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22/09/2020 | FRANCE | N°18VE01053

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 22 septembre 2020, 18VE01053


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) POISSONNERIE T'KINT a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2010 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1507396 du 6 février 2018, le Tribunal administratif de Versai

lles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) POISSONNERIE T'KINT a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2010 et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1507396 du 6 février 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mars 2018, la SARL POISSONNERIE T'KINT, représentée par Me Guillerand, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge sollicitée ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le service ne pouvait établir les impositions supplémentaires contestées sans lui offrir les garanties de procédure prévues par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'en soutenant que l'acquisition du fonds de commerce constituait à hauteur de l'insuffisance de prix une libéralité, il a entendu se placer sur le terrain de l'abus de droit et, par ailleurs, qu'aucun acte anormal de gestion ne saurait lui être reproché en tant qu'acquéreur ;

- le service l'a, à tort, assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt à raison d'une minoration du prix d'acquisition de son fonds de commerce de poissonnerie, alors que le prix de 280 000 euros acquitté correspondait à sa valeur vénale réelle à la date d'achat, compte tenu de ses résultats des années antérieures et de ses perspectives économiques incertaines, et que la méthode de valorisation retenue par le service était erronée ;

- le service a, également à tort, assorti les redressements de pénalités sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts alors que, les redressements en droits n'étant pas fondés et le service n'ayant pas établi la dénaturation de l'acte d'acquisition, elle n'a commis aucun manquement délibéré et qu'en conséquence, l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL POISSONNERIE T'KINT, qui exerce une activité de vente au détail de poissons et de crustacés, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des années 2010 à 2012, à l'issue de laquelle des compléments d'impôt sur les sociétés lui ont été assignés, à raison notamment de la réévaluation du montant des éléments incorporels du fonds de commerce de poissonnerie situé sur le marché de Versailles qu'elle a acquis le 7 décembre 2007 au prix de 280 000 euros, ces éléments étant inscrits à l'actif du bilan pour une valeur de 100 000 euros. Par un jugement du 6 février 2018 dont elle fait appel, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge des impositions supplémentaires qui lui ont été assignées, de ce chef, au titre de la seule année 2010, ainsi que des majorations correspondantes, à concurrence d'une somme totale de 29 692 euros.

Sur la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité. Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que lorsque l'administration use de la faculté qu'elles lui confèrent dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif, ou, que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, auraient normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. Il résulte également de ces dispositions que, lorsque l'administration invoque des faits constitutifs d'un abus de droit pour justifier un chef de rectification, le contribuable, qui n'a pas demandé la saisine du comité de l'abus de droit fiscal, doit être regardé comme ayant été privé de la garantie tenant à la faculté de provoquer cette saisine si, avant la mise en recouvrement de l'imposition, l'administration omet de l'aviser expressément que le redressement a pour fondement les dispositions précitées de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales.

4. Pour justifier la réévaluation du fonds de commerce litigieuse, le ministre de l'action et des comptes publics fait valoir qu'il n'a aucunement écarté l'acte de cession du fonds de commerce comme fictif, ni exposé que cette opération présentait un but exclusivement fiscal à l'encontre les objectifs poursuivis par le législateur mais qu'il s'est borné à apprécier une situation de fait, à savoir la minoration des éléments incorporels comptabilisés à l'actif du bilan de la société cessionnaire.

5. D'une part, la SARL POISSONNERIE T'KINT n'est pas fondée à soutenir que le service aurait nécessairement dû se placer sur le terrain de la répression d'un abus de droit, dès lors qu'aucun acte anormal de gestion ne peut être opposé à un acquéreur qui bénéficie d'un prix d'achat qu'il estime normal eu égard à la nature du fonds acquis, alors que l'acquisition d'une immobilisation à un prix volontairement minoré par les parties dissimulant une libéralité est susceptible d'entraîner des rectifications tant pour la société cédante que pour celle cessionnaire à raison de la correction de son actif net.

