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23/08/2007 | FRANCE | N°06/00618

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0036, 23 août 2007, 06/00618


23/08/2007

ARRÊT No

No RG : 06/00618

FB/HH**

Décision déférée du 23 janvier 2006 - Conseil de Prud'hommes de MONTAUBAN (05/00180)

Francis X...

SA EVERSET

C/

Benoît Y...

Société B.R.P. FRANCE (BOMBARDIER)

INFIRMATION

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 2 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT TROIS AOÛT DEUX MILLE SEPT

***

APPELANTE

SA EVERSET,

prise en la personne de so

n PDG, M. LAMOUILLE

175 cours de la Libération

38100 GRENOBLE

représentée par Me Daniel MARMOND de la SELARL ALCIMUS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

Monsieur Benoît Y...
...

23/08/2007

ARRÊT No

No RG : 06/00618

FB/HH**

Décision déférée du 23 janvier 2006 - Conseil de Prud'hommes de MONTAUBAN (05/00180)

Francis X...

SA EVERSET

C/

Benoît Y...

Société B.R.P. FRANCE (BOMBARDIER)

INFIRMATION

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 2 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU VINGT TROIS AOÛT DEUX MILLE SEPT

***

APPELANTE

SA EVERSET,

prise en la personne de son PDG, M. LAMOUILLE

175 cours de la Libération

38100 GRENOBLE

représentée par Me Daniel MARMOND de la SELARL ALCIMUS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

Monsieur Benoît Y...

...

82100 CASTELSARRASIN

comparant en personne

assisté de Me Michel Z..., avocat au barreau de TARN ET GARONNE

Société B.R.P. FRANCE (BOMBARDIER)

"Les Jardins de la Duranne"

Bât C - ...

13857 AIX EN PROVENCE

représentée par Me Jilali MAAZOUZ, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945.1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mars 2007, en audience publique, devant F. BRIEX, conseiller, chargé d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

R. MULLER, président

F. BRIEX, conseiller

M.P. PELLARIN, conseiller

Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxieme alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile

- signé par R. MULLER, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur Benoît Y... était embauché par la SA EVERSET suivant contrat en date du 11 août 2003, en qualité de responsable régional des ventes, niveau V échelon 1. Ce contrat était suivi d'un avenant en date du 5 janvier 2004 le plaçant au niveau VI échelon 1 et précisant sa rémunération ainsi que les moyens matériels mis à sa disposition dans le cadre de son contrat de travail ; la rémunération du salarié telle que résultant de ses derniers bulletins de paye était de 2 611,59 €.

La SA EVERSET avait été choisie dans les années 80 par la SAS A... BOMBARDIER qui fabrique des véhicules de loisirs type moto ou quad et qui ne possédait, à ce moment là, aucune antenne en FRANCE pour distribuer sur le marché français les produits de sa marque, la SA EVERSET importateur étant alors le seul interlocuteur des concessionnaires des produits de la marque BOMBARDIER sur tout le territoire national.

Le 28 septembre 2004, BOMBARDIER INC RECREATIONAL PRODUCTS (A...), par courrier remis en mains propres à Monsieur LAMOUILLE, PDG de la SA EVERSET, indiquait que la société EVERSET ne serait plus en charge de la commercialisation des produits de la marque BOMBARDIER, précision faite que cette commercialisation serait reprise en direct par A..., et ce à l'expiration d'un délai d'un an, via une nouvelle entité juridique qui devait être créée en FRANCE.

Dans le cadre de la rupture du contrat de distribution liant les sociétés EVERSET et A... qui souhaitait étudier la reprise d'une partie du personnel de la société EVERSET, était signé le 15 novembre 2004 par Madame B... LE BRETON et Monsieur LAMOUILLE un récépissé de documents remis en mains propres par la SA EVERSET à A... :

- le listing des clients par nature de produits et localité

- la liste complète du personnel avec les dates d'entrée

- le statut et la fonction de chaque collaborateur

- diverses informations relatives notamment à la convention collective applicable et les usages dont bénéficiait le personnel.

