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15/09/2022 | FRANCE | N°19/00815

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 15 septembre 2022, 19/00815


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------







ARRÊT DU : 15 SEPTEMBRE 2022







F N° RG 19/00815 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K3WB









Madame [B] [E] [Y] [R]

Monsieur [K] [M] [W]





c/



Madame [A] [I] épouse [O]

Madame [J] [O] épouse [U]

SAS BOURSE DE L'IMMOBILIER



























Nature de la décision

: AU FOND





















Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 janvier 2019 (R.G. 18/00461) par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 12 février 2019





APPELANTS :



[B] [E] [Y] [R]

née...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 15 SEPTEMBRE 2022

F N° RG 19/00815 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-K3WB

Madame [B] [E] [Y] [R]

Monsieur [K] [M] [W]

c/

Madame [A] [I] épouse [O]

Madame [J] [O] épouse [U]

SAS BOURSE DE L'IMMOBILIER

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 23 janvier 2019 (R.G. 18/00461) par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 12 février 2019

APPELANTS :

[B] [E] [Y] [R]

née le 09 Mai 1948 à [Localité 10]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]

[K] [M] [W]

né le 12 Août 1956 à [Localité 10]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]

Représentés par Me Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX et assistés de Me LHUISSIER substituant Me Thomas RIVIERE de l'AARPI RIVIERE - DE KERLAND, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

[A] [I] épouse [O]

née le 11 Juin 1942 à [Localité 6]

de nationalité Française

Sans profession, demeurant [Adresse 5]

Représentée par Me Laeticia CADY de la SELAS GAUTHIER DELMAS, avocat au barreau de BORDEAUX

[J] [O] épouse [U]

sur appel provoqué de [A] [I] épouse [O] du 1er août 2019

née le 22 Mars 1972 à [Localité 7]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Elodie VITAL-MAREILLE, avocat au barreau de BORDEAUX

SAS BOURSE DE L'IMMOBILIER

Agent immobilier, demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Catherine LATAPIE-SAYO, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 juin 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Paule POIREL, Président,

Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,

Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Annie BLAZEVIC

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Par l'intermédiaire de la SAS Bourse de l'Immobilier, aujourd'hui la SAS Human Immobilier, à laquelle ils avaient donné mandat de vendre leur maison située [Adresse 3], M. [M] [W] et Mme [B] [R] épouse [W] (M. et Mme [W]) ont signé un compromis de vente sous conditions suspensives par acte sous-seing privé du 30 mai 2017 avec Mme [A] [I] veuve [O] (Mme [O]) moyennant le prix principal de 513.000 euros.

Cet acte contenait une condition suspensive stipulée au bénéfice de Mme [O] ainsi rédigée : ' Réitération par acte authentique de la vente de sa résidence principale sise à [Adresse 5], par laquelle un compromis de vente a été signé en l'étude de Maître [L], Notaire à [Localité 7] le 18 mai 2017, au profit de la SCI La Cherferie, avant et au plus tard le 5 septembre 2017 dans cette même étude. Ce compromis de vente est annexé aux présentes'.

La signature de l'acte authentique devait intervenir au plus tard le 5 septembre 2017, Maître [L], notaire de Mme [O] et Maître [G], notaire de M. et Mme [W] étant désigné par l'acte sous seing privé pour y procéder.

Devant se reloger M. et Mme [W] ont signé le 13 juin 2017 par l'intermédiaire de la SAS Bourse de l'Immobilier un compromis de vente avec M. et Mme [H] en vue d'acquérir une maison située à [Adresse 9] moyennant le prix de 360.000 euros, sous la condition suspensive de la vente par M. et Mme [W] de leur bien immobilier situé [Adresse 3].

La résidence principale de Mme [O], situé [Adresse 5], a été vendue le 4 septembre 2017 au prix de 650.000 euros. Cependant, en raison de l'absence d'accord amiable sur la répartition de ces fonds de Mme [J] [O] épouse [U], fille de Mme [O], qui s'est avérée être en indivision avec Mme [O] sur ce bien, de même que son frère M. [T] [O], l'acte authentique n'a pas été passé le 4 septembre 2017 faute pour Mme [O] de disposer des fonds permettant de payer le prix de vente.

A défaut de solution amiable en vue de régler le litige, M. et Mme [W] ont, par acte d'huissier des 6 et 18 décembre 2018, assigné devant le tribunal de grande instance de Bordeaux Mme [O] et la SAS Bourse de l'Immobilier aux fins de voir condamner la SAS Bourse de l'immobilier à leur verser la somme de 10 000 euros au titre du dépôt de garantie, Mme [O] au paiement de la somme de 15.650 euros et Mme [O] solidairement avec la SAS Bourse de l'Immobilier au paiement de diverses sommes au titre des préjudices subis, outre une condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens, le tout assorti de l'exécution provisoire.

Mme [U] a été appelée en la cause par Mme [O].

Par jugement rendu le 23 janvier 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :

- débouté M. et Mme [W] de l'ensemble de leurs demandes,

- débouté Mme [I] veuve [O] de ses demandes dirigées à l'encontre de la société Bourse de l'Immobilier,

- constaté que Mme [I] veuve [O] ne sollicite pas la restitution à son profit du dépôt de garantie,

- débouté la société Bourse de l'Immobilier de l'ensemble de ses demandes,

- laissé à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles,

- dit que M. et Mme [W] supporteront la charge des dépens,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration en date du 12 février 2019, M. et Mme [W] ont relevé appel de jugement en ce qu'il les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes, leur a laissé la charge de leurs frais irrépétibles et dit qu'ils supporteront la charge des dépens, intimant Mme [O] et la SAS Bourse de l'immobilier.

Par acte en date du 1er août 2019, Mme [O] a assigné Mme [U] en appel provoqué devant la cour d'appel de Bordeaux.

