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12/04/2018 | FRANCE | N°15VE01854

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 12 avril 2018, 15VE01854


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...I...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des cotisations sociales, en droits et pénalités, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009.

Par un jugement n° 1200910 du 11 juin 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2015, M. et MmeI...

, représentés par la SCP Boquet Niclet Lageat, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...I...ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des cotisations sociales, en droits et pénalités, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009.

Par un jugement n° 1200910 du 11 juin 2014, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2015, M. et MmeI..., représentés par la SCP Boquet Niclet Lageat, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge des suppléments d'imposition ;

3° d'ordonner le sursis de paiement, sur le fondement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur profit d'une somme de

1 500 euros, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration a méconnu les articles 13 et 83-3 du code général des impôts et sa propre doctrine, exprimée par la réponse ministérielle à M.E..., député, du 28 décembre 1988, en rejetant la déduction des frais de documentation d'un montant de 946 euros en 2008 et 1 348 euros en 2009 ;

- elle a également méconnu la loi fiscale et la réponse ministérielle à M.F..., député, en date du 2 novembre 1992, en rejetant la déduction des frais de transports en commun, d'un montant de 1 015 euros, exposés en 2009 par Mme I...pour ses recherches d'emploi ;

- elle a encore méconnu la loi fiscale et les réponses ministérielles à M.D..., député, en date du 15 mars 1979, à M.F..., député, en date du 6 juin 1983, et à M.G..., député, en date du 6 juillet 1998, ainsi que l'instruction fiscale 5 F-2543 n° 18 du 10 février 1999, en rejetant la déduction des frais d'avocats exposés par la requérante, en 2008 et 2009, dans des litiges avec d'anciens employeurs ;

- elle n'était fondée à refuser la déduction des pensions alimentaires d'un montant de 1 286 euros en 2008 et 408 euros en 2009, versées à la mère du requérant, ni au regard de l'article 156 II -2° du code général des impôts, ni au regard de l'instruction fiscale 5 B-2421 (n° 4) du 1er septembre 1999.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Soyez,

- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.

1. Considérant que M. et Mme I...relèvent appel du jugement du 11 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et de contributions sociales, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009 ;

Sur les frais de documentation, de déplacement et d'avocats exposés par Mme I... :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 13 du code général des impôts : " Le (...) revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu. " ; qu'aux termes de l'article 83 du même code : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut, après défalcation des cotisations, contributions et intérêts mentionnés aux 1° à 2° quinquies et à l'article 83 bis ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu (...) Le montant de la déduction forfaitaire pour frais professionnels ne peut être inférieur à 364 euros ou à 797 euros pour les personnes inscrites en tant que demandeurs d'emploi depuis plus d'un an, sans pouvoir excéder le montant brut des traitements et salaires. Cette disposition s'applique séparément aux rémunérations perçues par chaque membre du foyer fiscal désigné aux 1 et 3 de l'article 6. Les sommes figurant au troisième alinéa sont révisées chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu (...) Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels, (...) Les frais de déplacement de moins de quarante kilomètres entre le domicile et le lieu de travail sont admis, sur justificatifs, au titre des frais professionnels réels (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir déduire ses frais réels, le contribuable doit fournir des justifications suffisamment précises pour permettre d'apprécier le montant des frais effectivement exposés par lui pour l'exercice de sa profession ; qu'ainsi, il ne peut se borner à présenter un calcul théorique de ces frais, ni faire état de dépenses réelles sans établir qu'elles constituent des frais inhérents à sa fonction ou à son emploi ;

