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18/06/2020 | FRANCE | N°18VE01383

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 18 juin 2020, 18VE01383


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge de l'amende pour non déclaration de compte détenu à l'étranger mise à leur charge au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à leur charge au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1507822 du 22 février 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procéd

ure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 20 avril 2018, le 19 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge de l'amende pour non déclaration de compte détenu à l'étranger mise à leur charge au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à leur charge au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1507822 du 22 février 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 20 avril 2018, le 19 décembre 2018, le 16 octobre 2019 et le 27 février 2020, M. et Mme B..., représentés en dernier lieu par Me Veyssade, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des cotisations primitives de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 à 2011, ainsi que celle de l'amende qui leur a été infligée au titre des années 2010 et 2011 ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration aurait dû produire les documents issus de la procédure pénale et dont il est fait mention dans la proposition de rectification, dans la mesure où les redressements proviennent de ces documents ;

- ils ont été privés d'un débat oral et contradictoire ;

- c'est dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale particulière que les questions sur l'activité de M. B... auraient dû être formulées, avec au moins une demande d'éclaircissements et de justifications, alors même qu'il s'agissait d'un compte joint et que Mme B... n'était pas concernée par la vérification de comptabilité ;

- les procès-verbaux ayant fondé les rectifications sont des faux ;

- il n'est pas établi que les montants figurant sur le compte bancaire suisse de M. B... lui étaient destinés ;

- les sommes versées en espèces sur leur compte joint correspondent à des remboursements de frais exposés lors d'une mission en Afrique ;

- les intérêts de retard et la majoration de 80 % doivent être remis, en conséquence de ce qui précède ;

- le compte bancaire détenu en Suisse n'a pas été déclaré, M. B... étant en détention préventive lors de la période de déclaration ; l'existence de ce compte avait été portée à la connaissance du juge d'instruction dès mars 2011.

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B... a été mis en examen pour association de malfaiteurs en vue d'escroquerie en bande organisée, et escroquerie en bande organisée, au détriment de son employeur, en mars 2011. L'administration a diligenté une vérification de comptabilité de cette activité occulte, dont les revenus ont été évalués d'office, pour la période allant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2011, cependant que les époux B... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2009 à 2011. A l'issue de ces procédures, des compléments d'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, et des cotisations primitives de contributions sociales, ensemble les intérêts de retard et la majoration de 80 % prévue au c du 1 de l'article 1728 du code général des impôts, ont été mis à la charge de M. et Mme B... au titre des années 2009 à 2011. En outre, l'amende prévue au IV de l'article 1736 du code général des impôts leur a été infligée pour les années 2010 et 2011. Ayant vainement réclamé contre ces impositions et cette amende, M. et Mme B... ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des sommes correspondantes. Ils relèvent appel du jugement, rejetant leur demande, rendu par cette juridiction le 22 février 2018.

Sur les impositions :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, s'agissant de l'examen contradictoire de la situation fiscale de M. et Mme B..., trois réunions avec la vérificatrice se sont déroulées le 1er octobre 2012, le 21 février 2013 et le 14 mai 2013. S'agissant de la vérification de comptabilité, M. B... a rencontré la vérificatrice à deux reprises, les 23 janvier et 20 mars 2013, dans les locaux du service, comme il ne conteste pas l'avoir demandé. S'il est vrai que, par deux courriers du 22 mars 2013, l'administration avait proposé une dernière intervention, dans le cadre de la vérification de comptabilité, au domicile vanvéen du contribuable le 15 avril 2013 à 10 h 00, et un dernier entretien, dans le cadre de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, le même jour à 11 h 30 dans ses locaux du 17ème arrondissement de Paris, elle a renoncé à leur tenue par courriers du 15 avril 2013, à la suite des observations de M. B..., et proposé leur report au 14 mai suivant, à des horaires compatibles avec les contraintes de déplacement du contribuable. Par ailleurs, par un courrier du 2 mai 2013, réceptionné le 7 suivant, l'administration a avisé M. B... de la tenue de la réunion de synthèse de la vérification de comptabilité dans ses locaux, et non au domicile de l'intéressé comme annoncé dans son courrier du 15 avril 2013. Celui-ci disposait donc d'un délai suffisant pour contester, le cas échéant, le lieu de cette réunion, laquelle, en tout état de cause, ne constitue pas une obligation incombant à l'administration. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir avoir été privés d'un débat oral et contradictoire, au cours des deux procédures de contrôle en cause.

3. En deuxième lieu, il résulte du droit de communication exercé auprès de l'autorité judiciaire qu'une partie des commissions de renseignement versées par son employeur dans le cadre d'une enquête interne a été appréhendée par M. B..., sous la forme de remises en espèces sur le compte bancaire, domicilié en France, qu'il détenait conjointement avec son épouse. Ce compte présentant ainsi un caractère mixte, la vérificatrice a pu régulièrement se fonder sur ses extraits de relevés, pour déterminer les revenus non commerciaux dégagés par M. B... dans l'exercice de son activité occulte. De même, l'administration a pu régulièrement établir l'imposition sur la base des procès-verbaux D 764 et D 765 de la procédure pénale, dès lors que les requérants n'établissent pas que ces documents, qu'ils arguent de faux, auraient été annulés par le juge pénal.