6. D'autre part, il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 22 novembre 2013, que le service, après avoir mis en oeuvre une méthode d'évaluation fondée sur le chiffre d'affaires annuel moyen, retraitée par différents facteurs, a estimé que la SARL POISSONNERIE T'KINT aurait dû constater à l'actif de son bilan une valeur des éléments incorporels compris dans le fonds de commerce égale à 600 000 euros, soit une minoration d'actif de 500 000 euros, que, compte tenu de la relation particulière liant les parties prenantes à la cession, le prix de vente minoré révélait l'intention libérale du cédant, et qu'en conséquence, il était fondé à redresser la société à raison du profit né de la correction de cette minoration. En se fondant sur ces constatations de fait, le service n'a pas entendu opposer à la SARL POISSONNERIE T'KINT l'existence d'actes fictifs ou d'une fraude à la loi au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales précité. La circonstance que l'administration ait, par ailleurs, au titre des pénalités pour manquement délibéré, requalifié la finalité exacte de l'opération consistant à permettre aux enfants de M. G... et de Mme D... de devenir propriétaires du fonds de poissonnerie pour un prix anormalement faible, ne saurait suffire à démontrer que le service a entendu implicitement mettre en oeuvre la procédure d'abus de droit. La société appelante ne saurait donc utilement soutenir que l'administration aurait entendu se placer sur le terrain de la répression d'un abus de droit, au sens des dispositions précitées, la privant irrégulièrement des garanties qui s'y attachent, dans une telle hypothèse. Ainsi, le moyen tiré de ce que l'administration aurait commis un abus de droit rampant doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés (...) " et aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition (...) Pour les immobilisations acquises à titre gratuit, de la valeur vénale (...) ". Il résulte de ces dernières dispositions que, dans le cas où le prix de l'acquisition d'une immobilisation a été volontairement minoré par les parties pour dissimuler une libéralité faite par le vendeur à l'acquéreur, l'administration est fondée à corriger la valeur d'origine de l'immobilisation, comptabilisée par l'entreprise acquéreuse pour son prix d'acquisition, pour y substituer sa valeur vénale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l'acquisition faite à titre gratuit laquelle, au demeurant, correspond, si le vendeur est une entreprise passible de l'impôt sur les sociétés, à un revenu distribué imposable entre les mains de l'acquéreur en vertu du c) de l'article 111 du code général des impôts.

8. Il résulte de l'instruction que, pour déterminer la valeur vénale des éléments incorporels du fonds de commerce de poissonnerie acquis par la SARL POISSONNERIE T'KINT, le vérificateur a utilisé une méthode couramment utilisée fondée sur le chiffre d'affaires annuel moyen qui consiste à dégager une moyenne sur la base des recettes TTC des trois dernières années d'exploitation du fonds et à appliquer à celle-ci un coefficient variant suivant la nature du commerce et de ses barèmes d'évaluation par profession. En l'espèce, il a initialement fixé ce coefficient à 41 % après avoir constaté un ratio de 41,65 % pour une cession d'un bien similaire intervenue le 7 novembre 2008, proche de celui en cause, avec une identité de direction et de propriétaire ainsi que des chiffres d'affaires et conditions d'exploitation proches, et un ratio de 40,61 % lors de la précédente cession du fonds intervenue le

6 novembre 1992, sans que les conditions d'exploitation n'aient connu d'évolution significative depuis. Il a également constaté que le barème de la profession indiquait un prix de cession des fonds de commerce de poissonnerie de détail qui oscille entre 30 et 60 % du chiffre d'affaires moyen TTC annuel. Le vérificateur a néanmoins corrigé ce coefficient en l'abaissant à 35 % pour tenir compte de l'absence de reprise de l'activité, réputée plus lucrative, de livraison de poissons aux restaurants qui était comprise dans le fonds et de l'absence, dans l'acte de cession, de clause de non-concurrence à la charge du vendeur.

