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25/09/2013 | FRANCE | N°12-30109;12-30110;12-30111;12-30112;12-30113;12-30114;12-30115;12-30116;12-30117;12-30118;12-30119;12-30120;12-30121;12-30122;12-30123;12-30124;12-30125;12-30126

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 septembre 2013, 12-30109 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° A 12-30.109 à U 12-30.126 ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon les jugements attaqués, que M. X... et dix-sept salariés de la société Alstom Power Systems ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de sommes à titre de prime de pénibilité ;
Attendu que les jugements condamnent l'employeur au paiement de la prime de pénibilité depuis juin 2009 inclus, soit le montant défini par le groupe d

e travail sur la ligne rotors et sur la ligne ailettes le 6 novembre 2008 et le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° A 12-30.109 à U 12-30.126 ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon les jugements attaqués, que M. X... et dix-sept salariés de la société Alstom Power Systems ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de sommes à titre de prime de pénibilité ;
Attendu que les jugements condamnent l'employeur au paiement de la prime de pénibilité depuis juin 2009 inclus, soit le montant défini par le groupe de travail sur la ligne rotors et sur la ligne ailettes le 6 novembre 2008 et le 2 décembre 2008, applicable aux intéressés selon leur poste de travail, en lui soustrayant la prime d'insalubrité perçue depuis juin 2009 inclus ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les demandes des salariés portaient sur le paiement de sommes déterminées, le conseil de prud'hommes a modifié l'objet du litige et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les jugements rendus entre les parties par le conseil de prud'hommes de Belfort, le 19 janvier 2012 ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits jugements et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Montbéliard ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des jugements cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Alstom Power Systems
Il est fait grief aux jugements attaqués d'AVOIR condamné la Société ALSTOM POWER SYSTEM à payer aux salariés des dommages-intérêts à hauteur de 100 ¿, ainsi que la prime de pénibilité depuis juin 2009 inclus soit le montant défini par le groupe de travail sur la ligne rotors et sur la ligne ailettes le 6 novembre 2008 et le 2 décembre 2008, applicable aux salariés selon leur poste de travail, en leur soustrayant la prime d'insalubrité perçue depuis juin 2009 inclus, d'AVOIR condamné la Société ALSTOM POWER SYSTEM à mettre les fiches de paie à compter de juin 2009 en conformité avec cette prime, d'AVOIR condamné la Société ALSTOM POWER SYSTEM à payer à UD CGT SITE ALSTOM des dommages-intérêts à hauteur de 100 ¿ et d'AVOIR condamné la Société ALSTOM POWER SYSTEM à verser respectivement aux salariés et à l'UD CGT SITE ALSTOM la somme de 100 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « conformément à l'article 1315 du code civil, il incombe au salarié de prouver l'engagement dont il se prévaut, par preuve librement rapportée. La SA ALSTOM POWER SYSTEMS soutient qu'elle n'a jamais signé, d'engagement de paiement d'une prime de pénibilité aux salariés demandeurs. Il convient de rappeler que le versement d'une prime peut résulter d'un engagement unilatéral de l'employeur, par exemple un engagement pris dans le cadre du comité d'entreprise (y en ce sens cour de cassation ch soc. 23 oct. 1991). Un tel engagement s'impose à l'employeur, sans que soient réunies les conditions nécessaires pour la reconnaissance d'un usage, les salariés pouvant se prévaloir de dispositions plus avantageuses prises par l'employeur au profit de son personnel. Sa validité exige néanmoins une volonté explicite de l'employeur, qui peut être issue de notes de services, ou de réponses aux représentants du personnel, ou énoncée à l'occasion de la négociation annuelle. Ainsi un compte rendu rédigé lors de la réunion d'un comité d'entreprise