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28/06/2021 | FRANCE | N°18VE04032

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 28 juin 2021, 18VE04032


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Mon cadeau préféré a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Puteaux à lui verser la somme de 77 232 euros au titre des préjudices subis à l'occasion des travaux d'aménagement de la " ZAC du théâtre " et de la rue Mars et Roty.

Par un jugement n° 1606354 du 4 octobre 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 décembre 2018 e

t le 29 juillet 2019, la société Mon cadeau préféré, représentée par Me B..., avocat, demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Mon cadeau préféré a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Puteaux à lui verser la somme de 77 232 euros au titre des préjudices subis à l'occasion des travaux d'aménagement de la " ZAC du théâtre " et de la rue Mars et Roty.

Par un jugement n° 1606354 du 4 octobre 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 décembre 2018 et le 29 juillet 2019, la société Mon cadeau préféré, représentée par Me B..., avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Puteaux à lui verser, d'une part, la somme de 67 232 euros au titre du manque à gagner subi du fait des travaux publics qu'elle a entrepris, d'autre part, la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et de l'atteinte à sa réputation professionnelle ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Puteaux le versement de la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité sans faute de la commune est engagée pour dommages de travaux publics causés aux tiers ;

- les travaux réalisés dans le cadre de l'aménagement de la place du théâtre et de la rue Mars et Roty lui ont causé un préjudice commercial revêtant un caractère anormal et spécial ;

- la situation a porté atteinte à sa réputation professionnelle et lui a causé un préjudice moral certain ;

- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal a relevé d'office sans en avertir les parties le moyen tiré de ce que certains faits générateurs des dommages invoqués ne constituaient pas des travaux publics ;

- le tribunal administratif n'a pas précisé dans son jugement les motifs qui l'ont conduit à écarter la qualification de travaux publics.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteure publique,

- et les observations de Me B..., pour la société Mon cadeau préféré, et de Me C..., pour la commune de Puteaux.

Considérant ce qui suit :

1. La société Mon cadeau préféré a conclu un bail commercial avec la commune de Puteaux le 15 juillet 2013 afin d'exploiter un magasin de cadeaux de naissance et de mobilier pour chambres d'enfants. L'installation de ce magasin s'inscrivait dans le cadre de l'aménagement de la place dite du théâtre à Puteaux, projet qui consistait en l'aménagement d'une place bordée de commerces autour du thème de l'enfance et de la petite enfance, avec un manège en son centre, des logements et un parking à proximité. La société Mon cadeau préféré a débuté son activité commerciale le 30 novembre 2013. Elle fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Puteaux à lui verser la somme de 77 232 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis, lors de la première année d'exploitation du magasin.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué (...) ". Le juge administratif, saisi de conclusions mettant en jeu la responsabilité de la puissance publique, n'est pas tenu de procéder à la communication ainsi prescrite lorsqu'il constate au vu des pièces du dossier qu'une des conditions d'engagement de la responsabilité publique n'est pas remplie, alors même qu'il fonde ce constat sur des dispositions législatives ou réglementaires non invoquées en défense.

4. Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté les conclusions indemnitaires présentées devant lui par la société Mon cadeau préféré au motif notamment que si la société faisait état d'un certain nombre de désagréments, constitués par l'absence d'installation du manège sur la place, de retards dans l'ouverture du parking, d'un certain nombre de boutiques restées vacantes à la date d'inauguration de la place, de l'obstruction des voies d'accès de la place, du stationnement de véhicules utilitaires et des travaux d'aménagement d'un restaurant sur la place à compter du mois de juillet 2014, l'ensemble de ces éléments n'étaient pas constitutifs de travaux immobiliers réalisés dans l'intérêt général pour le compte d'une personne publique ou pour l'exécution d'une mission de service public. En fondant sa décision sur le fait que les préjudices causés par ces évènements ne peuvent donc donner lieu, devant le juge administratif, à indemnisation sur le fondement du régime de responsabilité sans faute du fait des dommages de travaux publics causés aux tiers, alors même que devant le tribunal administratif, la défenderesse n'avait pas invoqué le fait que tous ces éléments n'étaient pas constitutifs de travaux publics, le tribunal n'a pas soulevé d'office un moyen mais a seulement relevé, pour rejeter la demande, que la société Mon cadeau préféré ne remplissait pas l'une des conditions d'engagement de la responsabilité de la puissance publique. La requérante qui, au demeurant, n'a soulevé ce moyen que dans son mémoire en réplique du 29 juillet 2019, n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le tribunal, qui a par ailleurs suffisamment motivé sa décision en indiquant que ces éléments ne sont pas constitutifs de travaux immobiliers réalisés dans l'intérêt général pour le compte d'une personne publique ou pour l'exécution d'une mission de service public, aurait méconnu l'article R. 611-7 du code de justice administrative en omettant de communiquer aux parties un moyen relevé d'office.

