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20/11/2014 | FRANCE | N°12VE00666

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 20 novembre 2014, 12VE00666


Vu la requête, enregistrée le 15 février 2012, présentée pour

Mme B...C..., demeurant..., par Me Arm, avocat ;

Mme C... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0900064 du 26 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Germain-en-Laye à lui verser la somme de 220 000 euros en réparation des préjudices subis résultant des illégalités fautives commises à son encontre ;

2° de condamner la commune de Saint-Germain-en-Laye à lui verser la somme de 240 000 euros

en réparation de son préjudice matériel et la somme de 100 000 euros en réparation de son...

Vu la requête, enregistrée le 15 février 2012, présentée pour

Mme B...C..., demeurant..., par Me Arm, avocat ;

Mme C... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0900064 du 26 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Germain-en-Laye à lui verser la somme de 220 000 euros en réparation des préjudices subis résultant des illégalités fautives commises à son encontre ;

2° de condamner la commune de Saint-Germain-en-Laye à lui verser la somme de 240 000 euros en réparation de son préjudice matériel et la somme de 100 000 euros en réparation de son préjudice moral et des multiples troubles subis dans ses conditions d'existence, sauf à parfaire, sommes assorties des intérêts légaux à compter de la réception de la demande préalable et de la capitalisation des intérêts ;

3° de mettre à la charge de la commune de Saint-Germain-en-Laye une somme de

4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit dès lors que la mise en oeuvre des articles L. 511-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation n'est pas applicable à un sinistre faisant suite à une catastrophe naturelle, le danger n'étant pas inhérent à l'édifice ;

- le jugement attaqué est entaché d'un examen minimaliste des moyens exposés dans la demande, de dénaturation des faits et éléments de l'espèce et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la prescription quadriennale a été opposée par la commune sans qu'il soit justifié de l'habilitation du signataire et la demande d'aide juridictionnelle présentée le 19 juillet 2004 a, en tout état de cause, interrompu le cours de la prescription quadriennale et, en conséquence, son recours enregistré le 31 décembre 2008 n'était pas tardif ;

- la responsabilité de la commune est engagée en raison des nombreuses et graves illégalités fautives commises dès lors que les conditions d'application de la procédure de péril imminent n'étaient pas réunies, le sinistre étant lié à la chute d'un arbre appartenant aux voisins lors de la tempête du 26 décembre 1999 et la commune reconnaissant que la zone considérée, s'agissant d'une partie du jardin de la propriété voisine, avait été sécurisée ; l'arrêté de péril imminent du 1er mars 2001 en l'absence d'avertissement préalable adressé au propriétaire et de motivation suffisante, était illégal en la forme par méconnaissance de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ; en tout état de cause la déstabilisation d'un conduit de fumée ne permettait pas de justifier l'état de péril grave et imminent, au reste non constaté dans le rapport de l'expert ; les mesures prescrites par le maire avaient été exécutées par ses soins le

9 avril 2001 antérieurement aux travaux exécutés d'office, lesquels ont excédé les termes de l'arrêté de péril par l'enlèvement de la totalité du bardage d'isolation conduisant à la nécessité d'une réfection de la totalité de ce bardage qui n'était même pas envisagée par le rapport d'expertise ; l'absence de la commune le 24 octobre 2001 lors de l'exécution de ces travaux est fautive ; l'exécution de ces travaux a porté une atteinte grave au droit de propriété et au respect de sa vie privée et de son domicile et est à l'origine de nombreux dommages matériels et

moraux ; l'édiction le 31 octobre 2001 d'un arrêté de péril non imminent, également irrégulier par l'absence d'expertise contradictoire régulière et méconnaissance de l'article L. 511-2 du code de la construction et de l'habitation et relatif à des travaux en réalité uniquement nécessités par l'intervention d'office irrégulière, n'a pas régularisé la situation ;

- le préjudice matériel direct et certain en raison du surcoût des travaux resté à sa charge exclusive devra être réparé par la somme de 40 000 euros ; la perte de valeur vénale résultant de la dégradation de la maison faisant suite aux désordres générés par les interventions intempestives du maire est évaluée à 200 000 euros, son bien ayant été vendu, en 2011,

288 000 euros au lieu de 500 000 euros ; le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence de caractère continu et évolutif qui ont conduit à l'adjudication de son bien devront être indemnisés par la somme de 100 000 euros ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2014 :

- le rapport de Mme Geffroy, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Lepetit-Collin, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la commune de Saint-Germain-en-Laye ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. " ;

2. Considérant, en premier lieu, que si la requérante a entendu soutenir que les premiers juges auraient insuffisamment motivé leur jugement, ce moyen manque en fait et doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance alléguée que les juges de première instance auraient commis plusieurs erreurs affectant le bien-fondé du jugement attaqué n'est pas de nature à entacher ce jugement d'irrégularité ; que le moyen doit, par suite, et en tout état de cause, être écarté ;

Sur la prescription quadriennale :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 susvisée : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. / Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public " ; qu'aux termes de son article 2 : " La prescription est interrompue par : / Toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité administrative, dès lors que la demande ou la réclamation a trait au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, alors même que l'administration saisie n'est pas celle qui aura finalement la charge du règlement ; / Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; / (...) Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée " ;

5. Considérant que Mme C...a présenté une demande d'aide juridictionnelle en vue d'exercer son action en indemnité à l'encontre de la commune de

Saint-Germain-en-Laye le 19 août 2004 à la suite du silence gardé par cette dernière sur son courrier du 9 décembre 2003 par lequel la responsabilité de la commune était mise en cause sur le fondement des fautes commises par la commune à la suite des arrêtés de péril pris par le maire de Saint-Germain-en-Laye les 1er mars 2001 et 31 octobre 2001 ; qu'il résulte des dispositions précitées de la loi du 31 décembre 1968 susvisée que, compte tenu de la date d'introduction de la demande d'aide juridictionnelle, acte interruptif, n'était pas atteinte par la prescription quadriennale la demande présentée au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le