peut constituer un engagement unilatéral de l'employeur qui lui est opposable (y en ce sens cour de cassation ch soc 28 fév 1996 n 92-45.334). En l'espèce, le procès verbal de réunion du 6 novembre 2008 du groupe de travail sur la pénibilité sur la ligne Rotors (pièce 2A de la défenderesse) propose une échelle pour les pénibilités dont l'inventaire est dressé, propose un montant de 8,50 euros, par jour pour l'équipe ailettage des rotors, indiquant la suite de la procédure. Ce document ne comporte aucune signature de la Direction. Le procès verbal de réunion du 20 octobre 2008 du groupe de travail sur la pénibilité sur la ligne Rotors (pièce 2B de la défenderesse) propose une échelle pour les pénibilités dont l'inventaire est dressé, propose un montant de 9,50 euros, par jour pour l'équipe ailettage des rotors, indiquant la suite de la procédure. Ce document ne comporte aucune signature de la Direction. Le compte rendu du 11 décembre 2008 du CHSCT rappelle la transmission de l'étude sur la pénibilité dans l'atelier des ailettes et des rotors, aux fins de validation par la direction. Il résulte de l'article L. 2325-15 que l'ordre du jour est établi conjointement par l'employeur et le secrétaire du comité. En l'espèce il convient de relever que l'ordre du jour de la réunion du comité d'établissement Turbines à vapeur du 11 juin 2009 ne comporte aucune référence à une annonce ou une discussion sur la prime de pénibilité. Le procès verbal de la réunion du 11 juin 2009 mentionne que M. Y... représentant de la direction a effectivement et incontestablement répondu par l'affirmative à l'exclamation "ce qui veut dire qu'ils ne toucheront pas leur prime de pénibilité à la fin du mois". Néanmoins cette confirmation a immédiatement été nuancée lorsqu'il a été question de verser la prime de pénibilité avec effet rétroactif à décembre, M. Y... indiquant " nous allons revoir les salariés. Nous allons leur faire la présentation de ce qui va être mis en place....", précisant que la réunion " sera évidemment organisée avant la clôture des paies". Il convient d'en déduire à tout le moins l'absence d'engagement quant à l'effet rétroactif de la prime de pénibilité, à décembre 2008. En revanche sur l'engagement de payer la prime de pénibilité à compter de cette réunion, si la réponse est affirmative, elle n'est toutefois pas assortie de précisions quant aux modalités de paiement ou aux montants, qui toutefois pourraient simplement correspondre aux préconisations du groupe de travail et à la transmission par le CHSCT. L'attestation produite par M. Y... qui n'amène rien de particulier au contenu du procès verbal, doit être écartée. Malgré la réouverture des débats à cette fin, l'employeur ne fournit aucune pièce relative à l'adoption des primes pour les autres ateliers tendant par exemple à établir que la prime de pénibilité a dans leur cas été plus clairement décidée. Il convient en particulier de relever qu'il n'allègue ni ne prouve l'attribution d'une prime d'un montant différent de celui retenu par la commission, ni ne fournit un quelconque écrit précisant la décision d'accorder une prime et son montant pour quelque chantier ou atelier que ce soit. L'employeur n'établit pas en particulier appliquer aux salariés de la ligne corps une prime de pénibilité différente de celle proposée par la commission alors qu'il est constant qu'ils perçoivent une prime. Il convient de relever qu'aucun écrit au dossier ne traduit la position de la direction concernant la ligne corps. Ainsi que la pièce 13 invoquée en défense lors de l'audience, à titre d'accord écrit de la direction est en réalité un écrit de M Martial Z... en sa qualité de vice président de la commission et ne saurait donc valoir accord de la direction pour payer une prime. De fait, le groupe de travail sur la pénibilité de chaque ligne, corps, rotors ou ailettes, indique à chaque fin de validation les actions à réaliser ensuite soit la présentation au CHSCT, la validation par la Direction puis la convocation de la commission. Il convient d'en déduire que la convocation de la commission pour mise en place de la prime implique