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16/12/2002 | FRANCE | N°01-99154

France | France, Cour de cassation, Commission revision, 16 décembre 2002, 01-99154


IRRECEVABILITE de la demande présentée le 2 novembre 2001 par X... Jean-Marc et tendant à la révision de l'arrêt de la cour d'assises de la Seine-Maritime en date du 25 mai 1997, qui, pour empoisonnement avec préméditation, l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle.

LA COMMISSION DE REVISION,

Vu la demande susvisée ;

Vu les articles 622 et suivants du Code de procédure pénale ;

Jean-Marc X... a été condamné par la cour d'assises de la Seine-Maritime, le 25 mai 1997, à 20 ans de réclusion criminelle, pour empoisonnement avec préméditation comm

is le 11 juin 1994 sur la personne d'Emilie Y... ;

Le pourvoi qu'il a formé contre cet arr...

IRRECEVABILITE de la demande présentée le 2 novembre 2001 par X... Jean-Marc et tendant à la révision de l'arrêt de la cour d'assises de la Seine-Maritime en date du 25 mai 1997, qui, pour empoisonnement avec préméditation, l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle.

LA COMMISSION DE REVISION,

Vu la demande susvisée ;

Vu les articles 622 et suivants du Code de procédure pénale ;

Jean-Marc X... a été condamné par la cour d'assises de la Seine-Maritime, le 25 mai 1997, à 20 ans de réclusion criminelle, pour empoisonnement avec préméditation commis le 11 juin 1994 sur la personne d'Emilie Y... ;

Le pourvoi qu'il a formé contre cet arrêt a été rejeté par la Cour de cassation le 21 octobre 1998 ;

Par requête formée le 2 novembre 2001, Jean-Marc X... a saisi la commission de révision d'une demande aux fins de saisir la cour de révision et d'ordonner la suspension de l'exécution de la condamnation ;

A l'appui de cette requête, il produit un document rédigé à la demande et pour le compte de Jean-Marc X..., par Robert Rosset, expert agréé par la Cour de cassation ;

Les éléments apportés par cette consultation sont considérés par le demandeur comme inconnus de la juridiction au jour du procès, de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné ;

Rappel des faits et de la procédure :

Le samedi 11 juin 1994, Emilie Y... âgée, de neuf ans, qui avait été confiée pour la fin de la semaine par ses parents aux époux Z..., à Gruchet-le-Valasse, devait décéder vers 22 h 30, à l'hôpital général du Havre où elle avait été transportée en urgence, à la suite d'un malaise survenu après l'absorption, vers 20 heures, d'une cuillerée de sirop de Josacine.

Très rapidement, les investigations permettaient de constater que la fillette avait été empoisonnée par du cyanure et que le médicament qu'elle avait bu contenait ce produit toxique.

Une information judiciaire était ouverte le 16 juin 1994 pour empoisonnement.

Emilie Y..., atteinte de bronchite, était sous antibiotiques depuis le mercredi 8 juin, le médecin ayant notamment prescrit deux flacons de Josacine.

Le 11 juin, sa mère, Corinne Y..., après avoir jeté le premier flacon, avait préparé le second flacon qu'elle rangeait dans les affaires de l'enfant avant de la conduire au domicile de la famille Z.... Le médicament était posé sur la table de la salle à manger.

De nombreuses hypothèses furent envisagées pour tenter d'expliquer la présence de cyanure en quantité importante et mortelle dans le flacon de Josacine :

l'éventualité d'une contamination dans le cycle de fabrication et de conditionnement du médicament,

un acte de malveillance au sein de l'entreprise,

la contamination par un produit domestique contenant du cyanure,

un acte de vengeance,

enfin, une erreur sur la victime. Cette dernière hypothèse était retenue, après vérification et élimination des autres, par les enquêteurs qui procédaient à des investigations dans l'entourage des familles Y... et Z...

Ils apprenaient ainsi qu'une relation s'était nouée entre Sylvie Z... et Jean-Marc X..., lequel était deuxième adjoint au maire et dirigeait la société Imagerie thermique industrielle (ITI), spécialisée dans la thermo-photographie industrielle.