Sur dix neuf employés, dix sept employés de la SA EVERSET étaient affectés à la commercialisation des produits de la marque "BOMBARDIER" et se trouvaient en conséquence concernés par le transfert d'activité ; les deux autres salariés restaient affectés à la SA EVERSET.

En l'absence de manifestation de A..., la SA EVERSET engageait dès le début juin 2005 une procédure de licenciement économique à l'encontre des dix sept salariés.

Monsieur Y..., par courrier recommandé avec AR du 14 juin 2005, était convoqué à un entretien préalable à un licenciement économique fixé au 23 juin 2005.

Apprenant en cours de procédure que la société A... FRANCE basée à Aix en Provence avait été inscrite le 31 mai 2005 au greffe du tribunal de commerce de Paris et venait d'être créée pour gérer en direct l'activité transférée, la SA EVERSET informait ses salariés au cours des entretiens préalables auxquels elle les avait convoqués que la procédure de licenciement engagée à leur encontre était arrêtée, sachant que l'article L 122-12 du Code du travail allait s'appliquer.

La société EVERSET remettait le 26 septembre 2005 en mains propres à chacun des salariés, dont Monsieur Y..., une lettre leur précisant qu'à dater du 1er octobre 2005 leurs contrats de travail se continueraient avec la société A... FRANCE.

Certains salariés, après avoir refusé de remettre à la SA EVERSET leurs outils de travail au motif qu'ils n'avaient eu aucune lettre d'acceptation de la poursuite de leur contrat par la société A..., consentaient à remettre ce matériel.

Monsieur Y... seul, tout en ne se présentant plus à son poste de travail, se refusait à la remise du matériel.

Parallèlement, d'autres salariés concernés par le transfert de l'activité de commercialisation des produits de marque BOMBARDIER tentaient de se rendre dans les locaux de BOMBARDIER FRANCE qui refusait de les laisser entrer dans l'entreprise.

Deux salariés, puis treize autres salariés de la SA EVERSET saisissaient successivement les 6 et 11 octobre 2005 la juridiction prud'homale de Grenoble en sa formation de référé, lui demandant :

- d'ordonner la poursuite de leur contrat de travail avec la société EVERSET ou la société A... FRANCE, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard ;

- de condamner la société, à l'égard de laquelle le contrat se poursuivait, au paiement de dommages-intérêts pour attitude abusive et injustifiée, outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par deux ordonnances des 26 octobre 2005 et une ordonnance du 16 novembre 2005, le Conseil de Prud'Hommes de Grenoble :

- ordonnait la poursuite du contrat de travail des quinze salariés à compter du 1er octobre 2005, par la société A... FRANCE, en application de l'article L 122-12 du Code du travail, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du 10ème jour suivant la notification de l'ordonnance ;

- se réservait le droit de liquider l'astreinte ;

- condamnait la société A... FRANCE à payer à chacun des salariés demandeurs la somme de 1 500 € à titre de dommages-intérêts pour attitude abusive et injustifiée et violation des obligations contractuelles ;

- condamnait la société A... FRANCE à payer à chacun des salariés demandeurs la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Sur appel de ces décisions, la Cour d'appel de Grenoble, par trois arrêts du 25 janvier 2006, confirmait les ordonnances entreprises sauf en ce qu'elles avaient mis à la seule charge de la société A... FRANCE les dommages- intérêts alloués et, statuant à nouveau, condamnait in solidum la société A... FRANCE et la société EVERSET au paiement provisionnel de la somme de 1 500 € à titre de dommages-intérêts à chacun des salariés intimés.

Y ajoutant,

- disait que la juridiction des référés était incompétente pour connaître du litige éventuel existant entre les sociétés ;

- condamnait in solidum la société A... FRANCE et la société EVERSET à payer à chacun des salariés demandeurs la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

- déboutait la société A... FRANCE de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

- condamnait in solidum la société A... FRANCE et la société EVERSET aux dépens de première instance et d'appel.

