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27/05/2020 | FRANCE | N°18VE03282

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 27 mai 2020, 18VE03282


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Hitachi Zosen Inova AG a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au titre du mois de décembre 2010 d'un montant de 259 932 euros.

Par un jugement n° 1504390 du 24 juillet 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 21 septembre 2018 et 19 juin 2019, la société Hitachi Zosen Inova A

G, représentée par le cabinet d'avocats B... et Moreau, demande à la Cour, dans le dernier éta...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Hitachi Zosen Inova AG a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au titre du mois de décembre 2010 d'un montant de 259 932 euros.

Par un jugement n° 1504390 du 24 juillet 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 21 septembre 2018 et 19 juin 2019, la société Hitachi Zosen Inova AG, représentée par le cabinet d'avocats B... et Moreau, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) à titre principal :

- d'annuler ce jugement ;

- de prononcer le remboursement d'un crédit de TVA au titre du mois de décembre 2010 d'un montant de 259 932 euros ;

2°) à titre subsidiaire, de poser à la Cour de justice de l'Union européenne la question suivante : " la directive 2006/112 et plus particulièrement ses articles 9, 213, 214, 226, 250 et 273 s'oppose-t-elle, dans des circonstances telles que celles du litige au principal, à une réglementation nationale ou à une pratique en matière fiscale selon laquelle un contribuable doit se voir refuser la qualité d'assujetti redevable après 2010 malgré des prestations de services facturées en 2011, aux seuls motifs que ces factures ne comportent pas son numéro d'identifiant national, qu'il n'a pas déposé de déclaration de TVA en 2011 et que, par conséquent, ces factures ne permettent pas d'établir la qualité d'assujetti en 2011, sa demande remboursement de TVA déposée en 2013, concernant de la TVA d'amont encourue en 2009 et 2010 doit être considérée comme forclose, celle-ci ayant dû être déposée au plus tard le 31 décembre 2012, compte tenu du délai de forclusion expirant le 31 décembre de la deuxième année suivant celle au cours de laquelle le contribuable a perdu sa qualité de redevable, étant précisé que l'assujetti a déposé une déclaration de TVA en 2011, que lesdites factures de 2011 ont été payées en 2014, que leur paiement a été validé par un accord de compensation avec le co-contractant en 2015, que, par conséquent, la TVA relative à ces facture était exigible en 2014 et que l'assujetti a mentionné ces factures de 2011 dans une déclaration de TVA déposée en 2015 ' "

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 20 000 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

La société soutient que :

- sa réclamation du 12 septembre 2013 tendant à un remboursement d'un crédit de TVA au titre du mois de décembre 2010 n'est pas tardive ;

- elle justifie, par les factures produites, de la réalité et du montant du remboursement du crédit de TVA.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les observations de Me B..., représentant la société Hitachi Zosen Inova AG.

Considérant ce qui suit :

1. La société Hitachi Zosen Inova AG, anciennement dénommée Von Roll Environment SA, fait appel du jugement du 24 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande en remboursement d'un crédit de TVA au titre du mois de décembre 2010, d'un montant de 259 932 euros.

2. Aux termes du IV de l'article 271 du code général des impôts : " La taxe déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut faire l'objet d'un remboursement dans les conditions, selon les modalités et dans les limites fixées par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article 242-0 A de l'annexe II au code général des impôts, pris sur le fondement de l'article 271 précité : " Le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déductible dont l'imputation n'a pu être opérée doit faire l'objet d'une demande des assujettis. Le remboursement porte sur le crédit de taxe déductible constaté au terme de chaque année civile ". Il résulte de l'article 242-0 C de cette annexe que le redevable ne peut demander le remboursement d'un crédit de TVA qu'au cours du mois suivant la période - année ou trimestre - au terme de laquelle ce crédit est constaté. Aux termes de l'article 242-0 G de la même annexe : " Lorsqu'un redevable perd cette qualité, le crédit de taxe déductible dont il dispose peut faire l'objet d'un remboursement pour son montant total ". Aux termes de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales : " En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaire (...), les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif ". Aux termes de l'article R. 196-1 de ce livre : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : (...) / c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation (...) ".

3. S'il résulte des dispositions des articles 242-0 A et 242-0 C que le redevable ne peut demander le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont il dispose que dans des délais déterminés, ces dispositions n'ont ni pour objet, ni pour effet de faire obstacle à ce que le redevable puisse ultérieurement, si ce crédit demeure et en cas de poursuite d'activité, procéder à son imputation sur une taxe due, ou, à défaut, en demander le remboursement au cours du mois de janvier de l'année suivante ou au cours du mois suivant un trimestre civil lorsque chacune des déclarations de ce trimestre fait apparaître un crédit de taxe déductible. Il résulte des dispositions précitées des articles 242-0 G de l'annexe II au code général des impôts et R. 196-1 du livre des procédures fiscales qu'une telle demande peut également être faite à la suite de la perte de la qualité de redevable dans les délais prévus, en l'absence de toute précision apportée sur ce point par les textes relatifs à la taxe sur la valeur ajoutée, par les dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales.

