La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/05/2024 | FRANCE | N°21/05710

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 02 mai 2024, 21/05710


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 02 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/05710 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PE3X



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13

septembre 2021

Tribunal judiciaire de PERPIGNAN

N° RG 16/02483





APPELANTE :



S.A. Axa France Iard

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Christophe DE ARAUJO, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Me Valéry-Pierre BREUIL de la SCP MARTY - BENEDETTI-BALMIGERE - BREUIL, avocat au barreau de PYRENEES-ORI...

ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 02 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/05710 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PE3X

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 13 septembre 2021

Tribunal judiciaire de PERPIGNAN

N° RG 16/02483

APPELANTE :

S.A. Axa France Iard

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Christophe DE ARAUJO, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Me Valéry-Pierre BREUIL de la SCP MARTY - BENEDETTI-BALMIGERE - BREUIL, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant présent sur l'audience

INTIMES :

Monsieur [I] [W]

né le [Date naissance 1] 1984 à [Localité 7] (66)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Bernard VIAL substituant Me Matthieu BRAZES, avocats au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant présent sur l'audience

Madame [B] [W]

née le [Date naissance 2] 1984 à [Localité 7] (66)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Bernard VIAL substituant Me Matthieu BRAZES, avocats au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant présent sur l'audience

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 mars 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant devis en date du 2 août 2008, M. [I] [W] et son épouse Mme [B] [W], ont confié à M. [C] [V], exploitant sous l'enseigne Socarenov et assuré auprès de la Sa Axa France Iard au titre de sa responsabilité décennale, un chantier de rénovation de l'immeuble dont ils sont propriétaires à [Localité 8], pour un montant total HT de 42 000 euros soit 44 310 euros TTC.

Les factures ont été intégralement réglées par les époux [W].

Se plaignant de désordres affectant les travaux, ils ont saisi le juge des référés près le tribunal de grande instance de Perpignan lequel a, par ordonnance du 6 avril 2011, désigné M. [X] [K] en qualité d'expert.

L'expert a déposé son rapport le 7 mars 2012 sur la base duquel les époux [W] ont fait assigner au fond la société Axa France Iard, par acte en date du 26 mai 2016, aux fins de se voir indemnisés de leurs préjudices.

Le 14 juin 2018, la compagnie Axa a déposé plainte pour faux et usage de faux à l'encontre de M. [C] [V].

Par ordonnance du 24 octobre 2019, le juge de la mise en état a prononcé le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la plainte pénale.

Par courrier en date du 11 février 2020, le procureur de la République a informé les époux [W] du classement sans suite de la plainte le 14 mai 2019.

Par jugement contradictoire en date du 13 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Perpignan a :

- débouté la société Axa France de ses moyens de défense,

- prononcé la réception judiciaire des travaux réalisés par M.[V] exploitant sous l'enseigne Socanerov pour le compte des époux [W] suivant devis valant marché de travaux en date du 2 août 2018, à la date d'août 2009, avec une réserve inhérente à la restauration non réalisée des enduits de façade,

- jugé que les désordres affectant lesdits travaux sont de nature décennale à l'exception de la restauration non réalisée desdits enduits et que la société Axa France doit sa garantie,

- condamné la société Axa France à payer aux époux [W] les sommes suivantes :

- 41 649,54 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres,

- 650 euros par mois à compter de septembre 2009 jusqu'à septembre 2021 au titre du préjudice de jouissance,

- 2 600 euros au titre du préjudice locatif durant la réalisation des travaux de reprise des désordres dont la durée est évaluée par l'expert à 4 mois,

- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,

- 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les époux [W] du surplus de leurs demandes,

- condamné la société Axa France aux entiers dépens en ce compris le coût de l'expertise judiciaire et en autorise la distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Axa France Iard a relevé appel de ce jugement le 27 septembre 2021.

PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 24 mai 2022, la société Axa France Iard demande en substance à la cour de réformer le jugement et, statuant à nouveau, de rejeter l'ensemble des demandes présentées par les époux [W] à son encontre, les condamner à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens et, à titre subsidiaire, de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux de leur demande au titre du trop-perçu, et dit que la garantie de la compagnie Axa ne peut s'appliquer du fait de la réserve inhérente à la restauration non réalisée des enduits de façade.