Monsieur Y..., après avoir successivement interrogé la SA EVERSET et A... sur la poursuite de son contrat de travail, la première entreprise lui ayant répondu que le contrat se poursuivrait avec A..., la seconde qu'il n'avait pas été créé pour reprendre l'activité antérieure d'EVERSET, saisissait le 23 novembre 2005 la formation des référés du Conseil de Prud'Hommes de Montauban des demandes suivantes à l'encontre de la SA EVERSET et de la SAS BOMBARDIER :

- 2 611,59 € au titre du salaire d'octobre

- 2 611,59 € au titre du salaire de novembre

- 2 611,59 € au titre du salaire de décembre

- 1 500,00 € à titre de dommages-intérêts pour retard

- 1 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Par ordonnance du 23 janvier 2006, la formation de référé du Conseil de Prud'Hommes :

- condamnait la SA EVEREST à régler à Monsieur Y... les sommes suivantes :

* 2 611,59 € au titre du salaire d'octobre

* 2 611,59 € au titre du salaire de novembre

* 2 611,59 € au titre du salaire de décembre

* 1 500,00 € à titre de dommages-intérêts pour retard du paiement des salaires

* 1 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

- constatait la rupture du contrat de travail au jour du prononcé de l'ordonnance ;

- disait n'y avoir lieu à application de l'article L122-12 à l'encontre de A... FRANCE ;

- condamnait en tant que de besoin la SA EVERSET aux dépens.

La SA EVERSET interjetait appel de cette décision le 9 février 2006.

La société A... FRANCE est intervenante volontaire.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

La SA EVERSET demande à la Cour de :

A TITRE PRINCIPAL

- dire et juger que l'article L 122-12 du Code du travail a lieu à s'appliquer, et ce conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, comme l'a fait la Cour d'appel de Grenoble ;

- dire et juger que la SA EVERSET n'est plus l'employeur de Monsieur Y..., et ce depuis le 1er octobre 2005, date à laquelle le transfert de l'activité de commercialisation des produits de la marque "BOMBARDIER" a été effectif au profit de A... FRANCE.

En conséquence,

- infirmer l'ordonnance rendue par le Conseil de Prud'Hommes de Montauban ;

- juger que le contrat de travail de Monsieur Y... s'est poursuivi avec la société A... depuis le 1er octobre 2005 ;

- mettre hors de cause la société EVERSET ;

- juger, dès lors, que seule la société A... FRANCE devait exécuter les obligations découlant de ce contrat transféré, notamment le paiement des salaires des mois d'octobre, novembre, décembre 2005 et janvier 2006 à Monsieur Y... ;

- condamner la société A... à rembourser à la société EVERSET les salaires versés par cette dernière à Monsieur Y... en exécution de l'ordonnance prud'homale, charges sociales comprises, ainsi que les frais engagés par la société pour établir les fiches de paie correspondantes, soit 18 000,60 € ;

- accueillir la demande reconventionnelle de la société EVERSET, sur laquelle le Conseil de Prud'Hommes a omis de statuer et ordonner à Monsieur Y... de restituer le matériel mis à sa disposition pour l'exercice de ses fonctions au sein de la société EVERSET, fonctions qu'il n'exerce plus depuis le 1er octobre 2005, date à laquelle son contrat a été transféré au sein de la société A... FRANCE ;

- accueillir la nouvelle demande formulée en cause d'appel par la société EVERSET tendant à la condamnation de Monsieur Y... à payer 1 000 € à titre de dommages-intérêts pour rétention abusive de ce matériel toujours en sa possession.

A TITRE SUBSIDIAIRE

- accueillir la demande reconventionnelle de la société EVERSET sur laquelle le Conseil de Prud'Hommes a omis de statuer et ordonner à Monsieur Y... de restituer le matériel mis à sa disposition pour l'exercice de ses fonctions au sein de la société EVERSET ;

- accueillir la nouvelle demande formulée en cause d'appel par la société EVERSET tendant à la condamnation de Monsieur Y... à payer 1 000 € à titre de dommages-intérêts pour rétention abusive de ce matériel toujours en sa possession.