M. et Mme [W], dans leurs dernières conclusions d'appelants en date du 25 juin 2020, demandent à la cour, au visa des articles 1103, 1104, 1217, 1231-1 et suivants du code civil, de:

- réformer le jugement prononcé le 23 janvier 2019 par le tribunal de grande instance de Bordeaux,

En conséquence,

- ordonner à la société Bourse de l'Immobilier de leur verser le dépôt de garantie de 10 000 euros détenu par elle en application du contrat du 30 mai 2017 au titre du dépôt de garantie,

- condamner Mme [I] veuve [O] à leur payer la somme de 15 650 euros avec intérêts de droit depuis le 6 septembre 2017 au titre de la clause pénale,

- condamner conjointement et solidairement Mme [I] veuve [O] et la société Bourse de l'Immobilier, ou l'un à défaut de l'autre, à leur payer à titre de dommages et intérêts :

- la somme de 8 539,25 euros en réparation du préjudice matériel subi,

- la somme de 5 000 euros pour chacun d'eux en réparation du préjudice moral subi,

- subsidiairement, s'il était retenu que le refus de libération des fonds par Mme [U] était fautif, la condamner au paiement de la somme de 15 650 euros avec intérêts de droit, de la somme de 8 538,25 euros en réparation du préjudice matériel subi, de la somme de 5 000 euros pour chacun d'eux en réparation du préjudice moral et celle de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner conjointement et solidairement Mme [O] et la société Bourse de l'Immobilier à leur payer la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner solidairement aux dépens.

Mme [O], dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 25 mai 2020, demande à la cour, au visa des articles 510 et 566 code de procédure civile, ainsi que des articles 621, 1112-1, 1240, 1231, 1235-1 et 1240 du code civil de :

A titre principal :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 23 janvier 2019 en ce qu'il a débouté M. et Mme [W] de leur demande de condamnation de Mme [O] au paiement de la somme de 25 650 euros au titre de la clause pénale ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 23 janvier 2019 en ce qu'il a débouté M. et Mme [W] de leur demande de condamnation de Mme [O] au paiement de la somme de 8 885,92 euros au titre du préjudice matériel et 5000 euros pour chaque époux au titre du préjudice moral ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 23 janvier 2019 en ce qu'il a débouté la société la Bourse de l'Immobilier de leur demande reconventionnelle de condamnation de Mme [O] au paiement de la somme de 25 650 euros au titre de la clause pénale et de la somme de 22 000 euros au titre de l'article 1240 du code civil;

A titre additionnel,

- ordonner la restitution de la somme de 10 000 euros versée à titre de dépôt de garantie détenue par la société Bourse de l'Immobilier à Mme [O] ;

- condamner les appelants à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

En cas de réformation du jugement du 23 janvier 2019 et à titre subsidiaire:

- dire et juger que la société Bourse de l'Immobilier a failli à son obligation de conseil engageant sa responsabilité à son égard ;

- condamner la société Bourse de l'Immobilier à la relever indemne de toute condamnation à son encontre ;

- condamner la société Bourse de l'Immobilier à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

En cas de réformation du jugement du 23 janvier 2019 et à titre infiniment subsidiaire :

- dire et juger que Mme [U] a eu un comportement fautif engageant sa responsabilité délictuelle ;

- condamner Mme [U] à la relever indemne de toute condamnation à son encontre,

- dire et juger que Mme [U] sera condamnée à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En cas de réformation du jugement du 23 janvier 2019 et à titre très infiniment subsidiaire :

- minorer le montant de la clause pénale et des dommages-intérêts demandés par les époux [W] à la somme globale de 10.000 euros,

- dire et juger que les 10.000 euros versés à la société Bourse de l'Immobilier au titre du dépôt de garantie devront être reversés aux époux [W] en application de la condamnation de Mme [O],

- dire et juger que la société Bourse de l'Immobilier devra procéder à ce versement dans un délai de 48 heures à compter du caractère définitif de la décision à venir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

- dire et juger que les dépens seront mis à la charge de la société Bourse de l'Immobilier.

La SAS Bourse de l'Immobilier, dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 25 mai 2020, demande à la cour, de :

Vu l'article 564 du code de procédure civile,

- déclarer irrecevables comme étant nouvelles les demandes présentées par Mme [O] à son encontre à l'exception de la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile déclarer recevable et bien fondé l'appel incident formé par elle,

Vu les articles 1103 et suivants, et l'article 1240 du Code Civil,

- voir confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 23 janvier 2019 en ce qu'il a débouté :

- M. et Mme [W] de l'ensemble de leurs demandes présentées à son encontre,

- Mme [O] de ses demandes dirigées contre elle.

Le réformant,

- voir condamner M. et Mme [W] solidairement au paiement de la somme de 1 000 euros pour procédure abusive,

Vu l'article 1240 du code civil et 954 du code de procédure civile,

- voir débouter Mme [O] de ses demandes à son encontre,

Vu les articles 1231-6 et 1112-1 du code civil,

- voir condamner Mme [O] au paiement de la somme de 25 650 euros avec intérêt au taux légal à compter du 15 novembre 2017, date de la mise en demeure,

Subsidiairement,

Vu l'article 1240 du code civil,

- voir condamner Mme [O] au paiement de la somme de 22 000 euros avec intérêt au taux légal à compter du 15 novembre 2017, date de la mise en demeure.

Vu l'article 1343-2 du code civil

- voir ordonner la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière,

- voir condamner in solidum M. et Mme [W] et Mme [O] au paiement de la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens qui comprendront ceux de première instance.

Mme [U], dans ses dernières conclusions notifiées le 30 octobre 2019, demande à la cour, au visa de l'article 838 du code civil; de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter Mme [A] [O] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- la condamner à lui verser une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 31 mai 2022.

Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION.

