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02/05/2024 | FRANCE | N°21/06189

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4e chambre civile, 02 mai 2024, 21/06189


ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à



























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



4e chambre civile



ARRET DU 02 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06189 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PFZM



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 octobre 2021 >
Tribunal judiciaire de BEZIERS

N° RG 19/00440





APPELANT :



Monsieur [U] [B]

né le 03 Décembre 1976 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Marion DEJEAN substituant Me Gaëlle BETROM, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant présent sur l'audience


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ARRÊT n°

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 02 MAI 2024

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/06189 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PFZM

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 octobre 2021

Tribunal judiciaire de BEZIERS

N° RG 19/00440

APPELANT :

Monsieur [U] [B]

né le 03 Décembre 1976 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Marion DEJEAN substituant Me Gaëlle BETROM, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant présent sur l'audience

INTIMEE :

S.A. Clinique [5] - Société anonyme au capital de 2.858.613,30 euros, immatriculée au RCS de BEZIERS sous le numéro 423 627 595, prise en la personne de son Président en exercice

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Me Emmanuel LE COZ de la SELARL CABINET LE COZ AVOCATS, avocat au barreau de BEZIERS, avocat postulant présent sur l'audience

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 mars 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Philippe BRUEY, Conseiller

Mme Marie-José FRANCO, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Charlotte MONMOUSSEAU

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Charlotte MONMOUSSEAU, Greffière.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Le 17 janvier 2015, le Dr [U] [B] a signé un contrat d'excercice et une convention d'installation avec la SA Clinique [5] (ci-après la clinique) pour un démarrage d'activité au 1er avril 2015.

La convention d'installation a été établie en vue de la succession et par rapport au revenu de son prédécesseur le Dr [V]. La clinique s'est engagée expressément à garantir au Dr [B] dans les 24 premiers mois de son installation un bénéfice d'exploitation égal à celui réalisé par son prédécesseur.

Le Dr [B] fait valoir que le Dr [V] n'a pas quitté son poste et que la clinique n'a jamais organisé de succession. Partant, il explique que de ce fait il n'a jamais atteint un chiffre d'affaires acceptable.

C'est dans ce contexte que le 23 mars 2016, par lettre recommandée avec accusé de réception, Dr [B] a transmis sa démission à la clinique avec effet au 23 juin suivant.

Le 7 avril 2016, par pli recommandé, le conseil de la clinique a mis en demeure le Dr [B] de procéder à la régularisation de ses comptes pour les années 2015 et 2016.

Le 27 février, puis le 10 octobre 2017, par courrier, le conseil de la clinique a réitéré les mises en demeure auprès du Dr [B].

Le 18 avril 2018, une ultime mise en demeure a été adressée au Dr [B] l'invitant à régulariser sa situation, et à régler la somme de 51 134,45 € sous 48 h.

Le 31 août 2018, la clinique a fait assigner M. [B] en référé devant le tribunal de grande instance de Béziers pour obtenir paiement. Le 19 octobre 2019, le juge des référés a rendu une ordonnance d'incompétence motivée par le constat d'une contestation sérieuse.

Par acte en date du 28 janvier 2019, le Dr [B] a fait assigner la Clinique [5] aux fins de voir la responsabilité de cette dernière engagée et obtenir réparation des préjudices subis.

Par jugement contradictoire en date du 18 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Béziers a :

- Débouté le Dr [B] de l'intégralité de ses demandes ;

- Condamné reconventionnellement le Dr [B] à payer à la SA Clinique [5] la somme de 50 932,73 € au titre de l'apurement des comptes, en application des dispositions contractuelles liant les parties;

- Rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

- Condamné le Dr [B] à payer à la SA Clinique [5] la somme de 1 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné le Dr [B] aux entiers dépens.

