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23/10/2012 | FRANCE | N°11VE02918

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 23 octobre 2012, 11VE02918


Vu la requête, enregistrée le 3 août 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. David A, demeurant ..., par Me Guilloux ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803431 en date du 9 juin 2011 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant que, par ce jugement, le tribunal n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des pénalités y

afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en l...

Vu la requête, enregistrée le 3 août 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. David A, demeurant ..., par Me Guilloux ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803431 en date du 9 juin 2011 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant que, par ce jugement, le tribunal n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

Il soutient, en premier lieu, que la somme de 90 931,45 euros, se décomposant en plusieurs remises de chèques et taxée en tant que revenus d'origine indéterminée au titre de l'année 2003 correspond, ainsi que l'a relevé le juge pénal dont les constations s'imposent au juge de l'impôt, à des prélèvements effectués sur la SAS Européenne Construction Moderne, dissoute en 1992, enregistrés sur compte courant détenu dans la société ECM début 1992 ; qu'en deuxième lieu, les sommes de 40 000 et 35 000 créditées le 17 février 2004 constituent des versements opérés par les AGF à raison du retrait partiel de son contrat d'assurance-vie souscrit en novembre 2003 et alimenté par des chèques tirés sur le compte de la SAS Européenne Construction Moderne ; qu'il a ensuite reversé ces sommes à ladite société le 18 février 2004 ; qu'en troisième lieu, c'est à tort que le service a crû pouvoir imposer entre ses mains la totalité des revenus regardés comme distribués par la SAS Européenne Construction Moderne en 2003 et 2004 (soit respectivement 251 328 euros et 438 274 euros) dès lors que ces sommes figuraient sur un compte courant d'associé d'ont il n'était que co-titulaire et ne pouvaient ainsi être imposées qu'au prorata de participation dans le capital de la société ; qu'en outre, ainsi que l'ont constaté à le juge pénal puis le Tribunal administratif, l'origine des apports enregistrés au compte courant des deux associés, à savoir les prélèvements dans la SAS Construction Moderne, a été justifiée ; que, de surcroît, les crédits litigieux, utilisés pour souscrire des contrats d'assurance-vie par le biais de fausses factures ont été reversés dans les caisses de la société ECM en 2004 ; que, par conséquent, l'administration n'a pas apporté la preuve, qui lui incombe, du quantum des sommes distribués et de leur appréhension effective ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2012 :

- le rapport de M. Huon, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

Considérant qu'à l'issue d'un examen de la situation fiscale personnelle de M. A au titre des années 2003 et 2004 et aux termes d'une proposition de rectification en date du 6 décembre 2006, le service vérificateur a, d'une part, réintégré dans le revenu imposable de l'intéressé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes regardées comme distribuées par la SAS Européenne Construction Moderne dont il était associé et président et, d'autre part, taxé d'office, par application des dispositions combinées des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, plusieurs crédits bancaires dont l'origine est demeurée indéterminée ; que M. A relève appel du jugement du 9 juin 2011 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant que, par ce jugement, le tribunal n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles il a été ainsi assujetti au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur les conclusions relatives aux contributions sociales :

Considérant que le Tribunal administratif a rejeté comme irrecevable la demande de M. A tendant à la décharge des suppléments de contributions sociales qui lui ont été assignées au titre des années 2003 et 2004 au motif que la réclamation contentieuse formée par l'intéressé le 25 avril 2007 ne visait que l'impôt sur le revenu et non lesdites contributions ; que le requérant ne contestant pas l'irrecevabilité qui lui a ainsi été opposée, ses conclusion sus-analysées ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions relatives à l'impôt sur le revenu :

En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable (...) des justifications, lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus, plus importants que ceux qu'il a déclarés (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : " (...). Sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes (...) de justifications prévues à l'article L. 16 " ;

Considérant que, si par un arrêt du 15 mars 2007, la Cour d'appel de Versailles a confirmé la condamnation du requérant pour abus de biens sociaux et blanchiment aggravé en relevant notamment que M. A avait prélevé des fonds disponibles après la liquidation de la SARL Construction Moderne, cet arrêt mentionne, à ce titre, une somme globale de 300 000 euros sans préciser le détail des transferts opérés au profit de l'intéressé ; que, contrairement à ce que soutient M. A, le service vérificateur ne disposait pas, eu égard aux termes de cet arrêt, des éléments lui permettant de déterminer l'origine et la nature des sommes figurant sur ses comptes bancaires et était ainsi en droit de lui demander de justifier des versements portés sur ces comptes à peine de taxation d'office en cas d'absence de réponse ;

