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24/11/2020 | FRANCE | N°18VE02133

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 24 novembre 2020, 18VE02133


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société BERKES HISPANA SL a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 21 497,62 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015.

Par un jugement n° 1705081 du 6 mars 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 juin 2018 et 25 janvier 2019, la société BERKES HI

SPANA SL, représentée par Me B... A..., demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement susmention...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société BERKES HISPANA SL a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 21 497,62 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015.

Par un jugement n° 1705081 du 6 mars 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 juin 2018 et 25 janvier 2019, la société BERKES HISPANA SL, représentée par Me B... A..., demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement susmentionné ;

2° de prononcer le remboursement des crédits de taxe sur la valeur ajoutée susmentionnés à hauteur de 21 893 euros ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société BERKES HISPANA SL soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer ;

- le moyen retenu par les premiers juges pour rejeter sa requête est erroné en fait ; les factures en cause concernent exclusivement l'année 2015 ;

- elle a déposé, sur le portail des autorités fiscales espagnoles, sa demande de remboursement le 17 juin 2016 soit dans les délais requis, avant de réitérer la même demande le 26 janvier 2017 dès lors que l'administration espagnole ne l'avait pas informée de sa non transmission aux autorités françaises ;

- les factures en cause revêtent toutes les informations requises ; les quelques erreurs matérielles figurant sur le formulaire ne sauraient à elles seules justifier le refus de remboursement.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2008/9/CE du Conseil du 12 février 2008 définissant les modalités du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée, prévu par la directive 2006/112/CE, en faveur des assujettis qui ne sont pas établis dans l'Etat membre du remboursement, mais dans un autre Etat membre ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bobko, rapporteur,

- et les conclusions de M. Met, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société BERKES HISPANA SL, dont le siège est situé en Espagne, et qui exerce son activité dans la fabrication et l'installation de machines industrielles, a demandé à l'administration, le 17 juin 2016 puis le 26 janvier 2017, le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015 dans le cadre de la procédure dite dérogatoire prévue par les dispositions des articles 242-0 N et suivants de l'annexe II au code général des impôts. Sa première demande n'a pas été transmise par les autorités fiscales espagnoles à l'administration fiscale française. Sa seconde demande a fait l'objet, le 15 février 2017, d'une décision de rejet total au motif que la société n'avait pas déposé sa demande dans les délais requis. Par la présente requête, la société BERKES HISPANA SL relève appel du jugement du 6 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant au remboursement de ce crédit de taxe sur la valeur ajoutée. Par un arrêt avant-dire droit du 16 juin 2020, la Cour a ordonné, avant de statuer sur la requête de la société, un supplément d'instruction tendant à la production par celle-ci, du contenu de la demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée, présentée le 26 janvier 2017 et les copies des factures qui l'ont appuyée en vue de déterminer si elles sont de nature à ouvrir droit au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée.

Sur l'étendue du litige :

2 Si la requérante demande le remboursement de la somme de 21 893,06 euros, il résulte de l'instruction, en particulier des factures produites en réponse à la demande de la Cour, que sa demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée introduite le 26 janvier 2017 portait sur un montant total de 21 497,62 euros.

Sur le bien-fondé du jugement :

3 D'une part, aux termes du V de l'article 271 du code général des impôts : " Ouvrent droit à déduction dans les mêmes conditions que s'ils étaient soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : [...] d) Les opérations non imposables en France réalisées par des assujettis dans la mesure où elles ouvriraient droit à déduction si leur lieu d'imposition se situait en France. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités et les limites du remboursement de la taxe déductible au titre de ces opérations ; ce décret peut instituer des règles différentes suivant que les assujettis sont domiciliés ou établis dans les Etats membres de la Communauté européenne ou dans d'autres pays ". Aux termes de l'article 242-0 T de l'annexe II au code général des impôts : " La demande de remboursement porte sur une période qui ne doit être ni supérieure à une année civile, ni inférieure à trois mois civils. Toutefois, cette demande peut porter sur une période inférieure à trois mois si elle constitue le solde d'une année civile. ".

4 D'autre part, aux termes de l'article 259 du code général des impôts : " Le lieu des prestations de services est situé en France : / 1° Lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel et qu'il a en France : / a) Le siège de son activité économique, sauf lorsqu'il dispose d'un établissement stable non situé en France auquel les services sont fournis ; / b) Ou un établissement stable auquel les services sont fournis ; / c) Ou, à défaut du a ou du b, son domicile ou sa résidence habituelle [...] ".

