tendant à la condamnation de l'OPHLM au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre d'intérêts compensatoires, distincts des intérêts moratoires et prévus au dernier alinéa de l'article 1153 du code civil en cas de mauvais vouloir manifeste du débiteur dans le paiement de sommes dues, doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; qu'en application des dispositions précitées, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'OPHLM d'Argenteuil-Bezons à payer à la société GROUPE VOISIN la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 7 juin 2007 est annulé.

Article 2 : Le titre exécutoire du 10 octobre 2002 est annulé en tant qu'il porte sur un montant excédant 9 600 euros.

Article 3 : L'OPHLM d'Argenteuil-Bezons est condamné à payer la somme de 18 400 euros à la société GROUPE VOISIN venant aux droits de la société Lemaire parcs et jardins. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 11 septembre 2003, les intérêts étant capitalisés le 12 septembre 2004 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes des intérêts.

Article 4 : L'OPHLM d'Argenteuil-Bezons versera à la société GROUPE VOISIN une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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N° 07VE01758


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE01758
Date de la décision : 14/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: Mme Hélène VINOT
Rapporteur public ?: M. DAVESNE
Avocat(s) : BOUILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-10-14;07ve01758 ?
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