la validation par la direction. Ainsi concernant la ligne corps, seul figure au dossier un compte rendu de la commission du 10 juin 2008 (pièce 9 en demande) signé du président de la Commission, Monsieur Dominique A..., qui fait état de la décision de la commission de modifier le système des primes en vigueur et propose la somme de 9,50 euros pour l'équipe préparation sol corps et 8,50 euros pour les équipes VMG-DZ63 aubage et montage corps. Cette décision suit la convocation pour le 10 juin 2008 avec ordre du jour "mise en place de la prime de pénibilité pour les chantiers VMG-DZ63 aubage et montage corps" (Pièce 8). De plus le montant payé correspond au montant proposé par le groupe de travail sur la ligne corps (pièce 5 en demande validation des items par le groupe de travail sur la pénibilité sur la ligne corps du 9 avril 2008). Le seul document complémentaire sur ce point traçant une proposition de la commission est le compte rendu du vice président de la commission des travaux insalubres M. Martial Z... du 3 avril 2007, qui concerne "la mise en place d'une primé de pénibilité" pour la ligne rotors, avec 9,50 euros pour le soudage vertical et 8,50 euros pour le soudage horizontal. Ce document n'émane pas de la direction de la défenderesse. Pourtant le paiement réalisé prouve son existence. Dès lors concernant les chantiers rotors et ailettes en l'absence de tout écrit de la direction, selon le même processus, les convocations des membres de la commission travaux insalubres du 24 juillet 2008 et du 15 janvier 2009 (Pièces 6 et 7 en demande) concernant respectivement "l'étude de postes des chantiers rotors et ailettes" puis "la mise en place des primes de pénibilité chantiers rotors ailettes", établissent que le montant et le principe des primes ont été arrêtés. La convocation "aux fins de mise en place de la prime" impliquait donc sa validation par la direction celle-ci ne pouvant en l'absence de tout élément contraire au dossier que correspondre aux validations des items réalisées le 6 novembre 2008 proposant pour l'équipe ailettage des rotors une prime de 8,50 euros et 7,50 euros par jour pour les équipes préparation sol équilibrage-usinage d'une part (pièce 11 en demande) et d'autre part le 2 décembre 2008 proposant pour le groupe 1 GA Aj, Doigts FDG ETA BAPS la prime de 6 euros par jour et pour le groupe 2 NX FA4,SX Mazak, la prime de 3 euros par jour de manière similaire au soudage rotors (Pièce 10 en demande). Dès lors il convient de retenir que des montants ci dessus rappelés ont été validés par l'employeur avant la convocation aux fins de mise en place des primes. Ainsi lorsque M. Y... - représentant de la direction- a répondu "si" à l'exclamation "ce qui veut dire qu'ils ne toucheront pas leur prime de pénibilité à la fin du mois", il a annoncé la décision de verser la prime de pénibilité selon les montants ci-dessus énoncés à compter de juin 2009 aux salariés concernés. Elle est dès lors due et il convient de préciser qu'elle doit se substituer à la prime d'insalubrité à compter de juin 2009 inclus. Il convient de condamner la SA ALSTOM POWERS SYSTEMS en ce sens » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'engagement unilatéral suppose une manifestation de volonté claire et non équivoque de l'employeur de s'obliger à l'égard de ses salariés ; qu'il ne peut résulter de simples commentaires informels et imprécis prononcés au cours d'une réunion ; qu'en déduisant l'engagement unilatéral de la Société ALSTOM POWER SYSTEM à verser une prime de pénibilité aux salariés des lignes rotors et ailettes de la seule interjection « si » prononcée par le représentant de la société au cours d'une réunion du Comité d'établissement du 11 juin 2009 à la suite d'une question posée, alors même que ce dernier avait aussitôt précisé qu'une décision définitive serait prise sur ce point après des discussions ultérieures avec les salariés, en sorte que ne pouvait se déduire de cet événement isolé une manifestation de volonté claire et non-équivoque de la société de s'engager unilatéralement à verser ladite prime, le Conseil de Prud'hommes a violé l'article