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19/07/2016 | FRANCE | N°14VE01370

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 juillet 2016, 14VE01370


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS LRMD, substituée aux droits et obligations de la SA Prisunic Exploitation, a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'ordonner la restitution des cotisations de taxe sur les achats de viande auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier au 30 novembre 2001, assorties des intérêts moratoires.

Par jugement n° 1202705 du 12 mars 2014, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête e

nregistrée le 06 mai 2014 et deux mémoires enregistrés les 8 avril et le 13 novembre 2015, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS LRMD, substituée aux droits et obligations de la SA Prisunic Exploitation, a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'ordonner la restitution des cotisations de taxe sur les achats de viande auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier au 30 novembre 2001, assorties des intérêts moratoires.

Par jugement n° 1202705 du 12 mars 2014, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 06 mai 2014 et deux mémoires enregistrés les 8 avril et le 13 novembre 2015, la SAS LRMD, venant aux droits et obligations de la

SA Prisunic Exploitation, représentée par Me Fasquel, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'ordonner la restitution des cotisations de taxe sur les achats de viande auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier au 30 novembre 2001, assorties des intérêts moratoires.

La SAS LRMD soutient que :

- l'autorité de la chose jugée n'est pas susceptible d'être attachée au jugement n° 0503046 du 7 mai 2008 du Tribunal administratif de Versailles qui n'est pas définitif, ce jugement ayant été frappé d'appel ;

- la Cour administrative d'appel de Versailles ayant rejeté l'appel dirigé contre ce jugement en raison de la tardiveté de la demande de première instance, et le pourvoi en cassation n'ayant pas été admis, la société pouvait présenter dans les délais une nouvelle réclamation ;

- la procédure utilisée par l'administration pour rétablir les impositions dégrevées est irrégulière, en l'absence de procédure de rectification et d'émission d'un titre de recouvrement ;

- la demande est fondée sur une cause juridique distincte, fondée sur l'absence d'exécution de la décision de dégrèvement du 2 septembre 2004, en matière de recouvrement, et non d'assiette ;

- les différents recours engagés par la société ont interrompu le cours de la prescription quadriennale.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nicolet, président assesseur,

- et les conclusions de Mme Rudeaux, rapporteur public.

1. Considérant que la SAS LRMD, venant aux droits et obligations de la SA Prisunic Exploitation, après avoir déclaré, conformément aux dispositions de l'article 302 bis ZD du code général des impôts alors en vigueur, la valeur de ses achats et payé la taxe sur les achats de viande dont elle estimait être redevable au titre de la période du 1er janvier au 30 novembre 2001, en a demandé la restitution par une réclamation en date du 30 décembre 2003 ; que, par une décision du 2 septembre 2004, l'administration lui a accordé le dégrèvement des ces impositions ; que, revenant sur cette décision de dégrèvement, l'administration a notifié à la société une décision en date du 7 décembre 2004 par laquelle elle a rejeté sa réclamation ; que la SAS LRMD a saisi, le 6 avril 2005, le Tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant à la restitution de ces taxes, pour un montant de 2 419 323 euros, qui a été rejetée par un jugement de ce tribunal n° 0503046 en date du 7 mai 2008 ; que l'appel formé contre ce jugement a été rejeté par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Versailles n° 08VE02282 du 4 novembre 2010 ; que, par une décision du 20 décembre 2011, le Conseil d'Etat a refusé d'admettre le pourvoi formé contre cet arrêt ; que la SAS LRMD relève appel du jugement du

12 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la restitution des cotisations de taxe sur les achats de viande auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier au 30 novembre 2001 ;

Sur les conclusions tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viande :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales :

" Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire. " ;

3. Considérant que, contrairement à ce que soutient la société requérante, ses conclusions tendant à la restitution des cotisations de taxe sur les achats de viande auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier au 30 novembre 2001, par une décision de rétablissement de ces impositions, postérieure à la décision de dégrèvement accordée le 2 septembre 2004, relèvent du contentieux de l'assiette de ces impositions, nonobstant la circonstance qu'elles soient présentées sous couvert d'une demande d'exécution de la décision de dégrèvement, et ne relèvent pas, par suite, d'un litige de recouvrement de ces impositions ;

En ce qui concerne l'exception de chose jugée par le Tribunal administratif de Versailles :

4. Considérant que la société requérante a saisi le Tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant à la restitution des cotisations de taxe sur les achats de viande auxquelles elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 2001 au 30 novembre 2001 ; que par un jugement du 7 mai 2008, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande au fond ; que par un arrêt du 4 novembre 2010 la Cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par l'intéressée contre ce jugement sans examiner le bien-fondé de ses prétentions, par le motif que la demande formée devant le tribunal administratif était irrecevable en raison de son caractère tardif ; que le motif ainsi retenu par le juge d'appel s'est rétroactivement substitué aux motifs retenus par les premiers juges ; que, par suite, l'exception de chose jugée ne peut plus être légalement opposée à la nouvelle demande présentée par la société requérante devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, tendant à la restitution de ces mêmes impositions ; que le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 12 mars 2014, qui a opposé à tort cette exception de chose jugée aux conclusions de la société LRMD tendant à la restitution des cotisations de la taxe sur les achats de viande, auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier au 30 novembre 2001, doit être annulé ; qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer en examinant l'ensemble des moyens invoqués tant en première instance qu'en appel ;