Il sera rappelé à titre préliminaire que les diverses demandes reprises intégralement ci-dessus de 'constater' ou 'dire que', ne sont pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du code de procédure civile, mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, sur lesquelles il n'y a pas lieu de statuer

Le tribunal de grande instance de Bordeaux a débouté en premier lieu M. et Mme [W] de leurs demandes à l'encontre de la SAS Bourse de l'Immobilier au motif que n'est pas démontrée l'attitude fautive de celle-ci, la SAS Bourse de l'Immobilier n'ayant été informée que le 30 août 2017 par Me [L], notaire des époux [W], qu'il avait été informé par Me [Z] notaire de Mme [O] qu'il existait une difficulté tenant au blocage du prix de vente par Mme [U], fille de Mme [O], retenant que le manquement de l'agence immobilière à son devoir de conseil n'était pas établi. En second lieu, il a rejeté les demandes de M. et Mme [W] à l'encontre de Mme [O] au motif que le bien immobilier de Mme [O] avait été vendu mais que Mme [O] n'avait pu disposer des fonds lui permettant d'acquérir le bien de M. et Mme [W] dans le délai de réitération de l'acte authentique, la répartition amiable de ces fonds n'ayant pu intervenir en raison de la position de la fille de Mme [O] quant au partage du prix de vente, la réalisation de la condition suspensive ayant été empêchée par un autre que le débiteur engagé sous cette condition.

A titre liminaire, sur la recevabilité des demandes de Mme [O] à l'encontre de la SAS Bourse de l'Immobilier.

La SAS Bourse de l'Immobilier demande que soient déclarées irrecevables comme étant nouvelles les demandes présentées par Mme [O] à son encontre à l'exception de la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que la demande de Mme [O] de relevé indemne formée à son encontre à titre subsidiaire est irrecevable en ce qu'elle est présentée pour la première fois à hauteur d'appel, par application de l'article 564 du code de procédure civile. Elle soutient ensuite que la phrase énoncée au dispositif des conclusions commençant par la formulation 'dire et juger' n'est pas une prétention, et qu'en conséquence, aucune prétention n'est formulée à son encontre de la part de Mme [O].

Seule la demande tendant à 'dire et juger que la société Bourse de l'Immobilier a failli à son obligation de conseil engageant sa responsabilité à son égard', est en réalité un moyen au soutien des prétentions de Mme [O] qui ne constitue pas une prétention au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du code de procédure civile et sur laquelle il n'y a pas lieu de statuer au dispositif.

Les autres demandes formées à l'encontre de la SAS Bourse de l'Immobilier précédées de la mention 'dire et juger' sont en réalité des demandes de condamnations qui constituent des prétentions au sens des dispositions susvisées en sorte qu'il conviendra de statuer sur celles-ci.

Concernant les demandes qualifiées de nouvelles et notamment celle tendant à 'condamner la société Bourse de l'Immobilier à la relever indemne de toute condamnation à son encontre' formée par Mme [O], aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. En revanche, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent, selon l'article 565 du même code, l'article 566 permettant d'ajouter aux prétentions soumises au premier juge les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

Tel est le cas de la demande tendant à être relevée indemne par la SAS Bourse de l'Immobilier de toute condamnation prononcée à son encontre qui constitue l'accessoire des demandes de Mme [O], qui sollicitait dans ses demandes formées en première instant que soit engagée la responsabilité de la SAS Bourse de l'Immobilier.

Sur la réalisation de la condition suspensive.

Le tribunal, rappelant que la condition suspensive ne peut être réputée accomplie lorsque sa réalisation a été empêchée par un autre que le débiteur engagé sous cette condition, a considéré que Mme [I] veuve [O] n'a pas pu disposer des fonds de la vente de sa résidence principale à [Adresse 5] en raison de la position de sa fille quant au partage du prix de vente, dont il n'est pas démontré qu'elle en avait connaissance avant le mois de septembre 2017 et en a déduit que la non-réalisation de la condition suspensive n'était pas imputable à l'acquéreur.

M. et Mme [W] soutiennent pour leur part que le compromis qu'ils ont signé avec Mme [O] mentionnait expressément la clause selon laquelle 'l'acquéreur déclare disposer dès à présent d'un ensemble des fonds nécessaires à la réalisation de l'opération et n'avoir pas recours à un prêt [...]', que Mme [O] avait connaissance de la difficulté quant à la possibilité pour elle de détenir les fonds, qu'elle n'a pas fait les démarches pour proroger la date à laquelle la vente devait être réitérée par acte authentique et qu'elle a pourtant acquis dès le 28 mars 2018 une autre maison à [Localité 8]. Ils soutiennent que dans ces conditions, la condition suspensive a été réalisée et que c'est aux torts de Mme [O] que la vente n'a pas été conclue.

Mme [O] fait valoir qu'elle a tout mis en oeuvre pour débloquer la situation, en produisant le courrier de mise en demeure adressé à Mme [U] le 26 septembre 2017, l'assignation en référé délivrée à cette dernière afin d'obtenir le déblocage des fonds du 13 octobre 2017 et le courrier de Me [Z] du 10 novembre 2017 concernant l'accord de Mme [U] pour la répartition du prix de vente. Elle ajoute que grâce à la procédure judiciaire, Mme [U] a accepté le déblocage du prix de vente, ainsi que cela ressort du courrier de son notaire du 13 novembre 2017 et soutient également que par courrier du 28 novembre 2017, elle a informé M. et Mme [W] du fait qu'elle était en position de leur verser le prix de vente mais qu'ils ont répondu par la négative en délivrant l'assignation au fond.

Mme [O] expose ensuite que seule l'attitude abusive de sa fille Mme [U], dont elle n'était pas informée lorsqu'elle s'est engagée à acquérir le bien de M. et Mme [W], a empêché la réalisation de la condition suspensive sollicitant sur ce point la confirmation du jugement.