Le 21 octobre 2021, le Dr [B] a relevé appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS

Par uniques conclusions remises par voie électronique le 14 décembre 2021, le Dr [B] demande en substance à la cour de réformer en toutes ses dispositions le jugement, et statuant à nouveau, de :

- Dire et juger que la clinique a manqué à ses obligations de bonne foi et de loyauté ;

- Dire et juger que la clinique a engagé sa responsabilité envers le Dr [B] ;

- Condamner la clinique à verser au Dr [B] la somme de 370 054 € en réparation des préjudices subis en raison des manquements commis par la clinique ;

- Subsidiairement, rejeter la demande incidente de la partie adverse ;

- En tout état de cause, condamner la clinique au paiement de la somme de 2 200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par uniques conclusions remises par voie électronique le 14 mars 2022, la SA Clinique [5] demande en substance à la cour de confirmer le jugement, et de :

- Juger que la SA [5] rapporte la preuve d'une créance certaine, liquide, et exigible d'un montant de 50 932,73 € à l'encontre de M.[B] ;

- Condamner M. [B] à payer à la clinique prise en la personne de son Président en exercice, la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de trésorerie ;

- En tout état de cause, condamner M. [B] à payer à la clinique prise en la personne de son Président en exercice, la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 14 février 2024.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur les manquements imputés à la clinique

Selon l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable,

'Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi.'

Un devoir de loyauté est associé à l'exigence de bonne foi.

M. [B] fait valoir qu'en ne l'informant pas dès le départ de ce que la succession était une simple éventualité et qu'il n'y avait aucune certitude qu'elle se fasse, en lui affirmant au contraire que le recrutement intervenait en vue d'une succession, en lui faisant signer une convention d'installation au regard des modalités d'installation de son 'prédécesseur', le Dr [V], qui ne le deviendra jamais, en ne mettant rien en oeuvre pendant plus de 18 mois pour que cette succession intervienne, la clinique a manqué à ses obligations de bonne foi et de loyauté.

Il est constant que le Dr [B] a répondu à une annonce de recrutement parue le 20 octobre 2014 portant mention 'en vue d'une succession, activité très importante'.

Il n'est pas moins constant que le contrat d'exercice régularisé le 17 janvier 2015 entre les parties stipule :

« A compter du 01/04/2015 le Docteur [U] [B] précédera pour son activité chirurgicale à son installation au sein de la SA Clinique [5] (...).

(...) En conséquence, afin de favoriser la cohésion des praticiens exerçant cette même spécialité (chirurgie viscérale et digestive) et réserver rapidement un niveau d'activité au Docteur [B] en harmonie avec celle de ses confrères, la clinique lui garantira durant les 24 premiers mois de son installation un bénéfice d'exploitation égal à celui réalisé par son prédécesseur le Docteur [V] au cours de l'exercice précédent à savoir celui ayant couru pendant la période allant du 01/01/2013 au 31/12/2013 et tel qu'arrêté par l'administration fiscale à savoir 144.000 euros.'

Toutefois, si ces éléments fournissent le cadre dans lequel s'est inscrit le recrutement du Docteur [B], soit en prévision de la succession du Docteur [V], ils sont inopérants à caractériser un quelconque manquement de la clinique aux obligations de bonne foi et de loyauté dès lors que M. [B], à qui était assuré pendant une période de transition de 24 mois une rémunération égale a minima à celle de son prédécesseur ne pouvait ignorer que la décision de succession du docteur [V] ne dépendait pas de la clinique mais de celle de ce confrère.

Le reproche du docteur [B] de ne pas avoir mis en oeuvre de moyens pour parvenir au départ de son prédécesseur est d'autant plus indélicat qu'il ne précise pas de quel moyen légal elle aurait pu disposer pour rompre un contrat légalement formé et c'est d'ailleurs le sens de la réponse par SMS reproduit dans le corps de ses écritures émanant du directeur de la clinique qui y exprime son embarras engendrant 'des réponses d'attente' ne pouvant prendre vis-à-vis du docteur [V] de position définitive.

