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08/11/2006 | FRANCE | N°04/00264

France | France, Cour d'appel de Rouen, 08 novembre 2006, 04/00264


R.G : 04/00264





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE 1 CABINET 1



ARRÊT DU 8 NOVEMBRE 2006









DÉCISION DÉFÉRÉE :



TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DIEPPE du 13 novembre 2003



APPELANTES :



S.A. QUILLE

4, rue Saint-Eloi

76000 ROUEN



représentée par Me Marie-Christine COUPPEY, avoué à la Cour



assistée de Me NAUTOU, avocat au Barreau de LISIEUX





S.N.C. CIRMAD PROSPECTIVES

6, rue Saint-Eloi

7

6000 ROUEN



représentée par Me Marie-Christine COUPPEY, avoué à la Cour



assistée de Me NAUTOU, avocat au Barreau de LISIEUX



INTIMÉS :



VILLE DE DIEPPE

Hôtel de Ville

Parc Jehan Ango

76203 DIEPPE CEDEX



représentée pa...

R.G : 04/00264

COUR D'APPEL DE ROUEN

CHAMBRE 1 CABINET 1

ARRÊT DU 8 NOVEMBRE 2006

DÉCISION DÉFÉRÉE :

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE DIEPPE du 13 novembre 2003

APPELANTES :

S.A. QUILLE

4, rue Saint-Eloi

76000 ROUEN

représentée par Me Marie-Christine COUPPEY, avoué à la Cour

assistée de Me NAUTOU, avocat au Barreau de LISIEUX

S.N.C. CIRMAD PROSPECTIVES

6, rue Saint-Eloi

76000 ROUEN

représentée par Me Marie-Christine COUPPEY, avoué à la Cour

assistée de Me NAUTOU, avocat au Barreau de LISIEUX

INTIMÉS :

VILLE DE DIEPPE

Hôtel de Ville

Parc Jehan Ango

76203 DIEPPE CEDEX

représentée par la SCP GREFF PEUGNIEZ, avoués à la Cour

assistée de Me Pascale Y..., avocat au Barreau de DIEPPE

ARTEFACT SELAFA

67, avenue Gustave Flaubert

76020 ROUEN CEDEX

représentée par la SCP GALLIERE LEJEUNE MARCHAND GRAY, avoués à la Cour

assistée de Me Frédéric Z..., avocat au Barreau de ROUEN (SCP EMO-HEBERT etASSOCIÉS)

Monsieur Herbert A...

...

76140 LE PETIT QUEVILLY

représenté par la SCP GALLIERE LEJEUNE MARCHAND GRAY, avoués à la Cour

assisté de Me Frédéric Z..., avocat au Barreau de ROUEN (SCP EMO-HEBERT etASSOCIÉS)

SOCIÉTÉ BUREAU VERITAS

17, bis place des Reflets

Immeuble B 22

92400 COURBEVOIE

représentée par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour

assistée de Me Serge B..., avocat au Barreau de PARIS

S.A. BERIM (BUREAU D'ÉTUDES & DE RECHERCHES POUR L'INDUSTRIE MODERNE)

149, avenue Jean Lolive

93500 PANTIN

représentée par la SCP HAMEL FAGOO DUROY, avoués à la Cour

S.A.R.L. VAL CONSEIL (dissoute le 31 décembre 1995 et radiée du registre du commerce de Bobigny le 10 juillet 1996)

55, rue de la Convention

93120 LA COURNEUVE

n'ayant pas constitué avoué du fait de sa dissolution, mais néanmoins régulièrement assignée par actes d'huissier de justice ayant donné lieu à trois procès-verbaux de recherche, en date des 30 juin et 2 juillet 2004, puis du 12 mai 2006, dans les conditions de l'article 659 du nouveau code de procédure civile

S.A. HONFLEURAISE DE MENUISERIE MÉTALLIQUE

Zone industrielle

Avenue du Président Duchesne

14600 HONFLEUR

représentée par la SCP DUPAS-TRAUTVETTER YGOUF BALAVOINE, avoués à la Cour

assistée de Me C..., avocat au Barreau de ROUEN (SCP LENGLET-MALBESIN)

SUISSE ACCIDENTS venant aux droits de la compagnie d'assurances l'UNION & LE PHENIX ESPAGNOL S.A.

