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27/05/2020 | FRANCE | N°18VE03309

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 27 mai 2020, 18VE03309


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Point P a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012 à raison des établissements qu'elle exploite à Nanterre (Hauts-de-Seine) et Pierrelaye (Val-d'Oise).

Par un mémoire distinct, la SAS Point P a demandé au tribunal de transmettre au Conseil d'État, en a

pplication de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, la questi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Point P a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2010, 2011 et 2012 à raison des établissements qu'elle exploite à Nanterre (Hauts-de-Seine) et Pierrelaye (Val-d'Oise).

Par un mémoire distinct, la SAS Point P a demandé au tribunal de transmettre au Conseil d'État, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du 17ème alinéa de l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972.

Par une ordonnance n° 1805367 du 16 août 2018, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a décidé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre au Conseil d'État cette question prioritaire de constitutionnalité et rejeté sa demande de décharge des impositions contestées.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 1er octobre 2018, le 21 mars 2019 et le 19 février 2020, la SAS Point P, représentée par Me A... et Me B..., avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 de cette ordonnance, en tant que le premier juge a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2010 à raison des établissements qu'elle exploite à Nanterre (Hauts-de-Seine) et Pierrelaye (Val-d'Oise) ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, elle n'entre pas dans le champ d'application de la loi instituant une taxe sur les surfaces commerciales dès lors qu'elle exerce une activité de commerce de gros et non de vente au détail ;

- à titre subsidiaire, l'article 3 A du décret du 26 janvier 1995 instaurant un abattement de 30 % méconnait, en tant qu'il prévoit que l'activité de vente de marchandises doit être exercée à titre exclusif pour bénéficier de cet abattement, les principes constitutionnels d'égalité devant la loi et les charges publiques ;

- à titre infiniment subsidiaire, l'administration fiscale n'était fondée à remettre en cause l'application de cet abattement qu'à raison des seules surfaces de ses établissements affectées à titre non exclusif à la vente de matériaux de construction.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le décret n° 95-85 du 26 janvier 1995 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer des conclusions à l'audience, en application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Le rapport de M. Illouz, conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Point P, qui exerce une activité de vente de matériaux de construction, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012, à l'issue de laquelle l'administration fiscale lui a notamment notifié des suppléments de taxe sur les surfaces commerciales au titre de chacune des trois années vérifiées. Cette société a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de la décharger de ces impositions supplémentaires. La SAS Point P fait régulièrement appel de l'ordonnance du 16 août 2018 en tant que, par cette ordonnance, le président de la 2ème chambre de ce tribunal a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'année 2010.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...) ".

3. Après avoir décidé qu'il n'y avait pas lieu de transmettre au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la SAS Point P, l'auteur de l'ordonnance attaquée a relevé que celle-ci se bornait à invoquer l'illégalité des dispositions du A du 3 du décret du 26 janvier 1995 et estimé que la condition d'exclusivité à laquelle ce décret subordonne le bénéfice de la réduction de taxe sur les surfaces commerciales prévue par la loi du 13 juillet 1972, ne méconnaissait pas l'habilitation donnée par le pouvoir réglementaire à cette loi. En statuant ainsi, alors qu'il est constant que les dispositions litigieuses de ce décret étaient applicables au litige, le premier juge a écarté ce moyen comme n'étant pas fondé et non, contrairement à ce que relève à tort l'ordonnance attaquée, comme étant inopérant. Toutefois, les dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ne permettaient pas au premier juge d'écarter ce moyen de légalité interne, qui n'était pas inopérant et qui n'entrait dans aucune autre des catégories de moyens listées par ces dispositions, pour rejeter par ordonnance la demande dont il était saisi. Cette ordonnance est, par suite, entachée d'irrégularité et doit, dans la limite des conclusions d'appel dont la cour est saisie, être annulée.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Cergy-Pontoise pour qu'il statue à nouveau, dans la limite de l'annulation prononcée, sur les conclusions de la demande de la SAS Point P tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe sur les surfaces commerciales mises à sa charge au titre de l'année 2010.

Sur les frais liés au litige :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par SAS Point P et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 2 de l'ordonnance du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n°1805367 du 16 août 2018 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe sur les surfaces commerciales auxquelles la SAS Point P a été assujettie au titre de l'année 2010 à raison des établissements qu'elle exploite à Nanterre (Hauts-de-Seine) et Pierrelaye (Val-d'Oise).

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la limite de l'annulation prononcée à l'article 1er du présent arrêt, au tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Article 3 : L'État versera à la SAS Point P une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 18VE03309


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE03309
Date de la décision : 27/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-07-01-04-04-04 Procédure. Pouvoirs et devoirs du juge. Questions générales. Moyens. Exception d'illégalité.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Julien ILLOUZ
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-05-27;18ve03309 ?
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