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03/12/2014 | FRANCE | N°13-20434;13-20435

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 décembre 2014, 13-20434 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° E 13-20434 et F 13-20435 ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1226-12 et L. 1226-14 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que l'indemnité spéciale de licenciement, égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9 du code du travail et versée sans condition d'ancienneté dans l'entreprise, n'est due qu'en cas de licenciement prononcé en raison de l'impossibilité de reclassement du salarié déclaré inapte par le mé

decin du travail ou du refus non abusif par le salarié inapte de l'emploi propo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° E 13-20434 et F 13-20435 ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1226-12 et L. 1226-14 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que l'indemnité spéciale de licenciement, égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9 du code du travail et versée sans condition d'ancienneté dans l'entreprise, n'est due qu'en cas de licenciement prononcé en raison de l'impossibilité de reclassement du salarié déclaré inapte par le médecin du travail ou du refus non abusif par le salarié inapte de l'emploi proposé ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que M. X... et M. Y..., salariés de la société Bazar dijonnais, ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation judiciaire de leur contrat de travail ; qu'ils ont ensuite été licenciés pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Attendu que pour condamner l'employeur à payer aux salariés une indemnité spéciale de licenciement, l'arrêt retient, par motif adopté, que leur inaptitude résultait d'une maladie professionnelle ;
Qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, alors qu'elle avait prononcé la résiliation judiciaire des contrats de travail, produisant les effets d'un licenciement nul en raison d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile, et après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils condamnent la société Bazar dijonnais à payer à M. X... la somme de 12 782 euros et à M. Y... la somme de 14 028 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement, les arrêts rendus le 2 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute MM. X... et Y... de leur demande ;
Condamne MM. X... et Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi n° E 13-20.434 par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société Bazar dijonnais.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Le Bazar Dijonnais SARL à payer à Monsieur Thierry X... la somme de 12 782 € à titre d'indemnité spéciale de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est justifiée ; que Thierry X... fait valoir qu'il a été victime de harcèlement moral de la part de l'employeur ; qu'il lui incombe d'établir la matérialité de faits précis et concordants constituant, à son sens, un tel harcèlement, à charge pour l'employeur, dans l'hypothèse où ces éléments, pris dans leur ensemble, permettraient de présumer l'existence d'un harcèlement moral de prouver que ces agissements ne seraient pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions seraient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'à cet effet, il soutient : - que depuis 2008, Pierre-Emmanuel Z..., gérant de l'entreprise, n'a cessé de le harceler, lorsqu'il était présent au magasin de Chenôve, par des remarques offensantes et inadmissibles devant les clients, -que dès son arrivée au mois d'octobre 2010, Géraldine A..., responsable de magasin, l'a harcelé et a critiqué sa façon de travailler, - que sa santé physique et mentale s'est dégradée, - et qu'après lui avoir proposé une rupture conventionnelle, Pierre-Emmanuel Z... lui a annoncé qu'il était hors de question de lui donner de l'argent pour partir ; qu'il ajoute que l'employeur a également commis des manquements à ses obligations en ne lui remettant ses bulletins de paye et ses tickets restaurants que tous les trois mois, en ne comptabilisant pas ses jours d'ancienneté et en rémunérant les dimanches de travail sous la forme de « prime sur objectifs marges non récupérées » ; qu'il produit différents documents dont il ressort : -que le comportement de Pierre-Emmanuel Z... est plus que contestable à certains moments et qu'il ne supporte pas qu'on puisse faire valoir un désaccord (témoignage de Benjamin B...), - que lors d'altercations entre lui et Pierre-Emmanuel Z..., ce dernier avait un comportement irrespectueux et inacceptable, que lorsqu'il a rencontré des difficultés familiales, le gérant s'est adressé à lui sur un ton moqueur en lui disant « vous avez bonne mine » et en lui demandant « s'il avait fait des UV », qu'il refusait de prendre un camion à hayon pour aider aux déchargements rendus difficiles du fait du mauvais fonctionnement des transpalettes manuels mis à la disposition des salariés et qu'il avait des propos inappropriés et moqueurs à son égard (témoignages d'Angélique C... et d'Anne-Laure D...), - que Pierre-Emmanuel Z... lui tenait des propos tels que « vous êtes nul », « vous êtes incapable », « vous ne savez pas travailler », « vous me faites perdre de l'argent », « vous mettez mon magasin à sac » et ce, devant les clients, que lors du décès de son père, il a dit « pas de pitié pour Thierry », et, en une autre occasion, « ce n'est pas une fois qu'on a fait dans son slip qu'il faut s'essuyer » parce qu'il n'avait pas nettoyé les chaineaux, et qu'il lui a été également dit « vous ne savez pas mettre en rayon, ça ne ressemble à rien, c'est de la merde », « vous ramez », et « si vous n'êtes pas content, démissionnez ou mettez-vus à la sécu » (témoignage de E...