86, boulevard Haussmann

75380 PARIS CEDEX 08

représentée par la SCP DUPAS-TRAUTVETTER-YGOUF-BALAVOINE, avoués à la Cour

assistée de Me C..., avocat au Barreau de ROUEN (SCP LENGLET-MALBESIN)

S.M.A.B.T.P.

114, avenue Emile Zola

75739 PARIS CEDEX 15

représentée par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avoués à la Cour

assistée de Me Olivier D..., avocat au Barreau du HAVRE

S.A. AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE venant aux droits d'UNI EUROPE (assureur de la société VAL CONSEIL)

4, rue Jules Lefebvre

75009 PARIS

représentée par la SCP DUVAL BART, avoués à la Cour

assistée de Me E..., avocat au Barreau de PARIS (CABINET MOUSSAFIR)

Me Christian F... - Mandataire liquidateur de Société C.N.E.I.

Place du Palais de Justice

59140 DUNKERQUE

représenté par la SCP COLIN VOINCHET RADIGUET ENAULT, avoués à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 27 septembre 2006 sans opposition des avocats devant Monsieur BOUCHÉ, Président, rapporteur, en présence de Monsieur PÉRIGNON, Conseiller,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur BOUCHÉ, Président

Monsieur PÉRIGNON, Conseiller

Madame LE CARPENTIER, Conseiller

GREFFIER LORS DES DÉBATS :

Jean Dufot

DÉBATS :

A l'audience publique du 27 septembre 2006, où l'affaire a été mise en délibéré au 8 novembre 2006

ARRÊT :

RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 8 novembre 2006, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile,

signé par Monsieur BOUCHÉ, Président et par Jean Dufot, greffier présent à cette audience.

*

* *

Par convention du 24 février 1989, la société CIRMAD Prospectives, dans le cadre d'une importante réhabilitation de "l'Espace de la Barre", a vendu en l'état futur d'achèvement ( vente dite "VEFA" ) à la ville de Dieppe un important ensemble immobilier ( "coque nue" c'est-à-dire clos et couvert ) destiné à recevoir pour partie des logements d'habitation, des commerces et des emplacements de stationnement, pour partie une école de musique ;

Le 28 juillet 1989, concernant l'école de musique, la ville de Dieppe a directement conclu avec la société VAL Conseil une convention d'études acoustiques comprenant pour mission, notamment, la rédaction d'un cahier des clauses techniques particulières ( CCTP ), le suivi et la réception du chantier ;

Le 20 novembre 1989, la ville a signé une convention d'assistance technique avec la société BERIM pour "veiller au respect des objectifs et prescriptions figurant dans les documents contractuels de la VEFA" ;

Le 15 mars 1989, la société CIRMAD, en sa qualité de maître de l'ouvrage et de vendeur, avait choisi la société QUILLE en qualité d'entrepreneur général tous corps d'état ;

Elle a en outre confié par contrat unique du 9 août 1989 à la société civile professionnelle d'architectes ARTEFACT la maîtrise d'oeuvre de conception et à l'architecte Herbert A... la maîtrise d'oeuvre de réalisation de l'ensemble immobilier, avec mission notamment "d'assistance au maître de l'ouvrage pour la rédaction du CPS, du CCTP et du planning général des travaux" ;

Elle a également confié au bureau VERITAS une mission de contrôle technique ;

La société QUILLE a sous-traité l'exécution d'un certain nombre de lots, notamment :

- par convention du 22 mai 1990, le lot menuiseries extérieures et vitrerie à la société Honfleuraise de Menuiseries Métalliques ( SHMM ) assurée auprès de la compagnie L'Union et le Phoenix Espagnol aux droits de laquelle vient la compagnie Suisse Accident,

- par convention du 18 décembre 1989, le lot étanchéité, couverture, bacs aciers à la société CNEI, assurée auprès de la SMABTP et aujourd'hui en liquidation judiciaire ;

Après livraison de l'immeuble destiné à recevoir l'école de musique, il était prévu des aménagements intérieurs en exécution de contrats passés entre le ville de Dieppe et divers cocontractants ;

La réception des travaux relatifs au clos et au couvert a été prononcée le 6 juin 1991, avec des réserves qui ont été levées le 29 juillet 1991 ;

Après cette réception, la ville de Dieppe, devenue maître de l'ouvrage et propriétaire, a comme prévu fait procéder à l'aménagement intérieur du bâtiment ;

Ainsi, à partir de juin 1991, par marchés publics, elle a confié sa conception et sa réalisation à divers intervenants, au nombre desquels :

