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14/05/2018 | FRANCE | N°16VE01954

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 14 mai 2018, 16VE01954


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Sannois à lui verser, en réparation des préjudices subis, la somme de 70 000 euros, assortie des intérêts de droit à compter du 10 décembre 2013.

Par un jugement n° 1403710 en date du 19 avril 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 17 juin 2016 et le 26 avril 2017, MmeA...

, représentée par Me Boukheloua, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Sannois à lui verser, en réparation des préjudices subis, la somme de 70 000 euros, assortie des intérêts de droit à compter du 10 décembre 2013.

Par un jugement n° 1403710 en date du 19 avril 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 17 juin 2016 et le 26 avril 2017, MmeA..., représentée par Me Boukheloua, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de condamner la commune de Sannois à lui verser, en réparation des préjudices subis, la somme de 70 000 euros, assortie des intérêts de droit à compter du 10 décembre 2013 et capitalisation de ces intérêts ;

3° de mettre à la charge de la commune de Sannois la somme de 3 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il n'est pas signé, en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- il est entaché d'erreurs de fait et de droit dès lors qu'elle a justifié avoir été laissée sans affectation fixe et a établi que le maire avait tardé à reconnaître l'imputabilité au service de l'accident dont elle a été victime ;

- au fond, elle s'en rapporte à ses écritures de première instance ;

- le comportement de la commune est fautif ; la commune l'a laissée sans affectation fixe et a refusé pendant près de deux ans de reconnaître l'imputabilité au service de son accident de trajet du 31 janvier 2009 malgré un avis de la commission de réforme rendu dès le 4 juin 2009 ; elle ne s'est jamais soustraite aux contrôles médicaux ; la commune a dépêché un agent municipal qui a pénétré dans sa propriété ; l'ensemble de ces agissements répétés traduit un harcèlement moral ;

- l'administration a l'obligation de garantir l'agent public contre tout risque dans l'exercice de ses fonctions ; en application de la jurisprudence Moya-Caville, elle est fondée à demander à être indemnisée de ses préjudices.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Van Muylder,

- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public ;

- et les observations Melle Darde, avocat stagiaire, en présence de Me B...pour la commune de Sannois.

1. Considérant que MmeA..., adjoint administratif titulaire au sein de la commune de Sannois depuis le 1er avril 1998, a été affectée à son retour de congé parental, le 30 novembre 2007, à la maison des loisirs et des arts, puis à la médiathèque à compter de septembre 2008 ; qu'elle a été victime le 31 janvier 2009 d'un accident de la route, qui a été reconnu imputable au service ; que Mme A...relève appel du jugement en date du 19 avril 2016 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Sannois à lui verser une indemnité de 70 000 euros, d'une part, sur le terrain de la responsabilité pour faute à raison du harcèlement moral qu'elle estime avoir subi et, d'autre part, sur le terrain de la responsabilité sans faute à raison de l'obligation de la commune de réparer les conséquences dommageables ayant résulté pour elle de l'exercice de ses fonctions ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. " ;

3. Considérant qu'il ressort du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement pour défaut de signature de la minute doit, par suite, être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, que si Mme A...soutient que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a entaché son jugement d'erreurs de droit et de fait, ces moyens qui se rattachent au bien-fondé du raisonnement suivi par le tribunal, sont, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ;

Sur les conclusions indemnitaires :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 susvisée portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction alors applicable : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés (...). " ;

6. Considérant, d'une part, qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que, d'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé ;

7. Considérant que Mme A...soutient qu'elle a été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de la part de la commune de Sannois qui l'a laissée sans affectation fixe, a mis plus de deux ans à reconnaître l'imputabilité au service de son accident de trajet du 31 janvier 2009 et a dépêché un agent municipal à son domicile pendant ses arrêts maladie ;

