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30/06/2016 | FRANCE | N°14VE01477

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 30 juin 2016, 14VE01477


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA ICM a demandé au Tribunal administratif de Versailles la décharge, en droits et pénalités, des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des intérêts de retard correspondants, qui lui ont été réclamés au titre de la période correspondant aux années 2004, 2005 et 2006 ;

Par jugement n° 0909269 du 13 mars 2014, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement le

16 mai 2014, le 15 janvier 2015 et le 1er juin 2016, la SA ICM, représentée par Me Fasquel, avocat,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA ICM a demandé au Tribunal administratif de Versailles la décharge, en droits et pénalités, des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des intérêts de retard correspondants, qui lui ont été réclamés au titre de la période correspondant aux années 2004, 2005 et 2006 ;

Par jugement n° 0909269 du 13 mars 2014, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement le 16 mai 2014, le 15 janvier 2015 et le 1er juin 2016, la SA ICM, représentée par Me Fasquel, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, de ces droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée.

Elle soutient que :

- étant une holding mixte, elle réalise des opérations dans le champ et hors du champ de la taxe sur la valeur ajoutée, et elle a constitué dès sa création, pour les opérations dans le champ, des secteurs d'activité distincts correspondant d'une part, à ce qui est imposable à la taxe en litige, d'autre part, à ce qui en est exonéré ;

- la totalité de ses opérations imposables correspond à des prestations d'assistance et de coordination fournies à ses filiales et à des prestations d'avances et de prêts de capitaux, opérations qui lui sont facturées par d'autres filiales, le Centre des Affaires de Messine, la SCEA G'M et la SA Centre de Documentation ; ces prestations facturées par ces trois filiales doivent donc être entièrement déduites ;

- compte tenu de l'existence de secteurs distincts dans son activité et de la nature de ses relations avec ses différentes filiales, le droit à déduction de la taxe litigieuse ne pouvait donc être déterminé par application d'un coefficient de prorata prévu à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts ;

- si les honoraires facturés par son commissaire aux comptes n'ont pas de lien direct et immédiat avec une ou plusieurs opérations ouvrant droit à déduction, ils constituent des frais généraux entrant, selon la jurisprudence communautaire, dans le prix de revient des prestations imposables à la taxe sur la valeur ajoutée ;

- les travaux immobiliers ont été exécutés au cours de la période vérifiée exclusivement dans les locaux sous-loués à la SCEA G'M ;

- ses produits financiers revêtaient un caractère accessoire et ne devaient pas être pris en compte dans la fraction déterminant le prorata de déduction global ;

- l'administration a méconnu sa propre interprétation de la loi fiscale.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la sixième directive n°77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977,

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique le rapport de M. Soyez et les conclusions de M. Delage, rapporteur public.

1. Considérant que la SA ICM, holding mixte, créée en 2009, a déduit intégralement la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au cours de la période correspondant aux années 2004 à 2006 ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité portant sur cette période, l'administration a estimé que la taxe déduite grevait des biens et services destinés à des opérations entrant toutes dans le champ de cette taxe, mais qui étaient soit imposables, soit exonérées ; qu'elle a, par suite, rejeté à concurrence de 10 % les droits déduits par la contribuable, et l'a assujettie à des suppléments de droits, augmentés d'intérêts de retard ; que la SA ICM relève appel du jugement n° 0909269 du 13 mars 2014, par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge de ces impositions supplémentaires ;

Sur l'application de la loi fiscale :

2. Considérant, en premier lieu, que les dispositions combinées des articles 256 et 271 du code général des impôts soumettent à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel et prévoient la déduction de cette taxe, lorsqu'elle a grevé les éléments du prix d'une opération imposable ; qu'au cas où un assujetti a des secteurs d'activité soumis à des régimes différents au regard de cette taxe sur la valeur ajoutée, ces secteurs font, en vertu de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts, l'objet de comptes distincts pour l'application du droit à déduction ; qu'en vertu des dispositions combinées de l'article 273 de ce code et de l'article 212 de la même annexe II, les redevables de la taxe sur la valeur ajoutée qui ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction, sont autorisés à déduire partiellement la taxe qui a grevé les immobilisations utilisées pour effectuer ces activités ; que le droit à déduction est alors déterminé par application d'une fraction comportant, au numérateur, le montant annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations ouvrant droit à déduction y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations et, au dénominateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations ouvrant ou n'ouvrant pas droit à déduction, et de l'ensemble des subventions, y compris celles qui ne sont pas directement liées au prix de ces opérations ; qu'en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée d'amont grevant des biens et services, l'article 219 de cette même annexe II prévoit, d'une part, la déduction de la taxe lorsque ces biens et services concourent exclusivement à la réalisation d'opérations ouvrant droit à déduction, d'autre part, sa non-déduction lorsqu'ils ne concourent pas exclusivement à la réalisation d'opérations n'ouvrant pas droit à déduction, et enfin l'application au droit à déduction de la fraction prévue à l'article 212 en cas d'utilisation concurrente de ces biens et services à la réalisation d'opérations dont seules certaines ouvrent droit à déduction ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA ICM fournit à ses filiales des prestations d'assistance et de coordination, leur consent des avances et des prêts contre intérêts, et leur sous-loue des immeubles nus à usage commercial ; que si ces trois types d'opérations entrent dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, les premières sont imposables de plein droit à la taxe sur la valeur ajoutée et les deuxièmes sur option, souscrite en l'espèce conformément à l'article 260-2° c du code général des impôts, les dernières étant exonérées, en vertu de l'article 261 C 1° a du même code ; que l'administration a constaté que l'intéressée qui avait déduit, comme il a été dit, la totalité de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les biens et services acquis par elle au cours de la période vérifiée, n'avait pas constitué de secteurs distincts d'activité pour celles de ces opérations qui sont imposables ou exonérées ; que, par suite, le vérificateur a déterminé le droit à déduction de la SA ICM par application du coefficient prévu à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts ;