- la société VAL Conseil pour les études acoustiques, assurée auprès de la société AXA Corporate Solutions,

- le bureau VERITAS pour le contrôle technique,

- la société ARTEFACT en qualité d'architecte,

- la société BERIM en qualité de bureau d'études,

- et de nombreux corps de métier spécialisés

***

À la suite de l'apparition de désordres d'infiltrations par les terrasses et affectant l'étanchéité et l'isolation acoustique du bâtiment, la ville de Dieppe a obtenu les 16 mars et 9 avril 1993 du juge administratif des référés de Rouen une mesure d'expertise judiciaire confiée à Jean-Claude G... et étendue en octobre suivant à plusieurs entreprises intervenantes ;

Parallèlement, la CIRMAD a obtenu du juge des référés du tribunal de grande instance de Dieppe les 26 mai, 16 juin et 8 octobre 1993 une autre mission confiée également à Jean-Claude G... ;

L'expert, qui s'est fait assister d'un expert judiciaire acousticien, a déposé devant le tribunal administratif deux rapports datés des 30 novembre 1995 et 28 juillet 1996 concernant l'acoustique des locaux, l'étanchéité des murs et des toitures et le chauffage , et un rapport daté du 8 août 1996 devant le tribunal de grande instance ;

La ville de Dieppe a saisi le tribunal administratif qui, par deux jugements du même jour 13 novembre 2000 devenus définitifs,

- a d'une part statué sur les responsabilités dans les désordres affectant les aménagements intérieurs,

- d'autre part, se déclarant incompétent pour connaître des désordres affectant le clos et le couvert, dès lors qu'ils concernent un contrat de vente, a rejeté la requête de la ville de Dieppe dirigée contre les sociétés VAL Acoustique ( lire VAL Conseil ) et BERIM en responsabilité pour manquement à leur obligation de conseil et de surveillance et l'a condamnée à verser à ces sociétés une indemnité de procédure et à supporter la charge des frais d'expertise.

***

C'est dans ces circonstances que, le 29 mai 2001, sur le fondement des articles 1601-3 et 1792 et suivants du code civil, la ville de Dieppe a assigné devant le tribunal de grande instance de Dieppe en paiement des sommes principales de 187 230 francs HT ( 28 543 ) pour les défauts d'acoustique et de 47 500 francs HT ( 7 241, 33 ) pour les défauts d'étanchéité constatés dans le cadre de l'exécution du contrat de vente en l'état de futur achèvement : la CIRMAD, la société VAL Conseil et la société BERIM ;

En application des articles 1792 et suivants et 1382 du code civil, la CIRMAD a appelé en garantie les 4, 5 et 6 décembre 2001 divers intervenants à l'opération de construction : le bureau VERITAS, la société ARTEFACT et Herbert A..., la société SHMM et la société CNEI ;

La société QUILLE, qui n'a pas été appelée en garantie par la CIRMAD, est intervenue volontairement pour mettre en cause plusieurs entrepreneurs et autres intervenants et réclamer la somme de 103 241, 30 francs TTC ( 14 739, 03 ), coût des travaux qu'elle a réalisés en cours d'expertise sur les skydômes à ses frais avancés et qui se sont avérés efficaces.

***

Suivant jugement contradictoire du 13 novembre 2003 dont les sociétés CIRMAD et QUILLE sont appelantes, le tribunal de grande instance de Dieppe a repris les constatations de l'expert :

- les défauts d'isolation sont imputables à la société CNEI et au bureau VERITAS,

- les défauts d'étanchéité sont imputables aux sociétés QUILLE, SHMM et CNEI,

- ces désordres rendent l'immeuble impropre à sa destination,

- la CIRMAD Perspectives en est responsable sur le fondement de l'article 1601-3 du code civil,

- aucune faute n'est démontrée à l'encontre de la société VAL Conseil assurée par la compagnie AXA Corporate, et de la société BERIM,

- en omettant de répercuter dans les conventions qu'elle a passées avec l'ensemble des intervenants à la construction, y compris à la société CNEI, liée contractuellement uniquement avec la société QUILLE, les impératifs d'acoustique spécifiques à la destination des lieux, la pratique de la musique, la CIRMAD s'est privée de toute garantie à leur encontre,

- s'agissant des désordres d'étanchéité, simples défauts d'exécution, ils engagent la responsabilité des sociétés SHMM et CNEI envers la CIRMAD sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