F...
Y...), - que peut après le recrutement de Géraldine A..., Pierre-Emmanuel Z... a demandé à cette dernière de mettre la pression sur les salariés présents dans le magasin (témoignage du 3 octobre 2012 de Brice-Michel G... qui ajoute que, durant deux ans, le gérant n'a cessé de le harceler pour qu'il rédige une attestation contre ses collègues, qu'après la décision du conseil de prud'hommes, il a réitéré sa demande en précisant qu'en cas de refus de sa part, il devrait fermer le magasin de Quétigny, que plusieurs salariés l'ont poussé à faire ce papier et que, peu après, il a été placé en arrêt maladie pour état d'anxiété puis, déclaré inapte, avant d'être mis à pied et licencié pour faute grave), - qu'il a été contraint de réclamer l'envoi de ses bulletins de salaire ainsi que ses tickets restaurants des quatre derniers mois de l'année 2010, - qu'il n'a pas reçu les bulletins de salaire que le 8 juin 2011, - qu'il a protesté le 14 juin 2011 contre l'absence de réception des tickets restaurants de septembre à décembre 2010 après que l'employeur lui ait indiqué qu'il les lui avait envoyés par courrier du mois de décembre 2010 ; - que le 29 juin 2011, le médecin du travail l'a déclaré inapte définitif à son poste ainsi qu'à tous les postes existants à Chenôve et à Quétigny en expliquant que l'origine de l'inaptitude était l'organisation du travail qui ne permettait pas de proposer des mesures individuelles de mutation ou de transformation de poste dans ce cadre, - et que depuis début 2011, il est suivi dans un centre médico-psychologie avec traitement psychiatrique ; que pris dans leur ensemble, ces éléments permettent de présumer l'existence du harcèlement moral allégué par Thierry X... ; que la SARL Le Bazar Dijonnais, à qui il incombe de prouver que les agissements dénoncés par le salarié ne seraient pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions seraient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, considère que les témoignages précités constituent des appréciations subjectives, sans évocation de faits précis et circonstanciés ; qu'elle ajoute que les livraisons étaient effectuées par camions équipés de hayons, que l'attestation de E...
F...
Y... doit être écartée pour manque d'objectivité dès lors que ce dernier et Thierry X... l'ont attraite conjointement devant la juridiction prud'homale, que les attestations qu'elle produit établissent que les relations et l'ambiance de travail sont de bonne qualité et que l'appelant n'a pas supporté l'arrivée d'une nouvelle directrice, que les tickets restaurant ont été adressés en temps utile au salarié, que les bulletins de salaire l'ont été dès réception des information apportées par la caisse primaire et que la rémunération du travail le dimanche équivalait au double du taux horaire ; que les productions de l'appelante établissent : - que peu après l'arrivée de Géraldine A..., Thierry X... et E...
F...
Y... ont signifié leur volonté de quitter l'entreprise moyennant finance, qu'il leur a été répondu que leur départ n'était pas souhaité et que, quelques jours plus tard, ils ont tous les deux été placés en arrêt maladie (témoignages de Géraldine A... et d'André Z..., ancien gérant), - que toutes les livraisons de marchandises au magasin de Chenôve sont réalisées par camion équipé de hayon (attestation de Marie-Claude H..., directeur administratif et financier de la SA Foirfouille, enseigne du bazar Dijonnais), - que depuis son arrivée au mois d'octobre 2010, Géraldine A... s'adresse sans aucun mépris ou manque de respect aux salariés, qu'elle a donné au magasin un fonctionnement et des équipements dont il avait besoin et qu'il n'est pas évident d'arriver dans un magasin où se trouve un personnel ayant une ancienneté de 10 ou 20 ans, que tant Thierry X... que E...
F...