Monsieur Benoît Y... demande à la Cour de :

- constater la rupture du contrat de travail D'EVERSET et sa non poursuite par B.R.P. sans respect des formes ;

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a jugé que la rupture du contrat de travail incombait principalement à EVERSET pour défaut de paiement des salaires ;

- confirmer sur ce point les condamnations prononcées ;

- donner acte à EVERSET du paiement des salaires d'octobre à décembre 2005 et du 1er au 23 janvier 2006 ;

- lui donner acte de son accord pour restituer les moyens matériels mis à sa disposition dans le cadre de son contrat de travail, dès que la rupture de celui-ci a été constatée et réglée ;

- lui donner acte de son offre de remettre le véhicule de fonction ainsi que l'ordinateur et le téléphone portable en gare ou à l'aéroport de Toulouse où la société EVERSET pourra en prendre possession à son choix ;

- déclarer cette offre satisfactoire ;

- condamner solidairement EVERSET et A... FRANCE au paiement de la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, en sus de celle déjà allouée par les premiers juges et aux dépens d'appel.

La société A... FRANCE demande à la Cour de :

- constater que l'activité de A... FRANCE (prestations de services) est d'une nature différente de l'activité D'EVERSET (distribution) ;

- constater que l'organisation D'EVERSET n'a pas été maintenue par A... FRANCE, mais au contraire radicalement bouleversée puisque A... FRANCE n'a plus aucune activité de logistique (qu'elle soit directe ou en sous traitance) et que les services centraux D'EVERSET ont été éclatés pour être incorporés dans les services centraux du Groupe A..., au niveau mondial et européen.

En conséquence,

- dire et juger qu'il existe une contestation sérieuse sur le maintien de l'identité de l'entité après transfert le 30 septembre 2005 au sens de l'article L 12-12 al2 du Code du travail ;

- dire et juger que A... FRANCE n'a pas l'obligation de reprendre les contrats de travail des salariés ;

- dire et juger qu'EVERSET est l'unique employeur des salariés ;

- enjoindre à EVERSET de poursuivre les contrats de travail des salariés ;

- condamner EVERSET au paiement de 50 000 € à titre de dommages- intérêts ;

- condamner EVERSET au paiement de la somme de 7 500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que pour un plus ample exposé des faits de la procédure et des moyens des parties, la Cour se réfère expressément à la décision attaquée et aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ;

Attendu que la saisine de la Cour en la forme des référés au visa des articles R 516-30 et R 516 -31 du code du travail implique, pour déterminer s'il existe ou non une contestation sérieuse un examen préalable, des éléments soumis à son appréciation ;

Attendu que l'article L112-12, alinéa 2 du Code du travail, interprété au regard de la directive de conseil du 14 janvier 1977 modifiée par celle du 29 juin 1998, s'applique toutes les fois qu'il y a transfert d'une entité économique autonome constituée d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre  et dont l'identité est maintenue, même en l'absence d'un lien de droit entre les employeurs successifs au transfert ;

Attendu que cette règle est d'ordre public et s'impose tant aux salariés qu'aux employeurs ;

Attendu que la reprise par un groupe étranger de la commercialisation de ses propres produits en FRANCE et de la clientèle qui y était attachée constitue un cas d'application de l'article L122-12 du Code du travail ;

Attendu que le groupe A..., groupe étranger, qui avait confié la commercialisation en FRANCE de ses produits de marque "BOMBARDIER" à un importateur, la société EVERSET a régulièrement dénoncé les contrats le liant à l'importateur, préavis contractuel ayant pris fin le 30 septembre 2005 ;

Attendu que le groupe A... a créé à compter du 1er juin une société A... FRANCE dont l'objet social est identique à celui de la société EVERSET, l'activité de la société A... FRANCE étant ainsi définie dans l'extrait KBIS : "promotion, vente et distribution de tous produits récréatifs ou de loisirs et fourniture de toutes prestations de services techniques et commerciales afférentes à ces produits y compris maintenance et service après vente" ;