Les deux intéressés se rencontraient à la faveur de la proximité entre la mairie de Gruchet-le-Valasse et le logement contigu des époux Z... Selon l'information, après une période de trouble au sein des deux couples, Sylvie Z... avait décidé de rompre cette relation, alors que Jean-Marc X... lui demeurait très attaché. Plusieurs incidents étaient survenus au cours des premiers mois de l'année 1994 au cours desquels Jean-Marc X... avait importuné tant Jean-Michel Z... que Sylvie Z... dans le but de provoquer leur séparation.

A ce stade des investigations, l'interception d'une conversation téléphonique entre Jean-Marc X... et un homme prénommé Alain, portant sur un produit que Jean-Marc X... disait avoir utilisé en petite quantité, puis jeté, intriguait les enquêteurs.

Placé en garde à vue, Jean-Marc X... s'expliquait sur ses relations avec Sylvie Z..., son emploi du temps du samedi 11 juin et son passage à la mairie ce jour-là. Interrogé sur la conversation téléphonique interceptée, après en avoir nié la teneur, il déclarait, dans un premier temps, qu'elle concernait un produit corrosif avec lequel il avait fait des tests sur des morceaux de métal et qu'il avait jeté dans un égout. Les enquêteurs identifiaient son correspondant, Alain A..., qui révélait avoir approvisionné Jean-Marc X... en cyanure de sodium acheté à la société Prolabo. Alain A... précisait, facture à l'appui, qu'il avait acheté un kilo de cyanure le 6 mai 1994 et que Jean-Marc X... était passé prendre le produit, chez lui, à Nanterre, le 9 mai.

Après de longues dénégations, Jean-Marc X... finissait par reconnaître cet achat et expliquait ses mensonges par sa crainte d'être inquiété dans le cadre de la mort d'Emilie Y....

Il indiquait qu'il avait fait des essais de traitement de métaux avec le cyanure ainsi acheté et que, vers le 16 ou 17 juin, il avait jeté le produit dans la Seine, et qu'il s'était également débarrassé des morceaux de ferraille testés et des documents sur le cyanure.

Ainsi, faute de pouvoir procéder à des comparaisons directes entre le cyanure acheté par Jean-Marc X... et celui trouvé dans le flacon empoisonné, les enquêteurs durent procéder à de nombreuses investigations à l'effet de rechercher d'où pouvait provenir le cyanure du flacon.

De même, le juge d'instruction devait ordonner de nombreuses expertises dans le but de rechercher s'il y avait une communauté d'origine entre le cyanure commercialisé par la société Prolabo à l'époque de l'achat par Jean-Marc X... et le cyanure trouvé dans la bouteille de Josacine.

Selon les termes de l'arrêt de la chambre d'accusation du 19 décembre 1996, la mise en accusation et le renvoi devant la cour d'assises de Jean-Marc X... étaient fondés sur les charges suivantes :

" Jean-Marc X... aimait véritablement Sylvie Z... avec laquelle il souhaitait refaire sa vie, au point de faire la démarche incongrue de demander à son mari de la quitter, attestant ainsi de sa volonté de le séparer ou de l'éloigner d'elle, ce qui constituait un mobile puissant.

Après que Sylvie Z... lui ait signifié la fin de leur relation, il avait encore au petit matin guetté le départ de son mari pour la rejoindre comme il le faisait auparavant.

Il s'était procuré du cyanure de sodium dans des conditions quasiment rocambolesques et l'avait dissimulé à ses employés, y compris au jeune ingénieur D..., avec lequel pourtant il s'en était entretenu plusieurs mois plus tôt, et il l'avait même caché à son épouse à laquelle il avait pourtant demandé de faire des recherches sur le sujet.

Il s'était débarrassé de ce produit et avait même, contre toute évidence, traité Alain A... de menteur pour éviter d'être confondu sur ce point.

Ce cyanure de sodium avait été acheté en conditionnement d'un kilogramme à la société Prolabo dont les deux seuls lots conditionnés ainsi présentaient seuls trois impuretés caractéristiques retrouvées à un taux de concentration comparable dans le cyanure ayant empoisonné le sirop de Josacine.

Le cyanure le plus proche de celui ajouté à la Josacine était celui qui avait été conditionné et mis en vente par Prolabo peu de temps avant que Jean-Marc X... en achète.

