La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/02/2022 | FRANCE | N°20VE00791

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 10 février 2022, 20VE00791


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Sri Ram a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits, majorations, intérêts de retard et amendes, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014 et 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des périodes correspondantes.

Par un jugement n° 1706399 du 7 janvier 2020, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Proc

dure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2020, la SARL Sri Ram, repr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Sri Ram a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits, majorations, intérêts de retard et amendes, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014 et 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des périodes correspondantes.

Par un jugement n° 1706399 du 7 janvier 2020, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2020, la SARL Sri Ram, représentée par Me Ader, avocat, demande à la cour :

1°) d'infirmer ce jugement ;

2°) de la décharger des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il n'a pas été répondu à deux de ses moyens ;

- l'administration a manqué à son devoir de loyauté en l'induisant en erreur quant à la possibilité de régulariser ses déclarations afférentes à l'exercice clos le 31 décembre 2015 ce qui a conduit à ce qu'elle soit soumise à la procédure de taxation d'office ;

- elle n'a pas bénéficié des garanties du recours hiérarchique et de l'interlocution départementale, prévues par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié applicables quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre et opposables à l'administration en vertu de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, et confirmées par la note interne de la sous-direction du contrôle fiscal CF1 référencée MFP/n°105/2006 du 7 février 2006 ; la mise en recouvrement du 18 avril 2017 est donc irrégulière du fait de l'absence d'acceptation préalable des demandes qu'elle a présentées à ce titre ;

- en méconnaissance des garanties prévues par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, millésime mai 2016, laquelle est opposable à l'administration en vertu de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, et également des commentaires administratifs publiés au BOFiP sous la référence BOI-CF-PGR-20-20 du 12 septembre 2012 et de la réponse ministérielle n° 16742 du 27 juillet 1955, l'administration a réalisé la vérification en dehors de la présence de son représentant légal et avec une personne ne bénéficiant d'aucun mandat de représentation ;

- elle demande la copie de la preuve de la notification de l'acte de mise en recouvrement afin d'être en mesure d'apprécier le délai de recours à sa disposition et le délai de prescription de l'action en recouvrement ;

- la mise en recouvrement des impositions et pénalités en litige a méconnu les garanties offertes aux petites et moyennes entreprises de création récente, ce que l'administration ne pouvait ignorer, et qui sont consacrées par les paragraphes 160 à 210 des commentaires administratifs publiés au BOFiP sous la référence BOI-CF-PGR-20-50 du 12 septembre 2012 et la réponse ministérielle du 30 avril 1976 ;

- les pénalités ne sont pas motivées ;

- elles ne sont pas fondées, son gérant n'étant pas gérant d'autres sociétés, mais seulement le détenteur passif de parts sociales dont certaines ont été cédées.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonfils,

