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14/04/2016 | FRANCE | N°13VE00990-15VE03377

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 14 avril 2016, 13VE00990-15VE03377


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse en première instance :

L'association ADEF RESIDENCES a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, qui a transmis sa demande au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, de condamner l'Etat et le département des Hauts-de-Seine à lui verser la somme de 3 828 436,60 euros, assortie des intérêts légaux, en réparation des conséquences dommageables du report de la date d'ouverture de son établissement pour personnes âgées dépendantes de Clamart.

Par un jugement n° 1009081 du 24 janvier 2013, le Tribunal admi

nistratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Première procédure devant la C...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse en première instance :

L'association ADEF RESIDENCES a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, qui a transmis sa demande au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, de condamner l'Etat et le département des Hauts-de-Seine à lui verser la somme de 3 828 436,60 euros, assortie des intérêts légaux, en réparation des conséquences dommageables du report de la date d'ouverture de son établissement pour personnes âgées dépendantes de Clamart.

Par un jugement n° 1009081 du 24 janvier 2013, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Première procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mars 2013 sous le n° 13VE00990, l'association

ADEF RESIDENCES, représentée par Me Claisse, avocat, a demandé à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1009081 en date du 24 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à condamner l'Etat et le département des Hauts-de-Seine à lui verser la somme de 3 828 436,60 euros correspondant aux différents préjudices qu'elle prétend avoir subis du fait du retard enregistré dans la mise en exploitation de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) " l'érable argenté ", assortie des intérêts légaux à compter du 19 avril 2010, date de notification des réclamations préalables ;

2° de condamner l'Etat et le département des Hauts-de-Seine à lui verser cette somme ;

3° de condamner l'Etat et le département des Hauts-de-Seine à lui verser les sommes de 3 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un arrêt n° 13VE00990, en date du 3 juin 2014, la Cour a, avant de statuer sur la requête de l'association ADEF RESIDENCES, ordonné une expertise aux fins de lui fournir tous les éléments de nature, à préciser et à chiffrer les divers chefs de préjudices supportés par l'association ADEF RESIDENCES (troubles dans les conditions de fonctionnement de l'association, atteinte à l'image de l'association, frais financiers et frais divers supportés) qui résultent directement de l'inertie fautive de l'administration pour la période du

25 septembre 2009 au 31 mars 2010.

Par un arrêt n° 14VE01965, en date du 23 octobre 2014, la Cour a rectifié l'erreur matérielle entachant la dernière phrase du point 7 de l'arrêt du 3 juin 2014.

Procédure devant le Conseil d'Etat :

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 août 2014, 28 novembre 2014, 16 mars 2015 et 7 juillet 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département des Hauts-de-Seine a demandé au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 3 juin 2014 et, réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de l'association ADEF RESIDENCES.

Par un arrêt n° 384063 en date du 7 octobre 2015, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 3 juin 2014 rectifié par l'arrêt du 23 octobre 2014 et renvoyé l'affaire devant la Cour.

Seconde procédure devant la Cour :

Par deux mémoires enregistré le 27 janvier 2016 et le 28 mars 2016, sous le n° 15VE03377 l'association ADEF RESIDENCES demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1009081 en date du 24 janvier 2013 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

2° de condamner l'Etat et le département des Hauts-de-Seine à lui verser la somme de 3 828 436,60 euros augmentée des intérêts légaux à compter du 19 avril 2010 , date de sa réclamation préalable, en réparation des divers préjudices subis du fait du report de la date d'ouverture de son établissement pour personnes âgées dépendantes de Clamart ;

3° de mettre à a charge de l'Etat et du département des Hauts-de-Seine la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association ADEF RESIDENCES soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier du fait d'une motivation erronée ;

- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de la remise en cause par l'administration de ses engagements ;

- l'arrêté du 8 mars 2007 a donné naissance à deux décisions administratives obéissant à des régimes juridiques différents d'une part la décision portant autorisation de création d'un établissement, d'autre part, une décision portant habilitation à accueillir les bénéficiaires de l'aide sociale ;

