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18/05/2011 | FRANCE | N°10-30776

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 18 mai 2011, 10-30776


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 78-2 du code de procédure pénale dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011, ensemble les articles 67 § 2 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et 20 et 21 du règlement (CE) n° 562/ 2006 du parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure que M. X..., de nationalité kosov

are, en situation irrégulière en France, auquel avait été précédemment notifiée une ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 78-2 du code de procédure pénale dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011, ensemble les articles 67 § 2 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et 20 et 21 du règlement (CE) n° 562/ 2006 du parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure que M. X..., de nationalité kosovare, en situation irrégulière en France, auquel avait été précédemment notifiée une obligation de quitter le territoire français, a été interpellé le 6 octobre 2009, dans le hall accessible au public de la gare ferroviaire de Toulouse ouverte au trafic international ; que le même jour le préfet de la Haute-Garonne lui a notifié une décision de maintien en rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ; qu'un juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de la rétention de M. X... pour une durée maximale de 15 jours ;

Attendu que, pour confirmer cette décision, l'ordonnance relève que, dans les zones accessibles au public des gares ferroviaires ouvertes au trafic international et désignées par arrêté, l'identité de toute personne peut être contrôlée en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi et que, en conséquence, le contrôle d'identité est régulier ;

Attendu, cependant, que la Cour de justice de l'Union européenne a, par un arrêt du 22 juin 2010 (n° C-188/ 10 et C-189/ 10), dit pour droit que l'article 67, paragraphe 2, TFUE ainsi que les articles 20 et 21 du règlement (CE) n° 562/ 2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 s'opposaient à une législation nationale conférant aux autorités de police de l'Etat membre concerné, la compétence de contrôler, uniquement dans une zone définie, l'identité de toute personne, indépendamment du comportement de celle-ci et de circonstances particulières établissant un risque d'atteinte à l'ordre public, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et des documents prévus par la loi, sans prévoir l'encadrement nécessaire de cette compétence garantissant que l'exercice pratique de ladite compétence ne puisse revêtir un effet équivalent à celui des vérifications aux frontières ; qu'en statuant comme il l'a fait, alors que l'article 78-2, alinéa 4, du code de procédure pénale qui n'est assorti d'aucune disposition offrant une telle garantie ne pouvait fonder la régularité de la procédure, le premier président a violé les textes susvisés ;

Vu l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;

Et attendu que les délais légaux de rétention étant expirés, il ne reste plus rien à juger ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 12 octobre 2009, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Toulouse ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Bertrand, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR confirmé la décision rendue par le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Toulouse du 8 octobre 2009, ordonnant que Monsieur Fitim X... soit maintenu dans les locaux du Centre de rétention administrative ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

AUX MOTIFS QUE sur l'application des dispositions de l'article 78-2, il résulte des pièces de la procédure que Monsieur X... a été contrôlé le 6 octobre 2009, à 10 heures 50 dans le hall de la gare Matabiau à Toulouse, gare ferroviaire ouverte au public et au trafic international, et visée dans l'arrêté interministériel du 5 novembre 2008 ; qu'interpellé, Monsieur X... indiquait être dépourvu de document d'identité ; qu'il était placé en garde à vue pour délit flagrant de séjour irrégulier ; que dans les zones accessibles au public des gares ferroviaires au trafic international et désignées par arrêté, l'identité de toute personne peut être contrôlée en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi ; qu'en conséquence, le contrôle d'identité est régulier ;

ALORS, d'une part, QUE l'article 78-2 du Code de procédure pénale n'autorise les contrôles d'identité que pour prévenir une atteinte à l'ordre public, notamment une atteinte à la sécurité des personnes et des biens ; qu'en affirmant que le contrôle d'identité subi par Monsieur X... était régulier, sans constater que cette mesure répondait à la finalité susvisée, le délégué du premier président a violé l'article 78-2, alinéa 4, du Code de procédure pénale, l'article 67, paragraphe 2, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et les articles 20 et 21 du règlement (CE) n° 562/ 2006 du Parlement européen et du Consei l, du 15 mars 2006 ;