Aux termes de l'article 1304 alinéa du code civil dans sa rédaction applicable à la présente espèce, la condition est suspensive lorsque son accomplissement rend l'obligation pure et simple. Selon l'alinéa 2 de l'article 1304-3 du même code, la condition suspensive est réputée accomplie si celui qui y avait intérêt en a empêché l'accomplissement. Par ailleurs, l'article 1304-5 du code civil dispose qu'avant que la condition suspensive ne soit accomplie, le débiteur doit s'abstenir de tout acte qui empêcherait la bonne exécution de l'obligation; le créancier peut accomplir tout acte conservatoire et attaquer les actes du débiteur accomplis en fraude de ses droits. Enfin, l'article 1306 alinéa 1er prévoit que l'obligation devient pure et simple à compter de l'accomplissement de la condition suspensive.

Il incombe au créancier d'une obligation sous condition suspensive de prouver que le débiteur a empêché la réalisation de celle-ci.

Il est de jurisprudence établie que la condition ne peut être réputée accomplie lorsque sa réalisation est empêchée par un autre que le débiteur engagé sous cette condition.

Il convient en l'espèce de rechercher si la condition suspensive était réalisée ou était réputée réalisée et à défaut, de savoir si l'empêchement de l'accomplissement de la condition résulte de la faute d'une des parties à l'acte sous seing privé ou d'un tiers.

Il ressort de l'acte sous seing privé signé entre M. et Mme [W] et Mme [O] le 30 mai 2017 que Mme [O] s'est engagée à acquérir l'immeuble situé à [Adresse 3] moyennant le prix de 513.000 euros, la commission à la charge de l'acquéreur s'élevant à 22.000 euros. Un dépôt de garantie de 10.000 euros devant être versé par l'acquéreur était prévu à l'article 15 du contrat. Le financement de l'acquisition devait se faire sans emprunt, Mme [O] ayant déclaré à l'article XVII disposer 'dès présent, de l'ensemble des fonds nécessaires à la réalisation de l'opération et n'avoir pas recours à un prêt. Il déclare que ces fonds proviennent de: vente de résidence principale sise à [Adresse 5] par acte authentique et selon compromis de vente en date du 18 mai devant Me [L] notaire à [Localité 7] avant et au plus tard le 5 septembre 2017 et déblocage de fonds personnels.'

Etait prévue la condition suspensive relative à la 'réitération par acte authentique de sa résidence principale sis à [Adresse 5] pour laquelle un compromis de vente a été signé en l'étude de Me [L] notaire à Bordeaux le 18 mai 2017 au profit de la SCI La Cherferie avant et au plus tard de 5 septembre 2017 en cette même étade. Ce compromis de vente est annexé aux présentes'.

La condition suspensive ainsi stipulée se réfère à la réitération de l'acte authentique et non au versement des fonds issus de la vente du bien immobilier désigné comme appartenant à Mme [O] seule. Il est constant que cet immeuble a été vendu par acte du 5 septembre 2017, seul le désaccord entre Mme [O] et sa fille Mme [U] sur la répartition des fonds provenant de la vente de l'immeuble appartenant en réalité en indivision à Mme [O] et à ses enfants ayant été à l'origine de l'absence de disponibilité de ces fonds pour Mme [O], à la suite de quoi la réitération de l'acte de vente n'a pas eu lieu.

La clause concernée est parfaitement claire et n'est pas sujette à interprétation en sorte qu'il ne peut être considéré ainsi que le fait à tort Mme [O], que seule la réception des fonds personnels issus de la vente constituait en réalité la condition suspensive.

La condition suspensive qui ne consistait pas dans le versement des fonds mais dans la seule réitération de l'acte authentique suite au compromis du 18 mai 2017 passé entre les consorts [O] et SCI La Cherferie. Cette condition était ainsi réalisée à la date du 5 septembre 2017.

Aucune contestation n'existant quant à la réalisation des autres conditions suspensives prévue par le compromis de vente, il apparaît que toutes les conditions suspensives étaient réalisées et que l'acte authentique n'a pas été réitéré du fait de Mme [O] qui n'a pu disposer des fonds provenant de la vente de l'immeuble sis à [Adresse 5], alors qu'elle avait déclaré dans le compromis 'disposer dès à présent de l'ensemble des fonds nécessaires à la réalisation de l'opération et n'avoir pas recours à un prêt'. Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a considéré que la condition suspensive n'était pas réalisée.

Il convient en conséquence d'examiner les demandes des parties comme conséquence de la réalisation de la condition suspensive tenant à la vente de son bien immobilier par Mme [O].

Sur les conséquences de la réalisation de la condition suspensive.

- Sur la restitution du dépôt de garantie et l'application de la clause pénale.

Le tribunal, relevant qu'il n'était pas saisi d'une demande en ce sens, n'a pas ordonné la restitution du dépôt de garantie de 10 000 euros versé par Mme [I] veuve [O].

S'agissant de la clause pénale, le tribunal a débouté M. et Mme [W] de leur demande à ce titre au motif que la condition suspensive n'était pas remplie.

M. et Mme [W] réclament en cause d'appel la condamnation de la SAS Bourse de l'Immobilier à leur verser le dépôt de garantie de 10 000 euros détenu par elle en application du compromis du 30 mai 2017 depuis le 6 Septembre 2017 outre la condamnation de Mme [O] à leur verser la somme de 15.650 euros au titre de la clause pénale, la demande au titre de la clause pénale à hauteur de 15.560 euros tenant compte de l'imputation de la somme de 10.000 euros correspondant au dépôt de garantie.

Ils se prévalent de la légèreté fautive avec laquelle Mme [O] s'est comportée en s'engageant dans l'acquisition de leur immeuble en déclarant qu'elle disposait des fonds lui permettant d'acquérir alors que la succession de son mari M. [D] [O] n'était par réglée.

