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26/03/2015 | FRANCE | N°14-14896

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 26 mars 2015, 14-14896


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort par un tribunal d'instance, qu'après avoir indemnisé les dégâts commis par des sangliers aux cultures de maïs de l'exploitation agricole de l'EARL de Mme X..., la fédération départementale des chasseurs du Loiret (la fédération), imputant à M. Y...une négligence fautive dans l'exercice de son droit de chasse, a saisi un tribunal d'instance en rembour

sement de l'indemnisation versée ;
Attendu que pour débouter la fédérat...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort par un tribunal d'instance, qu'après avoir indemnisé les dégâts commis par des sangliers aux cultures de maïs de l'exploitation agricole de l'EARL de Mme X..., la fédération départementale des chasseurs du Loiret (la fédération), imputant à M. Y...une négligence fautive dans l'exercice de son droit de chasse, a saisi un tribunal d'instance en remboursement de l'indemnisation versée ;
Attendu que pour débouter la fédération de sa demande, le jugement énonce qu'aucun élément produit au dossier ne permet de déterminer, ni que les sangliers proliféraient sur les terres de M. Y...avant août 2012, ni qu'il ait pu en avoir conscience, ni qu'il n'aurait pas mis en oeuvre les moyens nécessaires pour y remédier et encore moins qu'il aurait été mis en demeure de le faire ; que dès lors aucune faute ne peut être établie à l'encontre de M. Y...qui, antérieure aux dégâts causés à l'EARL X..., aurait favorisé ces derniers, ni aucun lien de causalité entre la faute qui peut lui être reprochée, ne pas avoir organisé de battue suite aux demandes qui lui ont été faites les 27 et 28 août 2012, et les dégâts antérieurement commis ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher s'il existait un lien de causalité entre la faute qu'il retenait et les dégâts postérieurs déclarés le 6 octobre 2012 dont il était également demandé réparation, le tribunal a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 9 janvier 2014, entre les parties, par le tribunal d'instance d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Montargis ;
Condamne M. Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y..., le condamne à payer à la fédération des chasseurs du Loiret la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la fédération départementale des chasseurs du Loiret.
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté la Fédération départementale des chasseurs du Loiret de toutes ses demandes ;
Aux motifs qu'aux termes de l'article 1382 du Code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par lequel il est arrivé à le réparer ; que la responsabilité suppose l'établissement d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité ; qu'en premier lieu il importe peu de savoir si les sangliers proviennent de parcelles voisines ou sont issus de celles dont est propriétaire M. Y..., dès lors qu'il a été constaté que des sangliers sont présents sur ses parcelles et y causent des ravages aux cultures ; que la présence de sangliers résulte en effet tant du rapport d'expertise de M. Z..., qui attribue les dégâts constatés le 15 août 2012 à 90 % aux sangliers (l'action des cerfs, évaluée à 10 % parait résiduelle), que des constatations de M. A..., lieutenant de louveterie, effectuées le 27 août, enfin des résultats de la battue du 5 septembre 2012 au cours de laquelle 10 sangliers ont été aperçus ; que si ces constatations sont insuffisantes à démontrer que les sangliers sont en nombre excessif sur les terres appartenant à M. Y..., elles démontrent néanmoins la présence réelle et récurrente (août septembre 2012) de sangliers, dont M. Y...lui-même rappelle que peu de bêtes peuvent causer beaucoup de dégâts ; qu'il ressort du courrier envoyé le 28 août 2012 par M. A...lieutenant de louveterie, à M. B...responsable de la cellule chasse auprès de la DDT, que Mme X... gérante de l'EARL X... a demandé à son propriétaire d'organiser une battue mais n'a pas obtenu de réponse positive de celui-ci ; qu'il résulte ensuite tant de ce courriel que du courrier envoyé le 22 février 2013 par M. B...au Président de la Fédération départementale des chasseurs du Loiret, que M. A...a contacté au téléphone le garde-chasse de M. Y...le 27 août 2012 et lui a demandé d'organiser une battue au sanglier dans les meilleurs délais ; que M. B...a également contacté M. Y...le lendemain aux mêmes fins ; que le 30 août 2012, M. Y...a fait savoir à M. B...qu'il ne procéderait pas à une battue prochainement ; que dès lors il est établi que M. Y...face aux demandes, tant du lieutenant de louveterie que du responsable de la DDT a refusé d'organiser une battue ; que même si les moyens sont limités et son âge avancé, il aurait pu organiser une battue avec ses amis chasseurs quitte à rester lui-même en retrait des opérations en raison de son état de santé ; qu'il s'y est opposé sans raison ; qu'il résulte de ces éléments que si l'obligation de M. Y...