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29/11/2011 | FRANCE | N°10VE00864

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 29 novembre 2011, 10VE00864


Vu, I, la requête, enregistrée le 18 mars 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, sous le n° 10VE00864, présentée pour Mme Valérie A, demeurant ..., par Me Di Dio, avocat à la Cour ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503676, 0602170 en date du 19 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000, à raison de l'exploitation d'u

ne discothèque à Montreuil ;

2°) de prononcer la décharge des sommes re...

Vu, I, la requête, enregistrée le 18 mars 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, sous le n° 10VE00864, présentée pour Mme Valérie A, demeurant ..., par Me Di Dio, avocat à la Cour ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503676, 0602170 en date du 19 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000, à raison de l'exploitation d'une discothèque à Montreuil ;

2°) de prononcer la décharge des sommes restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'une seule notification de redressements lui a été adressée, à la suite de deux vérifications de comptabilité successives portant respectivement sur la taxe sur la valeur ajoutée et les bénéfices industriels et commerciaux, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales ; qu'en l'absence de tout procès-verbal constatant un défaut de présentation de comptabilité, l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère incomplet ou irrégulier de la comptabilité présentée et que, tant l'article L. 13 du livre des procédures fiscales que l'instruction administrative référencée 13 L-1455 points n°s 24 et 25 du 1er juillet 1989 ont été méconnus ; que le tribunal a omis de se prononcer sur ce moyen ; qu'il résulte de l'article 3 du décret du 29 novembre 1983, du 3° de l'article 286 et de l'article 290 quater du code général des impôts, de l'article 96 B de l'annexe III à ce code et de l'instruction 4 A-1085 du 10 septembre 1985 ainsi que de la jurisprudence, que le tribunal devait inviter l'intéressée à produire les tickets Z ou les bandes de caisse enregistreuse ; que les tarifs transmis sont homogènes s'agissant des consommations vendues et que les précisions sollicitées par le vérificateur n'étaient prévues ni par l'article 96 B de l'annexe III au code général des impôts ni par les instructions 4 A-1085 du 10 septembre 1985 ni par les instructions 3 E-5-81 du 4 mars 1981 et 3 E-1427 point n° 66 du 2 novembre 1996 ; que l'obligation de conserver les rouleaux de caisse pendant six ans n'est pas imposée en cas d'émission de tickets Z numérotés, ainsi qu'il résulte de la mission d'organisation administrative du comité fiscal du 10 mai 1979 ; que le détail des recettes par tarif a été présenté ; que la méthode de comptabilisation des consommations de boissons était conforme aux prescriptions de la loi comptable ; que les erreurs d'inventaire sont marginales et qu'une erreur dans la valorisation du stock ne peut conduire à elle seule à la remise en cause de l'ensemble de la comptabilité ; que le tribunal a fait, à tort, un amalgame entre le taux de bénéfice brut et le coefficient multiplicateur ; que le calcul du coefficient global de l'entreprise n'est pas précisé ; que l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas retenu le rejet de la comptabilité préconisé par l'administration fiscale et a considéré, par voie de conséquence, que la reconstitution des recettes devenait sans objet ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des irrégularités qu'elle invoque et du bien-fondé des redressements ; qu'un taux minimum de 5 % aurait dû être retenu s'agissant des pertes, de la casse et des sur ou sous dosages ; que la consommation du personnel a été sous-évaluée et doit être fixée à 7 % et que les offerts peuvent être évalués à 5 %, soit un taux global de 17 % du total des achats consommés ; que le coût de la politique d'happy hour , mise en place en 1999 est plus faible que celui d'opérations publicitaires et promotionnelles ; que le vol d'une somme de 40 000 F (6 097,96 euros) dans la caisse le 8 février 1999 est établi ;

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Vu, II, la requête, enregistrée le 18 mars 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, sous le n° 10VE00865, présenté pour Mme Valérie A, par Me Di Dio, avocat à la Cour ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503675 en date du 19 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des années 1998, 1999 et 2000 ;

2°) de prononcer la décharge des sommes restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle présente les mêmes moyens que dans la requête n° 10VE00864 ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2011 :

- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;

Considérant que les requêtes nos 10VE00864 et 10VE00865 concernent la même contribuable et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que Mme A était la gérante de la discothèque Le Nelson sise à Montreuil, qui a fait l'objet d'une vérification de comptabilité selon la procédure contradictoire, à l'issue de laquelle des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis à la charge de l'intéressée au titre des années 1998, 1999 et 2000 ; qu'elle fait régulièrement appel du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 19 janvier 2010 en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande de décharge des impositions litigieuses ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : (...) La charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que les rappels d'impôt que l'administration envisage de mettre à la charge d'un contribuable ne peuvent être regardés comme établis conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qu'à la condition que la commission ait expressément entériné les bases d'imposition notifiées par le service ; que le contribuable supporte la charge de la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration lorsque, d'une part, la comptabilité comporte de graves irrégularités et que, d'autre part, l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

Considérant qu'il résulte de l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires le 28 avril 2003 sur les impositions en litige, que celle-ci a estimé que la comptabilité de la discothèque Le Nelson était régulière et probante et que la reconstitution du chiffre d'affaires par l'administration était, dès lors, sans objet ; que la commission n'ayant, ainsi, pas expressément entériné les bases d'imposition notifiées par le service, s'agissant des deux points susévoqués, il appartient, dès lors, à l'administration fiscale d'établir le bien-fondé des bases arrêtées par elle ;

Considérant qu'aux termes de l'article 290 quater du code général des impôts :