Mme [O] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté M. et Mme [W] de leur demande au titre de la clause pénale et sollicite également pour sa part la restitution de la somme de 10.000 euros versée par elle à titre de dépôt de garantie et en cas de réformation du jugement sur ce point, demande à être relevée indemne par la SAS Bourse de l'Immobilier et à titre subsidiaire par Mme [U].

La société Bourse de l'Immobilier s'en remet sur la demande de restitution du dépôt de garantie.

Il ressort du compromis de vente à la clause 'dépôt de garantie' que l'acquéreur a versé un dépôt de garantie de 10.000 euros sur le compte séquestre de la SAS Bourse de l'Immobilier , lequel 'deviendra acompte sur le prix dès réalisation de toutes les conditions suspensives', et devra être restitué à l'acquéreur en cas de 'non-réalisation d'une des conditions suspensives à la date limite prévue pour la signature de l'acte authentique', étant par ailleurs stipulé que :

'Cependant, le Séquestre ne pourra se dessaisir de la somme qu'il détient qu'en vertu d'un accord amiable signé par toutes les parties ou d'une décision de justice définitive dans les cas suivants:

- le vendeur conteste la restitution du dépôt de garantie en se fondant sur la faute, la négligence, la passivité, la mauvaise foi ou tout abus de droit de l'acquéreur dans le but d'empêcher l'accomplissement de la condition suspensive.

La contestation du vendeur devra être adressée à la Bourse de l'Immobilier par lettre recommandée avec accusé de réception.

- l'une des parties refuse de réitérer la vente par acte authentique bien que toutes les conditions suspensives soient remplies'.

Il contient par ailleurs un article XXIV intitulé 'inexécution : clause pénale et dommages-intérêts' selon laquelle :

'En cas de non régularisation de l'acte authentique par l'une des parties et après notification d'une mise en demeure restée infructueuse, les conditions suspensives étant toutes réalisées, la partie défaillante devra verser :

- à l'autre partie une somme forfaitaire à titre de clause pénale égale à 5% du prix de vente,

- à la Bourse de l'Immobilier des dommages-intérêts également égaux à 5% du prix de vente de l'opération étant effectivement conclue au sens de l'article 6 I alinéa 6 de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970.

Si la clause pénale est due par l'acquéreur, le montant du dépôt de garantie s'imputera à due concurrence.

La cas échéant, ces dommages-intérêts s'imputeront automatiquement sur le solde du dépôt de garantie après versement de la clause pénale à la partie non défaillante.

La présente clause pénale ne saurait priver la partie non défaillante de la possibilité de poursuivre l'autre partie en exécution forcée de la vente'.

La clause pénale réclamée par M. et Mme [W] calculée sur le prix de vente de 513.000 euros s'élève à la somme de 25.650 euros dont ils déduisent le dépôt de garantie de 10.000 euros.

Concernant la demande au titre de la clause pénale, celle-ci est fondée en son principe en ce que l'acte authentique de vente n'a pas été réitéré alors que les conditions suspensives étaient toutes réalisées, seule l'impossibilité de Mme [O] de payer le prix de vente étant à l'origine de la caducité du compromis de vente.

Mme [O] n'en conteste d'ailleurs pas le principe demandant à être relevée indemne par la SAS Bourse de l'Immobilier d'une éventuelle condamnation à cet égard et à titre subsidiaire par sa fille Mme [U] et sollicitant à titre subsidiaire sa modération sur le fondement de l'article 1235-1 du code civil.

Mme [O] qui explique qu'elle n'a pu acquérir le bien de M. et Mme [W] alors qu'elle avait vendu sa résidence principale et qu'elle a été sans domicile durant plusieurs mois ne rapporte cependant la preuve par ces circonstances qui lui sont personnelles que cette clause est manifestement excessive.

Il convient en conséquence, en application de la clause susvisée, de condamner Mme [O] à payer à M. et Mme [W] la somme de 25.650 euros au titre de la clause pénale, et, après imputation du dépôt de garantie de 10.000 euros qui sera versé à M. et Mme [W] par la SAS SAS Bourse de l'Immobilier qui le détient, la somme de 15.650 euros. La demande de Mme [O] tendant à se voir remettre le dépôt de garantie de 10.000 euros est en conséquence rejetée.

Les intérêts au taux légal sur la somme de 25.650 euros sont dûs à compter de la première demande soit à compter de l'assignation délivrée à Mme [O] et non à compter du 6 septembre 2017 ainsi que le demandent M. et Mme [W].

- Sur les dommages-intérêts complémentaires sollicités par M. et Mme [W].

Le tribunal a débouté M. et Mme [W] de leurs demandes d'indemnisation de leurs préjudices matériel et moral après avoir rejeté les demandes formées à l'encontre de l'agence immobilière en considérant qu'elle n'avait commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle retenant que la société Bourse de l'Immobilier ne pouvait pas anticiper les difficultés liées au partage du prix de vente de la résidence principale de Mme [O], dont elle n'a été informée qu'une semaine avant la date prévue pour la réitération de l'acte de vente.

M. et Mme [W] demandent la réformation du jugement et sollicitent sur le fondement des articles 1217 et 1231-1 du code civil, la condamnation de la SAS Bourse de l'Immobilier solidairement avec Mme [O] ou l'un à défaut de l'autre à les indemniser de leurs préjudices subis, à savoir 8 539,25 euros au titre du préjudice matériel dû notamment à plusieurs déménagements et 5 000 euros de dommages-intérêts complémentaires en soutenant que la société Bourse de l'Immobilier a commis deux principales fautes, à savoir un manquement dans la rédaction du compromis de vente sous seing privé et une négligence en ne demandant pas à Mme [I] veuve [O] de recopier de manière manuscrite la mention prévue par l'article L.312-17 du code de la consommation.

