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18/11/2010 | FRANCE | N°08VE01152

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 18 novembre 2010, 08VE01152


Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SARL LAVALDIERE, dont le siège social est sis 1, rue de Villersexel à Paris (75007), représentée par Me Hemmet, avocat à la Cour ; la SARL LAVALDIERE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500634 du 12 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 1997, ainsi que de la pénal

ité de 80 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts y afférent...

Vu la requête, enregistrée le 23 avril 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SARL LAVALDIERE, dont le siège social est sis 1, rue de Villersexel à Paris (75007), représentée par Me Hemmet, avocat à la Cour ; la SARL LAVALDIERE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500634 du 12 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice 1997, ainsi que de la pénalité de 80 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts y afférente ;

2°) de prononcer la réduction demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 980 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, en premier lieu, que, faute pour l'administration de l'avoir suffisamment informée sur la manière d'obtenir communication des documents obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication et utilisés pour fonder les impositions, la procédure est irrégulière ; que le tribunal administratif n'a pas répondu à ce moyen ; en deuxième lieu, que les impositions ne sont pas fondées ; qu'en application d'un accord qui la liait à la SCI Caplet, elle n'a bénéficié que de 32,50 % de l'indemnité de 2 500 000 francs, soit, déduction faite des honoraires de l'avocat, la somme de 605 203 francs qu'elle a comptabilisée et déclarée ; qu'elle a contracté dans sa comptabilité les flux financiers pour n'y enregistrer que le montant lui revenant définitivement ; que les faits relatifs à la répartition de l'indemnité et l'identité des véritables bénéficiaires de l'opération sont relatés dans l'ordonnance de renvoi du 27 juillet 2007, dont le tribunal administratif n'a pas tenu compte ; enfin, que l'administration n'apporte pas la preuve des éléments constitutifs des manoeuvres frauduleuses par lesquelles l'exposante aurait mis en place un montage juridique impliquant une société établie à Jersey, dont l'existence n'est pas établie, dans le but d'éluder l'impôt ; que l'exposante est étrangère à l'envoi et à l'encaissement des fonds à Jersey comme l'établissent les procès-verbaux de la procédure pénale ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 2010 :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président assesseur,

- et les conclusions de M. Dhers, rapporteur public ;

Considérant que la SARL LAVALDIERE, qui exerce une activité de marchand de biens, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des années 1997 à 1999 ; que, dans le cadre de ce contrôle, l'administration lui a notifié des redressements en matière d'impôt sur les sociétés qui ont consisté, notamment, à réintégrer dans le résultat imposable de l'exercice clos en 1997 la totalité d'une indemnité dont l'intéressée était bénéficiaire en vertu d'un protocole d'accord, conclu le 3 novembre 1997, avec une société tierce en contrepartie du désistement d'une action qu'elle avait introduite devant le Tribunal administratif de Rouen ; que l'administration a assorti les impositions supplémentaires en résultant de pénalités pour manoeuvres frauduleuses ; que la SARL LAVALDIERE fait appel du jugement du 12 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif a répondu au moyen tiré par la requérante de ce qu'elle n'avait pas été informée de la procédure à suivre pour obtenir copie des documents contenant les renseignements obtenus par l'administration auprès de tiers et utilisés pour fonder les impositions litigieuses, moyen qu'il a, au demeurant, rejeté comme inopérant ; qu'il suit de là que la SARL LAVALDIERE n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier en la forme pour ne pas comporter de réponse à ce moyen ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et n'est, d'ailleurs, pas contesté que la SARL LAVALDIERE, informée par l'administration de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle avait obtenus auprès de l'autorité judiciaire et utilisés pour fonder les impositions en litige, n'a pas demandé communication des documents ou copies de documents contenant ces renseignements ; qu'elle ne saurait, dès lors, utilement se prévaloir de la circonstance que l'administration ne lui a pas fait connaître les modalités pratiques de communication de ces documents pour soutenir que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité ;

