La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2013 | FRANCE | N°12-14396

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 mars 2013, 12-14396


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud-Est de ce qu'elle se désiste de la première branche du moyen unique de cassation ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 10 du décret n° 65-742 du 2 septembre 1965 relatif à l'application aux travailleurs salariés des dispositions de la loi n° 64-1330 du 26 décembre 1964 portant prise en charge et revalorisation des droits et avantages sociaux consentis à des Français ayant rési

dé en Algérie ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui a fait par ail...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud-Est de ce qu'elle se désiste de la première branche du moyen unique de cassation ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 10 du décret n° 65-742 du 2 septembre 1965 relatif à l'application aux travailleurs salariés des dispositions de la loi n° 64-1330 du 26 décembre 1964 portant prise en charge et revalorisation des droits et avantages sociaux consentis à des Français ayant résidé en Algérie ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui a fait par ailleurs liquider ses droits à une pension de vieillesse au titre du régime général à effet du 1er juillet 1996, a sollicité, le 29 septembre 1995, le rachat de périodes de cotisations comprises entre le 1er octobre 1959 et le 31 décembre 1963 sur le fondement de la loi n° 85-1274 du 4 décembre 1958 auprès de la caisse régionale d'assurance maladie du Sud-Est, devenue la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud-Est (la caisse) ; qu'ayant admis l'intéressé au bénéfice du rachat, celle-ci a cependant annulé, le 31 octobre 2001, sa décision faute du paiement des cotisations de rachat, annulation confirmée par la commission de recours amiable dont M. X... n'a pas contesté la décision ; que ce dernier a demandé ensuite, le 8 décembre 2003, la validation en application des dispositions de la loi du 26 décembre 1964 de périodes d'activité accomplies en Algérie de 1958 à 1963 ; que la caisse a fait droit à sa demande et révisé, à effet du 1er janvier 2004, les bases de liquidation de sa pension ; que souhaitant obtenir le bénéfice de la révision à effet du 1er juillet 1996, M. X... a saisi une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que, pour fixer à cette date l'effet de la pension révisée de M. X..., l'arrêt énonce que l'article 2 du décret n° 65-742 du 2 septembre 1965 dispose que les périodes validées en application de la loi n° 64-1330 du 26 décembre 1964 ouvrent droit aux avantages de vieillesse dans les conditions prévues au livre III, titre II, chapitre V et VI du code de la sécurité sociale, lesquels fixent notamment la liquidation de la pension de retraite à 60 ans ; qu'il mentionne que la loi n° 85-1274 du 4 décembre 1985 institue, en écartant l'application des conditions de délai prévues par la loi du 26 décembre 1964 pour la présentation des demandes, un régime d'assurance volontaire dérogatoire et plus favorable qui s'applique aux rapatriés pour les périodes postérieures au 1er juillet 1962 ; qu'il retient qu'aucun délai n'est opposable, aux termes de l'article 7 de la loi du 4 décembre 1985, à la présentation des demandes de validation des périodes prévues par la loi du 26 décembre 1964 et que ces deux textes non codifiés sont des régimes spéciaux qui dérogent en tant que tels au droit commun de l'assurance volontaire vieillesse et excluent à ce titre l'application des textes du code de la sécurité sociale invoqués par la caisse pour annuler la décision de rachat ou limiter la date d'effet du rachat à la date de sa demande, et ce en application de l'adage "la loi spéciale déroge à la loi générale" ; qu'il en déduit que l'application successive des deux régimes de rachat de 1964 et de 1985 conduit à prendre en compte pour chacun d'eux la date du 1er juillet 1996 pour liquider les droits de M. X... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la révision des droits à pension de M. X... ne pouvait prendre effet qu'à compter du premier jour du mois suivant sa demande d'admission au bénéfice des dispositions de la loi du 26 décembre 1964, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boutet, avocat aux Conseils, pour la Caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud-Est

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir fixé au 1er juillet 1996 la date d'effet de la révision du montant de la pension servie à Monsieur X... après rachat de périodes de salariat dont la demande avait été formée en décembre 2003 et d'avoir, en conséquence, condamné la CARSAT du SUD-EST a régler à Monsieur X... les arriérés dus