- les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Sri Ram, qui exerce depuis 2014 une activité de vente de boissons et de restauration rapide, de services de téléphonie et numériques, de transfert d'argent et de jeux, outre une activité de location de salle, a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité, à l'issue de laquelle l'administration lui a proposé des rectifications en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, selon la procédure de taxation d'office. La SARL Sri Ram fait appel du jugement du 7 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Versailles a refusé de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014 et 2015 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée également mis à sa charge au titre de la période correspondant à ces exercices.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". La SARL Sri Ram soutient que le tribunal n'a pas répondu aux moyens qu'elle soulevait tirés, d'une part, de ce que la procédure de vérification n'a pas été conduite avec un interlocuteur disposant d'un mandat à cette fin et, d'autre part, de ce qu'elle a été privée des recours hiérarchiques auxquels elle avait droit. Il ressort toutefois des termes du jugement que les premiers juges ont répondu de manière suffisamment motivé à ces deux moyens, respectivement aux points 6 à 8, et 13 de leur jugement. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) / 2° à l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 68 ; / 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ; (...) ". D'une part, l'article L. 68 du même livre dispose : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° (...) de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. (...) ". D'autre part, aux termes du 3° de l'article 287 du code général des impôts : " 3. Les redevables placés sous le régime simplifié d'imposition prévu à l'article 302 septies A, à l'exception de ceux mentionnés au 3 bis, déposent au titre de chaque exercice une déclaration qui détermine la taxe due au titre de la période et le montant des acomptes semestriels pour la période ultérieure. (...) ". L'article 242 sexies de l'annexe II au code général des impôts dispose : " Les entreprises placées sous le régime simplifié souscrivent chaque année, au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1er mai la déclaration mentionnée au 3 de l'article 287 du code général des impôts suivant le modèle prescrit par l'administration. (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que l'administration a considéré que la SARL Sri Ram avait déposé sa déclaration n° 2065 le 4 octobre 2016, par la remise au vérificateur du fichier des écritures comptables par son expert-comptable. Aucune déclaration au titre de l'impôt sur les sociétés n'est intervenue auparavant, notamment dans le délai de trente jours après la notification de la mise en demeure adressée le 9 juillet 2016 de déposer sa déclaration n° 2065 pour l'exercice clos le 31 décembre 2015. Elle n'a procédé à aucune déclaration de taxe sur la valeur ajoutée dans le délai légal, soit avant le 3 mai 2016, ni d'ailleurs dans le délai de trente jours suivant la notification de la mise en demeure de le faire reçue par l'appelante le 9 juillet 2016, alors au demeurant que l'administration n'était pas tenue de procéder à une telle mise en demeure en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Pour soutenir que l'interdiction qui lui aurait été faite par l'administration de produire ses déclarations au titre de l'année 2015 l'a induite en erreur et a conduit à ce qu'elle soit soumise à la procédure de taxation d'office, la requérante produit une attestation de son expert-comptable, datée du 20 février 2017, lequel indique que le contrôleur des impôts lui a demandé de ne pas télétransmettre le bilan au 31 décembre 2015 en raison d'une correction de résultats nécessaire et de l'absence de nécessité d'envoyer ce document. Toutefois, cette attestation fait état de faits postérieurs aux délais de déclaration. Ainsi, les déclarations relatives à l'exercice clos le 31 décembre 2015 étant pour l'une tardive et pour l'autre manquante, c'est à bon droit que l'administration a mis en œuvre la procédure de taxation d'office sur le fondement des 2° et 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. Le moyen tiré du manque de loyauté de l'administration doit, par suite, être écarté.

5. En deuxième lieu, le paragraphe 6 du chapitre Ier de la charte du contribuable vérifié, dont les dispositions sont opposables à l'administration en vertu de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, prévoit que : " En cas de difficultés, vous pouvez vous adresser à l'inspecteur divisionnaire ou principal et ensuite à l'interlocuteur désigné par le directeur. Leur rôle vous est précisé plus loin (...). Vous pouvez les contacter pendant la vérification. ".

6. La possibilité de s'adresser au supérieur hiérarchique du vérificateur puis, le cas échéant, à un second interlocuteur en cas de difficultés affectant le déroulement des opérations de contrôle constitue une garantie substantielle offerte à tous les contribuables, quelle que soit la procédure d'imposition qui sera ultérieurement mise en œuvre à leur encontre. Pour les contribuables relevant de la procédure d'imposition contradictoire, cette garantie peut être mise en œuvre jusqu'à l'envoi de la proposition de rectification. Pour les contribuables relevant d'une procédure d'imposition d'office, cette garantie peut être mise en œuvre jusqu'à l'envoi des bases d'imposition d'office, ou, lorsqu'il n'a pas été procédé à cet envoi en application du dernier alinéa de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, jusqu'à la date de mise en recouvrement.

7. Il résulte de l'instruction que la SARL Sri Ram a, par courriers des 17 janvier et 1er mars 2017, demandé à bénéficier d'un entretien avec le supérieur hiérarchique. L'administration a pu, par des réponses des 7 février et 15 mars 2017, refuser de faire droit à cette demande sans méconnaitre la garantie offerte par la charte du contribuable vérifié, dans la mesure où la société requérante n'a pas émis la demande de recours à un supérieur hiérarchique puis à l'interlocution départementale avant l'envoi des bases d'imposition d'office, le 10 novembre 2016 par le biais d'une proposition de rectification. Dès lors que la société ne justifie pas, par ailleurs, avoir adressé une demande antérieure à la réception de cette proposition de rectification pour contester les conditions de déroulement du contrôle, le moyen doit être écarté.

8. En troisième lieu, la SARL Sri Ram n'est pas fondée, en tout état de cause, à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, d'une note interne à l'administration en date du 7 février 2006 laquelle n'a pas été publiée et, au surplus, est relative à la procédure d'imposition.