- l'absence de réalisation de la visite de conformité et la non signature de la convention tripartite n'ont pas pour effet de mettre fin à l'arrêté d'autorisation mais seulement de retarder son entrée en vigueur, l'arrêté restant un acte créateur de droits ;

- la réalisation des deux formalités conditionne l'entrée en vigueur de l'autorisation d'ouverture mais pas de l'habilitation financière dont le retrait ne pouvait intervenir du fait de l'intervention des décisions du 12 mai et du 15 septembre 2009 ;

- les deux décisions des 12 mai et 15 septembre 2009 sont contraires aux principes de sécurité juridique et de confiance légitime ;

- elle n'a aucune part dans le retard pris pour l'ouverture de l'EHPAD imputable exclusivement à l'inertie des défendeurs, le délai pris entre la visite de conformité le 25 septembre 2009 et la notification à la requérante de la convention tripartite ;

- il ya bien un lien de causalité entre le retrait fautif de l'habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale et le retard pris dans l'ouverture de l'établissement.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Colrat,

- les conclusions de Mme Lepetit-Collin, rapporteur public,

- les observations de Me A...pour ADEF RESIDENCES et les observations de Me B... pour le conseil départemental des Hauts-de-Seine.

Vu la note en délibéré du 31 mars 2016 présentée par Me Claisse pour l'association ADEF RESIDENCES.

Sur la régularité du jugement attaqué :

1. Considérant que, si l'association ADEF RESIDENCES se prévaut de la motivation erronée du jugement en date du 24 janvier 2013 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, un tel moyen a trait au bien-fondé du jugement ; que, par suite, la requérante ne peut invoquer sur ce fondement l'irrégularité du jugement attaqué ;

2. Considérant que le jugement attaqué répond au point 5 au moyen tiré de l'absence de respect de ses engagements par l'administration ; que, par suite, l'irrégularité du jugement à raison de l'omission à statuer sur ce moyen invoquée par la requérante ne peut qu'être rejetée ;

Sur le fond du litige :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles alors en vigueur : " I.-Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens du présent code, les établissements et les services, dotés ou non d'une personnalité morale propre, énumérés ci-après : / (...) 6° Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-1 du même code : " La création, la transformation ou l'extension des établissements et services mentionnés à l'article L. 312-1 sont soumises à autorisation, sous réserve des dispositions de l'article L. 313-1-1. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-6 du même code : " L'autorisation mentionnée à l'article L. 313-1 ou son renouvellement sont valables sous réserve du résultat d'une visite de conformité aux conditions techniques minimales d'organisation et de fonctionnement mentionnées au II de l'article L. 312-1 dont les modalités sont fixées par décret et, s'agissant des établissements accueillant des personnes âgées dépendantes, de la conclusion de la convention tripartite mentionnée à l'article L. 313-12. / Ils valent, sauf mention contraire, habilitation à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale et, lorsque l'autorisation est accordée par le représentant de l'Etat, seul ou conjointement avec le président du conseil général, autorisation de dispenser des prestations prises en charge par l'Etat ou les organismes de sécurité sociale. " ;

4. Considérant que, par un arrêté conjoint en date du 8 mars 2007, le préfet des Hauts-de-Seine et le président du conseil général des Hauts-de-Seine ont autorisé la création d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) par l'association ADEF RESIDENCES à Clamart et, en l'absence de mention contraire, habilité cet établissement à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale ; que cet arrêté unique portant à la fois autorisation de création de l'établissement et habilitation à recevoir des personnes bénéficiaires de l'aide sociale précise que son entrée en vigueur est subordonnée au résultat de la visite de conformité et à la signature de la convention tripartite prévues à l'article L. 313-16 précité du code de l'action sociale et des familles ;

