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05/04/2018 | FRANCE | N°17VE02994

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 05 avril 2018, 17VE02994


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) BEAUTE NUTRITION SUCCES a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Etat à lui verser une provision de

1 851 497,60 euros augmentée des intérêts moratoires à compter du 14 juin 2016, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 1610972 du 15 septembre 2017, le juge des référés du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une r

equête et un mémoire enregistrés les 2 octobre 2017 et 12 mars 2018, la SA BEAUTE NUTRITION SUCCES, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) BEAUTE NUTRITION SUCCES a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Etat à lui verser une provision de

1 851 497,60 euros augmentée des intérêts moratoires à compter du 14 juin 2016, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 1610972 du 15 septembre 2017, le juge des référés du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 octobre 2017 et 12 mars 2018, la SA BEAUTE NUTRITION SUCCES, représenté par Me Korkmaz, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler cette ordonnance ;

2° de condamner l'Etat à lui verser une provision de 1 851 497,60 euros augmentée des intérêts moratoires à compter du 14 juin 2016 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SA BEAUTE NUTRITION SUCCES soutient que l'obligation dont elle se prévaut à l'encontre de l'Etat n'est pas sérieusement contestable ; elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle l'administration a mis à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés assorties d'intérêts de retard ainsi que de majorations et pénalités au titre de ses exercices clos en 1992 et 1993 ; elle a successivement saisi le Tribunal administratif de Paris, la Cour administrative d'appel de Paris et le Conseil d'État aux fins d'obtenir la décharge de ces impositions ainsi que des pénalités et majorations y afférentes ; à l'issue de ces différentes procédures, elle disposait d'une créance globale sur le Trésor public de 2 213 962,11 euros correspondant, à hauteur de 1 065 099,00 euros au dégrèvement des sommes mises à sa charge au titre des rectifications concernant son exercice clos en 1992, et, à concurrence de 1 148 863,11 euros, aux intérêts moratoires sur cette somme ; l'administration ne pouvait légalement lui opposer la compensation de sa dette avec une somme de

1 851 497,60 euros qui n'était ni liquide, ni exigible en méconnaissance des dispositions du paragraphe n°20 du bulletin officiel des finances publiques-impôts publié le 12 septembre 2012 référencé BOI-REC-PREA-10-30 ; la créance du comptable du Trésor de 1 851 497,60 euros n'a en effet pas été admise définitivement à son passif et lui est définitivement inopposable en application de l'article L. 622-26 du code de commerce ; cette créance était, en toute hypothèse, prescrite depuis le 15 mai 2012 en raison de l'absence d'actes de poursuites interruptifs de prescription engagés par le trésorier de Courbevoie dans les 4 ans suivant le jugement du Tribunal administratif de Paris du 14 mai 2008 rendant exigibles les impositions correspondantes ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Campoy,

- les conclusions de Mme Belle, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., substituant Me Korkmaz, pour la SA BEAUTE NUTRITION SUCCES.

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société à responsabilité limitée (SARL) Beauté Nutrition qui est, par la suite, devenue la société anonyme (SA) BEAUTE NUTRITION SUCCES, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle l'administration a mis à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés assorties d'intérêts de retard ainsi que de majorations et pénalités au titre de ses exercices clos en 1992 et 1993 d'un montant respectif de 1 472 697 euros et de 2 106 738 euros ; qu'après avoir successivement saisi le Tribunal administratif de Paris, la Cour administrative d'appel de Paris et le Conseil d'État aux fins d'obtenir la décharge de ces impositions ainsi que des pénalités et majorations correspondantes, cette société restait redevable de la somme de 1 851 497,60 euros au titre des rectifications dont elle avait fait l'objet au titre de son exercice clos en 1993, et disposait d'une créance globale sur le Trésor public de 2 213 962,11 euros correspondant, à hauteur de 1 065 099,00 euros, au dégrèvement des sommes mises à sa charge au titre de son exercice clos en 1992, et, à concurrence de 1 148 863,11 euros, aux intérêts moratoires sur cette somme ; que, par un avis de compensation du 14 juin 2016, la SA BEAUTE NUTRITION SUCCES a été informée qu'en application des dispositions de l'article L. 257 B du livre des procédures fiscales, le comptable public compétent allait affecter au paiement de la somme de 1 851 497,60 euros dont elle restait redevable, le remboursement de 2 213 962,11 euros constatés à son bénéfice et que, par conséquent, la restitution effectuée serait limitée à la somme de 362 464,51 euros ; qu'après avoir vainement contesté cette compensation le 5 août 2016, cette société a demandé le 22 novembre 2016 au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise la condamnation de l'Etat à lui verser une provision de 1 851 497,60 euros augmentée des intérêts moratoires sur cette somme à compter du 14 juin 2016, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative ; qu'elle relève appel de l'ordonnance du 15 septembre 2017 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur le caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont se prévaut la SA BEAUTE NUTRITION SUCCES à l'encontre de l'Etat :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 257 B du livre des procédures fiscales : " Le comptable public compétent peut affecter au paiement des impôts, droits, taxes, pénalités ou intérêts de retard dus par un redevable les remboursements, dégrèvements ou restitutions d'impôts, droits, taxes, pénalités ou intérêts de retard constatés au bénéfice de celui-ci. Pour l'application du premier alinéa, les créances doivent être liquides et exigibles. " ; qu'aux termes de l'article R. 257 B-1 du même livre : " Lorsqu'il a exercé la compensation prévue à l'article L. 257 B, le comptable public compétent notifie au redevable un avis lui précisant la nature et le montant des sommes affectées au paiement de la créance qu'il a prise en charge à sa caisse. Les effets de cette compensation peuvent être contestés dans les formes et délais mentionnés aux articles L. 281 et R. * 281-1 à R. * 281-5. " ;

4. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. " ;

5. Considérant, en premier lieu, la SA BEAUTE NUTRITION SUCCES fait valoir que sa créance sur l'Etat n'est pas sérieusement contestable dès lors, que la somme de 1 851 497,60 euros au titre de laquelle l'administration lui oppose la compensation, n'est ni liquide, ni exigible ; qu'à l'appui de sa demande, elle fait valoir qu'un jugement du Tribunal de commerce de Versailles du 25 novembre 1997 a ouvert à son égard une procédure de redressement judiciaire et qu'un autre jugement de la même juridiction du 24 juin 1999 a arrêté son plan de continuation mais qu'en vertu d'une ordonnance du juge commissaire du Tribunal de commerce de Versailles du 5 mai 2014, et d'un jugement de la même juridiction du 6 mai 2014, le greffe de cette juridiction aurait porté sur la liste des créances produites à l'occasion de cette procédure, au regard de la créance de l'administration fiscale, la mention " créance irrecevable " et que, par jugement du 21 juillet 2016, le Tribunal de commerce de Versailles aurait finalement clôturé les opérations de redressement judiciaire de la société sans prendre en compte cette créance ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que la somme de 1 851 497,60 euros au titre de laquelle l'administration oppose la compensation, fait partie des créances déclarées par le trésorier de Courbevoie à titre définitif hypothécaire pour un total de 3 939 641,47 euros

(25 842 354 F), reprise sur la liste des créances déclarées n°2 déposée au greffe du Tribunal de commerce de Versailles le 1er octobre 1998 à la suite du jugement de ce même tribunal du 25 novembre 1997 ; que les mentions manuscrites portées sur cette liste, telle qu'elle est produite par la requérante, ne permettent pas d'établir que la créance de l'administration fiscale serait éteinte du fait de sa non-déclaration à la procédure de redressement judiciaire ;

6. Considérant, en second lieu, que si la SA BEAUTE NUTRITION SUCCES soutient que la créance de l'administration était, de toute manière, prescrite depuis le

15 mai 2012 en raison de l'absence d'actes de poursuites interruptifs de prescription engagés par le trésorier de Courbevoie dans les quatre ans suivant le jugement du Tribunal administratif de Paris du 14 mai 2008 rendant exigibles les impositions litigieuses, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le jugement précité du tribunal administratif de Paris lui a été notifié le 19 juin 2008 et qu'il a ainsi fait courir un nouveau délai de prescription de quatre ans, expirant le 19 juin 2012, d'autre part, que le comptable a saisi le juge de la procédure collective de trois demandes présentées le 4 septembre 2008, le 21 novembre 2008 et le 19 septembre 2011, lesquelles ont interrompu le délai de prescription et fait courir un nouveau délai de quatre ans qui expirait le 19 septembre 2015 et enfin que, durant ce délai, la société a été destinataire d'une mise en demeure de payer du 27 juillet 2012 ;

7. Considérant que, dans ces conditions, eu égard à l'office du juge du référé provision, l'obligation dont se prévaut la société requérante à l'encontre de l'Etat ne peut être regardée comme non sérieusement contestable au sens des dispositions précitées de l'article

R. 541-1 du code de justice administrative ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir partielle opposée par le ministre, la SA BEAUTE NUTRITION SUCCES n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande de provision ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA BEAUTE NUTRITION SUCCES est rejetée.

2

N° 17VE02994


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02994
Date de la décision : 05/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015-04 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé-provision. Conditions.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Luc CAMPOY
Rapporteur public ?: Mme BELLE
Avocat(s) : SCP ROBIN et KORKMAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-04-05;17ve02994 ?
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