Un flacon de 60 millilitres saisi dans son entreprise avait probablement contenu du sel de cyanure et ainsi pu servir à en transporter et à en transvaser commodément.

L'eau qui avait servi à mettre en solution le cyanure qui avait empoisonné la Josacine était compatible avec celle qui avait été prélevée au robinet d'eau des toilettes de son entreprise.

Jean-Marc X... ignorait le samedi 11 juin 1994 la venue d'Emilie Y..., et, Sylvie Z... lui ayant dit vers 11 heures du matin que son mari avait été très malade pendant la nuit au point de devoir faire venir un médecin, il était fondé à croire que le médicament non rangé qui se trouvait sur la table de la salle à manger était destiné à Jean-Michel Z..., ce qui explique l'erreur sur la personne.

Il avait été aperçu à deux reprises par les époux B... sortant du domicile des Z... par la porte arrière dont il avait la clé et, si ce témoignage pouvait être inexact en temps, il était rendu crédible par ses circonstances et les éléments qui le précédaient.

Enfin, lui seul avait les moyens et la raison de porter ainsi la mort au domicile des époux Z...

En outre, Jean-Marc X... a lui-même contribué à aggraver les charges existantes, en faisant des déclarations inexactes ou approximatives, notamment sur ses relations avec Sylvie Z... qu'il a cherché à minimiser, et sur son emploi du temps de la journée du 11 juin 1994, et en ne s'expliquant pas clairement sur les raisons pour lesquelles il lui avait été nécessaire de se procurer aussi rapidement du cyanure de sodium à usage expérimental, alors qu'il n'avait à l'époque aucune compétence personnelle ni documentation sur les procédés de cyanurisation des métaux.

Dans ces conditions, l'ensemble des éléments d'appréciation réunis suffit à justifier, en dépit des dénégations persistantes de Jean-Marc X..., sa mise en accusation et son renvoi devant la cour d'assises du département de la Seine-Maritime, la qualification des faits qui a été initialement adoptée devant être conservée.

" La requête : Dans sa requête en révision, Jean-Marc X... soutient que les expertises ont pesé de tout leur poids auprès des juges et des jurés et ont été déterminantes dans la déclaration de culpabilité prononcée à son encontre ; il produit un document établi, à sa demande, par Robert Rosset, ingénieur ESPCI, docteur en sciences, intitulé : " Les rapports d'expertise de MM. Michel Lhermitte, Roland Molinaro, et Gérard Verger Observations et commentaires Un autre regard sur l'empoisonnement par le cyanure de sodium d'Emilie Y... " ;

Ce texte s'attache, sur cent-vingt-sept pages, à contester l'ensemble des expertises judiciaires tant dans leurs constatations que leurs conclusions, et à démontrer que le cyanure de sodium qui a empoisonné Emilie Y... ne pouvait pas être celui, d'origine Prolabo, dont a disposé Jean-Marc X... ;

Dans sa note de synthèse, Robert Rosset conclut :

" Dans la mesure où les rapports des experts Lhermitte, Verger et Molinaro ont pesé d'un certain poids (que nous ne sommes pas en mesure d'apprécier) dans la présomption de culpabilité de M. Jean-Marc X..., nous disons que ceux-ci doivent être écartés car non probants scientifiquement " ;

" Si l'empoisonnement par le cyanure de sodium d'Emilie Y... ne fait pas de doute, nous pensons qu'elle a été victime d'un ajout, à la Josacine, d'un cyanure de sodium à l'état solide et fortement dégradé. L'hypothèse la plus probable est l'utilisation, par l'assassin, d'un cyanure de sodium très ancien, fortement dégradé mais contenant suffisamment de cyanure de sodium pour avoir entraîné la mort d'Emilie Y... " ;

Les critiques de M. Rosset portent sur les points suivants :

1. Les explications des experts quant à l'état de dégradation du cyanure trouvé dans le flacon, alors que Jean-Marc X... aurait acheté du cyanure " frais " (= non dégradé), ne seraient pas satisfaisantes ;

Il est reproché à M. Molinaro d'avoir évoqué, pour expliquer cette dégradation, l'hypothèse du chauffage du produit par une exposition prolongée dans la boîte à gants de la voiture de Jean-Marc X..., ce qui serait impossible compte tenu des relevés de températures produits par le requérant ;