- les assureurs SUISSE Accidents ( pour la société SHMM ) et SMABTP ( pour la société CNEI en liquidation judiciaire ) sont fondés à opposer à la CIRMAD la franchise opposable à leurs assurés ;

En conséquence de ces observations, le tribunal :

- a condamné la société CIRMAD Prospectives à payer à la ville de Dieppe la somme de 28 543, 03 ( HT ) pour les travaux de reprise en matière acoustique, et celle de 7 241, 33 pour ceux de reprise de l'étanchéité, valeurs d'août 1996, ces sommes étant indexées sur l'indice du coût de la construction,

- a débouté la CIRMAD de ses recours en garantie concernant les désordres d'acoustique,

- recevant la CIRMAD en ses recours concernant les seuls désordres d'étanchéité, a condamné solidairement la société SHMM et son assureur la compagnie SUISSE Accidents à lui payer la somme en principal de 2 850 valeur d'août 1996 avec réévaluation, et la SMABTP, assureur de la société CNEI en liquidation judiciaire la somme de 3 811, 23 valeur d'août 1996 avec réévaluation,

- a autorisé les compagnies SUISSE Accidents et SMABTP à déduire de ces sommes le montant des franchises contractuelles,

- a débouté la société QUILLE de ses demandes en répétition ou garantie,

- a condamné la CIRMAD à payer à la ville de Dieppe la somme de 3 000 en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné solidairement la société SHMM et son assureur la société SUISSE Accidents à payer à la CIRMAD la somme de 1 000 en application du même texte,

- a condamné la SMABTP à payer à la CIRMAD la somme de 1 000 en application de ce même texte,

- a fait masse des dépens, incluant les frais d'expertise et a dit qu'ils seront supportés

. par la CIRMAD à hauteur de 80%,

. par la société SHMM et son assureur la compagnie SUISSE Accidents à hauteur de 10%,

. par la compagnie SMABTP à hauteur de 10%.

***

La société en nom collectif CIRMAD Prospectives et la société anonyme QUILLE ont relevé appel de cette décision et, ayant constitué même avoué et conclu, comme en première instance, par mêmes écritures dernièrement signifiées le 29 août 2005, elles demandent à la cour, par réformation partielle au visa des articles 1147, 1382 et 1792 et suivants du code civil, et des articles 66 et 325, 405 et 399 du code de procédure civile,

- concernant l'isolation acoustique, de leur donner acte de leur désistement d'appel à l'égard des sociétés BERIM, VAL Conseil et AXA et, par voie de conséquence, le désistement partiel de la cour du chef de cette réclamation de la ville de Dieppe,

- de condamner in solidum la société civile professionnelle ARTEFACT, Herbert A... , le bureau VERITAS et la SMABTP ( en présence de maître F... , ès qualités, de mandataire liquidateur de la société CNEI ) à garantir intégralement la CIRMAD de la condamnation de 28 543, 03 revalorisée prononcée au profit de la ville de Dieppe au titre de l'ensemble des travaux de reprise de l'isolation acoustique,

- de condamner les mêmes sous la même solidarité à payer à la société QUILLE la somme de 15 739, 03 revalorisée, coût des travaux supplémentaires d'isolation qu'elle a déjà entrepris au cours des opérations d'expertise,

- concernant l'étanchéité de la salle d'orgue, de condamner la compagnie SUISSE Accidents - assureur de la société SHMM - à garantir la CIRMAD de la condamnation prononcée au profit de la ville de Dieppe,

- concernant l'étanchéité des murs et toitures, de donner acte à la CIRMAD de son désistement d'appel du jugement à l'encontre des compagnie SUISSE Accidents et SMABTP, en ce qu'il l'a autorisée à déduire des condamnations prononcées à son profit les franchises contractuelles de leurs assurées et par voie de conséquence le dessaisissement de la cour du chef de cette réclamation de la ville de Dieppe ,

- de condamner toutes parties succombantes à garantir la CIRMAD des condamnations prononcées à son encontre par le tribunal au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, et de condamner les mêmes au même titre à verser aux concluants 5 000.

La ville de Dieppe, dans ses conclusions signifiées le 11 mars 2005, constate que la CIRMAD ne discute plus sa condamnation au paiement des sommes de 28 543, 03 et de 7 241, 33 à réévaluer et l'indemnité de 3 000 pour frais irrépétibles, et, s'en rapportant à justice sur le mérite des appels de la CIRMAD et de la société QUILLE dirigés contre les autres parties, demande la confirmation du jugement déféré et la condamnation des parties succombantes, et notamment les appelantes à lui régler 5 000 au titre de ses frais irrépétibles.

