La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/07/2015 | FRANCE | N°14-11895

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 juillet 2015, 14-11895


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé par la société Kemesys le 3 septembre 2003 en qualité de directeur opérations, M. X... a été licencié pour faute lourde le 19 juillet 2010 ; que la société a été placée en liquidation judiciaire le 14 mai 2013, Mme Z... étant désignée en qualité de liquidateur judiciaire ;
Attendu que pour rejeter l'exception d'incompétence et pour dire la juridiction prud'homale compétente, l'arrê

t retient que M. X... justifiait d'un contrat de travail écrit et que s'il dirigeait ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé par la société Kemesys le 3 septembre 2003 en qualité de directeur opérations, M. X... a été licencié pour faute lourde le 19 juillet 2010 ; que la société a été placée en liquidation judiciaire le 14 mai 2013, Mme Z... étant désignée en qualité de liquidateur judiciaire ;
Attendu que pour rejeter l'exception d'incompétence et pour dire la juridiction prud'homale compétente, l'arrêt retient que M. X... justifiait d'un contrat de travail écrit et que s'il dirigeait en fait la société, il exerçait des fonctions techniques de directeur d'opérations distinctes de ses fonctions de mandataire social, sous la subordination du dirigeant de l'entreprise qui lui donnait des instructions et auquel il rendait compte ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en constatant que l'intéressé était le dirigeant de fait de l'entreprise, ce qui excluait l'existence d'un contrat de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 décembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour Mme Z..., ès qualités
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit mal fondée l'exception d'incompétence soulevée par Me Z..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société KEMESYS et, en conséquence, d'avoir dit le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence compétent et renvoyé l'affaire devant cette juridiction pour poursuivre la procédure ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des articles L. 1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d'autrui moyennant rémunération ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que si l'existence de relations de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailler, à l'inverse, en présence d'un contrat de travail écrit ou apparent, il appartient à celui qui entend en contester l'existence de rapporter la preuve de son caractère fictif ; qu'un contrat de travail et un mandat social peuvent se cumuler, à condition que le contrat de travail corresponde à un emploi effectif et que les fonctions techniques, réalisées sous la subordination juridique de l'employeur, soient distinctes de celles découlant du mandat social ; qu'en l'espèce, l'intimé fournit aux débats le contrat de travail en date du 3 septembre 2004, conclu avec la société KEMESYS mentionnant son embauche en qualité de directeur d'opérations, qui prévoit qu'il exercera ses fonctions dans le cadre des directives écrites ou verbales données par Bernard A..., qui définit ses fonctions et chiffre sa rémunération, prévoit la mise en place d'objectifs, et stipule qu'il s'engage à respecter les instructions qui pourront lui être données par la direction de la société et se conformer aux règles relatives à l'organisation et au fonctionnement internes de la société ; qu'aux termes de son contrat, il est confié à Georges X... les fonctions techniques et précises suivantes : détermination et mise en oeuvre des programmes de recherche et développement, encadrement des opérations de production et l'élaboration de son planning sous contrôle de sa hiérarchie, animation et contrôle des activités de ses collaborateurs ; que l'intimé verse également aux débats son diplôme d'ingénieur, qui établit que ses attributions correspondent à une qualification et une formation réelles ; qu'il produit également ses bulletins de paie, faisant apparaître son emploi de directeur d'opérations au statut de cadre et visant la convention collective ; que de même, la lettre de licenciement de l'intéressé fait référence aux clauses du contrat selon lequel il devait notamment susciter et favoriser l'innovation, et en assurer la protection industrielle, par des brevets ou tout moyen adapté et à son refus de manière répétée de suivre les consignes transmises par sa hiérarchie ; que l'intimé produit également des courriels en date des 10, 12 avril 2010 et 3 mai 2010, ayant pour objet des comptes rendus de réunions opérations ; qu'il fournit également l'attestation de Mme Y..., qui relate que, dans les faits et les actes, il était subordonné à Bernard A... à qui il rendait compte par écrit principalement dans les comptes rendus de la réunion opération hebdomadaire ; que ce témoin précise que le manuel qualité ISO, les procédures associées et organigrammes témoignaient de la dépendance hiérarchique de l'intéressé, placement clairement sous l'autorité de Bernard A... ; que ce témoignage est corroboré par l'organigramme de la société et le manuel ISO ; qu'enfin, lors de son audition par les gendarmes, qui est également produite aux débats, Bernard A... a reconnu la qualité de salarié à l'intimé ; qu'il n'est d'ailleurs pas discuté qu'après son licenciement, l'intimé n'a plus exercé aucun pouvoir en toute indépendance au sein de la société KEMESYS, dont les locaux lui étaient d'ailleurs devenus inaccessibles, comme le mentionne la lettre de rupture ; que pour combattre ces éléments, la société appelante produit de nombreux documents, qui tendent à démontrer que l'intéressé était dirigeant de fait puisqu'il établissait les bulletins de paie, renseignait des formulaires de crédit d'impôt, effectuait des demandes de placement de sommes pour des montants importants excédant sa délégation de signature limitée à 50. 000 ¿ passant des commandes, et participait aux conseils d'administration en qualité de président directeur général de la société LR2M, principal actionnaire de la société KEMESYS, et comme telle administrateur ; que toutefois, si ces pièces sont de nature à établir que Georges X... a effectivement été dirigeant de fait de la société KEMESYS, ou en tout cas est apparu comme tel, il est non moins établi par les pièces précitées, que celui-ci fournit, qu'il a effectivement occupé un emploi effectif, distinct de ses fonctions de mandataire social et réalisé sous la subordination juridique de M. A..., qui lui donnait des instructions, à qui il rendait des comptes et qui a exercé à son encontre son pouvoir disciplinaire en le licenciant ; qu'à cet égard, il convient de relever que la lettre de licenciement ne fait nullement état de la qualité de mandataire social de l'intimé et que, si celui-ci avait commis une faute dans l'exercice de son mandat social, il aurait suffi à Bernard A..., dirigeant de la société KEMESYS, d'engager une procédure de révocation à son encontre, ce qu'il pouvait parfaitement faire en sa qualité d'actionnaire majoritaire ; qu'il résulte de ce qui précède que l'existence d'un contrat de travail est établi ;
ALORS QU'un mandat social ne peut être cumulé avec un contrat de travail que si le mandataire exerce effectivement des fonctions techniques distinctes de celles de son mandat et pour lesquelles il est placé dans un rapport de subordination, seuls éléments caractérisant une relation salariée ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que M. X... avait été dirigeant de fait de la société KEMESYS ; qu'en retenant néanmoins qu'il avait occupé un emploi effectif distinct de ses fonctions de mandataire social, elle s'est déterminée au regard des dix éléments suivants : le contrat de travail de M. X..., son diplôme d'ingénieur, ses bulletins de paie, sa lettre de licenciement, des courriels relatifs à des comptes rendus de réunions, une attestation selon laquelle il aurait été subordonné à M. A..., l'organigramme et le manuel ISO de la société, le procès-verbal d'audition des gendarmes dans lequel M. A... aurait reconnu sa qualité de salarié, la circonstance qu'après le licenciement, il n'a plus eu accès aux locaux et enfin la circonstance que M. X... n'avait pas fait l'objet d'une procédure de révocation ; qu'en statuant ainsi, quand aucun de ces éléments n'établissait concrètement l'exercice de fonctions techniques exercées par M. X... distinctes de la direction de la société et permettant de caractériser l'existence d'une relation de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-11895
Date de la décision : 01/07/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 05 décembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 jui. 2015, pourvoi n°14-11895


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Monod, Colin et Stoclet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.11895
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award