31 décembre 2008 tendant à la réparation des préjudices causés à la requérante par les arrêtés de péril pris par le maire de Saint-Germain-en-Laye les 1er mars 2001 et 31 octobre 2001 ; que, par suite, l'exception tirée de la déchéance quadriennale de cette créance opposée par la commune de Saint-Germain-en-Laye doit être écartée ;

Sur les conclusions indemnitaires :

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des termes du courrier de la requérante en date du 6 mars 2001 adressé au maire de la commune, que

le 26 décembre 1999, la chute d'un arbre de grande hauteur provenant d'une propriété privée voisine de celle de la requérante puis l'exécution d'un chantier requis par les propriétaires voisins pour extraire l'arbre ont causé un grave sinistre à la propriété de Mme C... notamment sur une cheminée et son conduit de fumée, la toiture et une partie d'un mur pignon recouvert d'un bardage isolant d'ardoises ; que le 1er mars 2001 le maire a pris un arrêté de péril imminent reprenant les conclusions de l'expert mandaté le 16 février 2001 par le Tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye par lequel il mettait en demeure la requérante de procéder, dans un délai de huit jours à compter de la date de notification dudit arrêté, à la suppression du conduit de cheminée, au remplacement de la bâche de protection détériorée et à l'enlèvement des modules du bardage surplombant la propriété voisine dont les attaches n'assuraient plus leur fonction ; que par son courrier précité du 6 mars 2001, Mme C... invoquait notamment un règlement en cours entre les assureurs des deux propriétés et le " manque de disponibilité des entreprises du bâtiment encore surchargées par les conséquences de la tempête " pour justifier l'absence de travaux de réparation de sa propriété malgré le délai écoulé de quatorze mois depuis la tempête ; qu'il résulte de l'instruction que si le 9 avril 2001 une entreprise requise par la requérante a déposé les deux premiers tronçons du " conduit fibro " ainsi qu'une quinzaine d'ardoises pour une somme totale de 160,83 euros, dès le 14 juin 2001, la mairie informait la requérante qu'une plaque de bardage étant à nouveau tombée sur le sol de la propriété voisine, la ville allait être conduite à procéder d'office aux travaux ; que la commune a fait réaliser d'office, du 24 au 29 octobre 2001, pour une somme de 7 724 euros, les travaux qu'elle estimait prévus par l'arrêté de péril imminent et dont les frais ont été définitivement pris en charge par la commune ; que la commune n'a, par la suite, pas poursuivi la procédure de péril non imminent introduite par un arrêté en date du 31 octobre 2001 par lequel le maire de la commune ordonnait, dans le délai d'un mois, la réfection de la toiture et la réalisation d'un enduit sur le mur pignon surplombant la propriété du 5 rue du Pontel ;

7. Considérant que Mme C... demande à être indemnisée d'un surcoût de travaux estimé à 40 000 euros, d'une perte de valeur vénale de 200 000 euros, son bien ayant été vendu par adjudication le 22 avril 2011 à la demande de sa banque, pour un prix de

280 000 euros, et d'un préjudice moral et de troubles dans les conditions d'existence pour une somme de 100 000 euros ; qu'elle soutient avoir subi ces préjudices du fait des arrêtés de péril du maire de Saint-Germain-en-Laye et des travaux engagés d'office par la commune

du 24 au 29 octobre 2001 qui auraient notamment excédé les prescriptions de l'arrêté de péril imminent en déposant la totalité du bardage du mur pignon ce qui aurait aggravé les conséquences du sinistre subi par son habitation et dont le coût estimé de réfection n'aurait, par la suite, pas été pris en charge par les assureurs du sinistre découlant de la tempête de 1999 ;

8. Mais considérant que la commune de Saint-Germain-en-Laye fait notamment valoir que le lien de causalité entre les prétendues fautes de la commune et les préjudices allégués n'est pas établi ; qu'il résulte de l'instruction, d'une part, ainsi qu'il a été décrit au point 5, que la commune n'est nullement à l'origine des graves désordres initiaux, d'autre part, que le bien de la requérante, près de deux années après la tempête de 1999, était toujours impropre à l'habitation sans de très importants travaux de réfection ; qu'en outre, il ne résulte pas de l'instruction ni que ces travaux aient été rendus nécessaires en raison de l'action que la commune a engagée à la suite des chutes d'ardoises du mur pignon sur un jardin privé voisin, ni que la requérante ou son assureur auraient postérieurement à l'exposition de la seule somme de 160,83 euros, près de deux années après la chute de l'arbre, assumé le coût des travaux nécessaires sans qu'il soit justifié des motifs de ce retard à réparer l'immeuble ; que, par suite, alors notamment que l'absence de travaux est à l'origine de l'aggravation des dommages initialement subis lors de la tempête de 1999, le caractère direct et certain du lien de causalité entre les décisions du maire de Saint-Germain-en Laye et tout ou partie des préjudices invoqués au point 6, au demeurant dépourvus des précisions suffisantes, ne peut, dans les circonstances de l'espèce, être regardé comme établi ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Saint-Germain-en-Laye, que

Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

10. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mme C... et la commune de

Saint-Germain-en Laye au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Germain-en-Laye tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 12VE00666


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE00666
Date de la décision : 20/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-01-01-01 Travaux publics. Notion de travail public et d'ouvrage public. Travail public. Travaux présentant ce caractère.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme LEPETIT-COLLIN
Avocat(s) : ARM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-11-20;12ve00666 ?
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