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11/04/2023 | FRANCE | N°21VE02312

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 11 avril 2023, 21VE02312


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1914831 du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a réduit les bases d'impositions sur le revenu de 297 555 euros et de 236 971 euros au titre des années 2012 et 2013 et les a d

chargés en conséquence, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1914831 du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a réduit les bases d'impositions sur le revenu de 297 555 euros et de 236 971 euros au titre des années 2012 et 2013 et les a déchargés en conséquence, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013 correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1er, a condamné l'Etat à leur verser une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 août 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Tabi, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué en ce qu'il rejette le surplus des conclusions de leur demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner au remboursement des dépens.

Ils soutiennent que :

- l'administration a rejeté à tort la comptabilité de la SAS Medya Viandes au titre des années 2012 et 2013 ;

- les chèques dit " porteurs " ont été comptabilisés et encaissés ; ce ne sont pas des recettes omises, par suite l'administration fiscale a réintégré à tort, dans son résultat imposable les paiements par chèques reçus de tiers ;

- les sommes contestées, portées au débit des comptes finances, banque et caisse de la SAS Medya Viandes, n'ont pas été désinvesties ; par suite, il ne peut y avoir distribution de ses sommes au profit de M. B....

Par un mémoire en défense enregistré le 6 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 13 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 3 février 2023 à 12 heures, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Bobko, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la SAS Medya Viandes, qui exerce une activité de commerce de gros de viande de boucherie, et dont M. B... est le président et l'associé majoritaire, l'administration a notifié au foyer fiscal de ce dernier des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012 et 2013 en raison de la réintégration à ses revenus déclarés de revenus regardés comme lui ayant été distribués par la société sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 et du c de l'article 111 du code général des impôts. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 1er juillet 2021 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il n'a pas intégralement fait droit à leur demande de décharge.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :

2. Pour écarter la comptabilité de la SAS Medya Viandes comme non-probante, l'administration ne s'est pas fondée, contrairement à ce que soutiennent les requérants, sur l'absence de système de basculement automatique de ces données de gestion dans le logiciel de comptabilité, mais a relevé un certain nombre d'irrégularités formelles dans sa comptabilité. En particulier, elle a constaté des anomalies comptables en ce que des paiements par chèques ont été comptabilisés au crédit de comptes clients n'ayant aucun lien avec les émetteurs des chèques. Elle a également constaté des anomalies et irrégularités dans les données de gestion en relevant l'absence de mention du mode de règlement et du montant réglé sur les factures ainsi que l'absence d'identification de certains clients enregistrés sous le libellé " espèces " et " chèques ", des encaissements de chèques émis par des personnes ne figurant pas en comptabilité, des créances clients soldées par des chèques émis par des personnes ne figurant pas en comptabilité, ainsi que des anomalies sur le compte " caisse " de la société, créditeur pendant plusieurs mois. L'administration a aussi constaté qu'à défaut de fichier spécifique aux règlements, il n'existait pas de référence commune entre les fichiers " ventes " et " clients " permettant au service de vérifier que les encaissements réalisés par la société correspondent à des produits comptabilisés. Elle a enfin, relevé une rupture du chemin de révision entre le document d'origine et l'écriture comptable des ventes et inversement, en méconnaissance de l'article 410-3 du plan comptable général dès lors qu'elle ne peut effectuer de recoupement entre les factures émises et les règlements effectuées par des tiers au regard des seules pièces transmises par la société.