8. Considérant, d'une part, qu'il est constant que Mme A...a été affectée à la maison des loisirs et des arts à compter du 30 novembre 2007, date de son retour de congé parental, sur des postes d'agents temporairement absents ; qu'elle a, par la suite, été affectée à la médiathèque à compter de septembre 2008 en remplacement d'un agent titulaire placé en congé maternité, puis, à la suite de l'avis favorable émis par la commission de réforme le 6 octobre 2011 à sa reprise en temps partiel thérapeutique, a de nouveau été affectée à la maison des loisirs et des arts, par lettre du maire de la commune de Sannois du 24 novembre 2011 ; qu'il n'est pas contesté que ces postes correspondaient au grade de Mme A...et que ces différentes affectations ont été prises dans l'intérêt du service ; qu'il n'est pas établi, ni même allégué, qu'un poste d'adjoint administratif susceptible d'être occupé par la requérante ait été vacant ; que, dans ces conditions, les circonstances que ces affectations n'ont pas été formalisées par des arrêtés du maire et que Mme A...a été affectée sur des postes en remplacement d'agents temporairement absents, ne sont pas de nature à faire présumer l'existence d'actes de harcèlement moral ;

9. Considérant, d'autre part, que Mme A...a déclaré avoir été victime d'un accident de trajet le samedi 31 janvier 2009 à 19h30 ; que, compte tenu du délai séparant la fin de son service, fixée à 18 heures, et l'heure de l'accident déclaré et du temps de trajet ordinaire entre son lieu de travail et son domicile, correspondant à une vingtaine de minutes, le fait que le maire de la commune de Sannois ait diligenté une enquête administrative sur les circonstances de cet accident afin d'en apprécier l'imputabilité au service ne peut être regardé comme laissant présumer un acte de harcèlement moral ; que, si Mme A...fait valoir que l'arrêté reconnaissant l'imputabilité de cet accident au service n'a été pris que le 21 avril 2011, il résulte cependant de l'instruction que le maire de la commune du Sannois avait informé l'intéressée dès le 1er juillet 2009 que ses absences entre le 31 janvier 2009 et le 26 avril 2009 étaient " enregistrées en accident de trajet " et que, conformément à l'avis de la commission de réforme du 4 juin 2009, il attendait, s'agissant des autres absences, les conclusions des expertises sur son état psychologique ; que, dans ces conditions, les faits dont se prévaut la requérante ne sauraient être qualifiés d'agissement constitutif de harcèlement moral ;

10. Considérant, enfin, que Mme A...soutient que la commune a chargé un agent municipal de se rendre à son domicile pour tenter de lui déposer des courriers " allant jusqu'à pénétrer dans sa propriété privée pour tenter de lui remettre les documents " ; que toutefois, Mme A...ne précise ni la date ni les circonstances précises de cet événement ; qu'en tout état de cause, la circonstance qu'un agent assermenté de la commune se soit rendu à son domicile afin de lui remettre, en temps utile, les convocations à des rendez-vous pour des expertises médicales ne peut laisser présumer l'existence d'actes de harcèlement moral ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'apporte pas d'éléments précis et concordants de nature à faire présumer l'existence d'agissements constitutifs de harcèlement moral à son encontre de la part de la commune de Sannois ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à rechercher la responsabilité de l'administration de ce chef ;

12. Considérant, en second lieu, que Mme A...invoque l'obligation de la commune de Sannois de la garantir contre les risques auxquels l'aurait exposée l'exercice de ses fonctions et de réparer les préjudices liés à cet exercice ; que, toutefois, le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence dont elle demande réparation et qu'elle impute à des actes de harcèlement moral, ne sont pas en lien avec l'accident de trajet du 31 janvier 2009, ni avec une maladie professionnelle ; que Mme A...n'est, dès lors, pas fondée à demander à ce que la responsabilité sans faute de la commune de Sannois soit engagée sur ce fondement ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...le versement à la commune de la somme de 1 000 euros sur le fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

2

N° 16VE01954


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01954
Date de la décision : 14/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Céline VAN MUYLDER
Rapporteur public ?: Mme MEGRET
Avocat(s) : BOUKHELOUA

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-05-14;16ve01954 ?
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