AUX MOTIFS QU'il convenait d'opérer une distinction entre les textes de 1964 et 1965 d'une part et la loi de 1985 d'autre part ; que les textes spécifiques relatifs aux rapatriés d'Algérie (loi n°64-1330 de 1964 et son décret d'application n°65-742 de 1965) concernaient la validation gratuite ou onéreuse de cotisations en vertu de l'affiliation, a posteriori, au régime général de la sécurité sociale française d'assurance vieillesse pour les périodes d'activité antérieures à l'indépendance de l'Algérie, soit avant le 1er juillet 1962 selon l'article 1er de la loi de 1964 ; que l'article 2 du décret d'application de 1965, en vigueur et applicable à la cause, disposait que "les périodes ainsi validées ouvrent droit, dans les conditions prévues au livre III, titre II, chapitre V et VI, du code de la sécurité sociale aux avantages vieillesse prévus par les chapitres V et VI précités" ; que l'ancien code de la sécurité sociale de 1956, pris en ses articles 331 à 359 qui fixaient notamment la liquidation de la retraite à 60 ans (articles 331, 343 et 345), était ainsi applicable pour la période antérieure au 1er juillet 1962 ; que dès lors les articles R 742-28 et R 74 39 de l'actuel Code de la sécurité sociale, relatifs à l'assurance volontaire et créés postérieurement par le décret n°85-1353 du 17 décembre 1985 ne pouvaient trouver application en l'espèce ; que la loi n°85-1274 du 4 décembre 1985 prévoyait que "les personnes visées à l'article 1er … bénéficient, en ce qui concerne le risque vieillesse, des dispositions de la loi n°65-555 du 10 juillet 1965 accordant aux Français exerçant ou ayant exercé à l'étranger une activité professionnelle salariée, ou non salariée, la faculté d'accession au régime volontaire vieillesse, sans que les délais prévus aux articles 3 et 7 de cette loi leur soient applicables" (article 2 alinéa 1er) ; que la loi de 1985 instituait donc un cas spécifique d'assurance volontaire dérogatoire et plus favorable qui s'appliquait spécifiquement aux rapatriés des anciennes colonies françaises alors que la loi de 1965 établissait un régime général d'assurance volontaire pour tous travailleurs salariés ou assimilés, avec soumission de ces derniers aux délais fixés par décret ; qu'en conséquence, pour les périodes postérieures au 1er juillet 1962, s'appliquait en l'espèce la loi de 1985 selon laquelle le rapatrié, dans le cas présent d'Algérie, était soumis au régime de l'assurance volontaire tel qu'établi par la loi de 1965, exception faite de l'application des délais prévus par les articles 3 et 7 de cette même loi ; que le législateur ayant ainsi visiblement entendu instituer un régime dérogatoire plus favorable pour les rapatriés eu égard à leur situation particulière ; que le régime applicable conduisait donc à distinguer, pour les rapatriés d'Algérie, deux périodes :

- la période d'activité et d'affiliation à un régime algérien antérieure au 1er juillet 1962 à laquelle le régime de base de l'assurance vieillesse s'appliquait, tel qu'institué par le Code de la sécurité sociale de 1956 qui excluait l'application des articles R 742-28 et R 742-39 du Code de la sécurité sociale postérieurs et relatifs à l'assurance volontaire ;

- la période d'activité postérieure au 1er juillet 1962 à laquelle s'appliquait le régime spécial de l'assurance volontaire vieillesse institué par la loi de 1985 ce qui excluait les délais de droit commun de l'assurance volontaire vieillesse ;
que, rappel fait que l'article 7 de la loi de 1985 disposait "aucun délai n'est opposable à la présentation des demandes de validation des périodes" prévues dans le cadre de l'article 1er de la loi du 26 décembre 1964 et dans celui du régime institué par ses propres articles 4 et 5 (de la loi de 1985) ; que de même aucun délai n'était opposable à la présentation des demandes de rachat de cotisations portant sur les périodes visées par l'article 5 de la loi de 1985 et qui étaient celles postérieures au 1er juillet 1962 ; qu'il en résultait que les régimes de 1964 et 1985 non codifiés étaient des régimes spéciaux dérogeant en tant que tels au droit commun de l'assurance volontaire vieillesse ; qu'ils excluaient à ce titre l'application des délais du Code de la sécurité sociale visés par la CARSAT pour annuler la décision de rachat (article R 742-39) ou limiter la date d'effet du rachat à la date de la demande (article R 742-28) et ce en application de l'adage "la loi spéciale déroge à la loi générale" ; que l'application successive de ces deux régimes conduisait à prendre en compte, dans chacun d'eux, la date du 1er juillet 1996, pour liquider les droits de Monsieur X... ; qu'en conséquence, la Cour infirmerait le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale qui l'avait débouté de ses demandes ;

ALORS DE PREMIERE PART QUE le juge doit en toutes circonstances respecter et faire respecter le principe du contradictoire ; que, pour faire rétroagir au 1er juillet 1996 la demande de révision de sa pension de vieillesse formée par Monsieur X... le 8 septembre 2003, la Cour d'appel s'est fondée sur le moyen tiré de l'inapplicabilité des dispositions du Code de la sécurité sociale aux demandes de rachat de périodes d'activité fondées sur les dispositions de la loi n°64-1330 du 26 décembre 1964 et de son décret d'application n°65-742 du 2 septembre 1965 pris pour son application, comme aux demandes fondées sur la loi n°85-1274 du 4 décembre 1985, par application de l'adage "speciala generalibus derogant" qu'elle a relevé d'office, sans avoir recueilli préalablement les explications contradictoires des parties, violant ainsi l'article 16 du Code de procédure civile ;