9. D'une part, la SARL POISSONERIE T'KINT conteste la méthode de valorisation ainsi retenue par le vérificateur en faisant valoir, d'une part, que le service ne pouvait se référer à une précédente cession réalisée en 1992 alors que l'activité exercée a beaucoup évolué depuis du fait du changement de personnels, de l'évolution du chiffre d'affaires et de celle des activités, seule l'activité de détail subsistant avec une concurrence sévère de quatre établissements. Toutefois, elle n'apporte aucune précision, ni aucun élément concret de nature à établir le caractère erroné du coefficient retenu, alors, d'une part, que le vérificateur a relevé l'absence d'évolutions significatives dans les conditions d'exploitation du fonds de commerce entre 1992 et 2007 et, d'autre part et au demeurant, que le ratio constaté au titre de cette cession ne venait que confirmer celui constaté à l'occasion d'une autre cession, beaucoup plus récente, intervenue le 7 novembre 2008 pour un fonds similaire. Si la SARL POISSONERIE T'KINT fait également valoir que le service aurait dû privilégier, " compte tenu des conditions particulières de la cession ", une méthode d'évaluation à partir des résultats et que le " Price Earning Ratio " (PER) à retenir, c'est-à-dire le délai de retour sur investissement, serait pour une affaire de poissonnerie de détail de neuf ans sans commune mesure avec celui de vingt-cinq ans auquel la méthode du vérificateur aboutit, elle ne justifie pas des données qu'elle avance, ni de la pertinence de l'analyse qu'elle en tire, et n'établit pas que cette méthode serait plus adaptée que celle retenue par le service, alors que, d'une part, le ministre de l'action et des comptes publics fait valoir que la méthode proposée repose sur un indicateur utilisé en analyse boursière qui s'appuie sur des résultats qui prennent en compte des éléments sans lien direct avec les seuls éléments incorporels d'un fonds de commerce et, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que l'estimation par le chiffre d'affaires constitue la méthode retenue par le barème de la profession et qui est couramment utilisée dans les cessions de fonds de commerce.

10. D'autre part, la SARL POISSONNERIE T'KINT conteste l'estimation de

600 000 euros retenue par le service en faisant encore valoir la médiocrité des résultats d'exploitation de l'année 2006 et leur faiblesse sur les deux années antérieures, le caractère incertain des perspectives économiques, l'absence de clause de non-concurrence alors que le dirigeant du fonds cédé restait présent à proximité dans l'enseigne concurrence " La Marée ", la seule reprise dans le fonds de la clientèle au détail entraînant une perte de 30 % du chiffre d'affaires ainsi que des marges moins importantes, et l'absence de droit au bail renouvelable. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'en recourant à la méthode rappelée au point 9., le service a nécessairement pris en compte le chiffre d'affaires réalisé au cours des trois derniers exercices et la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir en quoi les charges exposées au titre de ces exercices, conduisant à des résultats d'exploitation négatifs ou faiblement positifs, impliqueraient nécessairement de revoir à la baisse la valeur des éléments incorporels du fonds de commerce, ni dans quelle mesure. Il en va de même de ses simples allégations relatives au caractère incertain des perspectives économiques. Par ailleurs, il résulte de l'instruction qu'en réduisant de 41 à 35 % le coefficient retenu, le service a entendu tenir compte de l'absence de reprise de l'activité de livraison de poissons aux restaurants qui était comprise dans le fonds et de l'absence, dans l'acte de cession, de clause de non-concurrence à la charge du vendeur. La SARL POISSONNERIE T'KINT n'apporte aucun élément de nature à établir que ces deux éléments auraient dû conduire à une plus ample réduction de l'estimation effectuée, alors que, s'agissant de l'absence de clause de non concurrence, le vérificateur a relevé que la dépréciation induite était mineure compte tenu de la volonté du cédant de consentir une libéralité à ses enfants incompatible avec une entrée en concurrence, des possibilités réduites d'installation à proximité et de l'absence de création d'un nouveau fonds de poissonnerie par le cédant. Enfin, si l'intéressée fait valoir l'absence de droit au bail renouvelable dans la mesure où le fonds est seulement titulaire d'une convention d'occupation précaire accordée par le Ville de Versailles, elle n'apporte aucun élément de nature à établir en quoi, ni dans quelle mesure, cet élément devrait également conduire à une réduction de l'estimation effectuée alors, d'une part, que les deux termes de comparaison retenus par le service ont trait soit à un fonds également établi sur le domaine de la commune, soit au fonds en litige et, d'autre part, que s'il résulte des principes généraux de la domanialité publique que les titulaires d'autorisations ou de conventions d'occupation temporaire du domaine public n'ont pas de droit acquis au renouvellement de leur titre, il appartient au gestionnaire du domaine d'examiner chaque demande de renouvellement en appréciant les garanties qu'elle présente pour la meilleure utilisation possible du domaine public.