Sur le bien-fondé :

5. Il appartient au riverain d'une voie publique qui entend obtenir réparation des dommages qu'il estime avoir subis à l'occasion d'une opération de travaux publics à l'égard de laquelle il a la qualité de tiers d'établir, d'une part, le lien de causalité entre cette opération et les dommages invoqués et, d'autre part, le caractère anormal et spécial de son préjudice, les riverains des voies publiques étant tenus de supporter sans contrepartie les sujétions normales qui leur sont imposées dans un but d'intérêt général. Le caractère anormal du préjudice et des dommages supportés se déduit, notamment, des difficultés particulières rencontrées par les clients dans l'accès au fonds de commerce ou encore de l'impossibilité même d'accéder à ce fonds.

6. Ont le caractère de travaux publics les travaux immobiliers répondant à une finalité d'intérêt général réalisés pour le compte d'une personne publique ou pour l'exécution d'une mission de service public.

7. La société Mon cadeau préféré reprend en appel, au soutien de sa demande, le fait qu'un certain nombre de désagréments, au nombre desquels figurent l'absence d'installation du manège sur la place, des retards dans l'ouverture du parking, la vacance d'un certain nombre de boutiques à la date d'inauguration de la place, l'obstruction des voies d'accès de la place en particulier par le stationnement de véhicules utilitaires et les travaux d'aménagement d'un restaurant sur la place à compter du mois de juillet 2014 sont à l'origine des préjudices subis. Toutefois, et ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, l'absence d'installation du manège sur la place, la vacance d'un certain nombre de boutiques à la date d'inauguration de la place, l'obstruction des voies d'accès de la place en particulier par le stationnement de véhicules utilitaires et les travaux d'aménagement d'un restaurant sur la place à compter du mois de juillet 2014 ne sont pas constitutifs de travaux immobiliers réalisés dans l'intérêt général pour le compte d'une personne publique ou pour l'exécution d'une mission de service public et les préjudices causés par ces évènements ne peuvent donc donner lieu, devant le juge administratif, à indemnisation sur le fondement du régime de responsabilité sans faute du fait des dommages de travaux publics causés aux tiers.

8. Si la société Mon cadeau préféré reprend en appel son moyen tiré de ce que les travaux d'aménagement de la place du théâtre auraient gêné et même empêché l'accès à son magasin dont la clientèle est essentiellement composée de femmes enceintes et de familles avec poussettes entre décembre 2013 et mai 2014, d'une part, il résulte de l'instruction que le magasin n'a pas été privé d'accès par une fermeture totale de la place en dehors de la seule journée du 11 décembre 2013, les travaux entre mars et mai 2014 n'ayant porté que sur une partie des rues permettant l'accès à la place, que des parkings étaient disponibles à proximité de la place, d'autre part, que des panneaux signalant les commerces avaient d'ailleurs été installés dans la zone de travaux. Enfin elle n'apporte pas de précision de nature à établir que les nuisances sonores auraient excédé celles couramment admises pour ce type de chantier. Il ne résulte pas de l'instruction que le commerce exploité par la société Mon cadeau préféré aurait connu des périodes de fermeture durant les travaux ou que les horaires d'ouverture au public auraient dû être réduits. Enfin il ressort des plaquettes d'information de la commune de Puteaux que les travaux d'aménagement de la place étaient prévus, dès février 2013, comme devant s'achever en mars 2014. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la gêne subie par la société Mon cadeau préféré dans l'exploitation de son fonds de commerce n'avait pas, compte tenu du laps de temps durant lequel les travaux se sont poursuivis et du caractère prévisible de ceux-ci, excédé les sujétions que doivent normalement supporter les riverains des voies publiques dans un but d'intérêt général.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Mon cadeau préféré n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Puteaux le versement de la somme que la société Mon cadeau préféré demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Mon cadeau préféré est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Puteaux présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

2

N° 18VE04032


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE04032
Date de la décision : 28/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02-01-02 Travaux publics. Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics. Notion de dommages de travaux publics. Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: Mme Eugénie ORIO
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : CABINET BOULAY ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-06-28;18ve04032 ?
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