Y... ont reconnu le professionnalisme (témoignage de Corinne I...) et qu'elle est arrangeante, disponible et conciliante (témoignage de Julien J...), - que Brice-Michel G... a été licencié pour harcèlement sexuel, - et que trois séries de vingt-tickets restaurant ont été adressés à Thierry X... le 5 août 2011 ; que la Cour observe que, s'ils donnent de Géraldine A... une image favorable et, à l'inverse, une image assez peu flatteuse de Brice-Michel G..., et s'ils établissent que les livraisons s'effectuent à bord de camions équipés de hayon, ces éléments ne démontrent : - ni la fausseté des accusations de harcèlement, de propos méprisants et insultants et de pression dirigés contre Pierre-Emmanuel Z..., portés de façon concordante sinon circonstanciée par plusieurs salariés, y compris E...
F...
Y... dont l'attestation est tout aussi recevable que celle de ses collègues de travail, n'étant pas indifférent de souligner que l'unique témoignage favorable au gérant, celui de Maria K..., ne précise pas que les façons d'agir qui sont prêtées à ce dernier seraient incompatibles avec sa personnalité, - ni que le magasin de Chenôve a été équipé d'un transpalette en bon état de fonctionnement, - ni que les bulletins de salaires des quatre derniers mois de l'année 2010, antérieurs pour la plupart au début de son arrêt maladie, aient été adressés à temps à Thierry X..., - ni que l'intéressé ait été mis en possession en temps utile des tickets restaurants qu'il réclamait, - ni que les dimanches de travail n'aient pas été rémunérés au moyen de primes, - ni que l'employeur ait agi en vue de préserver la santé au travail du salarié ; qu'il doit être jugé, dans ces conditions, que Thierry X... a été victime d'agissements à type de harcèlement moral et que l'employeur s'est rendu responsable de manquements contractuels à son détriment ; qu'il convient par conséquent d'infirmer le jugement et de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la SARL Le Bazar Dijonnais, à effet du 26 juillet 2011 ; qu'il résulte du libellé même de l'avis du médecin du travail du 19 juin 2011 que l'inaptitude du salarié est la conséquence du harcèlement dont il a eu à souffrir ;
AUX MOTIFS ENCORE QU'or, lorsque la résiliation judiciaire du contrat de travail procède du harcèlement moral dont le salarié a été victime sur son lieu de travail, cette rupture produit les effets d'un licenciement nul, conformément aux dispositions de l'article L.1152-3 du code du travail ; que dès lors, il convient de faire produire à la résiliation judiciaire du contrat de travail de Thierry X... les effets d'un licenciement nul ; que la cour possède les éléments d'appréciation suffisants, tirés de l'ancienneté du salarié au sein de l'entreprise et du montant de sa rémunération, pour considérer qu'en lui allouant la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts, les premiers juges ont fait une estimation appropriée des préjudices du salarié ; qu'elle considère, pour sa part, que cette indemnité inclut la réparation du tort causé par l'exécution déloyale de ses obligations par l'employeur et par le harcèlement moral ; que le jugement mérite confirmation en ce qu'il a alloué à Thierry X... 4 127, 96 €, à titre d'indemnité de préavis et 412,79 € pour congés payés afférents, ces montants n'étant pas contestés par la SARL Le Bazar Dijonnais, même à titre subsidiaire ; qu'il soit également être approuvé en ce qu'il a ordonné à la SARK Le Bazar Dijonnais de délivrer à Thierry X... un bulletin de paye rectificatif et une attestation destinée à Pôle Emploi rectifiée, aucune astreinte n'ayant lieu d'être instituée en appel ;
ET AUX MOTIFS ENFIN QU'il doit être infirmé en ce qu'il a alloué à Thierry X... 10 953¿ à titre de complément d'indemnité spéciale de licenciement alors que, le montant de l'indemnité de licenciement versée s'élevant à 12 782 €, comme l'indique l'attestation destinée à Pôle Emploi, le solde à payer, équivalent à celui qui a déjà été versé, s'établit à 12 782 € ;
ALORS QUE, D'UNE PART, lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur tout en continuant de travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée, le licenciement étant, en présence d'une telle justification, non avenu ; qu'en pareil cas, le salarié ne peut prétendre aux indemnités attachées aux seuls motifs de son licenciement ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur X... en raison d'un harcèlement moral sur sa personne et lui fait produire les effets d'un licenciement nul ; qu'en condamnant dès lors la société Le Bazar Dijonnais à verser à Monsieur X... l'indemnité spéciale équivalente au double de l'indemnité légale de licenciement prévue par l'article L.1226-14 du Code du travail bien que son licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement soit non avenu, la Cour viole l'article 1184 du Code civil ensemble les articles L.1226-14 et L. 1231-1 du Code du travail et 12 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, le salarié victime d'un licenciement nul et qui ne réclame pas sa réintégration a droit, quelle que soit son ancienneté dans l'entreprise, d'une part, aux indemnités de rupture, d'autre part, à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaire ; qu'en l'espèce, tout en faisant produire à la résiliation judiciaire les effets d'un licenciement nul en raison du harcèlement moral dont Monsieur X... a été victime, la Cour condamne son employeur à lui verser l'indemnité spéciale correspondant au double de l'indemnité légale de licenciement prévue par de l'article L.1226-14 du Code du travail ; qu'en statuant ainsi, la Cour viole par fausse application le texte précité ensemble les articles L.1234-9 et L. 1152-3 du Code du travail.