En ce qui concerne les autres fins de non-recevoir opposées par l'administration :

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation./Toutefois, dans les cas suivants, les réclamations doivent être présentées au plus tard le 31 décembre de l'année suivant celle, selon le cas : / a) De la réception par le contribuable d'un nouvel avis d'imposition réparant les erreurs d'expédition que contenait celui adressé précédemment ; / b) Au cours de laquelle les retenues à la source et les prélèvements ont été opérés s'il s'agit de contestations relatives à l'application de ces retenues ; / c) Au cours de laquelle le contribuable a eu connaissance certaine de cotisations d'impôts directs établies à tort ou faisant double emploi. " ;

6. Considérant, en premier lieu, que l'administration, postérieurement à la décision de dégrèvement qui a été prise le 2 septembre 2004, a procédé au rétablissement des cotisations de taxe sur les achats de viande dont la société s'était acquittée au titre de la période du 1er janvier au 30 novembre 2001 ; que la société LRMD soutient, sans être contestée sur ce point, qu'aucun avis de mise en recouvrement ne lui a été notifié à cette fin ; que, par suite, la date du versement de la taxe sur les achats de viande, dont l'imposition a été annulée par la décision de dégrèvement, prescrite par les dispositions précitées du b de la première partie de l'article

R. 196-1 du livre des procédures fiscales, ne saurait être opposée à la société requérante ;

7. Considérant, en second lieu, que l'administration ne saurait utilement faire valoir que la décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux SAS SOMADIS du 16 mars 2011,

n° 333860, ne constituerait pas un événement au sens du c de la première partie de l'article

R. 196-1 du livre des procédures fiscales, dès lors que la société LRMD n'entend pas se prévaloir de cette décision juridictionnelle à cette fin ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales : " L'action doit être introduite devant le tribunal compétent dans le délai de deux mois à partir du jour de la réception de l'avis par lequel l'administration notifie au contribuable la décision prise sur la réclamation, que cette notification soit faite avant ou après l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 198-10. / Toutefois, le contribuable qui n'a pas reçu la décision de l'administration dans un délai de six mois mentionné au premier alinéa peut saisir le tribunal dès l'expiration de ce délai. " ;

9. Considérant que, bien qu'elle ait été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise le 27 mars 2012, avant l'expiration du délai de six mois prévu à l'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales, qui a suivi le dépôt de sa réclamation en date du 25 novembre 2011, cette demande était recevable dès lors que le tribunal administratif n'a statué que par jugement en date du 12 mars 2014, soit après l'expiration de ce délai ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions en litige :

10. Considérant que lorsque l'administration, saisie d'une réclamation en ce sens, prononce le dégrèvement d'une imposition, sa décision a pour effet d'annuler le titre fondant le paiement de cette imposition, que ce titre résulte d'un acte de l'administration ou, si les dispositions applicables le prévoient, d'une simple déclaration du redevable ; que la circonstance que les sommes déjà versées par le contribuable en exécution de ce titre ne lui aient pas été remboursées en méconnaissance des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ou n'aient pas fait l'objet d'une compensation pour avoir paiement d'autres impositions dues, est sans incidence sur la portée de la décision prononçant le dégrèvement ; qu'il s'ensuit que lorsque l'administration estime ultérieurement avoir consenti un tel dégrèvement à tort, il lui appartient, après avoir averti le contribuable de la persistance de son intention de l'imposer, d'émettre un nouveau titre en vue de procéder au recouvrement des impositions qu'elle entend rétablir ;

11. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, il n'est pas contesté que l'administration a procédé au rétablissement de la taxe acquittée par la société, postérieurement à la décision de dégrèvement du 2 septembre 2004, en s'abstenant d'émettre un nouveau titre en vue de procéder au recouvrement des impositions qu'elle entendait rétablir ; que la société requérante est ainsi fondée à soutenir que les impositions en litige ont été rétablies sans titre, et doivent par suite être déchargées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : " Quand l'État est condamné à un dégrèvement d 'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal (...) " ; qu'en vertu du 3ème alinéa de l'article R. 208-1 du même livre, ces intérêts moratoires " sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts " ;

13. Considérant qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable responsable du remboursement et la société requérante; que, par suite, les conclusions de la requête tendant au paiement des intérêts moratoires sont irrecevables ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1202705 du 12 mars 2014 est annulé.

Article 2 : Les cotisations de taxe sur les achats de viande auxquelles la société LRMD a été assujettie, au titre de la période du 1er janvier au 30 novembre 2001, lui seront restituées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 14VE01370


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14VE01370
Date de la décision : 19/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-04 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxes sur le chiffre d`affaires et taxes assimilées autres que la TVA.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Philippe NICOLET
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : SELAFA CONSEILS REUNIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-07-19;14ve01370 ?
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