La société SUISSE Accidents, assureur de la société Honfleuraise de Menuiseries Métalliques - SHMM - conclut le 22 mars 2005 à la confirmation du jugement et à la condamnation in solidum des société CIRMAD et QUILLE à lui payer 1 500 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société anonyme SHMM a été assignée par trois fois les 5 juillet 2004, 15 septembre 2005 et 23 janvier 2006 à personne habilitée ; elle n'a pas constitué avoué.

La société SMABTP, assureur de la société CNEI en liquidation judiciaire, demande à la cour le 6 octobre 2005 de confirmer le jugement, subsidiairement, au visa de l'article 1134 du code civil, de dire opposable aux sociétés CIRMAD et QUILLE la franchise contractuelle de 20% du montant des dommages en matière acoustique avec un minimum de 10 000 francs par sinistre, en toute hypothèse de les condamner à lui verser 2 000 pour ses frais hors dépens.

Maître Christian F..., ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société CNEI, demande à la cour dans des écritures signifiées le 30 juin 2004 de confirmer qu'aucune condamnation ne peut être prononcée contre son administrée, de le mettre hors de cause, et de condamner la partie succombante à lui verser 2 000 pour ses frais hors dépens.

La compagnie AXA Corporate Solutions, assureur de la société VAL Conseil, fait valoir auprès de la cour, dans ses écritures signifiées le 21 février 2006, qu'aucune demande n'est formée à son encontre par les sociétés appelantes et que la confirmation du jugement entrepris s'impose donc et justifie sa demande de leur condamnation à lui verser 3 000 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société à responsabilité limitée VAL Conseil, dont le siège social était à La Courneuve, a fait l'objet de procès-verbaux de recherches infructueuses les 30 juin et 2 juillet 2004 suivant les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, puis encore, cette fois à l'initiative du bureau VERITAS, le 12 mai 2006 : elle a été radiée du registre du commerce de Bobigny le 10 juillet 1996 à la suite de sa dissolution.

La selafa ARTEFACT et Herbert A... a signifié le 23 mai 2006 des conclusions de confirmation du jugement déféré et de condamnation in solidum des sociétés appelantes au paiement de 1 500 pour ses frais hors dépens ;

Subsidiairement, les concluants demandent que leur soient accordés recours et garantie des condamnations susceptibles d'être prononcées contre eux à l'encontre de la SMABTP et du bureau VERITAS, la société QUILLE devant conserver partie de la responsabilité des désordres, et la société SHMM l'intégralité des conséquences des défauts d'étanchéité des châssis de la salle d'orgue.

La société anonyme à directoire Bureau VERITAS fait valoir dans ses écritures signifiées le 4 février 2005 que les appelantes ne recherchent sa condamnation que pour les désordres acoustiques, que le tribunal administratif a écarté sa responsabilité à ce titre, que la cour ne peut, au risque de contrariété de décision, faire droit aux demandes de condamnation à garantir formées par les sociétés CIRMAD et par QUILLE, que ces dernières ne précisent pas le fondement de leur action à l'encontre du bureau VERITAS, que l'expert n'a trouvé à son encontre aucun motif de condamnation dès lors que les défauts d'isolation acoustique et thermique sont des aléas exclus de sa mission, que sa mise hors de cause s'impose et justifie sa demande à la charge des appelantes de 3 000 au titre de ses frais irrépétibles ;

Le bureau VERITAS forme subsidiairement une demande de condamnation solidaire des sociétés BERIM, VAL Acoustique, SHMM, ARTEFACT, SMABTP assureur de la société CNEI, et Herbert A... à le relever de toutes condamnations sur le fondement de l'article 1382 du code civil, la société QUILLE devant conserver, quant à elle, la charge de ses propres manquements.