Moyen produit au pourvoi n° F 13-20.435 par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société Bazar dijonnais.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Le Bazar Dijonnais SARL à payer à Monsieur E...
F...
Y... la somme de 14028 € à titre d'indemnité spéciale de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est justifiée ; que Meng-Srun Y... fait valoir qu'il a été victime de harcèlement moral de la part de l'employeur ; qu'il lui incombe d'établir la matérialité de faits précis et concordants constituant, à son sens, un tel harcèlement, à charge pour l'employeur, dans l'hypothèse où ces éléments, pris dans leur ensemble, permettraient de présumer l'existence d'un harcèlement moral de prouver que ces agissements ne seraient pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions seraient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'à cet effet, il soutient : - que depuis 2008, Pierre-Emmanuel Z..., gérant de l'entreprise, n'a cessé de le harceler, lorsqu'il était présent au magasin de Chenôve, par des remarques offensantes et inadmissibles devant les clients, -que dès son arrivée au mois d'octobre 2010, Géraldine A..., responsable de magasin, l'a harcelé et a critiqué sa façon de travailler, - que sa santé physique et mentale s'est dégradée, - et qu'après lui avoir proposé une rupture conventionnelle, Pierre-Emmanuel Z... lui a annoncé qu'il était hors de question de lui donner de l'argent pour partir ; qu'il ajoute que l'employeur a également commis des manquements à ses obligations en ne lui remettant ses bulletins de paye et ses tickets restaurants que tous les trois mois, en ne comptabilisant pas ses jours d'ancienneté et en rémunérant les dimanches de travail sous la forme de « prime sur objectifs marges non récupérées » ; qu'il produit différents documents dont il ressort : -que le comportement de Pierre-Emmanuel Z... est plus que contestable à certains moments et qu'il ne supporte pas qu'on puisse faire valoir un désaccord (témoignage de Benjamin B...), - que lors d'altercations entre lui et Pierre-Emmanuel Z..., ce dernier avait un comportement irrespectueux et inacceptable, qu'un matin, il a crié « F... » en arrivant au magasin devant tous les clients, sans même dire bonjour, avant de disputer Meng-Srun Y... parce que le chiffre d'affaires était nul et le magasin mal rangé, qu'il refusait de prendre un camion à hayon pour aider aux déchargements rendus difficiles du fait du mauvais fonctionnement des transpalettes manuels mis à la disposition des salariés et qu'il avait des propos inappropriés et moqueurs à son égard (témoignages d'Angléique C... et d'Anne-Laure D...), - que Pierre-Emmanuel Z... lui tenait des propos tels que « vous êtes nul », « vous êtes incapable », « vous ne savez pas travailler », « vous me faites perdre de l'argent », « vous mettez mon magasin à sac » et ce, devant les clients, et qu'il lui a été également dit « vous ne savez pas mettre en rayon, ça ne ressemble à rien, c'est de la merde », « vous ramez » et « si vous n'êtes pas content, démissionnez ou mettez-vous à la sécu » (témoignage de Thierry X...), - que peut après le recrutement de Géraldine A..., Pierre-Emmanuel Z... a demandé à cette dernière de mettre la pression sur les salariés présents dans le magasin (témoignage du 3 octobre 2012 de Brice-Michel G... qui ajoute que, durant deux ans, le gérant n'a cessé de le harceler pour qu'il rédige une attestation contre ses collègues, qu'après la décision du conseil de prud'hommes, il a réitéré sa demande en précisant qu'en cas de refus de sa part, il devrait fermer le magasin de Quétigny, que plusieurs salariés l'ont poussé à faire ce papier et que, peu après, il a été placé en arrêt maladie pour état d'anxiété puis, déclaré inapte, avant d'être mis à pied et licencié pour faute grave), - qu'à la fin de certains mois, il percevait une prime sur objectif marge d'un montant de 80¿ ou de 120¿ selon le cas- qu'il a été contraint de réclamer l'envoi de ses bulletins de salaire ainsi que ses tickets restaurants des quatre derniers mois de l'année 2010, - qu'il n'a pas reçu les bulletins de salaire que le 8 juin 2011, - qu'il a protesté le 14 juin 2011 contre l'absence de réception des tickets restaurants de septembre à décembre 2010 après que l'employeur lui ait indiqué qu'il les lui avait envoyés par courrier du mois de décembre 2010 ; - que le 22 juin 2011, le médecin du travail l'a déclaré inapte définitif à son poste ainsi qu'à tous les postes existants à Chenôve et à Quétigny en expliquant que l'origine de l'inaptitude était l'organisation du travail qui ne permettait pas de proposer des mesures individuelles de mutation ou de transformation de poste dans ce cadre, - et que depuis début 2011, il est suivi dans un centre médico-psychologie avec traitement psychiatrique ; que pris dans leur ensemble, ces éléments permettent de présumer l'existence du harcèlement moral allégué par E...