11. Dans ces conditions, la SARL POISSONNERIE T'KINT ne conteste pas utilement l'évaluation de la valeur vénale des éléments incorporels du fonds de commerce de poissonnerie acquis, ni, par suite, la différence significative de 500 000 euros constatée entre cette valeur vénale et le prix d'acquisition. Par ailleurs, il n'est pas contesté que, comme l'a relevé le vérificateur, M. H... G..., dirigeant de la société cédante, a entendu vendre son fonds de commerce à ses enfants, Mlle F... et M. B... G..., les deux premiers associés de la société cessionnaire, Mmes C... et E..., n'ayant servi que de prête-nom ne jouant aucun rôle dans l'attente que les enfants soient en mesure de devenir associés, soit seulement sept mois plus tard pour Mlle F... G..., la gérance du fonds et les pouvoirs pour assurer les formalités liées à la création de la société étant d'ailleurs confiés à Mme D..., mère de ces derniers et ayant financé l'achat du fonds de commerce à hauteur de 130 000 euros. Ainsi, eu égard à la communauté d'intérêts unissant les réels actionnaires de ces deux sociétés, qui appartiennent au même groupe familial, ces écarts doivent être regardés comme des libéralités volontairement consenties, de manière occulte, par la SAS Holding G... à la SARL POISSONNERIE T'KINT. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que cette dernière était imposable à raison de cette somme de 500 000 euros sur le fondement de l'article 38 du code général des impôts du fait de la correction de son actif.

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

12. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) / c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses

(...) " et aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

13. Pour appliquer la majoration de 40 % pour manquement délibéré s'agissant de la sous-évaluation du fonds, le service s'est fondé sur l'importance de la minoration du résultat de son premier exercice social, de près de 500 000 euros, ainsi que sur le fait qu'en tant que professionnelle de la poissonnerie, expérimentée et dotée d'une bonne connaissance du marché, une telle sous-évaluation ne pouvait être ignorée de sa gérante, estimant ainsi que, compte tenu des circonstances de la cession, sa finalité exacte avait été de permettre aux enfants de

M. G... et de Mme D... de devenir propriétaires d'un fonds de poissonnerie pour un prix anormalement faible, et attestant de l'intention de ces derniers de consentir une libéralité représentant un avantage occulte, dissimulé dans la comptabilité de la société. Dans ces conditions et alors qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander la décharge de ces majorations à raison de l'irrégularité des redressements opérés, ni à soutenir que seule aurait pu, en cas d'abus de droit régulièrement constaté, lui être infligée une pénalité de 80 % pour manoeuvres frauduleuses, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, du caractère délibéré des manquements commis par la SARL POISSONNERIE T'KINT. C'est, par suite, à bon droit qu'elle a mis à la charge de cette dernière la majoration de 40% prévue par le a. de l'article 1729 du code général des impôts précité.

14. Si l'intéressée se prévaut, il est vrai, d'une méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) ; / (...) ", elle n'assortit pas son moyen des précisions suffisantes permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé en se bornant à faire valoir l'absence de manquement délibéré lequel est pourtant établi, ainsi que cela est précisé au point 13.

15. Il résulte de ce qui précède que la SARL POISSONNERIE T'KINT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL POISSONNERIE T'KINT est rejetée.

3

N° 18VE01053


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01053
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : GUILLERAND

Origine de la décision
Date de l'import : 03/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-09-22;18ve01053 ?
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