2. M. Rosset conteste les expertises de M. Molinaro aux termes desquelles le cyanure aurait été introduit dans le flacon en solution liquide ;

Selon lui, le produit aurait été ajouté en poudre, ce qui prouverait, étant donné son état de dégradation, qu'il ne pouvait s'agir du cyanure récemment acheté par Jean-Marc X... ;

3. Selon M. Rosset, les experts n'auraient pas prouvé que l'eau ajoutée au cyanure aurait une composition comparable à celle de l'eau de ville provenant de la société ITI car ils se seraient fondés sur la teneur en zinc sans avoir pris en compte la proportion de ce métal dans la Josacine avant dilution ;

4. M. Rosset critique enfin l'analyse comparative des impuretés constatées, d'une part, dans le flacon empoisonné, d'autre part, dans les prélèvements effectués chez Prolabo. Il affirme que ces analyses ne seraient pas fiables, au motif que certaines impuretés n'ont pas été prises en compte ;

Et l'auteur de conclure : " Si le cyanure de sodium peut provenir des lots numéro B062 et A349 de Prolabo, il est, beaucoup plus certainement d'une autre origine, évidemment inconnue " ;

Les " commentaires " de M. Rosset, ainsi sollicités par la défense de Jean-Marc X..., ont été communiqués au conseil des époux Y... qui ont, eux-mêmes, demandé l'avis d'un autre spécialiste, Jacques Storck, professeur agrégé du Val-de-Grâce (chaire de chimie appliquée aux expertises dans l'armée), membre honoraire de l'Académie nationale de pharmacie ;

Ce spécialiste s'est attaché à démentir, point par point, les observations de M. Rosset dans un " avis technique " donné le 29 janvier 2002 ;

Il indique, dans sa note du 24 mai 2002, que seuls les rapports d'expertises judiciaires ont servi de base à ses observations ainsi qu'à celles de M. Rosset et que ni l'un ni l'autre n'ont pu expérimenter en laboratoire les scellés de cette affaire ;

L'instruction de la requête :

Les experts judiciaires ont été entendus par un membre de la Commission et ont affirmé que tous les points invoqués dans la requête ont déjà été débattus ;

Le contenu des dépositions des témoins et des experts n'étant pas mentionné au procès-verbal des débats, conformément à l'article 379 du Code de procédure pénale, et, leur enregistrement sonore n'ayant pas été ordonné en application de l'article 308 du même Code, la Commission a fait produire les principaux articles de presse écrite concernant l'audition des experts devant la cour d'assises ;

Dans ses observations, Monsieur l'avocat général considère " qu'il convient de se demander si, au niveau du principe, peut être admis comme fait nouveau une expertise effectuée à la demande du condamné et qui apporte une critique aux expertises judiciaires réalisées au cours de l'instruction et que la réponse apparaît pouvoir être positive seulement lorsque la nouvelle expertise :

établit de façon incontestable le caractère erroné d'une démonstration,

apporte à l'égard d'un élément décisif, grâce par exemple au progrès de la science, une preuve positive ou négative impossible à l'époque du procès,

et que cette démonstration, cet élément ou son ignorance a joué un rôle fondamental dans la déclaration de culpabilité ".

Décision :

Sur la requête en révision motivée par la critique des expertises figurant aux dossiers :

Attendu que les expertises judiciaires sont soumises à la discussion des parties pendant la procédure d'instruction ainsi que pendant les débats devant la cour d'assises ;

Que les parties ont le droit de demander des contre-expertises ou des expertises complémentaires, ainsi que des avis privés et de les transmettre tant au magistrat instructeur qu'à la cour d'assises ;

Attendu qu'une expertise officieuse réalisée à la demande du condamné ne saurait entrer dans les prévisions de l'article 622.4° du Code de procédure pénale que si elle ne constitue pas seulement une appréciation différente, voire critique, d'un rapport expertal, mais si elle apporte un élément nouveau que les experts judiciaires n'avaient pu ou su découvrir et qui n'était pas apparu lors du procès ;

Attendu qu'en l'espèce, il résulte de l'analyse du dossier ainsi que de la relation des audiences figurant dans les articles de presse recueillis, que les critiques invoquées par M. Rosset ont été débattues tout au long de l'instruction et devant la cour d'assises ;