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Y... ; que la SARL Le Bazar Dijonnais, à qui il incombe de prouver que les agissements dénoncés par le salarié ne seraient pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions seraient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, considère que les témoignages précités constituent des appréciations subjectives, sans évocation de faits précis et circonstanciés ; qu'elle ajoute que les livraisons étaient effectuées par camions équipés de hayons, que l'attestation de Thierry X... doit être écartée pour manque d'objectivité dès lors que ce dernier et E...
F...
Y... l'ont attraite conjointement devant la juridiction prud'homale, que les attestations qu'elle produit établissent que les relations et l'ambiance de travail sont de bonne qualité et que l'appelant n'a pas supporté l'arrivée d'une nouvelle directrice, que les tickets restaurant ont été adressés en temps utile au salarié, que les bulletins de salaire l'ont été dès réception des informations apportées par la caisse primaire et que la rémunération du travail le dimanche équivalait au double du taux horaire ; que les productions de l'appelante établissent : - que peu après l'arrivée de Géraldine A..., E... F... Y... et Thierry X... ont signifié leur volonté de quitter l'entreprise moyennant finance, qu'il leur a été répondu que leur départ n'était pas souhaité et que, quelques jours plus tard, ils ont tous les deux été placés en arrêt maladie (témoignages de Géraldine A... et d'André Z..., ancien gérant), - que toutes les livraisons de marchandises au magasin de Chenôve sont réalisées par camion équipé de hayon (attestation de Marie-Claude H..., directeur administratif et financier de la SA Foirfouille, enseigne du bazar Dijonnais), - que depuis son arrivée au mois d'octobre 2010, Géraldine A... s'adresse sans aucun mépris ou manque de respect aux salariés, qu'elle a donné au magasin un fonctionnement et des équipements dont il avait besoin et qu'il n'est pas évident d'arriver dans un magasin où se trouve un personnel ayant une ancienneté de 10 ou 20 ans, que tant E...
F...
Y... que Thierry X... ont reconnu le professionnalisme (témoignage de Corinne I...) et qu'elle est arrangeante, disponible et conciliante (témoignage de Julien J...), - que Brice-Michel G... a été licencié pour harcèlement sexuel, - et que trois séries de vingt-tickets restaurant ont été adressés à Thierry X... le 5 août 2011 ; que la Cour observe que, s'ils donnent de Géraldine A... une image favorable et, à l'inverse, une image assez peu flatteuse de Brice-Michel G..., et s'ils établissent que les livraisons s'effectuent à bord de camions équipés de hayon, ces éléments ne démontrent : - ni la fausseté des accusations de harcèlement, de propos méprisants et insultants et de pression dirigées contre Pierre-Emmanuel Z..., portées de façon concordante sinon circonstanciée par plusieurs salariés, y compris Thierry X... dont l'attestation est tout aussi recevable que celle de ses collègues de travail, n'étant pas indifférent de souligner que l'unique témoignage favorable au gérant, celui de Maria K..., ne précise pas que les façons d'agir qui sont prêtées à ce dernier seraient incompatibles avec sa personnalité, - ni que E...