Par dernières conclusions remises par voie électronique le 11 septembre 2023, les époux [W] demandent en substance à la cour de confirmer le jugement sauf en ce qu'il a arrêté au mois de septembre 2021 l'indemnité allouée aux époux au titre de leur préjudice de jouissance et, statuant à nouveau, de condamner la société Axa à leur payer la somme de 650 euros par mois au titre de leur préjudice de jouissance à compter du mois de septembre 2009 jusqu'à l'arrêt à intervenir et, à titre reconventionnel, à leur payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles nouvellement engagés par les concluants dans le cadre de la présente procédure d'appel, outre les entiers dépens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 13 février 2024.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

- Sur l'auteur du chantier litigieux

La société Axa fait grief au premier juge d'avoir considéré que M. [V] a réalisé les travaux au titre desquels les intimés invoquent sa garantie au motif qu'il n'aurait pas contesté être l'auteur des travaux et qu'ils respectent sensiblement le devis, alors qu'il n'y a pas eu de contrat écrit et qu'il existe des incohérences entre le devis et les factures produites qui portent toutes la même date du 31 décembre 2008.

La cour observe cependant que le premier juge a relevé outre les motifs rappelés par Axa, le fait, établi par l'expertise, que Maître [G] dont il n'est contesté par Axa qu'elle était bien le mandataire liquidateur de M. [V], a réclamé aux époux [W] suivant courrier du 19 octobre 2010 le paiement d'un solde de 5478,03 euros selon facture du 31 décembre 2008, cet envoi venant en relance d'un courrier précédent, et que suivant courrier du 17 février 2011 adressé à Maître [G], M. [V] évoquait les travaux réalisés chez les intimés, notamment en ce qu'il aurait proposé aux maîtres de l'ouvrage de refaire les enduits et que ces derniers l'en auraient empêché évoquant même son expulsion du chantier.

Ces éléments, ajoutés au fait que les devis et factures établis par l'entreprise Socarenov exploitée par M. [V] étaient bien libellés au nom de M. [W], et que selon les observations de l'expert, les travaux réalisés respectent sensiblement les termes de ces devis, permettent à la cour à la suite du premier juge, d'attribuer les travaux litigieux à l'entreprise exploitée par M. [V] sous l'enseigne Socarenov.

- Sur la couverture des travaux par la société Axa

L'appelante fait grief au premier juge d'avoir considéré que les travaux litigieux étaient couverts par le contrat d'assurance souscrit au titre de la garantie décennale alors que celui-ci a été résilié pour non-paiement des primes au 1er janvier 2009 et qu'à cette date les travaux litigieux n'avaient pas encore été réalisés.

Elle relève que le premier juge les a retenus comme étant couverts car réalisés postérieurement à l'ouverture du chantier et pendant la période de validité fixée aux conditions particulières, après s'être fondé de manière erronée sur l'article A 243-1 et son annexe 1 en sa rédaction résultant de l'arrêté du 19 novembre 2009 postérieur au contrat conclu le 8 janvier 2008.

L'Annexe I de l'article A243-1 dans sa version en vigueur du 1er mars 2001 au 28 novembre 2009 dispose s'agissant de la durée et du maintien de la garantie dans le temps, que le contrat couvre, pour la durée de la responsabilité pesant sur l'assuré en vertu des articles 1792 et 2270 du code civil, les travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la période de validité fixée aux conditions particulières.

Il est acquis en jurisprudence que cette notion d'ouverture de chantier doit s'entendre comme la date de commencement effectif des travaux confiés à l'assuré. (C.Civ 3e 16/11/2011 n°10-24.517).

Il résulte des pièces versées aux débats par la société Axa que M. [V] a souscrit auprès de cette compagnie un contrat d'assurance au titre de la responsabilité décennale à effet du 1er janvier 2008 lequel a fait l'objet d'une résiliation avec effet à compter du 1er janvier 2009.