Qu'ainsi, la cause de la dégradation du cyanure trouvé dans le flacon de Josacine a été longuement discutée, ainsi que l'hypothèse, parmi d'autres, selon laquelle le produit a pu rester un certain temps dans l'habitacle d'une voiture ; que, selon les experts, cette dégradation a pu également se poursuivre entre la date de l'introduction du produit dans le flacon et celle de son analyse ; qu'à ce sujet, un quotidien relève, le 22 mai 1997 : " la toxicologie n'apporte que des hypothèses " ;

Qu'il en est de même du point de savoir si le cyanure a été introduit dans le flacon à l'état solide ou liquide, ainsi que de l'analyse comparative des impuretés trouvées dans le flacon empoisonné et dans les prélèvements de cyanure provenant de différentes entreprises ;

Qu'enfin, la critique de la méthodologie des expertises à l'effet de tenter de déterminer l'origine de l'eau utilisée pour dissoudre le cyanure est également inopérante dès lors que, d'une part, ces analyses qui ont fait l'objet d'un complément d'expertise, ont été longuement discutées et que, d'autre part, pour conclure qu'il s'agissait vraisemblablement d'une eau de ville et non d'une eau minérale, en raison de la présence importante de zinc dans le flacon empoisonné, l'expert précise avoir procédé au dosage de ce métal dans des flacons de Josacine provenant du même lot que le flacon empoisonné ;

Attendu que les conseils de Jean-Marc X... ont fait usage, tout au long de la procédure, de leur droit de contester les expertises, en déposant des notes figurant au dossier, en demandant des contre-expertises et en faisant appel à des spécialistes de leur choix, notamment MM. Mahuzier et Fraisse, qui ont été entendus par la cour d'assises ;

Attendu, en conséquence, que la requête, fondée sur la simple critique de rapports d'expertises, ne présentant aucun caractère de nouveauté, alors, au surplus, que les expertises n'étaient pas les seuls éléments à charge retenus contre le condamné, ne peut qu'être déclarée irrecevable ;

Sur la note déposée le 25 novembre 2002 par un avocat de Jean-Marc X... :

Attendu que cette note, déposée le jour de l'audience, fait état d'un article de presse, publié la veille et écrit par un journaliste qui aurait consulté le dossier d'instruction ;

Que le requérant se réfère à cet article, intitulé " Contre enquête à l'appui de la révision du procès de la Josacine ", pour affirmer que, dans une conversation téléphonique enregistrée le 16 juin 1994, " Denis C... déclarait que Jean-Michel Z... avait mis du produit dans la Josacine, ce que ce dernier ne contestait pas " ; que, selon lui, cette écoute n'aurait jamais été exploitée ni par la gendarmerie ni par le juge d'instruction ni par la défense ;

Qu'il ajoute que, selon le journaliste :

un courrier reçu au lendemain de la condamnation ferait état de ce que " la femme de Denis C... se serait inquiétée le lendemain du drame du fait que son mari aurait pu sortir du cyanure de l'usine ",

Sylvie Z... aurait déclaré à ce journaliste " qu'avant le décès d'Emilie, Denis C... aurait eu l'intention de sortir du cyanure de son entreprise et qu'il aurait demandé à son ex-mari s'il était d'accord pour le garder " ;

Mais attendu qu'il résulte de l'examen du dossier les éléments suivants :

Dès le décès d'Emilie Y... survenu le 11 juin 1994, les investigations se sont portées sur le flacon de Josacine, dont elle avait absorbé une cuillerée vers 20 heures, et sur l'entourage de la victime ; c'est ainsi que, dès le 16 juin 1994, lorsqu'il a été établi que la victime avait été empoisonnée par du cyanure et que ce poison avait été décelé dans le flacon, une information était ouverte et le juge d'instruction ordonnait la surveillance de la ligne téléphonique d'un certain nombre de personnes considérées comme suspectes, et, notamment, de celle des époux Z... et des époux C... ;

En effet, la fillette avait absorbé le produit mortel au domicile des premiers, quant à Denis C..., qui est un ami des familles Y... et Z..., il avait rapporté aux médecins de l'hôpital du Havre où Emilie Y... est décédée, le flacon de Josacine suspect ;

