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21/07/2015 | FRANCE | N°13VE00150

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 21 juillet 2015, 13VE00150


Vu, I, sous le n° 13VE00150, la requête enregistrée le 14 janvier 2013, présentée pour la COMMUNE DE BOURG-LA-REINE, représentée par son maire en exercice, par la

Selarl Lazare avocats ;

La COMMUNE DE BOURG-LA-REINE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0904562 et 0906120 du 13 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à verser à M. et Mme B...la somme de 20 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2009 en réparation du préjudice subi du fait de la présence à proximité immédi

ate de leur résidence des installations de collecte et de transit des déchets de la commu...

Vu, I, sous le n° 13VE00150, la requête enregistrée le 14 janvier 2013, présentée pour la COMMUNE DE BOURG-LA-REINE, représentée par son maire en exercice, par la

Selarl Lazare avocats ;

La COMMUNE DE BOURG-LA-REINE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0904562 et 0906120 du 13 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à verser à M. et Mme B...la somme de 20 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2009 en réparation du préjudice subi du fait de la présence à proximité immédiate de leur résidence des installations de collecte et de transit des déchets de la commune ;

2° de rejeter la demande présentée par M. et Mme B...devant le Tribunal administratif de Versailles ;

3° de mettre à la charge de M. et Mme B...la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu au moyen de défense tiré de ce que la translation des bennes à l'aplomb des entrepôts du centre technique municipal (CTM) n'a pas eu de conséquences anormalement défavorables aux requérants ;

- le jugement n'a pas identifié la source et la nature des seuils réglementaires à partir desquels il a fondé sa condamnation ;

- la demande des époux B...est irrecevable faute de réclamation préalable et dans la mesure où la commune n'est pas le maître d'ouvrage d'un service public pour lequel elle n'est pas compétente ;

- la réorganisation du centre technique municipal a apporté une amélioration substantielle quant à son insertion dans son environnement ;

- l'expertise permet d'exclure le caractère imprévisible pourtant retenu par les premiers juges des mouvements de camion liés au nettoyage de l'alvéole qui intervient trois fois par semaine à raison de dix minutes, au ramassage des encombrants limité à une plage horaire de 11h30 à 12h30 et au premier samedi du mois pour ce qui concerne la mini-déchetterie ouverte au public ;

- la somme demandée ne correspond à aucune réalité au regard des préjudices invoqués ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juillet 2015 :

- le rapport de M. Bresse, président,

- les conclusions de Mme Colrat, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., de la Selarl Lazare avocats, pour la COMMUNE DE BOURG-LA-REINE, et de MeA..., de la Selarl Hourcabie-Pareydt-Gohon, pour M. et MmeB... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 juillet 2015, sous les nos 13VE00150 et 13VE00151, présentée pour M. B...;

1. Considérant que les deux requêtes susvisées nos 13VE00150 et 13VE00151 présentent à juges des questions semblables et ont fait l'objet d'une même instruction ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;

2. Considérant que la COMMUNE DE BOURG-LA-REINE relève appel du jugement en date du 13 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à verser aux époux B...la somme de 20 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de la demande en réparation du préjudice subi du fait du fonctionnement à proximité de leur domicile d'une installation de collecte et de transit de déchets ménagers et assimilés ; que, par des conclusions incidentes, M. et Mme B...demandent la réformation du jugement en ce qu'il a limité à 20 000 euros la somme accordée en réparation du préjudice et la condamnation de la COMMUNE DE BOURG-LA-REINE à leur verser une somme de 100 000 euros ; que M. et Mme B...demandent, en outre, par une requête distincte, l'annulation dudit jugement en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à la condamnation de la communauté d'agglomération des Hauts de Bièvre et la condamnation de la communauté d'agglomération à leur verser la somme de 100 000 euros ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant que la COMMUNE DE BOURG-LA-REINE soutient que les premiers juges n'ont pas tenu compte de son moyen de défense tiré de ce que le réaménagement du centre technique municipal par la translation des bennes de collectes et transit en 2005 a amélioré son insertion dans son environnement et que les premiers juges n'ont pas justifié de dépassement de seuils légaux pour fonder le principe et le calcul de l'indemnisation accordée ; que, toutefois, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments des parties, a implicitement mais nécessairement écarté l'argument tiré de l'amélioration apportée en 2005 en indiquant que l'implantation des bennes sur une partie du site jouxtant la propriété des époux B... était génératrice de nuisances ; que, par ailleurs, le tribunal a motivé de façon précise l'existence d'un préjudice né des nuisances sonores supportées par les époux B... et l'indemnisation accordée à ce titre sans avoir à se référer à des seuils légaux de nuisances sonores ; qu'ainsi, la commune ne peut valablement soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier du fait d'une omission à statuer et d'une insuffisance de sa motivation ;

Sur le fond du litige :

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction administrative ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " ; que, compte tenu de la nature d'ouvrage public des installations de collecte et de dépôt des déchets ménagers abritées au sein du centre technique municipal, les conclusions indemnitaires des époux B...sont relatives à la matière des travaux publics et leur recevabilité n'est, en application des dispositions précitées, subordonnée à aucune réclamation préalable susceptible de faire naître une décision ; que, par suite, la fin de non-recevoir soulevée par la COMMUNE DE BOURG-LA-REINE doit être écartée ;