était certes une obligation de moyens, ce dernier n'a pas mis en oeuvre les moyens à sa portée pour remédier aux problèmes causés par les sangliers dont la présence était constatée sur ses terres et dont il avait été averti ; qu'il importe en effet peu de considérer que lui-même et 6 ou 7 de ses amis n'auraient pas pu faire mieux que les 40 chasseurs de la battue administrative qui n'ont détruit que 3 sangliers, dès lors que cette battue administrative n'a été ordonnée que face à son refus de procéder à des actions de chasse sur les terres dont il est propriétaire et avec les moyens dont il dispose même si ces derniers sont limités ; qu'en conséquence, en ne prenant pas les dispositions nécessaires et en refusant d'organiser la ou les battues sollicitées M. Y...a bien commis une faute ; que toutefois une faute commise à la fin août n'a pas de lien de causalité avec les dégâts aux cultures constatés vers le 15 août ; qu'il convient donc de rechercher si M. Y...a commis une faute en n'exerçant pas son droit de chasse antérieurement aux dégâts causés à l'EARL X..., générant ainsi la prolifération des sangliers sur ses terres et entrainant les dégâts aux cultures qui en sont résulté ; qu'il apparait qu'aucun élément produit au dossier ne permet de déterminer, ni que les sangliers proliféraient sur les terres de M. Y...avant août 2012, ni qu'il ait pu en avoir conscience, ni qu'il n'aurait pas mis en oeuvre les moyens nécessaires pour y remédier et encore moins qu'il aurait été mis en demeure de le faire ; que dès lors aucune faute ne peut être établie à l'encontre de M. Y...qui, antérieure aux dégâts causés à l'EURL X..., aurait favorisé ces derniers, ni aucun lien de causalité entre la faute qui peut lui être reprochée (ne pas avoir organisé de battue suite aux demandes qui lui ont été faites les 27 et 28 août 2012) et les dégâts antérieurement commis ;
1°- Alors que le titulaire du droit de chasse commet une faute lorsqu'en raison de sa négligence à mettre en oeuvre son droit de chasse lequel permet d'éviter la prolifération du gibier, la présence de ce gibier devient anormale et source de préjudice ; que la faute est caractérisée même si la négligence du titulaire du droit de chasse n'est pas concomitante à la prolifération du gibier, dès lors qu'elle en est la cause ; qu'en exigeant la preuve d'une prolifération du gibier avant le mois d'août 2012, de la conscience de cette prolifération par M. Y...et d'une mise en demeure de remédier à cette prolifération, quand il suffisait pour que la responsabilité de M. Y...soit engagée, que la présence récurrente et partant anormale du gibier qu'elle constatait à partir du mois d'août 2012 ait été la conséquence de la négligence de ce dernier à mettre en oeuvre les moyens nécessaires à la régulation du gibier et en l'espèce, la conséquence de l'absence d'organisation d'une quelconque action de chasse avant le mois d'octobre 2012, le Tribunal a violé l'article 1382 du Code civil ;
2° Alors que le détenteur du droit de chasse doit spontanément mettre en oeuvre tous les moyens possibles pour éviter la prolifération du gibier ; qu'il ne peut s'exonérer de sa responsabilité en invoquant son ignorance de la prolifération du gibier et l'absence de mise en demeure d'y remédier ; qu'en décidant le contraire, le jugement attaqué a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;
3°- Alors que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en énonçant qu'aucun élément produit au dossier ne permettrait d'établir la faute commise par M. Y...avant août 2012, sans examiner le carnet de chasse pour la saison 2012-2013 de M. Y..., versé aux débats par la Fédération départementale des chasseurs, qui faisait valoir qu'il ressort de ce document que M. Y...n'avait organisé aucune action de chasse avant le 21 octobre, le Tribunal a violé les articles 455 du Code de procédure civile et 1353 du Code civil ;
4°- Alors que la Fédération départementale des chasseurs demandait la réparation par M. Y...des dégâts causés en août et déclarés par l'EARL X... le 19 août 2012, mais aussi la réparation des dégâts déclarés le 6 octobre 2012 dès lors été postérieurs au mois d'août 2012 ; qu'en se bornant à énoncer que la faute de M. Y...qui a refusé d'organiser les battues sollicitées, commise fin août, n'aurait pas de lien de causalité avec les dégâts constatés vers le 15 août, sans s'expliquer sur le lien de causalité entre cette faute et les dégâts postérieurs déclarés le 6 octobre 2012, le Tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 14-14896
Date de la décision : 26/03/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance d'Orléans, 09 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 26 mar. 2015, pourvoi n°14-14896


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.14896
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