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04/07/2013 | FRANCE | N°12-23621

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 juillet 2013, 12-23621


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que toute personne physique qui, s'étant constituée partie civile, a bénéficié d'une décision définitive lui accordant des dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait d'une infraction pénale, mais qui ne peut pas obtenir une indemnisation en application des articles 706-3 ou 706-14 du même code, peut solliciter une aide au recouvrement de ces

dommages-intérêts ; que selon le second, en l'absence de paiement volont...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que toute personne physique qui, s'étant constituée partie civile, a bénéficié d'une décision définitive lui accordant des dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait d'une infraction pénale, mais qui ne peut pas obtenir une indemnisation en application des articles 706-3 ou 706-14 du même code, peut solliciter une aide au recouvrement de ces dommages-intérêts ; que selon le second, en l'absence de paiement volontaire des dommages-intérêts par la personne condamnée dans un délai de deux mois suivant le jour où la décision concernant les dommages-intérêts est devenue définitive, la partie civile peut saisir le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI) d'une demande d'aide au recouvrement ; qu'il en résulte que la victime admise au bénéfice du Service d'aide au recouvrement des victimes (SARVI) sur le fondement d'une condamnation à être indemnisée, n'est pas recevable à saisir une commission d'indemnisation des victimes (CIVI) aux fins d'indemnisation ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'appartement dont Saliha Y...était locataire, a été sinistré, le 2 octobre 2007, par l'effet d'une substance explosive ou d'un incendie ; qu'une cour d'assises a condamné M. X... du chef du crime de dégradation ou détérioration volontaire d'immeuble par l'effet d'une substance explosive ou d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes, et, statuant sur l'action civile, l'a condamné à payer diverses indemnités aux locataires, notamment aux époux Y... ; que Mme Saliha Y...a saisi une CIVI d'une demande d'indemnisation de son préjudice sur le fondement de l'article 706-14 du code de procédure pénale ; que le FGTI a invoqué l'irrecevabilité de cette demande au motif que Mme Y...avait saisi le SARVI d'une demande ;
Attendu que pour débouter le FGTI de ses conclusions tendant à l'irrecevabilité de la demande de Saliha Y..., et confirmer le jugement rendu par la CIVI de Bobigny en ce qu'elle se déclare compétente pour examiner la requête présentée par la victime sur le fondement de l'article 706-14 du code de procédure pénale, l'arrêt énonce que rien n'établit que la victime, en sollicitant l'aide du SARVI et en acceptant le versement, par lui, d'une provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, a entendu renoncer à agir ultérieurement devant une CIVI, ce qu'aucun texte ne lui interdit ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autre infractions
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement par lequel la commission d'indemnisation des victimes d'infractions du Tribunal de grande instance de Bobigny s'est déclarée compétente pour examiner la requête présentée par Mme Y...sur le fondement de l'article 706-14 du code de procédure pénale ;
Aux motifs que « le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions fonde ses conclusions d'irrecevabilité sur l'article 706-15-1 du Code de procédure pénale qui dispose : " Toute personne physique qui, s'étant constituée partie civile, a bénéficié d'une décision définitive lui accordant des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait d'une infraction pénale, mais qui ne peut pas obtenir une indemnisation en application des articles 706-3 ou 706-14, peut solliciter une aide au recouvrement de ces dommages et intérêts ainsi que des sommes allouées en application des articles 375 ou 475-1. Celle aide peut être sollicitée y compris si l'auteur de l'infraction fait l'objet d'une obligation d'indemnisation de la victime dans le cadre d'une peine de sanction-réparation, d'un sursis avec mise à l'épreuve ou d'une décision d'aménagement de peine ou de libération conditionnelle " ; qu'il explique la différence entre le dispositif d'aide au recouvrement prévu par ce texte et celui de l'indemnisation prévu par les articles précédents, dispositifs qu'il estime exclusifs l'un de l'autre ; que selon lui, en optant pour le processus de l'Aide au recouvrement qui lui a permis de percevoir immédiatement la somme de 1. 350 euros, Mme Saliha Z... épouse Y... a renoncé au dispositif d'indemnisation relevant de la commission d'indemnisation des victimes d'infractions ; qu'il fait valoir diverses jurisprudences et souligne les complications qu'engendrerait selon lui l'application cumulée des deux textes ; qu'il ajoute que la requérante, assistée de son conseil, était parfaitement informée de l'état de droit ; qu'à suivre littéralement le raisonnement du Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions, le dépôt de la requête suffirait à faire présumer cette renonciation ou la reconnaissance qu'elle ne peut pas obtenir d'indemnisation en application des articles 706-3 ou 706-14 du Code de procédure pénale ; que cependant, on peut appréhender son raisonnement de manière plus large en considérant la requête et l'acceptation de la somme versée par le service d'aide au recouvrement ; mais que si Mme Saliha Z... épouse Y... a un droit, la renonciation ou la reconnaissance d'une exclusion de droit ne peuvent résulter que d'une expression de volonté tout à fait univoque ; qu'il reste donc à apprécier si la requête suivie de l'acceptation de la somme signifie la renonciation à une action devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions ou la reconnaissance de son