La société anonyme BERIM conclut le 13 janvier 2006 au constat qu'aucune demande n'est dirigée à son encontre par la ville de Dieppe, que les sociétés CIRMAD et QUILLE se désistent de leur appel concernant la demande initiale présentée à son encontre par la ville de Dieppe au titre des travaux complémentaires d'isolation acoustique, et qu'aucune partie ne précise les fondements juridiques des appels en garantie dirigés contre la concluante et ne prouve sa faute dans l'exécution de la mission très limitée qui lui a été confiée en novembre 1989 ;

La société BERIM demande aux appelantes et aux autres parties présentant une demande à son encontre la somme de 5 000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE LA COUR,

Les sociétés CIRMAD et QUILLE ne critiquent pas les dispositions du jugement qui prononcent leur condamnation à l'égard de la ville de Dieppe ;

Dès lors que cette dernière en accepte les termes et qu'aucune demande reconventionnelle n'est formée à son encontre, l'équité commande qu'elle soit aussi indemnisée des frais irrépétibles qu'elle a engagés devant la cour ; elle recevra à ce titre la somme de 4 500 , qui s'ajoute à celle de 3 000 mise à la charge de la CIRMAD par le tribunal ;

L'expert Jean-Claude G... a chiffré, sans être critiqué, aux sommes de 184 680 francs HT et de 2 550 francs HT le coût des travaux concernant l'amélioration de l'acoustique à réaliser tant sur les plafonds que sur les châssis de la salle d'orgue, soit la somme totale de 28 543, 03 HT mise à la charge de la société CIRMAD par le tribunal ;

L'expert a pu constater en outre que l'intervention spontanée de la société QUILLE sur les skydômes en cours d'expertise, destinée à porter remède aux défauts d'isolation thermique, s'est avérée efficace sur la déperdition de l'isolation acoustique ; il en a vérifié le coût : 87 050 francs HT, soit 103 241, 30 francs TTC ou 15 739, 13 ( et non HT comme le précise par erreur le tribunal ) ;

La procédure d'appel porte essentiellement sur les recours en garantie formés par les sociétés CIRMAD et QUILLE concernant les désordres acoustiques ;

Sur le fondement de l'article 1792 du code civil, les appelantes déclarées responsables demandent la garantie des condamnations prononcées contre elles par certains intervenants, du nombre desquels elles excluent désormais par désistement d'appel les sociétés VAL Conseil et BERIM ;

Sans pour autant désapprouver certains griefs techniques formés par l'expert G... à l'encontre de plusieurs intervenants, le tribunal a cependant entièrement débouté la CIRMAD et la société QUILLE de leurs recours au motif qu'elles ont omis de répercuter auprès des intervenants et sous-traitants dans les documents contractuels qui les lient l'un ou l'autre les impératifs acoustiques spécifiques à une école de musique ;

La CIRMAD reproche au bureau VERITAS, dont elle critique à juste titre la méconnaissance invoquée du fondement juridique de son recours, l'article 1792 du code civil et l'article L 111-24 du code de la construction, d'avoir ignoré les impératifs d'acoustique qui, aux dires mêmes de l'expert, faisaient partie intégrante de sa mission de contrôle ;

Dans le cadre de ses opérations d'expertise ordonnées par le tribunal administratif, l'expert G..., qui a consulté la convention passée avec la ville de Dieppe pour la seconde tranche des travaux, proche de celle signée par la CIRMAD pour la "VEFA", n'y a pas vu trace d'une mission de contrôle de l'isolation phonique intérieure et n'a retenu aucun grief à l'encontre du bureau d'études ; en revanche, la CIRMAD fait valoir que l'expert a trouvé dans la convention liant le bureau à la CIRMAD pour les ouvrages extérieurs l'exigence de vérifications des calculs et des plans dressés par les entreprises pour la réalisation des toits-terrasses qui, isolés par une laine de roche de cinq centimètres, ne pouvaient répondre aux résultats souhaités par la société VAL Conseil ;

Or, il résulte de la convention de contrôle technique signée les 16 mars et 27 avril 1989 avec la CIRMAD, que le bureau VERITAS avait pour mission, conforme aux dispositions des articles L 111-23 du code de la construction, de contribuer à la prévention des aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation du chantier et découlant des missions particulières choisies par le maître de l'ouvrage;

L'article 18 qui définit les missions particulières du bureau, élément par élément de l'opération "l'Espace de la Barre", renvoie, en ce qui concerne l'école de musique, aux articles 6 et 11 et 8 relatifs à la solidité et aux essais sur les équipements, ainsi qu'à la sécurité des personnes, et à l'article 4 de l'Annexe 1 relatif à la solidité des ouvrages existants ;

Aucune allusion ne figure aux études et spécifications de la société VAL Conseil ;

La confirmation du rejet du recours de la CIRMAD s'impose donc, rendant désormais inopérant le recours subsidiaire du bureau VERITAS à l'encontre des sociétés VAL Conseil et BERIM ;