Au jour de son recrutement, le docteur [B] n'a jamais mis en doute que le Docteur [V] ait manifesté son intention de cesser ses activités, Mme [F] [M], secrétaire médicale attestant de la volonté en ce sens du docteur [V], pas plus que le docteur [B] n'a estimé devoir négocier une condition résolutoire à son contrat d'exercice.

Le docteur [V] précise dans une attestation qu'une succession s'organise progressivement sur une durée de deux-trois ans, de telle sorte que la période de 24 mois visée au contrat, à laquelle le docteur [B] a mis fin avant terme, était l'expression raisonnable de la durée de la phase de transition.

M. [B] échoue donc à prouver le manquement à l'obligation de bonne foi et au devoir de loyauté qu'il invoque.

Le jugement qui le déboute de sa demande indemnitaire sera en conséquence confirmé.

Sur la demande reconventionnelle de la clinique au titre de l'apurement des comptes

Les premiers juges ont condamné M. [B] au paiement de la somme sollicitée telle qu'elle résulte de la convention et de l'apurement des comptes effectué en application de celle-ci.

M. [B] critique la somme réclamée, variable au fil des réclamations et mises en demeure, sans justification ni cohérence, fait valoir son inexactitude au regard des honoraires qu'il a effectivement perçus et la période d'assiette et indique que la convention dont se prévaut la clinique est dépourvue de validité puisque son contenu n'est pas certain, n'étant jamais devenu le successeur du Dr [V].

Toutefois, de telles critiques ne peuvent conduire à une infirmation partielle du jugement dès lors que contrairement à ce qu'il soutient, la validité de la convention n'est pas critiquable en ce que :

- son contenu est certain quant au recrutement du docteur [B] par la clinique ;

- le contrat valable contient les stipulations suivantes :

'En vue de l'obtention de ce résultat, la Clinique versera mensuellement une avance d'honoraires de 12.000 euros sous déduction de l'ensemble des recettes réalisées par le praticien. Pour ce faire, ce dernier communiquera à la fin de chaque mois à l'établissement le chiffre d'affaire réalisé comprenant notamment les honoraires d'intervention et ceux résultants des interventions chirurgicales, ainsi que les charges professionnelles fiscalement déductibles.

A la fin des exercices comptables compris dans la période allant du 01/04/2015 au 31/12/2015 une clôture des comptes sera effectuée par l'expert-comptable de la Clinique [5] afin de déterminer le résultat réalisé par le Docteur [B].

Le praticien pourra également faire participer à cette clôture des comptes le conseil de son choix.

En fonction des sommes avancées au praticien, une régularisation sera effectuée soit par un versement complémentaire émanant de la clinique, soit, en cas de trop perçu par le Docteur [B], par une restitution des excédents avancés.'

- M. [B], suite à sa lettre de rupture du 23 mars 2016 et à la lettre du 7 avril 2016 l'invitant à procéder à la vérification des comptes avec la clinique, puis aux lettres de mise en demeure des 27 février 2017, 10 octobre 2017 n'a eu ni recours au conseil de son choix pour participer à la clôture des comptes ni manifesté une réponse argumentée et critique à la liquidation des comptes justifiée par le travail de comptabilisation et compensation des avances clinique et du compte mandataire, lesquelles sont parfaitement justifiées à concurrence de la somme à laquelle il a été condamné en première instance.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le préjudice de trésorerie

La clinique entend obtenir en appel la condamnation de M.[B] au paiement de la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice de trésorerie, demande dont elle a été déboutée en première instance au motif qu'elle n'en justifiait pas.

Toutefois, si elle expose que le nombre d'interventions réalisées par le docteur [B] après la lettre de rupture est en chute libre pendant les trois mois de préavis, elle ne met pas la cour en mesure par renvoi à un quelconque document de vérifier ce qui ne demeure alors qu'allégations.

Le jugement sera dès lors confirmé dans l'ensemble de ses dispositions.

Partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, M. [B] sera condamné aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [U] [B] aux dépens d'appel,

Condamne M. [U] [B] à payer à la Clinique [5] la somme de 2 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/06189
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;21.06189 ?
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