Sur le moyen relevé d'office, après l'avertissement prévu à l'article 1015 du nouveau Code de procédure civile :
Vu les articles 207, alinéa 2, 207-1 et 212 du Code civil ;
Attendu que lorsque le créancier a lui-même manqué gravement à ses obligations envers le débiteur, le juge peut décharger celui-ci de tout ou partie de la dette alimentaire ; que, cependant, cette faculté ne s'étend pas, sauf l'exception prévue par l'article 303, alinéa 2, du Code civil, au devoir de secours entre époux, dont l'obligation alimentaire pesant sur la succession de l'époux prédécédé n'est que la continuation ;
Attendu que Jules X... est décédé le 8 novembre 1988 en laissant pour héritier sa fille, née d'un premier mariage, Mme Y..., et l'Association pour la recherche contre le cancer (ARC) instituée légataire universel par un testament du 5 novembre précédent ; qu'Aline X..., veuve de Jules X..., a saisi le tribunal d'instance d'une demande de pension alimentaire, fondée sur l'article 207-1 du Code civil ; que l'ARC et Mme Y... se sont prévalus des dispositions de l'article 207, alinéa 2, du Code civil en faisant état du comportement de Mme X... au cours des dernières années de la vie conjugale et, en particulier, dans les jours ayant précédé le suicide de Jules X... ; qu'après avoir relevé que l'attitude de Mme X... justifiait une décharge partielle de l'obligation alimentaire, le Tribunal a fixé à 1 200 francs par mois la pension due par l'ARC en fonction de sa part dans l'actif successoral ;
Attendu que, pour infirmer cette décision et rejeter les prétentions de Mme X..., l'arrêt attaqué énonce notamment que le départ provisoire du domicile conjugal de Mme X..., en 1987, la scène violente qui a opposé les époux en août 1988, le fait que le mari, atteint d'un cancer, n'ait pas bénéficié des soins et attentions que devait lui prodiguer son épouse et la fin tragique de Jules X..., constituent autant d'éléments démontrant que Mme X... avait manqué gravement à ses obligations ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les fautes imputées à Mme X... ne pouvaient priver celle-ci de son droit à aliments, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 février 1992, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.