ALORS, d'autre part, QU'en affirmant que le contrôle d'identité subi par Monsieur X... était régulier, sans rechercher si le procès-verbal d'interpellation mentionnait l'existence de circonstances particulières permettant de s'assurer que l'intéressé avait commis ou tenté de commettre une infraction ou que son comportement aurait été de nature à porter atteinte à l'ordre public, le délégué du premier président a privé sa décision de base légale au regard de l'article 78-2, alinéa 4, du Code de procédure pénale, de l'article 67, paragraphe 2, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et des articles 20 et 21 du règlement (CE) n° 562/ 2006 du Parlement européen et du Consei l, du 15 mars 2006.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR confirmé la décision rendue par le juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Toulouse du 8 octobre 2009, ordonnant que Monsieur Fitim X... soit maintenu dans les locaux du Centre de rétention administrative ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les diligences du préfet, selon les dispositions de l'article R. 552-3 : « à peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée, signée, et accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre … » ; qu'en l'espèce, la requête en date du 7 octobre 2009 du préfet de la Haute-Garonne répond aux dispositions précitées en ce qu'elle vise l'absence de moyens de transport immédiat et le recours contentieux contre l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; qu'aucune disposition du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile n'exige que l'administration justifie des démarches qu'elle a effectuées pour la reconduite à la frontière de la personne retenue, à ce stade de la procédure ; qu'à titre superfétatoire, la préfecture produit un échange de mails selon lesquelles les autorités Kosovares ne s'opposeraient pas à un retour de Monsieur X... ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la préfecture de la Haute-Garonne justifie de ses diligences, puisqu'il est prouvé par document daté du 20 juillet 2009 que Monsieur X... Fitim est reconnu comme originaire du Kosovo et que les autorités kosovares ne s'opposent pas à sa reconduite à la frontière ;

ALORS, d'une part, QUE le préfet doit justifier des diligences qui lui incombent pour exécuter la mesure d'éloignement ; qu'en affirmant « qu'aucune disposition du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile n'exige que l'administration justifie des démarches qu'elle a effectuée pour la reconduite à la frontière de la personne retenue, à ce stade de la procédure » le délégué du premier président a violé les articles L. 552-1, L. 552-9 et R. 552-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

ALORS, d'autre part, QU'en affirmant, « à titre superfétatoire », que le préfet justifiait des diligences mises en oeuvre en produisant un échange de « mails selon lesquelles les autorités Kosovares ne s'opposeraient pas à un retour de Monsieur X... » quand ces mails étaient datés du 20 juillet 2009 et qu'ils étaient donc relatifs à une autre procédure que celle qui était en cause, qui a débuté le 6 octobre 2009, le délégué du premier président s'est déterminé par une motivation inopérante et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L. 552-1, L. 552-9 et R. 552-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-30776
Date de la décision : 18/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

ETRANGER - Mesures d'éloignement - Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire - Procédure - Nullité - Cas - Nullité de la procédure judiciaire préalable - Contrôle d'identité dans les zones accessibles au public des ports, aéroports et gares ferroviaires ou routières ouverts au trafic international - Contrôle irrégulier en raison de son fondement

CONTROLE D'IDENTITE - Contrôle de police - Contrôle dans les zones accessibles au public des ports, aéroports et gares ferroviaires ou routières ouverts au trafic international - Contrôle irrégulier en raison de son fondement

Les articles 67 § 2 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), 20 et 21 du Règlement ( CE ) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 s'opposent à une législation nationale conférant aux autorités de police de l'Etat membre concerné la compétence de contrôler, uniquement dans une zone définie, l'identité de toute personne, indépendamment de son comportement et de circonstances particulières établissant un risque d'atteinte à l'ordre public, sans prévoir l'encadrement nécessaire de cette compétence garantissant que son exercice pratique ne puisse revêtir un effet équivalent à celui des vérifications aux frontières. L'article 78-2, alinéa 4, du code de procédure pénale dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 n'est assorti d'aucune disposition offrant une telle garantie


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 12 octobre 2009

Sur la régularité du contrôle d'identité sur le fondement de l'article 78-2, alinéa 4, du code de procédure pénale, à rapprocher :1re Civ., 23 février 2011, pourvoi n° 09-70462, Bull. 2011, I, n° 35 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 18 mai. 2011, pourvoi n°10-30776, Bull. civ. 2011, I, n° 92
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, I, n° 92

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: M. Falcone
Avocat(s) : Me Bertrand

Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.30776
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