Attendu que dans un courrier adressé à ses concessionnaires le 22 juin 2005, A... indiquait que l'entité dénommée A... FRANCE "poursuivrait les activités de A... en FRANCE" ;

Attendu que Monsieur Stoffel C... , directeur général de A... FRANCE, indiquait dans une interview accordée au magazine "Hors Bord" : "A compter du 1er octobre 2005, la distribution des produits A... .... va être assurée par A... FRANCE, directement en liaison avec l'usine, que de nombreux articles et communiqués de presse confirmaient que A... à compter du 1er octobre 2005 organiserait directement la distribution auprès de son propre réseau de concessionnaires" ;

Attendu que la direction de A... s'exprimait dans les termes suivants :

- dans le journal "Hors Bord"

"Bombardier "reprend l'importation"... A... a décidé de reprendre en direct la distribution de ses produits en FRANCE, à partir du 1er octobre 2005, en remplacement de la société EVERSET, jusque là importateur officiel dans l'hexagone. A... précise que la livraison, les pièces détachées, le service après vente resteront au même niveau que celui d'aujourd'hui " ;

Attendu que par mail du 22 août 2005, Monsieur Stoffel C..., directeur général de la société A... FRANCE, demandait à Monsieur Pierre LAMOUILLE, président de la société EVERSET :

- l'ensemble des informations relatives à la stratégie commerciale et à la politique tarifaire spécifiques menées par le société EVERSET ;

- des informations des clients par ligne de produits ;

- la liste des concessionnaires participant à un programme spécifique commercial sous forme de fichiers ;

- le détail des programmes de financement offert par EVERSET ;

Attendu qu'au regard de ces éléments, la société A... FRANCE a, contrairement à ses dénégations, bien repris l'activité concédée par le groupe A... à la société EVERSET jusqu'au 30 septembre 2005 ;

Attendu que le fait qu'à partir du 15 octobre le groupe A... ait décidé de modifier l'activité de la société n'est pas opposable aux salariés dont les contrats de travail devaient être repris par D... FRANCE, le 1er octobre 2005 ;

Attendu, par ailleurs, que l'exploitation de la marque "Bombardier" constituait la quasi totalité de l'activité de la société EVERSET ;

Attendu, en conséquence, que les critères pour valider le transfert d'une entité économique autonome sont réunis ;

Attendu que pour autant la société A... FRANCE soutient que l'article L122-12 ne saurait trouver application au motif qu'il refuse son application au cas d'espèce, que la perte d'un marché ne permet pas l'application de l'article L122-12, que la société EVERSET a touché une indemnité, que la société A... a changé l'organisation de la distribution de ses produits, que l'extrait KBIS démontre qu'elle n'a pas la même organisation que la société EVERSET ;

Mais attendu que l'article L122-12 s'applique du seul effet de la loi, que la société EVERSET n'a pas perdu un marché, que la société EVERSET a perçu une indemnité au titre de son préjudice commercial qui a compensé la perte de son activité, que l'organisation de la distribution des produits est identique à celle de la société EVERSET, qu'au jour de sa création la société D... FRANCE avait la même activité que la société EVERSET ;

Attendu que l'obligation de la société A... n'est en conséquence pas sérieusement contestable ;

Attendu que l'article L122-12 alinéa 2 s'applique, sans contestation possible, au cas d'espèce ;

Attendu que le contrat de travail de Monsieur Y... a donc été transféré à la société A... FRANCE qui est devenue son nouvel employeur à compter du 1er octobre 2005, date à laquelle A... FRANCE a repris la commercialisation des produits de la marque "Bombardier" et de la clientèle ancienne qui y était attachée ;

Attendu que la Cour réformant la décision entreprise :

- dit et juge que la société EVERSET n'est plus l'employeur de Monsieur Y... depuis le 1er octobre 2005, date à laquelle le transfert de commercialisation des produits de la marque "Bombardier" a été effectif au profit de la société A... FRANCE ;

