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29/12/2011 | FRANCE | N°10VE00485

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 29 décembre 2011, 10VE00485


Vu la requête, enregistrée le 15 février 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SOCIETE MYTSUKO, dont le siège social est sis 110 B avenue du Général Leclerc à Pantin (93500), par Me Moreau, avocat à la Cour ; la SOCIETE MYTSUKO demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501631 en date du 17 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles auxquelles elle a ét

assujettie au titre de l'exercice clos en 1999 ainsi que des pénalités cor...

Vu la requête, enregistrée le 15 février 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SOCIETE MYTSUKO, dont le siège social est sis 110 B avenue du Général Leclerc à Pantin (93500), par Me Moreau, avocat à la Cour ; la SOCIETE MYTSUKO demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501631 en date du 17 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1999 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner l'Etat aux entiers dépens ;

Elle soutient qu'à compter de 1995, son président-directeur général a procédé au rachat des créances de la société auprès des créanciers chirographaires de cette dernière ; qu'un acte a été signé pour chaque cession de créance ; que tirant les conséquences de la substitution de créanciers ainsi opérée, la société a annulé les dettes figurant au passif fournisseurs et les a corrélativement inscrites, pour leur même valeur, c'est-à-dire leur valeur nominale, au crédit du compte courant ouvert dans ses écritures au nom de M. A ; qu'elle a ensuite procédé au remboursement partiel de sa dette à l'égard de M. A à hauteur de 6 552 814 F, comptabilisé par le débit de son compte courant ; que le vérificateur n'a pas remis en cause le caractère régulier et probant de la comptabilité de la société ; qu'il appartient à l'administration de démontrer que la dette n'aurait pas dû demeurer inscrite au passif du bilan de la société ; qu'une cession de créance, même non signifiée, ne modifie en rien l'obligation que supporte le débiteur cédé ; que contrairement à ce que soutient le service, si elle avait réduit le niveau de sa dette, elle aurait donné une image inexacte de ses engagements et, par voie de conséquence, de son patrimoine, exposant son dirigeant à une sanction pénale ; que le passif de la société reste en tout état de cause inchangé dès lors que soit le service reconnaît la validité de la cession de créances et elle est bien débitrice vis-à-vis du cessionnaire d'une dette de 15 685 875 F, soit la validité même de la cession est contestée et, dans ce cas, la société reste débitrice de la même somme envers ses créanciers d'origine ; que dès lors que le service admet le transfert des créances pour leur montant total, il ne peut, sans se contredire, contester le fait que les créances aient été inscrites au compte courant de M. A pour leur valeur nominale, la société étant nécessairement débitrice de ces sommes envers le cessionnaire ; qu'ainsi, le passif reste inchangé et l'article 38-2 du code général des impôts ne trouve pas à s'appliquer ; que si la cession de créances produit pleinement ses effets entre les parties sans aucune condition de forme, cette cession n'est opposable aux tiers qu'après l'accomplissement des formalités légales ; que ce formalisme doit toutefois être atténué ; qu'ainsi, il ressort d'une jurisprudence constante et abondante que toute attitude impliquant nécessairement l'acquiescement du débiteur de la cession comporte de sa part acceptation tacite du transport ; qu'en l'espèce, la société avait nécessairement connaissance de la substitution de créancier et qu'elle en avait accepté les conséquences ; que l'arrêté du Conseil d'Etat du 28 février 1997 autorise la démonstration par tous moyens que la dette devait bien être maintenue au passif de son bilan du fait d'une cession de créance ; que tel est le cas en l'espèce ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 décembre 2011 :

- le rapport de M. Coudert, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public,

- et les observations de Me Cornon, substituant Me Moreau, pour la SOCIETE MYTSUKO ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 26 décembre 2011, présentée pour la SOCIETE MYTSUKO ;