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Y... n'ait pas fait l'objet de remarques racistes, -ni que le magasin de Chenôve ait été équipé de transpalettes en bon état de fonctionnement - ni que les bulletins de salaire des quatre derniers mois de l'année 2010, antérieurs pour la plupart au début de son arrêt maladie, aient été adressés à temps à E...
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Y..., - ni que l'intéressé ait été mis en possession en temps utile des tickets restaurants qu'il réclamait, - ni que les dimanches de travail n'aient pas été rémunérés au moyen de primes, - ni que l'employeur ait agi en vue de préserver la santé au travail du salarié ; qu'il doit être jugé, dans ces conditions, que E...
F...
Y... a été victime d'agissements à type de harcèlement moral et que l'employeur s'est rendu responsable de manquements contractuels à son détriment ; qu'il convient par conséquent d'infirmer le jugement et de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la SARL Le Bazar Dijonnais, à effet du 23 juillet 2011 ; qu'il résulte du libellé même de l'avis du médecin du travail du 19 juin 2011 que l'inaptitude du salarié est la conséquence du harcèlement dont il a eu à souffrir ;
AUX MOTIFS ENCORE QU'or, lorsque la résiliation judiciaire du contrat de travail procède du harcèlement moral dont le salarié a été victime sur son lieu de travail, cette rupture produit les effets d'un licenciement nul, conformément aux dispositions de l'article L.1152-3 du code du travail ; que dès lors, il convient de faire produire à la résiliation judiciaire du contrat de travail de E...
F...
Y... les effets d'un licenciement nul ; que la cour possède les éléments d'appréciation suffisants, tirés de l'ancienneté du salarié au sein de l'entreprise et du montant de sa rémunération, pour considérer qu'en lui allouant la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts, les premiers juges ont fait une estimation appropriée des préjudices du salarié ; qu'elle considère, pour sa part, que cette indemnité inclut la réparation du tort causé par l'exécution déloyale de ses obligations par l'employeur et par le harcèlement moral ; que le jugement mérite confirmation en ce qu'il a alloué à E...
F...
Y... 4 509,74 €, à titre d'indemnité de préavis et 450,97 € pour congés payés afférents, ces montants n'étant pas contestés par la SARL Le Bazar Dijonnais, même à titre subsidiaire ;qu'il soit également être approuvé en ce qu'il a ordonné à la SARK Le Bazar Dijonnais de délivrer à E...
F...
Y... un bulletin de paye rectificatif et une attestation destinée à Pôle Emploi rectifiée, aucune astreinte n'ayant lieu d'être instituée en appel ;
ET AUX MOTIFS ENFIN QU'il doit être infirmé en ce qu'il a alloué à E...
F...
Y... 11 903 € à titre de complément d'indemnité spéciale de licenciement alors que, le montant de l'indemnité de licenciement versée s'élevant à 14 028 €, comme l'indique l'attestation destinée à Pôle Emploi, le solde à payer, équivalent à celui qui a déjà été versé, s'établit à 14 028 € ;
ALORS QUE, D'UNE PART, lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur tout en continuant de travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée, le licenciement étant, en présence d'une telle justification, non avenu ; qu'en pareil cas, le salarié ne peut prétendre aux indemnités attachées aux seuls motifs de son licenciement ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur Y... en raison d'un harcèlement moral sur sa personne et lui fait produire les effets d'un licenciement nul ; qu'en condamnant dès lors la société Le Bazar Dijonnais à verser à Monsieur Y... l'indemnité spéciale équivalente au double de l'indemnité légale de licenciement prévue par l'article L.1226-14 du Code du travail bien que son licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement soit non avenu, la Cour viole l'article 1184 du Code civil ensemble les articles L.1226-14 et L. 1231-1 du Code du travail et 12 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, le salarié victime d'un licenciement nul et qui ne réclame pas sa réintégration a droit, quelle que soit son ancienneté dans l'entreprise, d'une part, aux indemnités de rupture, d'autre part, à une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaire ; qu'en l'espèce, tout en faisant produire à la résiliation judiciaire les effets d'un licenciement nul en raison du harcèlement moral dont Monsieur Y... a été victime, la Cour condamne son employeur à lui verser l'indemnité spéciale correspondant au double de l'indemnité légale de licenciement prévue par de l'article L.1226-14 du Code du travail ; qu'en statuant ainsi, la Cour viole par fausse application le texte précité ensemble les articles L.1234-9 et L. 1152-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-20434;13-20435
Date de la décision : 03/12/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 02 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 déc. 2014, pourvoi n°13-20434;13-20435


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.20434
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