3. Considérant, en premier lieu, que les requérants soutiennent que Mme I...a exposé des frais de documentation d'un montant de 946 euros en 2008 et de 1 348 euros en 2009, qui étaient nécessités par son activité salariée dans divers établissements d'hébergement pour personnes handicapées ; que relèveraient de ces frais des achats d'équipements de téléphonie mobile, du matériel et des fournitures de bureau, des fax, des abonnements de téléphone et internet ; qu'à cet effet, ils font valoir que les astreintes auxquelles Mme I...était assujettie à domicile, entre 19h et 8h, l'obligeaient à s'équiper en conséquence et que son employeur atteste ne pas avoir pris en charge des frais de formation professionnelle, en raison d'une semaine par mois, du 7 janvier 2008 au 3 février 2009, en vue de la soutenance d'un mastère 2 à l'université Paris 13 ; que, toutefois, les obligations professionnelles de Mme I...ne sont pas de nature à elles seules à entraîner ces diverses dépenses ; que, tout particulièrement, le suivi par la requérante d'une formation professionnelle n'était pas de nature à justifier les dépenses de téléphonie, telles que l'acquisition d'un smartphone en 2009 ; qu'au surplus, ces dépenses ne sont pas assorties des justifications suffisamment précises pour permettre leur rattachement à l'activité professionnelle de la requérante ; que, par ailleurs, certaines factures ne sont pas nominatives, et d'autres sont établies à un autre nom que celui de Mme I...; qu'enfin, les requérants ne sauraient se prévaloir, à l'appui de l'absence de justification de certaines dépenses, de procédures prud'homales en cours se rapportant à des années antérieures ; qu'ainsi, le moyen tiré du rejet indu de ces frais de documentation doit être écarté en application tant de la loi fiscale que de l'instruction fiscale et de la réponse ministérielle à M.E..., député, du

28 décembre 1988 ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que Mme I...expose que ses prospections d'emploi depuis son licenciement, en février 2009, ont nécessité de nombreux déplacements pour des entretiens de recrutement ; mais que, n'ayant pas annexé à la déclaration de revenus du ménage en 2008 et 2009 de justificatifs, elle se contente de verser au dossier une facture globale établie par la SNCF, d'un montant de 1 015 euros ; qu'en l'absence, d'une part, de copies des titres de transport nominatifs, mentionnant les destinations, d'autre part, de preuves de rendez-vous pour des entretiens professionnels, elle ne justifie pas, par cette seule facture globale, de l'objet professionnel de ces déplacements ; qu'en ce qui concerne les entretiens avérés de recrutement du 2 avril et du 6 juillet 2009, les titres de transport produits ne concordent pas avec ces dates de rendez-vous professionnels ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées au point 2 du 3° de l'article 83 du code général des impôts doit être écarté ;

5. Considérant que, pour les mêmes motifs, M. et Mme I...invoquent en vain, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la réponse ministérielle à M.F..., en date du 2 novembre 1992, selon laquelle la déduction de ces frais de déplacement ne peut être admise que sous réserve que l'intéressé soit en mesure d'en justifier la réalité et le montant ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que par ses recours devant la Cour d'appel de Colmar, le Tribunal de grande instance de Bobigny et la Cour d'appel de Paris, Mme I...a recherché la responsabilité de son employeur et l'octroi de dommages et intérêts pour atteinte à son statut de délégué syndical, entrave au fonctionnement du comité d'hygiène et sécurité et des conditions de travail et à l'exercice des fonctions de délégué du personnel ; que, dès lors, ces actions ne peuvent être regardées comme engagées en vue d'indemnités pour licenciement abusif, imposables dans la catégorie des traitements et salaires ; qu'en revanche, par son recours devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, le 24 mars 2005, elle a demandé l'annulation de l'autorisation de licenciement accordée le 27 janvier 2005 en sa qualité de salarié protégé ; et que, dans le litige qui l'opposait, devant le conseil des prud'hommes, à son ancien employeur, l'APEI de Nanterre, elle réclamait des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse, assimilables à des salaires ; mais que, dans ce dernier litige, elle demandait également des dommages et intérêts, alors que les factures d'avocat produites ne distinguent pas la part d'honoraires consacrée au versement des salaires, seuls déductibles de ses revenus, de la part consacrée à la réparation du préjudice ; qu'en tout état de cause, Mme I...n'établit pas avoir acquitté les frais d'avocats dans ces deux litiges relatifs à des licenciements ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code général des impôts doit être écarté ;