Sur le bien-fondé des impositions :

S'agissant de l'année 2003 :

Considérant que M. A soutient que la somme de 90 931,45 euros, se décomposant en plusieurs remises de chèques, qui demeure taxée en tant que revenus d'origine indéterminée au titre de l'année 2003 se rattache, ainsi qu'il ressort de l'arrêt précité du 15 mars 2007 de la Cour d'appel de Versailles à des prélèvements effectués sur la SAS Construction Moderne, liquidée au cours de l'année 2002, et enregistrés sur son compte courant détenu dans la SAS Européenne Construction Moderne ;

Considérant, en premier lieu, que l'administration admet, au vu des copies de chèques versés au dossier dont l'encaissement est intervenu au cours de l'année 2003, qu'à due concurrence de 58 321,60 euros, les crédits bancaires litigieux ont pour origine des versements opérés au profit de M. A par la SARL Construction Moderne ; que, toutefois, le ministre demande que, par voie de substitution de base légale, cette somme, initialement imposée en tant que revenus d'origine indéterminée, soit imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions de l'article 111-a du code général des impôts ;

Considérant que l'administration est en droit, à tout moment de la procédure, pour justifier le bien-fondé d'une imposition, de substituer une autre base légale à celle qui a été primitivement retenue ; que, lorsque le contribuable taxé d'office en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales établit, au soutien de conclusions visant à la décharge des impositions régulièrement établies sur ce fondement, que les sommes en litige se rattachaient à une catégorie déterminée de revenus, le service peut ainsi demander au juge, dans le cadre de la procédure de taxation d'office, une imposition des sommes en litige selon les règles applicables à la catégorie d'imposition concernée, sans qu'il y ait lieu de subordonner cette demande au respect de la procédure contradictoire, la procédure d'imposition d'office suivie sur le fondement de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales demeurant régulière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 111-a du code général des impôts : " Sont notamment considérés come revenus distribués : a) sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes (...) " ; qu'il est constant que la somme de 58 321, 60 euros correspond à des remises de chèques émis par la SARL Construction moderne au profit de M. A, lequel était associé-gérant puis liquidateur de ladite société, l'intéressé ayant utilisé cette somme pour souscrire à son profit, puis alimenter, des contrats d'assurance-vie auprès de la société AGF ; que la somme ainsi mise à la disposition de M. A constitue un revenu distribué en vertu des dispositions de l'article 111 a) du code général des impôts ; que, par ailleurs, le requérant, qui ne conteste pas cette qualification, ne saurait soutenir que ladite somme ne pouvait être imposée qu'au titre de l'année 2002 dès lors qu'il l'a appréhendée au cours de l'année 2003 ; que, par suite, il y a lieu de faire droit à la demande de substitution de base légale sollicitée par l'administration ;

Considérant, en second lieu, que M. A n'a produit aucun élément de nature à justifier, ainsi qu'il lui incombe en vertu des dispositions des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, de l'origine et de la nature du surplus des crédits bancaires litigieux, soit 32 609,85 euros ; qu'à cet égard, il ne saurait utilement se prévaloir de l'arrêt précité de la Cour d'appel de Versailles statuant en matière pénale, dès lors que s'il a retenu l'implication du requérant dans l'appréhension frauduleuses de bénéfices sociaux de la SAS Construction Moderne et de la SAS Européenne Construction Moderne, cet arrêt, ainsi qu'il a été dit, ne cite pas expressément et de manière détaillée les sommes indûment transférées et ne contient ainsi, en ce qui concerne les crédits précisément en cause, aucune constatation de fait susceptible de s'imposer au juge de l'impôt ;

S'agissant de l'année 2004 :

Considérant que M. A soutient que les sommes de 40 000 euros et 35 000 euros inscrites le 17 février 2004 au crédit de son compte bancaire ouvert à la HSBC BANQUE HERVET n° 0079117P0021 constituent de versements effectués à raison de retraits partiels de ses contrats d'assurance-vie en date du 12 février 2004 en produisant, pour la première fois en cause d'appel, à l'appui de cette allégation une attestation établie en ce sens le 9 août 2010 par un agent général d'assurance Allianz ; que, si le service admet la caractère probant de ce justificatif, il demande cependant le maintien de la taxation des sommes en cause dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions de l'article 125-0 A du code général des impôts ;