C'est ainsi que figure au dossier la retranscription de nombreuses conversations téléphoniques, notamment, de celles du 16 juin 1994 entre Jean-Michel Z... et Denis C... (cotes D. 1343 et D. 1344), dont le journaliste, cité dans la requête, a extrait les phrases suivantes :

" Ils font leur boulot correctement, hein, c'est bien ce que je pensais ! " (Jean-Michel Z...) ;

" C'est hallucinant... mais bon, tu vois que t'étais pas coupable ! " (Denis C...) ;

" Il faut qu'on sache, hein ! - Ouais, ok ! - Il faut qu'on sache ! - O.K. ! - Hein ! - Oui ! - Parce que t'à l'heure, tu vas passer heu, à la télé, toi, avec ton produit qu't'a mis dans la Josacine ! - Ouais, ouais, O.K. ! " ; (Denis C...) ;

Le lendemain de l'enregistrement de ces conversations, Denis C... et Jean-Michel Z... ont été placés en garde à vue et longuement entendus par les enquêteurs ; Denis C... a dû s'expliquer sur le cyanure qu'il aurait pu sortir de l'entreprise Oril où il travaille, sur son intervention au domicile de Jean-Michel Z... dans la soirée du 11 juin et sur le comportement de ce dernier ce soir-là ;

De même, des perquisitions ont été faites, tant au domicile des intéressés que sur leur lieu de travail, à l'effet de découvrir tout produit susceptible de contenir du cyanure ;

Enfin, les analyses comparatives demandées dès le début de l'enquête n'ont pas établi de concordance entre le cyanure retrouvé dans le flacon de Josacine et le cyanure provenant de l'entreprise Oril ;

Attendu, en conséquence, qu'il apparaît que, contrairement aux allégations contenues dans la requête, les écoutes invoquées ont été exploitées par les enquêteurs, même si ceux-ci n'en ont pas révélé l'existence lors de l'audition des intéressés ;

Attendu, au surplus, que ces écoutes figurant au dossier ont pu être analysées par toutes les parties à la procédure, pendant l'instruction et les débats devant la cour d'assises ;

Attendu enfin que, le fait que Denis C... ait pu se procurer du cyanure et en fournir à Jean-Michel Z... a été examiné par les enquêteurs dans les termes suivants, selon leur procès-verbal de synthèse (D. 1745) :

C..., Denis : ami des Z..., il les fréquente régulièrement et sera présent le soir des faits 11 juin 1994 à leur domicile après le malaise d'Emilie. Il a été prévenu par téléphone et s'est rendu sur place. Il sait Z... Jean-Michel, maladif et dépressif. Il peut avoir du cyanure facilement et il connaît bien le logement de Z...,

" Daniel dit Andrieu, Lydie épouse C... : elle peut avoir du cyanure par l'intermédiaire de son mari " ;

Attendu en conséquence, que la requête présentée le 2 novembre 2001, et la requête complémentaire déposée le 25 novembre 2002 ne peuvent qu'être déclarées irrecevables ;

Par ces motifs :

DECLARE IRRECEVABLES les requêtes présentées par Jean-Marc X...


Synthèse
Formation : Commission revision
Numéro d'arrêt : 01-99154
Date de la décision : 16/12/2002
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Analyses

REVISION - Commission de révision - Fait nouveau ou élément inconnu au jour du procès - Nécessité.

Doit être déclarée irrecevable, comme n'entrant pas dans les prévisions de l'article 622.4° du Code de procédure pénale, la demande qui invoque des éléments connus de la juridiction de condamnation.


Références :

Code de procédure pénale 622.4°

Décision attaquée : Cour d'assises de la Seine-Maritime, 25 mai 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Commission revision, 16 déc. 2002, pourvoi n°01-99154, Bull. civ. criminel 2002 COMREV N° 2 p. 3
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles criminel 2002 COMREV N° 2 p. 3

Composition du Tribunal
Président : Président : Mme Anzani.
Avocat général : Avocat général : M. Viricelle.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Anzani.
Avocat(s) : Avocats : Me Szpiner, Me Rosano, Me Trinité-Confiant, Me de Caunes, avocats au barreau de Paris.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.99154
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