L'expert a relevé page 9 de son rapport sans être contredit sur ce point par l'appelante, que les travaux ont débuté le 20 décembre 2008. Peu importe qu'il s'agisse des travaux de démolition préalable à la réalisation des travaux litigieux qui ont suivi, dès lors que la date de ces travaux de démolition constitue bien la date du commencement effectif du marché confié à l'assuré.

- Sur la réception des travaux

En vertu de l'article 1792-6 du code civil,« la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement.»

La réception judiciaire suppose de déterminer la date à laquelle l'ouvrage était en état d'être reçu (C.Civ 3°, 10 juillet 1991), le juge devant rechercher si l'immeuble est habitable (C.Civ 3° 21 mai 2003).

Au cas d'espèce, la société Axa fait grief au premier juge d'avoir prononcé la réception judiciaire des travaux au mois d'août 2009 alors que les travaux litigieux doivent être démolis et refaits notamment la réalisation des planchers, les époux [W] reconnaissant que l'immeuble n'est pas habité.

Il résulte cependant des observations de l'expert non sérieusement contestées par Axa que les travaux réalisés par M.[V] ont consisté en la démolition des planchers existants et leur remplacement, que la charpente bois existante a été remplacée par une charpente métallique, que deux escaliers en béton ont été réalisés reliant le rez-de-chaussée à l'étage et les 1er et 2ème étages, que les travaux de création de trois ouvertures avec restauration de l'existant ont été réalisés à 80%, le chantier ayant été abandonné alors que les enduits étaient en cours de réfection.

Il en ressort que si ces travaux sont atteints de désordres et non-conformité, l'immeuble était néanmoins habitable au mois d'août 2009 lorsque le chantier a été abandonné dès lors qu'ainsi que relevé pertinemment par le premier juge, les travaux de couverture étaient achevés de même que la réalisation des planchers et qu'était également assurée la circulation entre les étages.

C'est dès lors à bon droit que le premier juge a prononcé la réception judiciaire des travaux au mois d'août 2009 avec une réserve relativement aux travaux d'enduits de façade non réalisés.

Au regard de ces considérations, et la société Axa ne contestant pas la nature décennale des désordres constatés par l'expert, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a dit que la société Axa devait les garantir.

- Sur l'indemnisation

La société Axa a conclu à titre subsidiaire à la confirmation de la décision déférée en ce qu'elle débouté les époux [W] de leur demande au titre du remboursement de la somme de 4 394,95 euros au titre d'un trop-perçu par l'entrepreneur au titre des travaux non réalisés et dit que la garantie ne pouvait s'appliquer à la restauration non réalisée des enduits de façade.

Les intimés sollicitent également la confirmation du jugement entrepris sauf à réactualiser l'indemnisation de leur préjudice de jouissance par la condamnation de la société Axa à leur verser la somme de 650 euros par mois à compter du mois de septembre 2009 jusqu'à la date du présent arrêt, demande à laquelle il sera fait droit tenant l'inexécution du jugement déféré.

La cour confirmera enfin la décision du premier juge ayant condamné la société Axa à verser aux époux [W] la somme de 1 000 euros titre de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive de l'assureur au constat, partagé par la cour, que ce dernier a rallongé abusivement l'issue du litige en déposant plainte à l'encontre M. [V] le 14 juin 2018 pour faux et usage de faux au titre d'une attestation d'assurance datée du 5 février 2009 et obtenu ainsi du juge de la mise en état une décision de sursis à statuer en date du 24 octobre 2019, sans s'assurer du sort de sa plainte laquelle avait été classée sans suite le 14 mai 2009.

Partie succombante, la société Axa France Iard sera condamnée aux dépens d'appel par application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Axa France Iard à payer aux époux [W] la somme de 650 euros par mois à compter d'octobre 2021 jusqu'à la date du présent arrêt au titre du préjudice de jouissance.

Condamne la société Axa France Iard aux dépens d'appel.

La condamne à payer aux époux [W] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/05710
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;21.05710 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award