S'agissant des demandes de dommages-intérêts complémentaires formées par M. et Mme [W], c'est à juste titre et par des motifs que la cour fait siens que le tribunal a jugé que la clause pénale stipulée par le compromis de vente, prévue 'à titre d'indemnité forfaitaire et de clause pénale' a forfaitairement évalué le préjudice des vendeurs en cas de retard ou d'inexécution, à l'exclusion de toute autre indemnisation sauf à ce que cette clause ne suffise pas à indemniser les vendeurs de leur préjudice ce qui n'est pas démontré en l'espèce. Il sera précisé que M. et Mme [W] qui sollicitent les sommes de 8005,56 euros au titre de leurs frais de déménagement et frais divers et de 5000 euros chacun au titre de leur préjudice moral ne démontrent pas que la clause pénale dont le montant s'élève à 25.650 euros ne suffit pas à réparer leurs préjudices, en sorte que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté M. et Mme [W] de leurs demandes à ce titre.

Sur les demandes de Mme [O] à l'encontre de la SAS Bourse de l'Immobilier.

Mme [O] demande à être relevée indemne de toute condamnation à son encontre par la SAS Bourse de l'Immobilier faisant valoir, en visant dans le dispositif de ses écritures tant l'article 1231 que l'article 1240 du code civil, que la SAS Bourse de l'Immobilier a rédigé seule le compromis de vente sans avoir recours aux services d'un notaire, que tant elle-même que M. et Mme [W] ont signé celui-ci en toute confiance, la SAS Bourse de l'Immobilier étant informée des spécificités de ce compromis et du fait qu'elle n'était pas seule propriétaire du bien situé [Adresse 5] en indivision depuis le décès de son mari, contestant toute responsabilité dans l'échec de la vente, et demandant à titre subsidiaire qu'il soit jugé que sa fille a eu un comportement fautif qui a empêché la perception de la partie du prix de vente devant lui revenir sur la vente du bien dépendant de la succession de son mari.

Elle reproche à la SAS Bourse de l'Immobilier un manquement à son devoir de conseil, le prix de vente de l'immeuble dépendant de la succession de M. [O] ne pouvant être l'objet le jour même de la vente d'un partage partiel de succession.

La SAS Bourse de l'Immobilier conclut à la confirmation du jugement, sollicite le débouté de Mme [O] et sollicite reconventionnellement sa condamnation au paiement d'une somme de 25650 euros sur le fondement des articles 1231-6 du code civil et 1112-1 du code civil et subsidiairement à une somme de 22.000 euros sur le fondement de l'article 1240 du code civil. acte. Elle conteste avoir commis la moindre faute dans l'exécution de sa mission d'agent immobilier, seuls les comportements de Mme [O] et de sa fille ayant mis échec à la vente observant qu'elle n'avait pas connaissance du compromis de vente concernant la vente du bien immobilier de Mme [O] dans lequel elle n'est pas intervenue et qu'elle ne pouvait anticiper le contentieux de Mme [O] avec ses enfants, rappelant avoir inséré tant dans le compromis de vente du 30 mai 2017 que dans celui passé ensuite entre M. et Mme [W] et M. et Mme [H] une condition suspensive relative à la vente du bien de l'acquéreur, se prévalant de ce que Mme [O] avait précisé disposer dès à présent de l'ensemble des fonds nécessaires à la réalisation de l'opération et ajoutant que le notaire de Mme [O] ne l'avait pas informée des difficultés à venir dans le partage du prix de vente. Elle conteste le caractère insuffisant des délais de réitération prévu dans chaque acte.

L'agent immobilier, débiteur d'une obligation de moyens, est tenu d'une obligation de renseignement et de conseil et doit s'assurer que se trouvent réunies toutes les conditions nécessaires à l'efficacité juridique de la convention.

En premier lieu, il sera relevé que c'est à juste titre que le tribunal a jugé que la mention manuscrite prévue à l'article L.312-17 du code de la consommation relative à l'absence de recours à un emprunt n'avait pas de lien causal avec le non-aboutissement de la vente.

Il ressort ensuite du compromis de vente du 30 mai 2017 que Mme [O] a déclaré à la clause XVIII relative au financement de l'acquisition 'disposer dès à présent de l'ensemble des fonds nécessaires à la réalisation de l'opération et n'avoir pas recours à un prêt...ces fonds proviennent de la vente de sa résidence principale sis à [Adresse 5] par acte authentique et son compromis de vente en date du 18 mai 2017 devant maître [L] notaire à [Localité 7] avant et au plus tard le 5 septembre 2017 et déblocage de fonds personnels.' Il est indiqué à la clause XIX relative à la condition suspensive tenant à la réitération de cette vente que celle-ci doit avoir lieu au plus tard le 5 septembre 2017 au profit de la SCI La Cherferie et que le compromis est annexé aux présentes, ce compromis ayant été passé les 18 et 29 mai 2017 entre Mme [O], veuve de M. [D] [O], M. [T] [O] et Mme [J] [O] épouse [U] d'une part et la SCI La Cherferie d'autre part, le prix de vente du bien étant de 650.000 euros.

Il était ainsi clairement stipulé que les fonds permettant à Mme [O] de payer le prix de vente de l'immeuble provenaient pour partie de la vente de sa résidence principale qui devait intervenir au plus tard le 5 septembre 2017.

Il est constant que la vente de ce bien a eu lieu. Il ressort cependant du courriel du 30 août 2017 adressé à la SAS Bourse de l'Immobilier par l'étude de Me [L], notaire de Mme [O], que sa fille Mme [U] souhaitait un partage total de la succession de M. [D] [O], décédé le 16 septembre 2013 et allait bloquer le prix de vente du bien si on ne lui proposait de partage intégrant ce prix. Puis, par un courrier adressé à Me [G], notaire de M. et Mme [W], et à la SAS Bourse de l'Immobilier, Me [C] de l'étude de Me [L] déclarait avoir reçu l'apport personnel de Mme [O], le complément du prix étant le fruit de la vente prévue le lundi suivant pour un autre bien, le déblocage de ces fonds étant incertain, informant ensuite Me [G] par courriel du 1er septembre 2017 que le rendez-vous du lundi ne pourrait être maintenu. Par courriel du 7 septembre, il lui était indiqué qu'il n'y avait pas encore d'accord définitif.