9. En quatrième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 4, la SARL Sri Ram n'a pas procédé dans les délais aux déclarations de résultats au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2015 ni à la déclaration de taxe sur la valeur ajoutée. Cette situation n'a pas été révélée par la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet. Dès lors, les irrégularités qui auraient entaché cette vérification sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. Au surplus, et en tout état de cause, il résulte de l'instruction que le gérant de la SARL Sri Ram, M. A..., était présent le 6 septembre, lors de la première intervention, et qu'il a demandé par écrit à ce que les opérations de vérification de comptabilité se poursuivent dans les locaux du cabinet de son expert-comptable. A cet égard, la société requérante n'établit, ni même n'allègue, aucunement que le vérificateur se serait refusé à un échange de vues. En outre, le représentant légal de la société a, le 17 octobre 2016, contresigné le procès-verbal de remise des fichiers des écritures comptables de la société. Il ne conteste pas avoir été présent lors des deux dernières rencontres avec le vérificateur, les 18 octobre et 9 novembre 2016, en même temps que son conseil, expert-comptable, lequel n'avait pas, dans ces conditions, à justifier d'un mandat écrit pour représenter le gérant de la SARL Sri Ram dans la mesure où ce dernier était également présent lors des rencontres avec le vérificateur. Dans ces conditions, la société contrôlée, qui était régulièrement représentée au cours des opérations de contrôle, n'a pas été privée des garanties de représentation reconnues par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié.

10. En cinquième lieu, et à supposer même que la SARL Sri Ram ait entendu invoquer les dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, elle ne peut utilement se prévaloir des commentaires administratifs publiés au BOFiP sous la référence BOI-CF-PGR-20-20 du 12 septembre 2012, relatifs à la procédure d'imposition, qui est exclue du champ d'application de la garantie contre les changements de doctrine figurant à l'article précité, de même, et pour le même motif, que des termes de la réponse ministérielle n° 16742 du 27 juillet 1955. Par suite, ces moyens doivent également être écartés.

Sur les pénalités :

11. En premier lieu, la proposition de rectification du 10 novembre 2016 indique les motifs de droit et de fait sur lesquels l'administration s'est fondée pour appliquer la majoration de 40 % prévue au b du 1° de l'article 1728 du code général des impôts. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette majoration doit être écarté.

12. En deuxième lieu, la société requérante se prévaut des § 160 à 210 des commentaires administratifs publiés le 12 septembre 2012, au BOFiP sous la référence BOI-CF-PGR-20-50-20120912, renvoyant en particulier à une prise de position du ministre des finances du 30 avril 1976, aux termes de laquelle : " Les petites et moyennes entreprises qui se créent, et, notamment, les salariés s'établissant à leur compte (à l'exclusion des créations résultant d'un simple changement dans les conditions juridiques d'exploitation), doivent bénéficier d'un traitement spécifique à l'occasion des vérifications dont elles font l'objet au cours de leurs premières années d'activité (...) d'une part sur la remise des pénalités, d'autre part, sur l'octroi de délais de paiement ". Eu égard à ses mentions, cette instruction ne peut pas être regardée comme une interprétation de la loi mais constitue seulement une recommandation adressée par le ministre pour inciter les agents compétents à faire preuve d'indulgence à l'égard de certains chefs d'entreprise. Par suite, la SARL Sri Ram ne saurait se prévaloir des termes de l'instruction précitée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ni à l'encontre des pénalités, ni davantage à l'encontre des impositions principales, à supposer qu'elle ait entendu le faire.

13. En troisième lieu, si la SARL Sri Ram conteste le bien-fondé des pénalités au motif que son gérant n'exerce pas de fonctions identiques dans d'autres sociétés dans lesquelles il n'est que le détenteur passif de parts sociales, ce moyen est inopérant dès lors que les pénalités pour défaut de déclaration sont indépendantes de la bonne foi du contribuable.

14. Enfin, il n'y a pas lieu d'ordonner à l'administration de communiquer la preuve de la réception de l'avis de mise en recouvrement des impositions contestées pour vérifier les délais de recours et l'existence d'une prescription de l'action en recouvrement dès lors que la recevabilité du litige d'assiette soulevé par la société n'est pas contestée et qu'un moyen relatif au recouvrement est inopérant dans un tel litige.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Sri Ram n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées, ainsi, et en tout état de cause, que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du même code, en l'absence de dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par la SARL Sri Ram est rejetée.

2

N° 20VE00791


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award