Considérant qu'aux termes de l'article 125-0 A du code général des impôts, applicable à l'espèce : " I. Les produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation ainsi qu'aux placements de même nature sont, lors du dénouement du contrat, soumis à l'impôt sur le revenu. (...) " ;

Considérant que le rachat partiel d'un contrat d'assurance-vie par l'assureur, lequel rembourse au souscripteur une partie de son épargne moyennant une réduction du capital garanti au terme du contrat, doit être regardé, pour l'application des dispositions précitées, comme le fait générateur de l'imposition des produits qui lui sont attachés au même titre que le dénouement intervenant à l'échéance prévue au contrat ; qu'ainsi que le fait valoir le ministre, M. A n'établit ni même n'allègue qu'il aurait soumis à l'impôt sur le revenu les sommes perçues à l'occasion des retraits partiels concernés ou qu'il aurait acquitté un prélèvement libératoire dans les conditions prévues par dispositions combinées du II de l'article 125-0 A et de l'article 125 A du code général des impôts ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'accueillir la demande de substitution de base légale demandée par le service et sur le principe et les modalités de laquelle le requérant n'a d'ailleurs formulée aucune objection utile ; qu'à cet égard, la seule circonstance, au surplus non établie ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que M. A aurait reversés les produits litigieux à la SAS Européenne Construction Moderne est en tout état de cause sans incidence sur l'imposition desdits produits par application des dispositions de l'article 125-0 A du code général des impôts dont, ainsi qu'il vient d'être dit, le fait générateur est constitué par le rachat partiel des contrats ;

En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :

Considérant que, s'appuyant sur les résultats de la vérification de comptabilité de la SAS Européenne Construction Moderne et les éléments de l'enquête judiciaire diligentée à l'encontre de M. A pour abus de biens sociaux au détriment de cette société, le service vérificateur a notamment relevé qu'au cours de l'année 2003, le requérant avait souscrit plusieurs contrats d'assurance-vie auprès des sociétés AGF et SMABTP au moyen de fonds provenant de la SAS Européenne Construction Moderne par le biais de son compte courant d'associé pour un montant de 275 000 euros tandis que sur un total d'apports de 282 498,40 euros au crédit de ce compte, 251 328 euros n'avaient pas été justifiés, somme que l'administration a ainsi regardé comme distribuée à M. A ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du a) de l'article 111 du code général des impôts que les sommes mises à disposition des associés sont présumées constituer des revenus distribués, imposables entre leur mains dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que, pour combattre cette présomption de distribution, il incombe au contribuable d'établir, par tout moyen, qu'il n'a pas eu la disposition des sommes en litige ou que celles-ci n'avaient pas le caractère d'une avance, d'un acompte ou d'un prêt ;

Considérant, en premier lieu, que le service établit, ainsi qu'il ressort de l'analyse des mouvements opérés sur le compte précité, que M. A a seul personnellement bénéficié des fonds litigieux, cette circonstance, qui, du reste, n'est nullement contestée ayant d'ailleurs entraîné sa condamnation des chefs d'abus de biens sociaux et de blanchiment aggravé ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que n'étant que co-titulaire, avec Mme Esmer B, du compte courant ayant enregistré les opérations en cause, il ne pouvait être imposé à raison desdites opérations qu'au prorata de sa participation dans le capital social de la société, soit 43,69 % ;

Considérant, en second lieu, que M. A soutient que les prélèvements opérés à son profit ont été compensés par des apports en compte courant au moyen de chèques tirés de la SARL Construction Moderne ; que, toutefois, s'il produit des chèques émis en 2003 par ladite société au profit de la SAS Européenne Construction Moderne pour un montant total de 251 328 euros, l'intéressé n'apporte aucun élément de nature à établir que les sommes ainsi versées à la SAS Européenne Construction Moderne provenaient de fonds dont il disposait en tant qu'associé de cette société et constituaient ainsi des apports personnels ;

Considérant, enfin, que la circonstance, qui, au demeurant n'est établie par aucune pièce du dossier, que la somme en litige aurait été remboursée en 2004 à la SAS Européenne Construction Moderne, est sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition établie à l'encontre de M. A au titre de l'année 2003 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a partiellement rejeté sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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