5. Considérant que l'acte administratif édicté sous condition ne crée aucun droit avant la réalisation desdites conditions ; que, par suite, l'intervention des deux décisions du président du conseil général en date des 12 mai et 15 septembre 2009 refusant d'habiliter l'EHPAD en cause à accueillir des personnes bénéficiaires de l'aide sociale, antérieure à la visite de conformité intervenue le 25 septembre 2009 et à la signature de la convention tripartite le 31 mars 2010, ne peut être regardée comme retirant illégalement l'autorisation accordée sous conditions le 8 mars 2007 ; qu'ainsi, l'association requérante n'est pas fondée à demander à être indemnisée des conséquences du retrait illégal d'un acte administratif ;

6. Considérant que le principe de confiance légitime ne trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique national que dans le cas où la situation juridique dont a à connaitre le juge administratif français n'est régie par le droit de l'Union européenne ; que la situation de l'association ADEF RESIDENCES dans la présente instance n'est régie que par le droit national ; que, par suite, elle ne peut utilement invoquer le principe de confiance légitime ;

7. Considérant que le principe de sécurité juridique impose à l'autorité investie du pouvoir réglementaire d'édicter des mesures transitoires lorsqu'une réglementation nouvelle porte une atteinte excessive à des intérêts publics ou privés en cause ; que la présente affaire n'est pas relative à l'application d'une réglementation nouvelle portant une atteinte excessive aux intérêts de la requérante ; que, par suite, celle-ci n'est pas fondée à se prévaloir de la méconnaissance par l'administration du principe de sécurité juridique ;

8. Considérant que l'association requérante se prévaut de l'inertie administrative et du retard fautif pris par l'Etat et le conseil général des Hauts-de-Seine dans la signature de la convention tripartite prévue à l'article L. 312-12 du code de l'action sociale et des familles ; que même lorsqu'aucun délai ne lui est imposé par les textes applicables, il appartient à l'administration d'instruire les demandes dans un délai raisonnable ; que la durée d'un tel délai doit être appréciée au regard des exigences liées à l'accomplissement des formalités liées à l'instruction des dossiers, à la complexité de la procédure et à l'importance des projets en cause ; qu'il ressort des pièces du dossier que la visite de conformité était un préalable à l'engagement des négociations à la signature de la convention conformément à l'annexe 1 de celle-ci et qu'elle a eu lieu le 25 septembre 2009 ; que le procès-verbal de la visite a été adressée à l'association ADEF RESIDENCES le 4 décembre 2009 ; que c'est à cette date qu'ont pu commencer les négociations devant aboutir à la convention tripartite de financement du fonctionnement de l'EHPAD ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'une réunion s'est tenue entre les parties le 19 février 2010 à l'issue de laquelle des pièces complémentaires ont été demandées à la requérante qui les a transmises le 26 février 2010 ; que la convention a finalement été signée le 31 mars 2010 ; qu'au regard des exigences liées à l'instruction d'un dossier de cet ordre, l'écoulement d'un délai de moins de quatre mois entre la notification du procès-verbal de la visite de conformité et la signature de la convention ne peut être regardé comme révélant un inertie fautive des services de l'Etat ou du département des Hauts-de-Seine de nature à engager la responsabilité de l'administration à l'égard de l'association ADEF RESIDENCES ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices qu'elle allègue avoir subis du fait du retard pris dans l'ouverture de son établissement de Clamart ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association ADEF RESIDENCES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association ADEF RESIDENCES le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le département des Hauts de Seine et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association ADEF RESIDENCES est rejetée.

Article 2 : L'association ADEF RESIDENCES versera au département des Hauts-de-Seine une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE00990-15VE03377
Date de la décision : 14/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Agissements administratifs susceptibles d'engager la responsabilité de la puissance publique.

Santé publique - Établissements privés de santé - Autorisations de création - d'extension ou d'installation d'équipements matériels lourds.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Eugénie ORIO
Rapporteur public ?: Mme LEPETIT-COLLIN
Avocat(s) : CAZIN ; CAZIN ; SCP CLAISSE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-04-14;13ve00990.15ve03377 ?
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