En équité, le bureau d'études doit recevoir de la société CIRMAD une indemnité de 2 500 pour ses frais irrépétibles ;

Dès lors que les sociétés VAL Conseil et BERIM, liées à la ville de Dieppe la première par une convention d'études acoustiques, la seconde par une convention d'assistance technique de nature purement administrative, toutes deux sans mission de maîtrise d'oeuvre, ne se sont vu reprocher aucune faute par l'expert dans les désordres affectant l'ouvrage "hors aménagements" livré par la CIRMAD, venderesse, désordres qui ne doivent pas être confondus avec ceux d'équipements et d'aménagements sur lesquels le tribunal administratif a statué, elles ont été à bon droit exemptées de toutes condamnations par le tribunal de grande instance et bénéficient devant la cour d'un désistement des appels dirigés par les sociétés CIRMAD et QUILLE à leur encontre ;

En équité, la compagnie AXA Corporate, assureur de la société VAL Conseil, qui présente une demande de garantie des sociétés CNEI et SHMM dans les motifs de ses conclusions sans la reprendre dans leur dispositif, et la société BERIM recevront chacune des appelantes une indemnité de 2 500 pour leurs frais hors dépens ;

La société CNEI, chargée du lot étanchéité-couverture et bac-acier en sous-traitance de la société QUILLE suivant une lettre d'engagement du 17 avril 1989 qui n'est pas versée aux débats ( maître F..., mandataire liquidateur parle d'une convention du 18 décembre 1989 qui n'est pas davantage produite aux débats ), et la CIRMAD, cette dernière sur le fondement quasi-délictuel de l'article 1382 du code civil, se voit reprocher d'être à l'origine des défauts d'isolation acoustique par la mise en oeuvre d'une isolation insuffisante des toitures-terrasses ;

Outre cette insuffisance dans la mise en oeuvre des procédés d'étanchéité, qui ont une influence évidente sur l'acoustique intérieure du bâtiment, les sociétés CIRMAD et QUILLE reprochent à la société CNEI un manquement à son obligation de conseil pour n'avoir pas attiré l'attention des constructeurs sur les inconvénients et les malfaçons susceptibles d'apparaître par une exécution conforme aux prescriptions de la maîtrise d'oeuvre ;

Ces griefs, qui méritent d'être pris en considération au chapitre des désordres d'étanchéité pour lesquels la SMABTP admet la responsabilité de la société CNEI son assurée, ne sont en revanche pas fondés quand ils se rapportent aux problèmes d'acoustique ;

C'est en effet la société ARTEFACT, architecte de conception qui a participé à la rédaction des CCTP et qui, en omettant d'y inclure les préoccupations relatives à l'isolation phonique définies par la société VAL Conseil, doit répondre de l'influence négative d'une exécution trop légère des terrasses par la société CNEI sur le confort acoustique de l'école ;

Il en a été de même de l'architecte Herbert A... qui a dirigé le chantier sans s'interroger ni interroger son collègue concepteur sur la faiblesse des terrasses, réalisées conformément aux documents contractuels, au regard des objectifs de Val Conseil et de la destination des lieux ;

La SMABTP est en conséquence fondée à réclamer la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a mis hors de cause son assurée au titre des désordres d'acoustique ;

L'équité commande qu'elle conserve, ainsi que maître F..., ès qualités, ses frais de procédure ;

La responsabilité des deux architectes secondairement invoquée par la CIRMAD, en relations contractuelles avec eux, est ainsi démontrée au titre de ces mêmes désordres acoustiques et, contrairement à ce qu'en a décidé le tribunal, mérite leur condamnation à la garantir chacun à hauteur du tiers des condamnations prononcées à l'encontre de la CIRMAD, sur le fondement des articles 1147 et 1792 du code civil ;

Il n'est pas raisonnable de leur part en effet de soutenir qu'intervenants à l'acte de construire, ils ignoraient la destination de l'immeuble dont ils ont conçu le cahier des charges ou suivi la réalisation ;

En revanche, la société QUILLE, tenue d'une obligation de résultat à l'égard du maître de l'ouvrage la CIRMAD qui conclut avec elle et ne forme aucune demande à son encontre, a fait des travaux d'amélioration de la thermie qui ont eu une influence positive sur l'acoustique, pour un coût de 15 739, 03 TTC ;