Par un courrier du 20 septembre 2017, Me [L] indiquait à la SAS Bourse de l'Immobilier que la vente de la maison de Mme [O] avait eu lieu. Le 15 septembre 2017, la SAS Bourse de l'Immobilier a mis en demeure Mme [O] de convenir d'un rendez-vous pour la signature de l'acte notarié, auquel elle n'a pas répondu.

Il ressort des explications des parties qu'à la suite d'une procédure de référé engagée par Mme [O] à l'encontre de Mme [U] le 13 octobre 2017, celle-ci a accepté après avoir reçu une provision sur le partage, le déblocage des fonds revenant à Mme [O]. Différents documents sont invoqués montrant que Mme [O] avait connaissance de la position de Mme [U] quand à la répartition des fonds issus de la vente du bien sis [Adresse 5]. Toutefois, ceux-ci sont postérieurs au compromis du 30 mai 2017 et ne peuvent fonder un manquement au devoir de conseil de la SAS Bourse de l'Immobilier.

Il ne saurait être reproché à Mme [O] de n'avoir pas précisé dans le compromis de vente du 30 mai 2017 le montant des fonds qu'elle attendait de la vente du bien sis [Adresse 5]. C'est en effet à la SAS Bourse de l'Immobilier qu'il revenait d'apporter toutes les précisions utiles à l'efficacité du compromis de vente.

Si sont évoqués des documents relatifs à la position de Mme [U] sur le règlement de la succession qui sont postérieurs au 30 mai 2017, date de signature du compromis de vente, et ne peuvent fonder un manquement de la SAS Bourse de l'Immobilier à son devoir de conseil, celle-ci avait cependant connaissance du compromis de vente passé entre les consorts [O] et la SCI La Cherferie le 18 mai 2017 puisqu'il a été annexé au compromis signé entre M. et Mme [W] et Mme [O] le 30 mai 2017 lequel faisait clairement apparaître comme vendeurs Mme [O] et ses deux enfants, en sorte qu'il était connu de la SAS Bourse de l'Immobilier que Mme [O] n'était pas l'unique propriétaire du bien et qu'elle ne bénéficierait pas de la totalité des fonds provenant de la vente. Il lui appartenait dans ces conditions de s'assurer d'une part que l'ensemble des mentions portées sur ce compromis étaient exactes ce qui n'était pas le cas, Mme [O] étant seule mentionnée comme propriétaire, et d'autre part quelle était la répartition du financement de l'acquisition entre l'apport personnel de Mme [O] et les fonds provenant de la vente du bien indivis et de s'assurer que les conditions du partage successoral permettraient à Mme [O] de disposer immédiatement des fonds.

La SAS Bourse de l'Immobilier ne saurait se retrancher derrière l'absence d'information donnée par les notaires dès lors qu'ayant passé seule le compromis de vente, elle devait en assumer l'entière responsabilité au besoin en s'informant auprès des notaires des parties, le compromis de vente ayant été signé sans certitude quant à la disponibilité des fonds pour Mme [O], la SAS Bourse de l'Immobilier ayant ainsi pris un risque quant à la possibilité de la réitération de l'acte authentique au 5 septembre 2017 et manqué de ce fait à son devoir de conseil tant à l'égard de M. et Mme [W] que de Mme [O].

Au vu de ces éléments, il apparaît que la SAS Bourse de l'Immobilier a commis un manquement à son devoir de conseil.

Le manquement au devoir de conseil est sanctionné par l'indemnisation d'une perte de chance laquelle n'est pas sollicitée par Mme [O] qui demande à être relevée indemne des condamnations prononcées à son encontre, demande à laquelle il ne peut être fait droit sur le fondement du manquement au devoir de conseil.

Il convient donc de rejeter la demande à ce titre.

Sur les demandes reconventionnelles de la SAS Bourse de l'Immobilier.

Le tribunal a rejeté les demandes reconventionnelles de la SAS Bourse de l'Immobilier aux motifs qu'aucun abus d'agir en justice n'était démontré à l'encontre de M. et Mme [W] et que la non réalisation effective de l'opération de vente n'était pas imputable à Mme [O] en sorte qu'elle devait être déboutée de ses demandes au titre de la clause pénale à l'encontre de Mme [O], et qu'à défaut de réalisation effective de l'opération de vente, l'agent immobilier n'avait pas droit au paiement de sa commission.

La SAS Bourse de l'Immobilier demande l'infirmation du jugement et sollicite d'une part la condamnation de M. et Mme [W] au paiement d'une somme de 1 000 euros pour procédure abusive, et d'autre part, la condamnation de Mme [O] à lui payer la somme de 25 650 euros au titre de la pénalité contractuelle par application de la clause contenue à la page 16 du compromis de vente et à titre subsidiaire, la somme de 22 000 euros représentant le montant de sa commission sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

- sur la demande à l'encontre de M. et Mme [W].

M. et Mme [W] ayant été partiellement accueillis en leurs prétentions, l'abus de droit d'agir en justice de leur part n'est pas démontré. La demande de dommages-intérêts pour procédure abusive a été justement rejetée par le tribunal, le jugement étant confirmé sur ce point.

- sur la demande à l'encontre de Mme [O].

Le compromis de vente stipule à la clause 'Commission de négociation' que

'Les parties reconnaissent que la présente vente a été réalisée et négociée par la Bourse de l'Immobilier .

Les honoraires de la Bourse de l'Immobilier d'un montant de 22 000 € sont à la charge de l'acquéreur (').'