4. La perte de la qualité de redevable ouvrant droit au remboursement d'un crédit de TVA résulte, pour l'application de ces dispositions, de l'impossibilité pour l'assujetti de récupérer, par voie d'imputation sur les taxes dont il est redevable, le crédit dont il disposait. Dès lors, un assujetti, quelle que soit l'activité qu'il a exercée, doit être regardé comme ayant perdu la qualité de redevable lorsqu'il n'est plus en mesure de réaliser aucune opération donnant lieu à collecte de TVA. Tel est le cas lorsque non seulement l'assujetti ne peut plus effectuer aucune des opérations qui constituaient son activité normale, soit qu'il ait cédé l'ensemble des marchandises qu'il avait pour objet de vendre, soit qu'il ait cessé totalement d'effectuer les prestations de services qu'il avait pour objet de rendre, mais également ne dispose plus de biens, stocks ou éléments d'actif immobilisé, dont la cession est soumise à la perception de TVA.

5. Il résulte de l'instruction, en premier lieu, que par acte du 22 mai 2013, la société Hitachi Zosen Inova AG a désigné comme son représentant fiscal en France la société Tevea RF Consulting. Celle-ci a déposé pour le compte de la société requérante, le 12 septembre 2013, une demande de remboursement d'un crédit de TVA au titre du mois de décembre 2010. Cette demande précise que la société Hitachi Zosen Inova AG avait cessé ses activités à la suite notamment de difficultés financières survenues à la fin de l'année 2010. En deuxième lieu, la société Hitachi Zosen Inova AG n'avait plus de représentant fiscal en France à compter de l'année 2011, bien que cette désignation soit obligatoire lorsqu'une personne non établie dans l'Union européenne est redevable de la TVA en France. En troisième lieu, si elle verse à l'instance quatre factures numérotées 9003990, 9003993, 9004027 et 9004390, datées de février 2011 à août 2011, mentionnées comme étant à l'attention de la société Inova France, elle n'établit pas, par ces seules factures, que les prestations indiquées ont été effectivement et réellement effectuées en 2011, alors qu'il est constant qu'elle n'a déposé aucune déclaration de TVA faisant état de la réalisation d'un chiffre d'affaire de 2011 au 12 septembre 2013, date de sa demande de remboursement. La société précise à cet égard qu'elle n'a pas déclaré la TVA afférente à ces factures, dans l'attente d'un règlement du litige l'opposant à la société Inova France, qui s'est seulement résolu par un accord conclu le 29 avril 2015. Cet accord indique toutefois, à son paragraphe 1, que les dernières factures émises par Hitachi portaient les numéros 9003900 et 9003970, soit des numéros antérieurs aux factures versées dans la présente instance, ces dernières n'étant nullement mentionnées dans cet accord. En quatrième lieu, la société Hitachi Zosen Inova AG ne peut utilement se prévaloir de sa qualité de redevable de la TVA en Suisse pour justifier de la persistance de cette qualité en France. En cinquième et dernier lieu, elle ne soutient ni même n'allègue disposer en France de biens, stocks ou éléments d'actif immobilisé, dont la cession serait soumise à la perception de TVA. Il ressort de l'ensemble de ces éléments que la société Hitachi Zosen Inova AG doit être regardée comme ayant perdu la qualité de redevable ouvrant droit au remboursement d'un crédit de TVA au sens de l'article 242-0 G de l'annexe II au code général des impôts, le 31 décembre 2010.

6. A titre subsidiaire, la société soutient que le refus de lui reconnaître sa qualité d'assujettie à la TVA en 2011, aux seuls motifs que les factures émises en 2011 ne mentionnent pas son numéro d'identifiant national et qu'elle n'a pas déposé de déclaration de TVA en 2011, est contraire aux articles 9, 213, 214, 226, 250 et 273 de la directive n° 2006/112 CE du Conseil du 28 novembre 2006, ainsi qu'aux principes de neutralité et de proportionnalité de la TVA. Il résulte toutefois de ce qui précède que la perte de la qualité de redevable de la société Hitachi Zosen Inova AG ne se fonde pas sur ces motifs, mais sur un ensemble d'éléments indiquant qu'elle n'était plus en mesure de réaliser aucune opération donnant lieu à collecte de TVA après le 31 décembre 2010. Le moyen précité doit, dès lors, être écarté, sans qu'il soit besoin de poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne.

7. Il résulte de ce qui précède que la demande déposée par la société Tevea RF Consulting, pour le compte de la société Hitachi Zosen Inova AG, présentée le 12 septembre 2013, portant sur un remboursement d'un crédit de TVA au titre du mois de décembre 2010, est tardive au regard de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales et, dès lors, irrecevable. Par suite, la société Hitachi Zosen Inova AG n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er: La requête de la société Hitachi Zosen Inova AG est rejetée.

N° 18VE03282 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE03282
Date de la décision : 27/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-02-02 Contributions et taxes. Règles de procédure contentieuse spéciales. Réclamations au directeur.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Nicolas TRONEL
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : CABINET LEDRU et MOREAU AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-05-27;18ve03282 ?
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