ALORS DE DEUXIEME PART QUE le principe selon lequel la loi spéciale déroge à la loi générale ne s'applique qu'en cas d'incompatibilité entre des règles de même nature ; que ni la loi n°64-1330 du 26 décembre 1964, ni le décret n°65-742 du 2 septembre 1965 pris pour son application ne comportant de dispositions applicables à la date d'effet de la révision d'une pension de vieillesse liquidée consécutive au rachat de périodes d'assurance, la Cour d'appel qui a écarté les dispositions du Code de la sécurité sociale fixant la date d'effet de la révision de la pension liquidée au premier jour du mois civil suivant la date de la demande de rachat, au motif que le régime spécial de la loi de 1964 dérogeait au droit commun de l'assurance volontaire vieillesse, a violé les articles R 742-28 et R 742-38 du Code de la sécurité sociale ;

ALORS DE TROISIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE l'article 10 du décret n°65-742 du 2 septembre 1965 dispose que l'entrée en jouissance des droits est fixée au premier jour du mois suivant celui de la demande de liquidation ; qu'en considérant qu'en application de la loi n°64-1330 du 26 décembre 1964 et du décret du 2 septembre 1965 pris pour son application, la révision des droits de Monsieur X... devait prendre effet le 1er juillet 1996 et non le premier jour du mois suivant celui au cours duquel il avait formé sa demande de rachat, la Cour d'appel a, en toute hypothèse, violé l'article 10 du décret n°65-742 du 2 septembre 1965, et les articles R 742-28 et R 742-38 du Code de la sécurité sociale ;

ALORS DE QUATRIEME PART QUE l'article 11 de la loi n°85-1274 du 4 décembre 1985 dispose que la révision de la pension déjà liquidée d'une personne visée par la loi prend effet à compter du premier jour du mois suivant la date de la demande présentée en application de la loi ; qu'en énonçant, pour fixer au 1er juillet 1996 la date d'effet de la révision de la pension de Monsieur X..., que le régime de 1985 non codifié était un régime spécial dérogeant au droit commun de l'assurance volontaire vieillesse excluant l'application des dispositions du Code de la sécurité sociale fixant la date d'effet de la révision de la pension au premier jour du mois suivant la date de la demande de rachat en application de l'adage la loi spéciale déroge à la loi générale, la Cour d'appel a violé l'article 11 de la loi du 4 décembre 1985 et les articles R 742-28 et R 742-38 du Code de la sécurité sociale ;

ALORS DE CINQUIEME PART QUE les dispositions de l'article 7 de la loi n°85-1274 du 6 décembre 1985 rendant imprescriptibles les demandes de validation des périodes visées aux articles 4 et 5 de la loi et à l'article 1er de la loi n°64-1330 du 26 décembre 1964, sont étrangères à la date d'effet de la révision de la pension consécutive au rachat de ces périodes, qui ne peut être antérieure au premier jour du mois suivant celui de la demande de validation ; qu'en se fondant sur l'article 7 de la loi du 6 décembre 1985 pour faire rétroagir la date d'effet de la révision de la pension de Monsieur X... au 1er juillet 1996, la Cour d'appel a violé les articles 7 et 11 de la loi du 6 décembre 1985, l'article 10 du décret n°65-742 du 2 septembre 1965 et les articles R 742-28 et R 742-38 du Code de la sécurité sociale ;

ALORS DE SIXIEME PART QUE le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; que Monsieur X... n'ayant pas contesté la décision définitive de la Commission de Recours Amiable du 20 mars 2002 ayant maintenu la décision du 31 octobre 2001 d'annulation de la décision d'admission au rachat de cotisations du 24 septembre 1997 pour défaut de paiement des cotisations, et n'ayant pas sollicité que cette décision soit annulée, la Cour d'appel qui a jugé que les régimes de 1964 et 1985, non codifiés, étaient des régimes spéciaux dérogeant au droit commun de l'assurance volontaire vieillesse et excluant l'application des délais de l'article R 742-39 du Code de la sécurité sociale visés par la CARSAT du SUD-EST pour annuler la décision de rachat, a violé l'article 4 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-14396
Date de la décision : 14/03/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Cour d'appel de Montpellier, 21 décembre 2011, 11/00032

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 21 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 14 mar. 2013, pourvoi n°12-14396


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.14396
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award