3. En se bornant à soutenir que la clientèle de la société est principalement constituée de restaurants de type " kebab " n'ayant pas de compte bancaire, de sorte qu'elle est contrainte d'accepter les chèques de tiers non identifiés en comptabilité, les requérants ne contestent pas utilement les irrégularités relevées par l'administration. S'ils soutiennent que lorsque l'émetteur de chèque n'est pas le client facturé, il est identifié par une mention manuscrite sur le bordereau de livraison du client et se réfèrent en appel aux quelques pièces produites en première instance, notamment les attestations établies par certains de ses clients, tickets, factures et des extraits de son grand livre et de sa balance " clients de révision ", d'états de crédits clients et de suivis de balance " Coala-NCI ", ces éléments ne sauraient justifier ni les anomalies relevées par l'administration ni permettre le rapprochement entre les règlements de tiers et les factures de ventes comptabilisées. Dans ces conditions, eu égard aux graves irrégularités de comptabilité constatées par le service, ce dernier doit être regardé comme rapportant la preuve, qui lui incombe, du défaut de valeur probante de l'ensemble de la comptabilité présentée, justifiant qu'il soit procédé à la reconstitution de son chiffre d'affaires au cours de la période vérifiée, sans que les requérants ne puissent utilement se prévaloir du fait que les comptes avaient été établis par un expert-comptable extérieur et certifiés par un commissaire aux comptes indépendant.

En ce qui concerne la reconstitution des recettes de la SAS Madya Viandes :

4. Si les requérants contestent la prise en compte de chèques dit " porteurs " comme des recettes omises non comptabilisées, ils n'apportent pas d'éléments permettant de justifier que les chèques dits porteurs correspondent à des recettes comptabilisées. Les seules attestations établies par certains clients de la société, de même que les tickets, pour certains illisibles, factures et extraits du grand livre et de la balance " clients de révision ", les états de crédits clients et de suivis de balance " Coala-NCI ", déjà produits en première instance, sont insuffisants à établir que ces paiements en chèques ont effectivement été comptabilisés.

En ce qui concerne la distribution des revenus :

5. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. " Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ".

6. En cas de refus des propositions de rectification par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire de sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve que celui-ci en a effectivement disposé. Toutefois, le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle. La qualité de seul maître de l'affaire suffit en outre à regarder le contribuable comme bénéficiaire des revenus réputés distribués, en l'application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, par la société en cause, la circonstance qu'il n'aurait pas effectivement appréhendé les sommes correspondantes étant sans incidence à cet égard.

7. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'administration a procédé au rejet de la comptabilité et au rehaussement du bénéfice de la SAS Medya Viandes. Les bénéfices non déclarés par la SAS Medya Viandes doivent ainsi légalement être regardés comme des revenus distribués en application des dispositions du 1° de l'article 109 du code général des impôts. Pour contester l'existence et le montant des revenus distribués, les requérants soutiennent que les bénéfices réintégrés dans la SAS Medya Viandes n'ont pas été désinvestis de cette dernière dès lors que les chèques dit " porteurs " ont tous été comptabilisés pour être portés au crédit des comptes clients débiteurs et par symétrie comptables au débit des comptes financiers, banque et caisse de la société. Toutefois, ils ne l'établissent pas, dès lors que les discordances de noms et de montants entre les factures et les encaissements empêchent tout rapprochement comptable. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a estimé que les sommes réintégrées au bénéfice de la SAS Medya Viande, devaient être regardées comme des revenus distribués.

8. En second lieu, l'administration relève que M. B..., en qualité de président et associé majoritaire de la SAS Medya Viandes, doit être regardé comme le seul maître de l'affaire, ce que les requérants ne contestent au demeurant pas. Par suite, l'administration peut déduire que M. B..., en qualité de maître de l'affaire, doit être regardé comme étant présumé être le bénéficiaire des revenus légalement réputés distribués par la SAS Medya Viandes.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande. Par suite, leur requête doit être rejetée, y compris les concluions tenant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Beaujard, président de chambre,

Mme Dorion, présidente assesseure,

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 avril 2023.

La rapporteure,

O. C...Le président,

P. BEAUJARDLa greffière,

S. LOUISERELa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour exécution conforme,

La greffière,

2

N° 21VE02312


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02312
Date de la décision : 11/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : SELARL ANDRE MADRID

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-04-11;21ve02312 ?
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