En ce qui concerne le droit au remboursement :

5 Il résulte de l'instruction, en particulier du formulaire " modelo 360 " transmis par la société requérante aux autorités compétentes espagnoles, que la demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée introduite par la société BERKES HISPANA SL le 26 janvier 2017, pour un montant de 21 497,62 euros, porte sur le seul exercice 2015. La circonstance qu'une facture datée du 17 novembre 2014, mentionnant, au demeurant, une date limite de paiement au 1er janvier 2015, ait été comptabilisée dans cette demande ne permet pas, à elle seule, de considérer que la demande de la requérante portait sur une période supérieure à une année civile. Il s'ensuit que l'administration ne pouvait rejeter le droit au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée litigieuse en se fondant sur ce seul motif.

En ce qui concerne l'éligibilité des factures présentées :

6 En premier lieu, si le ministre fait valoir que plusieurs factures présentent des irrégularités, en raison d'adresses incomplètes, il résulte de l'instruction que les factures versées au dossier par la société requérante, qui étaient jointes à sa demande de remboursement du 26 janvier 2017, comportent les adresses complètes des fournisseurs, ainsi que toutes les informations permettant de les identifier.

7 En deuxième lieu, si le ministre fait également valoir que le document tenant lieu de facture pour le Luna Hôtel, sans mention de la taxe sur la valeur ajoutée, est exclu du droit à déduction, il résulte de l'instruction que ce document ne figure pas dans la demande transmise par la société BERKES HISPANA SL le 26 janvier 2017 et est, par suite, étranger au litige.

8 En troisième lieu, l'administration fait, en outre, valoir que plusieurs factures, établies par les sociétés Socorair, Entrepose, CA Refractories, Patey, LSPP et Vibrafloor, sont afférentes à des prestations de service, qui sont, en application des dispositions précitées de l'article 259 du code général des impôts, imposables dans le pays du preneur. Il résulte de l'instruction que la facture de la société Socorair est relative à une prestation de mesure des rejets atmosphériques, que les deux factures de la société Entrepose sont afférentes à une location d'échafaudage et de complément d'échafaudage, que celle émise par la société CA Refractories porte sur des travaux de perçage, que les deux factures de la SALR Patey sont relatives à des travaux d'isolation, que celle établie par la société LSPP est afférente à des tests d'étanchéité et que la facture de la société Vibrafloor établie pour un montant de 540 euros porte sur une prestation de transport. Au surplus, la facture de la société Socorair a été émise le 17 novembre 2014, sans que la requérante ne soutienne, ni même n'allègue, avoir honoré cette facture au cours de l'année 2015. En conséquence, dès lors qu'il est constant que la société BERKES HISPANA SL n'a en France ni le siège de son activité économique ni un établissement stable, les prestations de services qu'elle a prises sont réputées être situées en Espagne où elle a établi son siège. Dans ces conditions, les prestataires français de la société requérante ne pouvaient appliquer la taxe sur la valeur ajoutée au prix des prestations servies à cette dernière. La taxe relative à ces prestations ayant été, ainsi, facturée à tort, la société

BERKES HISPANA SL ne peut en demander le remboursement en France.

9 En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que deux factures établies par la société DEF Industrie le 31 mars 2015 sont afférentes à la fois à une livraison de matériels et aux travaux d'installation de ceux-ci et ne comportent qu'une tarification forfaitaire. De même, il résulte de l'instruction que la facture établie par la société Laval, le 20 mars 2015 est afférente à une fourniture de ventilateurs industriels mais également à une autre prestation qui n'est pas identifiable à la seule lecture de la codification mentionnée. Par suite, en l'absence de toute précision apportée par la requérante sur ces trois factures, la société BERKES HISPANA SL ne peut obtenir le remboursement en France de la taxe sur la valeur ajoutée relative à ces prestations.

10 Il résulte de tout ce qui précède que la société BERKES HISPANA SL est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil n'a pas fait droit à sa demande à hauteur de la somme de 15 405,06 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil n° 1705081 du 6 mars 2018 est annulé.

Article 2 : Il est accordé à la société BERKES HISPANA le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 2015, à hauteur de 15 405,06 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à la société BERKES HISPANA SL la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 18VE02133


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE02133
Date de la décision : 24/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Catherine BOBKO
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : SCP FERNANDEZ Y MIRAVALLES et GARCIA-BAYAT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-11-24;18ve02133 ?
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