Considérant, en second lieu, que si, eu égard aux garanties dont le livre des procédures fiscales entoure la mise en oeuvre d'une vérification de comptabilité, l'administration est tenue lorsque, faisant usage de son droit de communication, elle consulte, au cours du contrôle, tout ou partie de la comptabilité tenue par l'entreprise vérifiée mais se trouvant chez un tiers, de soumettre l'examen des pièces obtenues à un débat oral et contradictoire, il en va différemment lorsque les documents qui lui sont communiqués ne présentent pas le caractère de pièces comptables de l'entreprise vérifiée ; qu'il résulte de l'instruction que les pièces consultées par l'administration au cabinet du juge d'instruction près le Tribunal de grande instance de Meaux n'avaient pas le caractère de pièces comptables mais étaient uniquement constituées de procès-verbaux d'audition ; que, par suite, la SARL LAVALDIERE ne peut utilement se prévaloir de l'absence d'un débat oral et contradictoire sur ces documents pour démontrer que la procédure d'imposition suivie à son encontre aurait été irrégulière ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ; qu'il résulte de ces dispositions que la créance acquise sur un tiers par une personne morale passible de l'impôt sur les sociétés doit être rattachée à l'exercice au cours duquel cette créance est devenue certaine dans son principe et son montant ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un protocole d'accord signé le 3 novembre 1997, la SNC Le Havre Centre René Coty s'est engagée à verser à la SARL LAVALDIERE la somme de 2 500 000 francs en réparation du préjudice invoqué par celle-ci du fait de la réalisation d'une opération de construction à proximité d'un bien immobilier sur lequel elle détenait un droit réel, la SARL LAVALDIERE s'engageant, pour sa part, à se désister du recours qu'elle avait formé contre le permis autorisant la construction en litige ; que, selon les termes de cet accord, la SNC Le Havre Centre René Coty a, le même jour, remis à l'avocat de la SARL LAVALDIERE un chèque d'un montant de 2 500 000 francs libellé à l'ordre de la caisse des règlement pécuniaires des avocats (CARPA), à charge pour ce dernier de procéder au règlement de ladite somme entre les mains de la SARL LAVALDIERE au vu de la décision juridictionnelle donnant acte de son désistement ; que le président du Tribunal administratif de Rouen a donné acte du désistement de la requête de la SARL LAVALDIERE par ordonnance du 21 novembre 1997 ; que, bien que cette indemnité constituât ainsi une créance certaine dans son principe comme dans son montant, la SARL LAVALDIERE n'a comptabilisé dans les résultats de l'exercice clos en 1997 qu'une somme de 605 203 F ; que si elle fait valoir qu'en application d'un accord qui la liait à la SCI Caplet, dont les statuts ont été enregistrés à la recette des impôts de Paris 12ème, elle ne devait bénéficier que de 32,50 % de l'indemnité de 2 500 000 francs, soit, déduction faite des honoraires de l'avocat, la somme de 605 203 francs qu'elle a comptabilisée et déclarée, elle ne justifie, en tout état de cause, par aucune pièce et, notamment, pas par l'ordonnance du juge d'instruction en date du 27 juillet 2007 renvoyant devant le tribunal correctionnel différents prévenus de faits d'escroquerie ou de tentative d'escroquerie, dont faisaient partie ses dirigeants de fait, de l'existence d'un tel accord, alors que, par ailleurs, compte tenu tant de leurs montants que de leurs bénéficiaires, les mouvements financiers relevés par l'administration sur le compte séquestre de la CARPA et sur le compte bancaire de la requérante, ne corroborent pas cette allégation ; qu'il suit de là que l'administration a, à bon droit, réintégré la somme de 1 894 797 francs dans le résultat imposable de la SARL LAVALDIERE au titre de l'exercice 1997 ;

Sur les pénalités pour manoeuvres frauduleuses :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts: 1-Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 % s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que l'administration soutient que la SARL LAVALDIERE a délibérément omis de déclarer l'indemnité taxable et mis en place un montage, incluant une société domiciliée dans un pays à fiscalité privilégiée, dans le but d'éluder l'impôt et d'égarer le contrôle fiscal ; qu'elle fait valoir, à cet égard, que la SARL LAVALDIERE a demandé, le 7 novembre 1997, à son conseil d'établir un chèque 1 250 000 F à partir du compte séquestre CARPA, sur lequel avait été créditée, le 3 novembre précédent, l'indemnité de 2 500 000 francs, à l'ordre d'une société située à Jersey, dont la SARL LAVALDIERE était co-gérante ; qu'elle ajoute que l'indemnité n'a été inscrite dans la comptabilité de la contribuable que pour un montant de 1 000 000 F, son compte bancaire n'ayant été crédité que de ce seul montant, et que le vérificateur n'a eu connaissance de la situation réelle qu'en usant de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire ; que, contrairement à ce qu'allègue la requérante, aucune mention du jugement du Tribunal de grande instance de Meaux du 3 avril 2008 n'est susceptible d'établir qu'elle aurait été étrangère à ce montage et que, comme elle le soutient, elle aurait été abusée par des tiers ; qu'il suit de là que l'administration démontre que, dans les conditions de l'affaire, la requérante s'est effectivement rendue coupable de manoeuvres frauduleuses ; que, par suite, l'administration a fait une exacte application des dispositions précitées de l'article 1729-1 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL LAVALDIERE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la SARL LAVALDIERE et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de la SARL LAVALDIERE est rejetée.

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N° 08VE01152


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 08VE01152
Date de la décision : 18/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Corinne SIGNERIN-ICRE
Rapporteur public ?: M. DHERS
Avocat(s) : HEMMET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-11-18;08ve01152 ?
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