4. Considérant que, pour contester cette méthode de proratisation globale, la SA ICM se prévaut, dans sa réclamation du 25 mars 2009 et au contentieux, d'une sectorisation opérée par elle-même de ses activités, selon que celles-ci sont imposables à la taxe en litige ou en sont exonérées ; que, selon elle, il y aurait lieu, dans le cadre de cette analyse, de rattacher à son seul secteur imposable, correspondant à l'assistance et à la coordination de ses filiales et à la location de locaux nus à usage professionnel, la totalité des biens et services qui lui ont été facturés par ses autres filiales ; que seraient ainsi concernés tant le reporting, l'établissement des déclarations fiscales et le suivi des audits, assurés par le Centre d'affaires de Messine, que l'enregistrement comptable, le règlement de factures et l'établissement des fiches de paye et de déclarations sociales, assurés par le Centre de Documentation, et la gestion par la SCEA G'M du parc immobilier commercial ; qu'il en irait de même des travaux immobiliers réalisés sur les immeubles sous-loués et des honoraires du commissaire aux comptes de la holding dont la mission porterait uniquement sur le secteur imposable ; que, toutefois, il est constant que l'activité exonérée de taxe sur la valeur ajoutée, consistant en avances et prêts aux

filiales de la holding, représente au cours des années vérifiées entre 10 et 15 % du chiffre d'affaires ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette mise à disposition de capitaux pourrait être assurée sans qu'il soit à aucun moment recouru à des services bancaires facturés à la holding, à des prestations servies par le Centre de Documentation, le Centre d'affaires Messine ou la SCEA G'M et à des certifications des comptes assurées par la SA ICM ; qu'en raison de ce caractère transversal des prestations de biens et services facturées à la société requérante, caractère que ne contredisent pas utilement les simples tableaux Excel élaborés par celle-ci, les biens et services en question doivent être regardés comme utilisés tant pour les besoins des activités imposables de celle-ci que pour ceux de ses activités exonérées ; que la méthode retenue par l'administration fiscale n'apparaît donc pas inappropriée à l'activité de la SA ICM ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu du principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée, issu notamment de la directive du 17 mai 1977 susvisée relative à un système harmonisé de taxe sur la valeur ajoutée, il convient de déduire d'une opération imposable à cette taxe l'intégralité de la taxe ayant grevé les biens et services consommés pour la réalisation de cette opération ; que la SA ICM soutient qu'en ne déduisant qu'à hauteur de 90 %, la taxe ayant grevé les honoraires du commissaire aux comptes à l'occasion de la certification, au cours de la période vérifiée, de ses comptes, l'administration porte atteinte à ce principe ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 4, l'utilisation indistincte des biens et services pour les besoins de l'activité imposable et de l'activité exonérée de la société requérante, conduit à déterminer un taux de déduction partielle de 90 % en vertu des dispositions précitées de l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts ; que, par suite, l'application de ce taux à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ne porte pas atteinte aux principes mentionnés ci-dessus ;

6. Considérant, en troisième lieu, que la SA ICM soutient que les produits financiers revêtent un caractère accessoire ; qu'il résulte cependant de l'instruction que le montant allégué de ces produits est fondé sur la seule activité de ses trois filiales prestataires déjà mentionnées, à l'exclusion non explicitée des honoraires des autres intermédiaires tels que les rémunérations des commissaires aux comptes et des consultants engagés pour la coordination et l'assistance aux filiales ; qu'en l'absence de tout argument en ce sens, il n'est nullement établi que les produits financiers perçus n'impliquaient qu'un taux d'utilisation limité au dixième des biens et services grevés de taxe sur la valeur ajoutée acquis par elle ; qu'ainsi, le moyen tiré du bien-fondé de la déduction en totalité de la taxe en litige ne peut qu'être écarté ;

Sur l'interprétation de la loi fiscale :

7. Considérant que SA ICM invoque, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la documentation administrative 3-D-1722 du 2 novembre 1996, en ses paragraphes n°1, 23 et 24, et les instructions administratives 3 D-2-85 du 7 février 1985 et

3 A -1-06 du 10 janvier 2006, en son paragraphe n°2 ; que, toutefois, cette doctrine administrative ne comporte pas une interprétation différente de la loi fiscale ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA ICM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société ICM est rejetée.

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N° 14VE01477


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE01477
Date de la décision : 30/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-03 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Cas des entreprises qui n'acquittent pas la TVA sur la totalité de leurs affaires.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : SELAFA CONSEILS REUNIS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-06-30;14ve01477 ?
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