La clause 'Inexécution : clause pénale et dommages-intérêts' dispose que :

'En cas de non régularisation de l'acte authentique par l'une des parties et après notification d'une mise en demeure restée infructueuse, les conditions suspensives étant toutes réalisées ou réputées réalisées, la partie défaillante devra verser :

(')

- à la Bourse de l'Immobilier, des dommages intérêts également égaux à 5 % du prix de vente, l'opération étant effectivement conclue au sens de l'article 6-1 alinéa 6 de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970.

Si la clause pénale est due par l'acquéreur, le montant du dépôt de garantie s'imputera à due concurrence (').'

Une telle clause prévoyant une pénalité en cas de non régularisation de l'acte authentique alors que les conditions suspensives sont réunies s'analyse en une clause pénale.

Les conditions suspensives sont en l'espèce réalisées et Mme [O] n'a pas donné suite à la mise en demeure de signer l'acte authentique. Cependant, c'est à tort que la SAS Bourse de l'Immobilier invoque le comportement fautif de Mme [O] comme étant à l'origine de la non-réitération de la vente, alors que la non-réitération de la vente n'est pas entièrement imputable à Mme [O], la SAS Bourse de l'Immobilier ayant par son manquement à son devoir de conseil participé à celle-ci. La demande au titre de la clause pénale est donc mal fondée et doit être rejetée.

Concernant la réclamation d'une somme de 22.000 euros réclamée à titre subsidiaire par la SAS SAS Bourse de l'Immobilier sur le fondement de l'article 1240 du code civil, à titre de dommages-intérêts équivalent au montant de la commission perdue, au motif que Mme [O] ne pouvait ignorer les difficultés résultant de la position de sa fille quant au partage de la succession et qu'elle ne l'en a pas informée, il convient d'observer que la SAS Bourse de l'Immobilier est mal fondée à invoquer la faute de Mme [O] alors qu'il lui appartenait, ainsi que ci-dessus relevé, dans le cadre de son devoir de conseil, de mettre en oeuvre toutes les dispositions permettant d'assurer l'efficacité du compromis de vente, et notamment de vérifier les conditions de paiement du prix de vente.

En outre il doit être rappelé qu'en application de l'article 6-I alinéa 8 de la loi n°70-9 du 2 janvier 1970, réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, 'Aucun bien, effet, valeur, somme d'argent, représentatif d'honoraires, de frais de recherche, de démarche, de publicité ou d'entremise quelconque, n'est dû aux personnes indiquées à l'article 1er ou ne peut être exigé ou accepté par elles, avant qu'une des opérations visées audit article ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l'engagement des parties'.

La vente n'ayant en l'espèce pas été conclue, aucune somme ne peut être réclamée par la SAS Bourse de l'Immobilier au titre de ses honoraires, y compris sous forme de dommages-intérêts dès lors qu'aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de Mme [O].

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a débouté la SAS Bourse de l'Immobilier de l'ensemble de ses demandes.

Sur le recours en garantie de Mme [I] veuve [O] contre Mme [U]

Mme [O] sollicite la condamnation de Mme [U] à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.

Cependant, d'une part Mme [O] n'ignorait pas les difficultés de règlement de la succession de M. [D] [O], d'autre part il ne peut être reproché à Mme [U] d'avoir refusé le partage partiel du prix de vente du bien immobilier, le partage partiel d'une succession nécessitant l'accord de tous les indivisaires dont il appartenait à Mme [O] de s'assurer préalablement à la signature du compromis de vente du 30 mai 2017. Le comportement fautif de Mme [U] n'est donc pas établi.

La demande de garantie est mal donc fondée et doit être rejetée.

Sur les mesures accessoires.

Eu égard aux circonstances de l'affaire, la SAS Bourse de l'Immobilier sera condamnée aux dépens ainsi qu'à verser une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à M. et Mme [W].

L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile aux autre parties à l'instance.

Par ces motifs,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté M. [K] [W] et Mme [B] [W] de leurs demandes de dommages-intérêts complémentaires et débouté la SAS Bourse de l'Immobilier devenue la SAS Human Immobilier de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formée à leur encontre ainsi que de l'ensemble de ses demandes,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare recevable la demande de Mme [A] [I] veuve [O] de se voir relevée indemne par la SAS Bourse de l'Immobilier devenue la SAS Human Immobilier des condamnations prononcées à son encontre,

Condamne la SAS Bourse de l'Immobilier devenue la SAS Human Immobilier à restituer à M. [K] [W] et Mme [B] [W] le dépôt de garantie de 10.000 euros,

Condamne Mme [A] [I] veuve [O] à payer à M. [K] [W] et Mme [B] [W] la somme de 15.650 euros au titre de la clause pénale, imputation faite du dépôt de garantie de 10.000 euros qui sera versé à M. et Mme [W] par la SAS Bourse de l'Immobilier, avec intérêts au taux légal à compter du 18 décembre 2017,

Déboute Mme [A] [I] veuve [O] de sa demande tendant à se voir remettre le dépôt de garantie de 10.000 euros,

Déboute Mme [A] [I] veuve [O] de sa demande tendant à se voir relever indemne de la condamnation prononcée à son encontre par la SAS Bourse de l'Immobilier,

Déboute la SAS Bourse de l'Immobilier de ses demandes à l'encontre de Mme [A] [I] veuve [O],

Déboute Mme [A] [I] veuve [O] de son appel en garantie à l'encontre de Mme [J] [O] épouse [U],

Déboute les parties de toute autre demande,

Condamne la SAS Bourse de l'Immobilier devenue la SAS Human Immobilier à payer à M. [K] [W] et Mme [B] [W] une somme de 3500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile à l'égard des autres parties à l'instance,

Condamne la SAS Bourse de l'Immobilier devenue la SAS Human Immobilier et Mme [A] [I] veuve [O] aux dépens de première instance et d'appel.

La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Annie BLAZEVIC, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/00815
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;19.00815 ?
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