interdiction ; que le texte ne le dit pas ; qu'aucun élément de fait de l'espèce n'est allégué à l'appui d'une telle reconnaissance ou d'une telle renonciation et qu'elles ne résultent pas de la seule demande d'application de l'article 706-15-1 du Code de procédure pénale ; que le texte n'exprime pas non plus directement une interdiction de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infractions après avoir saisi le service d'aide au recouvrement ; que les interdictions sont d'interprétation stricte et qu'une telle interdiction n'est pas formulée ; que le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions fait valoir la complication que générerait la coexistence des deux systèmes ; qu'à supposer cette complication acquise, elle résulte de l'organisation mise en place par le législateur mais ne suffit pas à signifier une interdiction ; qu'il appartient éventuellement au service d'aide au recouvrement de ne pas accepter d'intervenir s'il estime que cette condition n'est pas remplie ; mais que s'il l'accepte et qu'il verse une provision, sa décision, dépourvue d'autorité de chose jugée, ne permet pas d'exclure le recours à la commission d'indemnisation des victimes d'infractions ; qu'en conséquence, il faut rejeter la demande du Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions tendant à l'irrecevabilité de la requête et confirmer le jugement dont appel ».
Alors, d'une part, que le service d'aide au recouvrement institué par les articles 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale au bénéfice des victimes d'infractions qui ne peuvent obtenir une indemnité sur le fondement des articles 706-3 ou 706-14 du même code est exclusif de toute action engagée dans le même temps par la victime sur le fondement de ces textes ; qu'ainsi, une victime d'infraction qui sollicite l'aide au recouvrement instituée par les articles 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale et qui obtient à ce titre le versement d'une indemnité ou d'une provision ne peut agir au surplus sur le fondement de l'article 706-14 du même code ; que dès lors, en jugeant que Mme Y...était recevable à agir devant la commission d'indemnisation.. A des victimes d'infractions sur le fondement de l'article 706-14 du code de procédure pénale après avoir obtenu l'aide au recouvrement instituée par les articles 706-15-1 et 706-15-2 et avoir perçu, à ce titre, le versement d'une provision, la Cour d'appel a violé les articles 706-14, 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale ;
Alors, d'autre part, et en toute hypothèse, qu'une victime d'infraction qui, dûment informée par la juridiction pénale de la possibilité qu'elle avait de saisir la commission d'indemnisation des victimes d'infraction, préfère solliciter l'aide au recouvrement instituée par les articles 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale, lequel est exclusif de toute possibilité d'obtenir une indemnité sur le fondement, notamment, de l'article 706-14 du même code, renonce, ce faisant, aux droits éventuels qu'elle était susceptible de faire valoir sur le fondement de ce texte ; que dès lors, en jugeant que Mme Y...était recevable à agir devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions sur le fondement de l'article 706-14 du code de procédure pénale après avoir sollicité et obtenu l'aide au recouvrement instituée par les articles 706-15-1 et 706-15-2 et avoir perçu, à ce titre, le versement d'une provision, la cour d'appel a violé les articles 706-14, 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale ;
Alors, enfin, que le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, saisi d'une demande d'aide au recouvrement sur le fondement des articles 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale, est tenu d'accorder dans les deux mois une indemnité à la victime ; qu'il ne peut en conséquence refuser de recevoir la demande dont il est saisi en contraignant la victime à engager préalablement une procédure d'indemnisation sur le fondement de l'article 706-14 du code de procédure pénale ; que dès lors, en considérant, pour juger que Mme Y...était recevable à agir devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions, qu'il appartenait au service d'aide au recouvrement dépendant du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions de ne pas accepter la requête d'aide au recouvrement présentée par Mme Y...s'il estimait que celle-ci pouvait obtenir une indemnisation sur le fondement de l'article 706-14, ce qui aurait eu pour effet de la contraindre à engager préalablement une procédure longue et incertaine pour obtenir une indemnité ne pouvant excéder, en tout état de cause, le plafond prévu par ce texte, la cour d'appel a violé les articles 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale, ensemble l'article L. 422-7 du code des assurances ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-23621
Date de la décision : 04/07/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

INDEMNISATION DES VICTIMES D'INFRACTION - Bénéficiaires - Exclusion - Cas - Victime admise au bénéfice du service d'aide au recouvrement des victimes

Il résulte des articles 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale, que la victime admise au bénéfice du Service d'aide au recouvrement des victimes pour obtenir les dommages-intérêts qui lui ont été accordés par une décision définitive en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait d'une infraction pénale, n'est pas recevable à saisir une commission d'indemnisation des victimes aux fins d'indemnisation


Références :

articles 706-15-1 et 706-15-2 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 jui. 2013, pourvoi n°12-23621, Bull. civ. 2013, II, n° 153
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, II, n° 153

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: M. Taillefer
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.23621
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