7. Considérant, dans ces conditions, que les requérants ne peuvent se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des dispositions du paragraphe 11 de l'instruction 5F-2543 du 10 février 1999, afférent aux " dépenses exposées par les salariés pour l'exercice du mandat de représentation du personnel dont ils peuvent être investis dans l'entreprise ", dépenses qui n'ont pas trait aux frais d'avocat exposés en cas d'atteinte au statut de salarié protégé ; que, pour les mêmes raisons, ils invoquent en vain le bénéfice du paragraphe 18 de cette instruction, qui a trait aux " honoraires versés à un avocat dans le cadre de procédures prud'homales engagées contre l'employeur en vue du paiement des salaires ", ainsi que les réponses ministérielles à M.D..., député, en date du 15 mars 1979, à M.F..., député, en date du 6 juin 1983, et à M.G..., député, en date du 6 juillet 1998 ;

Sur les pensions alimentaires :

8. Considérant qu'en vertu du 2° du II de l'article 156 du code général des impôts, sont seules déductibles pour la détermination du revenu net imposable les pensions alimentaires " répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 du Code civil " ; qu'aux termes de l'article 205 du code civil : " Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin " et qu'aux termes de l'article 208 du même code : " Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les contribuables qui déduisent ou demandent à déduire du montant global de leurs revenus, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, les versements qu'ils ont faits à leurs parents privés de ressources doivent justifier devant le juge de l'impôt de l'importance des aliments dont le paiement a été rendu nécessaire par le défaut de ressources suffisantes de leurs ascendants ;

9. Considérant que M. et MmeI..., pour établir l'état de besoin de la mère du requérant, qui demeure au Pérou, produisent une attestation datant de 2005 d'un fonctionnaire de police péruvien, ainsi qu'un mail du 29 juin 2010 attestant que cette dame n'est pas imposable ; mais que le premier document se borne à retranscrire une déclaration de Mme B...A..., affirmant qu'elle ne vit que des subsides de son fils ; que le second document, produit seulement en espagnol, ne porte ni signature ni cachet et n'a donc pas date certaine ; qu'ainsi, l'état de besoin prévu à l'article 205 du code civil n'est pas établi, en particulier pour les années 2008 et 2009 en litige ;

10. Considérant qu'au surplus, les requérants produisent copie de virements qui datent des années 2005 et 2006 et ne peuvent, par suite, être déduits au titre des revenus des années en litige ; que les transferts d'argent datant des années en litige sont destinés à des tiers dont rien n'assure qu'ils en reversent le montant à la mère de M.I... ; qu'il suit de là que ces transferts ne peuvent être déduits au titre des pensions alimentaires en application du 2° du II de l'article 156 du code général des impôts ;

11. Considérant que M. et Mme I...ne peuvent se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle à M. H... du 28 mars 1983, reprise par la documentation administrative de base 5 B 2421, cette dernière se bornant à rappeler que le montant de la pension déductible dépend des circonstances propres à chaque cas particulier et ne contenant par là même aucune interprétation formelle de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre des finances et des comptes publics, que

M. et Mme I...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande en décharge des sommes en litige ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi susvisée du

10 juillet 1991 doivent donc être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au sursis de paiement :

13. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L 277 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Le contribuable qui conteste le

bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge peut, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, être autorisé à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. Le sursis de paiement ne peut être refusé au contribuable que s'il n'a pas constitué auprès du comptable les garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor " ; qu'aux termes du quatrième alinéa du même article : " (...) L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent " ;

14. Considérant que ces dispositions, qui ont pour objet de permettre de surseoir au paiement des impositions lorsque le sursis de paiement a été formé par réclamation contentieuse, n'ont de portée que pendant la durée de l'instance devant le tribunal administratif ; que, sitôt que les premiers juges se sont prononcés au fond, leur décision rend à nouveau exigibles les impositions dont ils n'ont pas prononcé la décharge ; que, par suite, M. et Mme I...ne sont pas fondés à demander le maintien du sursis de paiement qui leur a été accordé ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme I...est rejetée.

N° 15VE01854 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE01854
Date de la décision : 12/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Conventions internationales.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : SCP BOQUET NICLET LAGEAT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-04-12;15ve01854 ?
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