Elle n'a fait qu'exécuter le contrat qui la lie à la société CIRMAD et ne peut agir contre les architectes sur le plan quasi-délictuel, à défaut de preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre cette faute et ce préjudice ;

La société CIRMAD est fondée en équité à être partiellement indemnisée par la société ARTEFACT et par Herbert A... des frais irrépétibles qu'elle a engagés devant la cour ;

Elle recevra à ce titre la somme globale de 3 000 ;

S'agissant enfin de la mise en cause de la société SHMM, chargée par la société QUILLE du lot menuiseries extérieures-aluminium-vitrerie-miroiterie, sa responsabilité se limite à un défaut de châssis de la salle d'orgue ;

À ce seul titre, la compagnie La SUISSE Accidents son assureur accepte la condamnation de 2 850 HT valeur août 1996 prononcée par les premiers juges à son encontre solidairement avec son assurée, en se prévalant toutefois de l'application de la franchise figurant dans la police d'assurance, ce que désormais les appelantes acceptent par désistement de leur recours sur ce point ;

Les appels concernant les défauts d'étanchéité imputés par le tribunal aux sociétés SHMM et CNEI ont été limités par les sociétés CIRMAD et QUILLE aux franchises d'assurance imposées par les compagnies SMABTP et La SUISSE leurs assureurs ;

En conséquence de leur désistement sur ce point, et de l'acceptation des termes du jugement par les intervenants et assureurs condamnés dans la limite de ces franchises, la décision entreprise doit être confirmée ;

Il n'est pas inéquitable que la SMABTP, maître F..., ès qualités, et la compagnie La SUISSE conservent la charge des frais hors dépens qu'ils ont dû assumer devant la cour ;

En revanche, la société BERIM et la compagnie AXA, assureur de la société VAL Conseil, injustement appelées en cause d'appel par la CIRMAD avant de se désister, ont dû assurer leur représentation ; chacune mérite en équité indemnisation de 2 800 ;

L'issue de l'appel conduit à réformer le partage des dépens ordonné par le tribunal ;

Les sociétés SHMM et La SUISSE Accidents d'une part, et la compagnie SMABTP d'autre part conserveront la charge de 10 % de ces dépens ;

Les architectes en assumeront 40%, les 40% restant devant demeurer à la charge de la venderesse-maître de l'ouvrage ;

PAR CES MOTIFS,

Donne acte aux sociétés CIRMAD Prospectives et QUILLE de leur désistement d'appel à l'encontre des sociétés VAL Conseil, AXA Corporate Solutions et BERIM ;

Donne acte aux sociétés CIRMAD et QUILLE de leur désistement d'appel à l'encontre des assureurs La SUISSE Accidents et la SMABTP ;

Réformant partiellement le jugement du 13 novembre 2003 sur le rejet des recours en garantie exercés par la société CIRMAD en matière de désordres d'acoustique,

Condamne in solidum la société ARTEFACT et Herbert A... à garantir chacun à hauteur de un-tiers ( 1/3 ) la société CIRMAD de la condamnation de 28 543, 03 euros HT - valeur août 1996 - indexée dans les termes du jugement ;

Les condamne avec la même solidarité à verser à la société CIRMAD une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société QUILLE de son appel ;

Condamne les sociétés CIRMAD et QUILLE, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, pour les frais de procédure exposés devant la cour, à payer :

- à la ville de Dieppe une indemnité de 4 500 euros,

- au bureau VERITAS une indemnité de 2 500 euros,

- à la compagnie AXA Corporate Solutions une indemnité de 2 500 euros,

- à la société BERIM une indemnité de 2 500 euros ;

Condamne la société ARTEFACT et Herbert A... à supporter la charge de 40% des dépens d'expertise et de première instance ;

Confirme le jugement du 13 novembre 2003 en ses autres dispositions complémentaires et non contraires ;

Fait masse des dépens d'appel et condamne les sociétés CIRMAD et QUILLE à en supporter la charge pour moitié et la société ARTEFACT et Herbert A... l'autre moitié ;

Dans ces limite et proportion, accorde à maître M.C. COUPPEY, avoué, et à la société civile professionnelle d'avoués GALLIERE-LEJEUNE-MARCHAND-GRAY, et aux autres avoués pour le tout, le droit de recouvrement direct défini par l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Numéro d'arrêt : 04/00264
Date de la décision : 08/11/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Dieppe


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-11-08;04.00264 ?
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