L. 1221-1 du code du travail et les articles 1108 et 1134 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en déduisant du procès verbal de la réunion du comité d'établissement du 11 juin 2009 l'engagement unilatéral à verser une prime de pénibilité aux salariés des lignes rotors et ailettes, quand il ressort de ce procès verbal que la direction s'était bornée à indiquer au cours de la réunion qu'une décision serait prise sur cette question, après discussion avec les salariés, sans qu'aucun engagement définitif ne soit pris, le Conseil de Prud'hommes a dénaturé ledit procès verbal et violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE pour déduire l'engagement unilatéral de la Société ALSTOM POWER SYSTEM à verser une prime de pénibilité aux salariés des lignes rotors et ailettes, le Conseil de Prud'hommes s'est également fondé sur le motif selon lequel « la convocation " aux fins de mise en place de la prime" impliquait donc sa validation par la direction (¿) en l'absence de tout élément contraire au dossier » ; qu'en statuant ainsi alors que la simple convocation par la Société ALSTOM POWER SYSTEM de la Commission des travaux insalubres afin qu'elle étudie l'opportunité de mettre en place une telle prime ne pouvait caractériser une manifestation de volonté claire et non équivoque de sa part de s'engager unilatéralement à verser cette prime aux salariés, le Conseil de Prud'hommes a derechef violé l'article L. 1221-1 du code du travail et les articles 1108 et 1134 du code civil ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QU'en se fondant sur le motif inopérant selon lequel la Société ALSTOM POWER SYSTEM a accordé une prime de pénibilité aux salariés des lignes corps et soudage après avoir saisi la commission des travaux insalubres pour en déduire que la saisine de cette commission concernant le cas des salariés des lignes rotors et ailettes valait engagement unilatéral de l'employeur à leur verser la prime de pénibilité, le Conseil de Prud'hommes n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail et des articles 1108 et 1134 du code civil ;
ALORS, DE CINQUIEME PART, QUE la Société ALSTOM POWER SYSTEM faisait valoir dans ses conclusions, pour démontrer l'absence de tout engagement unilatéral à verser une prime de pénibilité aux salariés des lignes rotors et ailettes, avoir continué à leur verser après juin 2009 une prime d'insalubrité, à l'inverse des salariés des lignes soudage et corps qui ont vu la prime de pénibilité se substituer à cette prime d'insalubrité ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions déterminantes, le Conseil de Prud'hommes a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, DE SIXIEME PART, QUE le juge doit trancher le litige qui lui est soumis ; qu'en toute hypothèse en condamnant la Société ALSTOM POWER SYSTEM à payer à chacun des salariés « la prime de pénibilité depuis juin 2009 inclus soit le montant défini par le groupe de travail sur la ligne rotors et sur la ligne ailettes le 6 novembre 2008 et le 2 décembre 2008, applicable aux salariés selon leur poste de travail, en leur soustrayant la prime d'insalubrité perçue depuis juin 2009 inclus », sans qu'il soit possible à la lecture du jugement de connaître le montant exact des rappels de prime de pénibilité que la Société ALSTOM POWER SYSTEM a été condamnée à payer à chacun des salariés, le conseil de Prud'hommes n'a pas tranché le litige qui lui était soumis et a violé l'article 4 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-30109;12-30110;12-30111;12-30112;12-30113;12-30114;12-30115;12-30116;12-30117;12-30118;12-30119;12-30120;12-30121;12-30122;12-30123;12-30124;12-30125;12-30126
Date de la décision : 25/09/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Belfort, 19 janvier 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 sep. 2013, pourvoi n°12-30109;12-30110;12-30111;12-30112;12-30113;12-30114;12-30115;12-30116;12-30117;12-30118;12-30119;12-30120;12-30121;12-30122;12-30123;12-30124;12-30125;12-30126


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.30109
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