- dit et juge que le contrat de travail de Monsieur Y... s'est poursuivi avec la société A... depuis le 1er octobre 2005 ;

- met hors de cause la société EVERSET ;

- dit et juge que seule la société A... FRANCE devait exécuter les obligations découlant du contrat transféré, notamment le paiement des salaires des mois d'octobre, de novembre, décembre 2005 et janvier 2006 à Monsieur Y... ;

- condamne la société A... à rembourser à la société EVERSET les salaires versés par elle à Monsieur Y... en exécution de l'ordonnance prud'homale, charges sociales comprises, ainsi que les frais engagés par la société EVERSET pour faire établir les fiches de paie correspondantes, soit 18 000,60 € ;

Attendu que la Cour déboute la SAS A... FRANCE de ses demandes ;

Attendu que la Cour donne acte à Monsieur Y... de son accord pour restituer les moyens matériels mis à sa disposition dans le cadre de son contrat de travail, de remettre le véhicule de fonction ainsi que l'ordinateur et le téléphone portable en gare ou à l'aéroport de Toulouse où la société EVERSET pourra en prendre possession à son choix, en tant que de besoin le lui ordonne ;

Attendu que la Cour rejette la demande de la société EVERSET tendant à la condamnation de Monsieur Y... à lui verser la somme de 1000 € pour rétention abusive de matériel, alors qu'il est acquis aux débats que l'intéressé avait offert de restituer le matériel par mise à disposition après avoir perçu son salaire de janvier 2006 en exécution de l'ordonnance de référé, offre refusée par la société qui exigeait que le salarié ramène le véhicule au siège à Grenoble alors que l'activité de l'intéressé s'exerçait dans le grand sud ouest :

Attendu que la Cour condamne la société A... FRANCE à payer à Monsieur Y... la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La COUR,

Déclare l'appel régulier en la forme et recevable.

Au fond,

Infirme l'ordonnance rendue le 23 janvier 2006 par la formation de référé du Conseil de Prud'Hommes de Montauban.

Dit et juge que la société EVERSET n'est plus l'employeur de Monsieur Y... depuis le 1er octobre 2005, date à laquelle le transfert de commercialisation des produits de la marque "Bombardier" a été effectif au profit de la société A... FRANCE.

Dit et juge que le contrat de travail de Monsieur Y... s'est poursuivi avec la société A... depuis le 1er octobre 2005.

Met hors de cause la société EVERSET.

Dit et juge que seule la société A... FRANCE devait exécuter les obligations découlant du contrat transféré, notamment le paiement des salaires des mois d'octobre, de novembre, décembre 2005 et janvier 2006 à Monsieur Y....

Condamne la société A... à rembourser à la société EVERSET les salaires versés par elle à Monsieur Y... en exécution de l'ordonnance prud'homale, charges sociales comprises, ainsi que les frais engagés par la société EVERSET pour faire établir les fiches de paie correspondantes, soit 18 000,60 €.

Déboute la SAS A... FRANCE de ses demandes.

Donne acte à Monsieur Y... de son accord pour restituer les moyens matériels mis à sa disposition dans le cadre de son contrat de travail, de remettre le véhicule de fonction ainsi que l'ordinateur et le téléphone portable en gare ou à l'aéroport de Toulouse où la société EVERSET pourra en prendre possession à son choix, en tant que de besoin le lui ordonne.

Rejette la demande de la société EVERSET tendant à la condamnation de Monsieur Y... à lui verser la somme de 1000 € pour rétention abusive de matériel.

Condamne la société A... FRANCE à payer à Monsieur Y... la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Condamne la société A... FRANCE aux entiers dépens.

Le présent arrêt a été signé par M. R. MULLER, président et par Mme D. FOLTYN-NIDECKER, greffier.

Le greffier Le président

Dominique FOLTYN-NIDECKER Raymond MULLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0036
Numéro d'arrêt : 06/00618
Date de la décision : 23/08/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Montauban, 23 janvier 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2007-08-23;06.00618 ?
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