4. En troisième lieu, si, pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, les dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales permettent au service de demander à un contribuable des éclaircissements et justifications, l'abstention d'user de cette faculté n'a pas pour effet de vicier le contrôle que le service diligenterait. Dès lors, en ne demandant pas aux époux B... des éclaircissements sur l'origine des sommes portées au crédit de leur compte joint, et en particulier sur leur lien avec une hypothétique activité de consultant en Afrique, l'administration n'a pas entaché d'irrégularité l'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle.

5. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet (...) de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Si les requérants soutiennent que l'administration devait leur fournir les documents obtenus à l'occasion de l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, et ayant servi à fonder les rectifications en matière de revenus non professionnels portées à leur connaissance par notification du 31 mai 2013, il ne résulte pas de l'instruction qu'ils en auraient demandé la communication avant la mise en recouvrement des impositions litigieuses.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

6. Aux termes du 1 de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ". Par application combinée des dispositions de l'article L. 193 et R. 1931 du livre des procédures fiscales, il appartient au contribuable dont l'imposition a fait l'objet d'une évaluation d'office de faire la preuve du caractère exagéré du redressement dont il fait l'objet. M. et Mme B... se trouvant en situation d'évaluation d'office, la charge de la preuve leur incombe.

7. M. et Mme B... soutiennent que les sommes versées en espèces sur leur compte joint au cours des années litigieuses, et regardées par l'administration comme des revenus tirés de l'activité occulte de M. B..., correspondent à des remboursements de frais exposés par ce dernier en Afrique, à l'occasion d'une mission de prospection confiée par la société AMMSA GROUP, dont une attestation, datée du 10 avril 2018, de son représentant justifierait. Toutefois, et à supposer que les procès-verbaux mentionnés au point 3 retraçant les déplacements en Afrique de M. B... soient incomplets, cette seule attestation, produite pour la première fois en appel, ne permet d'établir ni la réalité de cette mission, ni celle du défraiement allégué et des conditions dans lesquelles il serait intervenu, en l'absence de tout autre élément. Au surplus, les montants prétendument versés à titre de remboursement de frais et ceux figurant au crédit du compte bancaire des requérants ne se recoupent pas. Enfin, la circonstance que les dates des encaissements de ces espèces ne correspondent pas aux dates d'émission des factures de commission ne saurait suffire à démontrer que les sommes en cause seraient sans rapport avec l'appréhension par M. B... d'une partie des rémunérations versées par son employeur, alors qu'il résulte de l'instruction pénale que l'émetteur de ces factures était en relation avec M. B..., dont il suivait les instructions en vue de la remise des fonds, dans un premier temps par le biais d'espèces, puis de virements à partir de son compte bancaire domicilié en Espagne, vers le compte ouvert en Suisse par M. B.... Par ailleurs, si M. et Mme B... prétendent que les sommes virées sur ce compte auprès de la Banque cantonale vaudoise étaient destinées à rémunérer l'informateur chargé de recueillir des informations dans le cadre de l'enquête interne diligentée par l'employeur de M. B..., ils n'apportent, au soutien de cette allégation, aucune précision susceptible d'en étayer le bien-fondé. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a estimé, eu égard au rôle de M. B... dans l'escroquerie en bande organisée pour laquelle il a été mis en examen, que les sommes créditant ses comptes étaient constitutives de revenus assimilés à des bénéfices non commerciaux, au sens des dispositions de l'article 92 du code général des impôts. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander la décharge des impositions mises à leur charge, ni par voie de conséquence, celle des intérêts de retard et de la majoration de 80 % en cas de découverte de l'exercice d'une activité occulte qui y ont été assortis.

Sur l'amende :

8. Aux termes du IV de l'article 1736 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " IV.-Les infractions aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 A et de l'article 1649 A bis sont passibles d'une amende de 1 500 € par compte (...) non déclaré (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 1649 A de ce code : " Les personnes physiques (...) domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger ". Il est constant que M. et Mme B... n'ont pas déclaré l'existence du compte ouvert par M. B... en Suisse. Est sans incidence sur l'obligation déclarative incombant au foyer fiscal formé par les requérants en vertu des dispositions de l'article 1649 A du code général des impôts la double circonstance que l'existence de ce compte aurait été portée à la connaissance du juge chargé de l'instruction pénale dès le mois de mars 2011, et que M. B... se trouvait en détention préventive au cours de la période de déclaration des revenus de l'année 2010. Il s'ensuit que l'administration était fondée à leur infliger, au titre des années 2010 et 2011, l'amende prévue au IV de l'article 1736 du code général des impôts précité.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande. Leur requête doit être rejetée y compris, en conséquence, les conclusions qu'ils ont présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

2

N° 18VE01383


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01383
Date de la décision : 18/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité.

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Examen de la situation fiscale personnelle (ex VASFE).


Composition du Tribunal
Président : Mme BESSON-LEDEY
Rapporteur ?: M. Fabrice MET
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : PINOS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-06-18;18ve01383 ?
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