5. Considérant que, même sans faute de sa part, et sans que puisse être opposé le fait d'un tiers, le maître de l'ouvrage est intégralement responsable des dommages causés aux tiers par les ouvrages publics dont il a la garde, en raison tant de leur existence que de leur entretien ou de leur fonctionnement ; qu'il n'en va différemment que si ces dommages sont, au moins partiellement, imputables à une faute de la victime ou à un cas de force majeure ; que la victime doit toutefois apporter la preuve de la réalité et de l'actualité des préjudices qu'elle allègue avoir subis et de l'existence d'un lien de causalité entre l'ouvrage public et lesdits préjudices, et justifier que ces derniers présentent un caractère spécial et anormal ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la COMMUNE DE

BOURG-LA-REINE est le maître d'ouvrage responsable du fonctionnement du centre technique municipal, dont elle gère le personnel, sur le site duquel est installé un centre de collecte et transit des déchets ménagers et assimilés nonobstant les circonstances que, par un arrêté interpréfectoral du 17 décembre 2003, les compétences de la communauté d'agglomération des Hauts de Bièvre ont été étendues à la valorisation et à l'élimination des déchets et que, par une convention de services partagés signée le 16 novembre 2007, la commune met à disposition de la communauté d'agglomération le premier samedi de chaque mois les locaux du centre technique pour l'organisation d'un service de déchetterie ouvert aux habitants de la commune ; que dans le cas où un ouvrage public, par sa seule présence, cause un dommage permanent à une propriété ou à ses occupants, il ne saurait être demandé réparation de ce dommage qu'au seul maître de cet ouvrage ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont exclu la responsabilité de la communauté d'agglomération des Hauts de Bièvre dans la survenue des désordres allégués et rejeté les conclusions des époux B...tendant à la condamnation de la communauté d'agglomération des Hauts de Bièvre ; que, par suite, la requête susvisée des

époux B...tendant à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté leur demande dirigée contre la communauté d'agglomération des Hauts de Bièvre doit être rejetée sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la communauté d'agglomération des Hauts de Bièvre à l'appel des époux B...sur le fondement de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise, que le réaménagement en 2005 du centre technique municipal de la COMMUNE DE

BOURG-LA-REINE au sein duquel se trouvent des installations de collecte et de transit des déchets ménagers et assimilés de la commune a généré, du fait du déplacement de cette activité à proximité immédiate de la parcelle cadastrée n° 254 des épouxB..., des mouvements répétés de camions déposant des déchets collectés dans des bennes semi-enterrées, sources de nuisances sonores pour les riverains immédiats ; que le rapport d'expertise indique que ces mouvements ont eu lieu, à la date de rédaction du rapport, à raison de cinq à treize fois par jour, générant des nuisances sonores sur une durée cumulée de trente-cinq minutes par jour ; que ce préjudice présente, eu égard notamment à la localisation de la propriété des époux B... dans une zone réservée par les documents d'urbanisme à l'habitat pavillonnaire, un caractère anormal et spécial ; que, compte tenu des possibilités d'amélioration de l'organisation du site relevée par l'expert et des écritures de la commune indiquant que les nuisances avaient, depuis les constatations du rapport d'expertise, été limitées à trois jours par semaine sur une tranche horaire limitée, et en l'absence de troubles visuels et olfactifs présentant un caractère anormal, il y a lieu de ramener l'évaluation du préjudice subi par les époux B... et la condamnation mise à la charge de la COMMUNE DE

BOURG-LA-REINE par les premiers juges à 10 000 euros augmentés des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de la demande au greffe du Tribunal administratif de Versailles ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE

BOURG-LA-REINE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée a verser aux époux B...la somme de 20 000 euros ; qu'il y a lieu, ainsi qu'il a été dit plus haut, de ramener cette condamnation à la somme de 10 000 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de la demande au greffe du Tribunal administratif de Versailles ; que les conclusions incidentes de

M. et Mme B...tendant à ce que l'indemnité accordée par les premiers juges soit portée à 100 000 euros doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des parties les sommes qu'elle réclament au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 13VE00151 de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : La somme que la COMMUNE DE BOURG-LA-REINE a été condamnée à verser à

M. et Mme B...par le jugement n° 0904562 et 0906120 du 13 novembre 2012 du Tribunal administratif de Versailles est ramenée à 10 000 euros.

Article 3 : Le jugement n° 0904562 et 0906120 du Tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Les conclusions incidentes de M. et Mme B...et celles qu'ils ont présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Les conclusions de la COMMUNE DE BOURG-LA-REINE et de la communauté d'agglomération des Hauts de Bièvre fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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Nos 13VE00150...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE00150
Date de la décision : 21/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-01-03-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute. Responsabilité encourue du fait de l'exécution, de l'existence ou du fonctionnement de travaux ou d'ouvrages publics. Victimes autres que les usagers de l'ouvrage public. Tiers.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : SELARL MOLAS et ASSOCIES ; SELARL MOLAS et ASSOCIES ; SELARL LAZARE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-07-21;13ve00150 ?
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