Considérant que la SOCIETE MYTSUKO, qui exerce une activité de négoce de prêt-à-porter féminin, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 1999, 2000 et 2001 à l'issue de laquelle différents redressements lui ont été notifiés tant en matière d'impôt sur les sociétés que de taxe sur la valeur ajoutée ; que la société a contesté devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le seul redressement afférent à la réintégration dans ses résultats imposables de l'exercice clos en 1999 d'un passif non justifié d'un montant de 8 239 661 francs ; que la SOCIETE MYTSUKO relève appel du jugement en date du 17 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires résultant dudit redressement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre du budget :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, la requête d'appel présentée pour la SOCIETE MYTSUKO ne se borne pas à reproduire ses écritures de première instance mais comporte une critique du jugement dont elle demande l'annulation, mettant ainsi le juge d'appel en mesure de se prononcer sur les erreurs qu'aurait pu commettre le tribunal en écartant les moyens soulevés devant lui ; qu'il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par le ministre ne peut qu'être écartée ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, président-directeur général et actionnaire majoritaire à hauteur de 99 % des parts de la SOCIETE MYTSUKO, a racheté à titre personnel et dans le cadre d'un plan de redressement sur neuf ans, les créances détenues sur cette société par les créanciers chirographaires acceptés par ce plan et ceci pour des prix inférieurs à la valeur nominale desdites créances ; qu'en conséquence de ces rachats, intervenus à compter de l'année 1995, la société requérante a, d'une part, annulé les dettes figurant au compte de passif fournisseurs et, d'autre part, inscrit au compte courant de M. A une dette d'un égal montant, soit 15 685 875 francs ; que le service, estimant que la dette de la SOCIETE MYTSUKO à l'égard de M. A correspondait au prix de rachat des créances et non à la valeur nominale de ces dernières, a regardé la différence entre ces valeurs comme constitutive d'un abandon de créances ayant bénéficié à la requérante ; que le service a en conséquence réintégré aux résultats imposables de la SOCIETE MYTSUKO au titre de l'exercice clos en 1999 ce passif injustifié, arrêté finalement à la somme de 8 239 661 francs (1 256 128 euros) ;

Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. ; qu'aux termes de l'article 1690 du code civil : Le cessionnaire n'est saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur. Néanmoins, le cessionnaire peut être également saisi par l'acceptation du transport faite par le débiteur dans un acte authentique. ;

Considérant, d'une part, que l'administration fait valoir que les cessions à M. A des créances détenues par les fournisseurs de la SOCIETE MYTSUKO n'ont pas fait l'objet de la signification ou de l'acte authentique prévu par l'article 1690 du code civil ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la vérificatrice avait initialement admis, ainsi que cela ressort des termes mêmes de la notification de redressements du 29 novembre 2002, la réalité du rachat par le président-directeur général de la société des créances détenues par les fournisseurs de la société ; que, par ailleurs, il est constant que la société requérante, débiteur cédé, avait elle-même communiqué au cours des opérations de contrôle les différents actes de cession de créances conclus entre ses fournisseurs et M. A ; que, dans ces conditions et compte-tenu des circonstances du rachat de créances précédemment rappelés, la SOCIETE MYTSUKO doit être regardée comme apportant la preuve de la réalité du transfert des créances en litige, transfert qu'elle a accepté, et ceci alors même que les formalités prévues à l'article 1690 du code civil n'ont pas été respectées ;

Considérant, d'autre part, que l'administration ne conteste pas que M. A a racheté lesdites créances à titre personnel ; qu'ainsi, la circonstance que l'intéressé les ait acquises à un prix inférieur à leur valeur nominale est sans incidence sur le montant de la dette dont la SOCIETE MYTSUKO était redevable à raison de ces créances ; qu'il suit de là que le service n'était pas fondé à estimer que la différence entre la valeur nominale des créances et leur prix de rachat par M. A était constitutive d'un abandon de créances pour la requérante ; que, dès lors, c'est à tort que le service a réintégré aux résultats imposables de la SOCIETE MYTSUKO au titre de l'exercice clos en 1999 la somme de 8 239 661 francs (1 256 128 euros) ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE MYTSUKO est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande et, par suite, à demander la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1999 à raison de réintégration dans ses résultats imposables d'un passif injustifié ainsi que des pénalités correspondantes ;

Sur les dépens :

Considérant que la SOCIETE MYTSUKO ne fait état d'aucune mesure d'expertise ou d'instruction justifiant la condamnation de l'État sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ; que sa demande doit, dès lors et en tout état de cause, être rejetée ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE MYTSUKO et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La SOCIETE MYTSUKO est déchargée des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1999 ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 2 : Le jugement du 17 novembre 2009 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 3 : L'Etat versera à la SOCIETE MYTSUKO une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE MYTSUKO est rejeté.

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N° 10VE00485


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00485
Date de la décision : 29/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-03-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Évaluation de l'actif. Créances.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Bruno COUDERT
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : CORNON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-12-29;10ve00485 ?
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