I. Dans les établissements de spectacles comportant un prix d'entrée, les exploitants doivent délivrer un billet à chaque spectateur avant l'entrée dans la salle de spectacle. (...) II. Lorsqu'ils ne délivrent pas de billets d'entrée en application du I, les exploitants de discothèques et de cafés-dansants sont tenus de remettre à leurs clients un ticket émis par une caisse enregistreuse(...) III. Les infractions aux dispositions du présent article (...) sont recherchées, constatées, poursuivies et sanctionnées comme en matière de contribution indirectes ; qu'aux termes de l'article 96 B de l'annexe III de ce code : Les tickets que les exploitants de discothèques (...) sont tenus de remettre à leurs clients en application du II de l'article 290 quater du code général des impôts doivent porter, en caractère imprimés par les caisses enregistreuses, les indications suivantes : le nom de l'exploitant ou la raison sociale de l'établissement ; l'adresse de l'établissement ; la date (jour, mois et année) de la prestation ; le nombre de consommations servies par catégorie ou tarif ; le prix total exigé ; le numéro d'ordre du ticket. Ces tickets sont remis aux clients en même temps que les prestations dont ils constatent le service. ; qu'en outre, il résulte de l'ensemble des dispositions du code général des impôts relatives aux obligations comptables des commerçants, et notamment de celles des articles 54 et 286 du code général des impôts, qu'ils doivent tenir, conserver et présenter à toute demande du service des impôts les pièces de recettes et de dépenses justifiant du détail de leurs opérations et de la nature précise des services fournis à la clientèle ;

Considérant, en premier lieu, que le vérificateur a considéré que les bandes de caisse concernant les entrées dans la discothèque et le bar, qui lui ont été présentées, ne mentionnaient pas l'identification des produits vendus, ni leur quantité ni les prix des consommations ; que, toutefois, les bandes de la caisse enregistreuse du bar, dont plusieurs spécimens des tickets récapitulatifs dits Z ont été produits au dossier par Mme A, récapitulent le total journalier des recettes bar, correspondant à des renouvellements de consommations à la bouteille ou au verre, et mentionnent le nombre de verres ou de bouteilles ainsi que les prix correspondants par grandes catégories ; qu'il n'est pas contesté qu'un prix unitaire de 100 F était demandé aux clients du bar pour les boissons consommées au verre, quelle que soit la boisson et, s'agissant des bouteilles, un prix de 750 F pour le champagne ordinaire, de 850 F pour le whisky et l'alcool ordinaire, de 950 F pour le whisky et l'alcool supérieur et de 1 200 F pour le champagne et l'alcool de luxe, ces différents prix étant portés sur les tickets Z ; qu'ainsi, les indications portées sur les tickets Z étaient conformes aux prescriptions de l'article 96 B précité de l'annexe III au code général des impôts ; qu'il suit de là que l'administration, qui n'établit pas l'absence d'identification des produits ainsi vendus et des quantités par type de consommations, ne peut utilement se prévaloir, ni de ce que les dosages étaient différents suivant la nature de la boisson servie au verre, selon qu'il s'agissait d'alcool fort, de champagne ou d'autre alcools, ni que le prix des bouteilles était identique pour des alcools différents ; que, par suite, elle n'établit pas que les éléments susmentionnés dont disposait le vérificateur n'auraient pas permis à celui-ci d'évaluer avec une précision suffisante les recettes réalisées au titre des années d'imposition en litige ;

Considérant, en second lieu, que si des anomalies ont été relevées par le vérificateur dans les inventaires de stocks, l'administration n'établit pas, en faisant valoir que la capacité de stockage de bouteilles aurait été insuffisante, que celles-ci auraient pour effet de minorer les recettes, alors que la requérante soutient sans être sérieusement contredite que ces bouteilles étaient susceptibles d'être entreposées à l'extérieur de l'espace de stockage qui leur était réservé ; qu'en outre, les ratures portées sur les inventaires de stocks ont été justifiées par la requérante et sont, au demeurant, mineures ; qu'enfin, une insuffisance du taux de bénéfice brut a été relevée, à titre indicatif , par le vérificateur, et ne constituait pas, en tout état de cause, un indicateur d'une éventuelle irrégularité de la comptabilité ;

Considérant qu'il suit de là que la comptabilité de la discothèque Le Nelson , gérée par Mme A, qui n'était pas lacunaire et ne présentait pas d'anomalies dans sa forme, notamment au regard des dispositions de l'article 96 B de l'annexe III au code général des impôts, doit être regardée comme probante et régulière ; que le service des impôts n'était, dès lors, pas fondé par la loi fiscale à reconstituer le chiffre d'affaires de l'entreprise gérée par Mme A ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement n° 0503675, que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements contestés, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a partiellement rejeté ses demandes tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000, s'agissant des redressements relatifs aux minorations de recettes, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée correspondants, au titre de la même période ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme A d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 2 des jugements n° 0503676-0602170 et n° 0503675 du 19 janvier 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise sont annulés.

Article 2 : Mme A est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000, s'agissant des redressements relatifs aux minorations de recettes, et, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée correspondants, au titre de la même période.

Article 3 : Mme A est déchargée de la différence entre l'impôt sur le revenu et la taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 1998, 1999 et 2000 et ceux qui résultent de l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Une somme de 2 000 euros est mise à la charge de l'Etat au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens.

Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes de Mme A est rejeté.

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N° 10VE00864-10VE00865 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00864
Date de la décision : 29/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: Mme Catherine RIOU
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : DI DIO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-11-29;10ve00864 ?
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